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Récit et métarécit : qui est le narrateur ?

La question du récit interroge la place du lecteur. Dans Lector in fabula (1985), Umberto Eco attire l’attention sur le personnage comme agent d’interprétation (Guillemette et Cossette, 2006b). La façon dont l’auteur le présente et l’introduit dans le récit contingente les sentiments du lecteur à son égard. De quelle façon le design-eur introduit-il le spect-acteur ? Quelle est l’interprétation de l’utilisateur d’un design interactif alors qu’il est lui-même l’instigateur de la narration ? Sa place est celle d’un personnage omniscient ou d’un narrateur intradiégétique ? Le métarécit lié à l’opérabilité du design éloigne toute idée de degré zéro dans la narration : l’utilisateur ne peut envisager toutes les formulations possibles d’une application, et n’y trouverait d’ailleurs aucun sens. Son point de vue est alors celui d’un lecteur mis à distance par un dispositif spectaculaire lui imposant la coupure de la rampe (Bougnoux, 1996), mais sa responsabilité, engagée par les choix narratologiques de sa navigation, contingente son interprétation. Cette double position, à la fois extra- et intradiégétique du spect-acteur interroge le dispositif narratologique mis en œuvre par le design-eur.

Un récit est issu d’une combinaison de statuts distincts. L’origine en revient à l’auteur qui écrit le récit, il est omniscient; ensuite le narrateur est celui qui raconte, il est un personnage ou un rôle joué par l’auteur, il est donc lié à l’histoire ; pour finir, les interprétations du lecteur sont fantasmées et ses réactions préméditées par l’auteur. Le narrateur ignore le lecteur dans la plupart des cas ; s’il le prend à partie quelquefois, c’est, au risque de rompre la diégèse, pour le prendre à témoin.

Première partie : contexte de l’étude Chapitre 2: interactivité et individualisation

 Le récit interactif travaille les limites de ces trois statuts – auteur, narrateur, lecteur : le lecteur est à la fois responsable de l’énonciation tel un auteur, et acteur de la narration tel le narrateur.

Le temps narratif

Le récit est constitué de plusieurs strates constitutives du temps spécifique à la narration :

- L’ordre des séquences narratives permet d’orchestrer le temps de la description et celui de l’action, diachronique ou synchronique, l’enchainement ou la simultanéité.

- La durée scande le rythme de la narration, le temps des actions. - la fréquence indique la répétition des faits

La notion de récit ne peut être illustrée par les deux axes du design interactif actuel que nous avons utilisés ci-avant. En effet, le traitement de l’information, pour graphique et sémantique qu’il soit chez Manuel Lima, n’en réfère pas à un système narratif. Nous resserrons notre exemple autour de la communication du sensible avec les productions de l’agence Hi-ReS!. Pour exposer clairement les enjeux, nous revenons sur le site que cette agence a réalisé pour la promotion du film américain Requiem for a Dream réalisé par Darren Aronofsky en 2000. Le réalisateur ordonne les séquences de manière chronologique en ménageant un rythme de plus en plus rapide au fil de l’histoire. Alors qu’une certaine banalité, baignée dans une lumière chaude, est rendue par des scènes assez longues dans la première partie du film, une dominante bleutée froide accompagne des scènes plus courtes contenant un récit violent dans la deuxième partie. L’ordre est chronologique sauf pour une séquence très brève qui est récurrente tout au long du film : un montage de très gros plans sur un rail de drogue et des images floues hallucinatoires représentent l’échappatoire. La fréquence de ce fil rouge s’accélère tout au long du film pour rendre compte de l’augmentation de la dépendance à la drogue des personnages, les trois jeunes et la mère. Le spectateur est soumis au montage du réalisateur qui orchestre cette montée en puissance de son récit de la déchéance humaine.

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Comment rendre compte de l’ordre, de la durée, et de la fréquence des

scènes du film dans une application interactive où le spectateur déclenche lui-même le récit ?

Jean-Louis Weissberg explique la méfiance du public à l’égard de la télévision par son absence de proximité. Pascal Bouchez et Sylvie Leleu-Merviel montrent combien l’interface multimédia accentue la perte de la présence de l’autre (l’auteur) en écartant sa trace liée au montage de la séquence narrative : « Or l’hypermédia, avec l’intrusion de l’interactivité, induit la perte de la maîtrise du « montage » de ce qui est vu par le lecteur. » (Bouchez et Leleu-Merviel, 2007 : 131). Le concepteur du site Requiem for a Dream utilise l’interactivité pour rompre la distance spectaculaire. L’utilisateur est en position de narrateur (cf. Figure 12, p. 97), mais ignore le récit. Il le découvre au fil de ses choix improvisés. L’application ne se présente pas comme un site informatif type journalistique, où articles rédigés et extraits vidéo renseignent sur le contenu du film et le tournage. Il s’agit d’immerger l’utilisateur dans un récit qui n’illustre pas en vain l’argument du film, mais plonge l’utilisateur dans un environnement sensible qui l’amène à partager les mêmes émotions que le spectateur du film. Il se présente comme une expérience à vivre. Or le dispositif narratif est totalement différent puisque spécifique au scénario d’un support multimédia interactif.

