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Chapitre 1 : Des hydrogénases et de leurs modèles :

C) Complexes binucléaires nickel-fer et nickel-ruthénium

2) Réactions entre le [Ni(xbsms)] et des complexes de fer

i. Contexte bibliographique

La chimie des complexes organométalliques du type fer(II)-cyclopentadiényle est assez développée car ce ligand apporte une charge négative et stabilise donc préférentiellement cet état d’oxydation. Les ligands les plus utilisés sont les anions cyclopentadiényle noté Cp– et 1,2,3,4,5- pentaméthylcyclopentadiényle noté Cp*–. Ces ligands ont généralement une hapticité élevée

(cinq) et apportent 6 électrons. Ils sont relativement difficiles à substituer, les complexes obtenus sont donc relativement stables. Ils sont aussi assez encombrants, favorisant la coordination de

Chapitre 2 : Synthèse et caractérisation des complexes inspirés du site actif des hydrogénases [NiFe]

ligands de faible taille. De plus, ils sont capables de stabiliser des hydrures comme dans les complexes [FeHCp(CO)2] et [FeH2Cp((i-Pr)2PCH2CH2P(i-Pr)2)2].

40

En 2003, la réaction entre un complexe de nickel et [Fe(CO)2Cp(thf)]

+ a été abordée par deux

équipes sans faire l’objet de publications de recherche. L’existence du composé 2 (cf Fig. 20) est mentionnée sur le site Internet41 et dans un article de revue42 de Thomas B. Rauchfuss sans plus

de précisions.

Le composé 3 (cf Fig. 21) était décrit dans une revue.43 Seuls quelques paramètres structuraux et les deux réactifs utilisés pour l’obtenir étaient mentionnés. Il n’y avait pas d’autres caractérisations ni de mode opératoire pour sa synthèse.

Ni N S N S Fe CO N S Fe S S N Ni

Fig. 20 : Complexe 2 Fig. 21 : Complexe 3 [Ni(L)Fe(Cp)]+ Ces composés possèdent des sites de coordination vacants ou labiles sur le fer et sont donc susceptibles d’avoir une réactivité intéressante. L’intérêt de tels composés et les données parcellaires de la littérature nous ont incité à nous intéresser à la synthèse du motif {Ni(µ-S)2Fe}

via la réaction entre les complexes [Fe(CO)2Cp(thf)](BF4) et [Ni(xbsms)].

ii. Synthèse et caractérisation

Cette réaction se fait de façon quantitative dans le dichlorométhane à température ambiante en moins de cinq minutes. Après évaporation, extraction au THF et précipitation à l’éther, un solide rouge est isolé par filtration avec un rendement de 82%.

S S S S Ni Fe CO CO S S S S Ni Fe OC CO O

+

+

+

[Ni(xbsms)FeCp(CO)2]+

Fig. 22 : Synthèse du complexe [Ni(xbsms)FeCp(CO)2] +

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Page 72 En spectrométrie infrarouge, on observe deux bandes carbonyles d’égale intensité à νCO= 2053 et

2006 cm–1 différentes de celles du complexe [Fe(CO)

2Cp(thf)](BF4) alors qu’un seul composé est

présent en solution d’après des chromatographies sur couche mince. La spectrométrie de masse confirme la formation du cation [Ni(xbsms)FeCp(CO)2]

+ à m/z = 579 ainsi que le pic

correspondant à la perte de deux carbonyles à m/z = 523. Le tétrahydrofuranne lié au fer du complexe [Fe(CO)2Cp(thf)](BF4) a été remplacé par un des thiolates du complexe [Ni(xbsms)].

On n’a donc qu’un seul thiolate pontant les deux métaux. L’interprétation des signaux du spectre RMN 1H de ce composé confirme la coordination d’un seul soufre au complexe de fer et qu’un seul complexe de fer est lié au complexe de nickel.