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Que deviennent les notions d’auteur, de narrateur, de lecteur dans un récit où l’utilisateur est responsable de l’émergence du message ? Quel temps narratif est institué alors que l’ordre, la durée, et la fréquence sont mouvants ?

L’application Requiem for a Dream utilise la mise en abyme comme point de vue subjectif extrême : l’utilisateur se trouve face à l’écran, tel le personnage de la mère face à son écran de télévision. Les informations visuelles assaillent l’utilisateur dans un rythme soutenu. Celui-ci est inactif lorsqu’il est bombardé d’images, puis il lui est demandé de cliquer pour opérer un faux choix (une seule conséquence est possible) afin d’accéder à une nouvelle série d’images. Le choix- leurre se propose comme métaphore de l’impuissance des décisions que

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l’utilisateur-personnage prend dans la vie. Lorsque la main lui est enfin donnée, celui-ci se trouve face à un écran blanc que le mouvement de la souris déchire pour faire apparaitre des bribes d’images (cf Figure 13 p. 99). La quête commence et interroge la curiosité de l’utilisateur. Celui-ci efface l’absence d’image (le blanc) jusqu’à découvrir temporairement un jeune couple allongé au sol. Le point de vue de l’utilisateur est en plongée totale, en position démiurgique par rapport au plan du sol où se trouve le couple. Le trou, qu’il entretient par le mouvement de la souris, le positionne selon un point de vue de voyeur. À la fois déclencheur de la narration (il a toute puissance pour cliquer sur l’un ou l’autre des deux corps et dérouler son histoire) et témoin visuel de la déchéance qui s’affiche devant lui, l’utilisateur est un narrateur malgré lui qui ignore l’histoire ; il est également un spectateur actif, décidant du déroulement de l’application (cf. Figure 12, p. 97).

Ainsi l’utilisateur n’a pas le point de vue en focalisation externe103

103 « Focalisation externe : C’est lorsque le narrateur ne rapporte que les apparences extérieures de l’histoire. Le narrateur tient ainsi le lecteur en attente. » Disponible sur : http://www.etudes- litteraires.com/focalisation.php, consulté le 10/05/12.

du narrateur, puisqu’il est partie prenante du récit lorsqu’il répond à l’injonction de la bannière "click here now" ou qu’il actionne le bouton "go !" de la machine à sous. Il est alors un personnage intradiégétique.

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L’utilisateur n’est pas non plus en focalisation interne104

Malgré une interactivité qui plonge l’utilisateur dans une expérimentation, et, selon Jean-Louis Weissberg, favorise une proximité nouvelle par rapport à l’écran télévisuel, on comprend que le concepteur mène le jeu. L’auteur de l’application commande les métaphores, propose les ellipses, prévoit la polychronologie. Entre les choix contraints et les options préméditées, l’utilisateur est guidé vers un aboutissement unique. Il fait l’expérience des sensations vécues par les personnages ; l’excitation du jeu, du gain, la quête de l’amour, les contraintes, la fuite et les hallucinations (cf.

puisqu’il ne connait pas l’histoire qui est contée, il la découvre, la construit selon son métarécit. Il n’est pas narrateur dans le sens où il ignore l’histoire avant son énonciation mais se trouve en position de la révéler par ses actions. Il n’est pas non plus un personnage puisque l’histoire se déroule devant ses yeux de témoin. Peut être est- il un figurant, à la fois intradiégétique en actionnant des machines appartenant à la diégèse, et à la limite de la diégèse en tant que témoin de la vie des personnages ? Un figurant ne décide pas du déroulement du récit.

Figure 13, p. 99), puis l’échec et la chute. L’utilisateur expérimente l’obéissance, en répondant aux injonctions du design, puis l’échec, en se trouvant face à des symboles graphiques signifiants une rupture de lien d’image ou d’affichages de mauvaise qualité, de chargement tronqué, de bande sonore dégradée, etc. Ainsi, le concepteur reste l’auteur du récit, même s’il délègue l’instance de narration à l’utilisateur. Le message induit est révélé par l’interactivité, mais généré par le design-eur de l’application. De fait, l’utilisateur fait ici l’expérience de notre objet « dess@in » (cf. dess@in p. 72) représentant la négociation entre les trois sémioses (design-eur/objet/utilisateur). « You should be sort of the editor of choice »105

104 « Focalisation interne : c’est lorsque le narrateur raconte tout ce qu’il voit, tout ce qu’il sait et tout ce que pense un personnage. » Disponible sur : http://www.etudes-litteraires.com/

précise Florian Schmitt, lors de notre entretien, répondant à la question sur la délégation d’énonciation augmentée de contenus générés par les utilisateurs-contributeurs eux-mêmes. Lorsque le site prend en

focalisation.php, consulté le 10/05/12.

105 « Vous [en tant que concepteur] devez être une sorte de guide », Interview de F. Schmitt réalisée par nous, le 20 juin 2008 à Londres dans les bureaux de l’agence Hi-ReS! , 8-9 Rivington Place.

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charge une narration, ou l’image d’une marque, il est incontournable que le concepteur reste le guide des choix de l’utilisateur afin d’en maîtriser les signifiés.

 Il y a volonté de communication pour le design interactif : le vecteur de transmission ne peut être inversé, comme le fait souvent l’art numérique qui réduit le message de l’artiste à l’existence de l’œuvre elle-même.

Nous avons noté au chapitre précédent cette nuance comme significative de l’écart entre ces deux champs de l’image numérique.

Cependant, la contrainte du message à transmettre n’interdit pas une expérience vécue par l’utilisateur du design interactif qui peut être semblable à celle vécue pour une œuvre numérique : mis en abyme, il se frotte à l’existence de l’application. On retrouve ce statut de spect-acteur dans les diverses créations du studio Hi-ReS! comme dans Car Parc 1 et Barbican, où l’utilisateur trace lui- même le design à l’écran ; dans Lost Untold où il participe à l’enquête pour retrouver les disparus jusqu’à découvrir son nom inscrit sur la liste des passagers de l’avion écrasé au sol; dans Lexus/ Minority Report, où l’utilisateur se trouve être le personnage désigné pour la mission.

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L’ordre, la durée, et la fréquence que choisit le réalisateur du film sont ici également délégués à l’utilisateur. Néanmoins, comme le stipule Florian Schmitt, le concepteur garde la main. Son application Requiem for a Dream ménage au spect-acteur des temps de contemplation inactive avec des temps de choix ou de leurre (cf. Figure 13, p. 99). L’ordre est organisé suivant une trame et des séquences : si l’on clique sur l’homme, on déclenche une suite d’évènements, où des boucles discursives sont ménagées, qui nous amènent à une fin unique, le retour à l’écran du choix initial. Cela permet d’enchainer en cliquant cette fois sur la femme… Que l’on commence par l’un ou l’autre de ces deux choix, peu importe ; l’utilisateur passera par les deux visions du récit. Des boucles discursives sont proposées : par exemple, une pseudo-interface de site (citation graphique) a ses cinq boutons actifs qui renvoient à des sous-récits. Ceux-ci s’achèvent en revenant à cette interface intermédiaire : sans rompre le récit, chaque boucle du regard contribue à générer un sentiment d’expérience chez l’utilisateur confronté à ses choix exploratoires. L’ordre importe peu, puisque ce polymorphisme reste structuré par des points de retour incontournables : la fin de la boucle et le retour au point de départ du choix est imposé par le concepteur. La durée et la fréquence sont elles-mêmes maitrisées de la même manière. Si l’utilisateur prend le temps de la contemplation avant chaque clic qui fait progresser son aventure, le contenu et la structure restent inchangés. La fréquence des images est de deux ordres : il y a celle des images insérées par le concepteur qui reprend le rythme de récurrence du film, et celle de l’utilisateur qui convoque plusieurs fois la même boucle discursive, par goût ou par maladresse. Cela n’affecte pas le récit ni le message, mais permet au spect-acteur de ressentir à son rythme les stimuli, ce qui augmente son sentiment de proximité voire d’intimité avec l’histoire.

Le temps de l’énonciation est résolument celui de l’utilisateur alors que le temps narratif est celui orchestré par le design-eur. Le métarécit de l’utilisateur procède d’un rythme et d’un enchainement qui sont individuels. La question est alors celle de l’impasse. L’utilisateur explorera-t-il toutes les boucles prévues par le design-eur ? La narration sera-t-elle tronquée s’il fait l’impasse sur certaines circonvolutions ? C’est là que réside la qualité du design-eur qui n’autorise la

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liberté de l’utilisateur qu’en certains points de la diégèse, comme le précise Franck Renucci (2003 : 203) à propos du film interactif cité en début de chapitre : « Mais cette multiplicité du possible ne peut se faire que si en amont l'auteur a présidé à des choix rigoureux quant à son propre point de vue ainsi qu'à l'ordre de présentation des événements. » Les applications de Hi-ReS! présentent des similitudes conceptuelles avec le film interactif dans la gestion des ruptures orchestrées du film et de l’harmonie conservée.

On voit combien les spécificités de l’image liée à l’interactivité travaillent les notions d’auteur, narrateur, et spectateur, ainsi que le dispositif narratologique. Nous développons ces remarques dans le chapitre 5 au moyen d’une étude approfondie de l’application Communicate.

L’instance de narration

Nous comprenons la narration comme étant le dispositif de sémiose106

La sémiotique narrative de Algirdas J. Greimas décrit les structures de l'histoire qui compose le récit. L’histoire est considérée comme une suite d’actions qui s’enchaînent liée aux choix des personnages. Ils sont chargés de faire évoluer le récit par leurs décisions et leurs actions. Algirdas J. Greimas établit un schéma actanciel qui hiérarchise clairement le rôle de chacun (cf.

diégétique à l’histoire qui nous est contée. Le schéma narratif le plus simple introduit une histoire en décrivant un contexte ou une scène relativement banals, puis un évènement survient qui rompt l’équilibre décrit précédemment et crée une tension. Un certain nombre de péripéties se succèdent et permettront à un personnage méritant (héros) de rétablir un nouvel équilibre, dans un ordre nouveau, ramenant la banalité en réduisant la tension.

Figure 14, p. 102), personnages intra-diégétiques comme intervenants extradiégétiques. La quête constitue le point de jonction sémiotique entre l’intra et l’extradiégétique.

106 La sémiose désigne la signification en fonction du contexte. C'est une notion de sémiologie développée par C. S. Peirce, cf. chap. 3, (rappel de la p. 22).

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Deux points de vue extradiégétiques sont mis en relation par un récit constitué de schémas symboliques cohérents. L’Objet est une diégèse dont l’auteur tient à ce que le destinataire fasse l’expérience. Cet Objet propose une narration organisée autour de concepts empiriques partagés (héros, quête, adjuvants, opposants). Le récit interactif génère une porosité entre le monde symbolique de la diégèse et la réalité du spect-acteur. Objet, adjuvants et opposants sont élaborés par le design-eur-auteur. La quête est orchestrée par l’utilisateur-producteur (cf. Figure 15, p. 103). L’utilisateur est à la fois :

- le sujet (par projection subjective ou avatar) participant de la diégèse, - l’énonciateur (il manipule et dirige le déroulement du récit) à la lisière

de la diégèse,

- le spectateur de sa propre action (la quête), extérieur à la diégèse. On comprend que ces postures, à la fois naturelle et virtuelle, ne font qu’une, du point de vue de sa réalité.

 Sur le plan de la représentation symbolique, l’espace de l’expérience est indivisible entre le geste et sa représentation.

Première partie : contexte de l’étude Chapitre 2: interactivité et individualisation

Ainsi l’utilisateur de l’application additionne plusieurs satisfactions : celle d’être le maître du jeu (narrateur), celle d’être le héro qui sauve la situation (personnage central), et celle d’assister à un récit qui lui convienne (spectateur de son propre métarécit).

Nous modélisons le récit fragmenté de l’auteur au moyen de formes disjointes (cf. Figure 16, p. 103) conformément à notre intuition formulée au chapitre 1 selon laquelle le corps du récit est une succession de possibles programmés par l’auteur, dont l’énonciation n’est pas réalisée mais anticipée de manière polymorphique (arborescence de l’application).

Figure 15 : notre schéma actanciel du design interactif

Figure 16 : l'instance de narration et l'auteur

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 Le destinataire extradiégétique procède du récit puisqu’il en devient le narrateur par délégation en interagissant avec les éléments intradiégétiques.

L’interacteur est ainsi une instance d’énonciation. Il est à la fois le héros du récit avec un point de vue en focalisation interne qui dirige la quête (cf. Figure 12, p. 97), et le spectateur avec un point de vue en focalisation externe qui n’appréhende que les possibles proposés par l’application. C’est l’opérabilité du récit, matérialisée par le curseur, qui provoque la couture sémiotique des points de vue, pour Franck Renucci, à propos du film interactif: « L'apparition du curseur dévoile l'instance d'énonciation dans le film, dénonce le voyeurisme du spectateur et met en communication l'espace de production et l'espace de réception du film. Le sujet, n'étant plus là en tant que spectateur, ne s'identifie plus ni à l'événement ni à son récit. Il n'habite plus un espace symbolique libéré de toute contrainte. Il n'occupe plus une instance abstraite placée en un point aveugle de l'image. Il rejoint ainsi le hic et le nunc de la réalité. Il n'est plus, dès lors, suspendu au récit mais il est présent en face d'une image contenant un élément qui révèle et stimule la présence de l'autre » (Renucci, 2003 : 255). Ainsi l’interacteur ne peut plus être spectateur. Franck Renucci explique comment l’intrusion soudaine de la réalité rompt la mise à distance du dispositif narratologique.

La pratique interactive, ou plus précisément la praxis hypermédia au sens où