En laissant le milieu réactionnel sous agitation, le produit précédent se décompose en quelques jours. Cette dégradation est accélérée par voie thermique et par l’ajout de l’oxyde d’amine Me3NO qui est un abstracteur de CO. En spectrométrie infrarouge, on observe la

disparition progressive des deux bandes carbonyles (νCO= 2053 et 2006 cm

–1) et l’apparition d’une

nouvelle bande carbonyle (νCO= 1939 cm

–1). Cependant cette bande disparaît aussi

progressivement (cf Fig. 23). Un nouveau composé qui ne possède pas de ligands carbonyles se forme. La disparition du second CO est trop rapide pour que l’on puisse isoler le produit monocarbonylé. De plus, le produit totalement décarbonylé est instable et nous n’avons pas réussi à isoler le produit final de la réaction. Cette instabilité peut être due à l’insaturation du fer (II) qui ne possède que 16 électrons dans cette espèce en l’absence d’autres ligands disponibles dans le milieu. S S S S Ni Fe CO S S S S Ni Fe S S S S Ni Fe CO CO - CO - CO + + +

?

Fig. 23 : Schéma probable de dégradation du complexe [Ni(xbsms)FeCp(CO)2] +

Cette espèce à 16 électrons peut être très intéressante car elle pourrait réagir facilement avec l’hydrogène. Elle possède en effet un site de coordination vacant. Afin de piéger cette espèce, nous avons effectué cette synthèse en milieu plus coordinant en utilisant l’acétonitrile comme solvant. Nous avons aussi placé le milieu sous 2 bars de monoxyde de carbone afin de défavoriser la décoordination des carbonyles et stabiliser le composé monocarbonylé. Ces deux approches n’ont pas permis d’empêcher la dégradation du complexe initial. L’ajout dans le milieu d’autres ligands comme la triphénylphosphine ou la pyridine rompt la liaison fer-soufre pour conduire aux complexes [FeCp(CO)2(PPh3)]

+

et probablement à [FeCp(CO)2(py)] +

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butylisonitrile conduit à la formation d’un composé monocarbonylé (νCO= 2023 cm

–1 dans le

dichlorométhane) de nature inconnue. Cette valeur est en effet trop faible pour être celle d’un ligand isonitrile coordiné ou non. Des ligands du fer plus forts que l’acétonitrile mais plus faibles que la pyridine et la triphénylphosphine doivent être testés comme par exemple la triéthylamine, l’ammoniac et les halogénures.

b) Réaction avec [Fe(CN)

2

(CO)

3

Br]

i. Introduction

La principale difficulté d’élaboration d’un bon modèle structural du site actif des hydrogénases [NiFe] est la synthèse du motif {Fe(CO)(CN)2(RS)2}. Une première solution

44 a été apportée par

la synthèse du complexe [Fe(CO)2(CN)2(S2CR-S,S)]

(cf Fig. 24). L’intermédiaire clé de cette

synthèse est le complexe [Fe(CN)2(CO)3Br] –

qui possède deux ligands labiles en cis l’un de l’autre : le bromure et un carbonyle. Ce composé est obtenu en deux étapes : le fer pentacarbonyle est cyané en présence d’un excès de cyanure pour former le complexe [Fe(CO)4CN]– .

Fe(CO)5 +CN –

 [Fe(CO)4CN] –

+ CO

L’addition oxydante du bromure de cyanogène dans le THF sur le fer (0) conduit au composé [Fe(CO)3(CN)2Br] – : [Fe(CO)4CN] – + BrCN  [Fe(CO)3(CN)2Br] – + CO

Ce complexe de fer (+II) peut alors réagir avec le diéthyldithiocarbamate de sodium dans le THF à 50°C : Fe(CO)3(CN)2Br Et 2N S S Et2N S S Fe(CO)2(CN)2 -

+

- Fig. 24 : Synthèse du complexe [Fe(CO)2(CN)2(S2CNEt2-S,S)]

.

ii. Résultats La synthèse du complexe [Fe(CO)4CN]

est décrite selon quatre modes opératoires qui ont des rendements assez différents45. Nous avons dans un premier temps optimisé le mode opératoire le

plus efficace 45ii) qui consiste à introduire deux équivalents de cyanures pour un équivalent de fer pentacarbonyle et de chauffer sous agitation à 60°C pendant 24h dans le méthanol dans un tube de Schlenk. Pendant les premières heures, le tube de Schlenk est ouvert régulièrement afin de libérer la surpression de monoxyde de carbone. Après filtration, le filtrat est évaporé, puis extrait à l’acétonitrile. Un équivalent de [PPN]Cl est alors ajouté. Un précipité de KCl apparaît, le filtrat

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Page 74 est séparé par filtration et le solvant évaporé. Les rendements en [PPN][Fe(CO)4(CN)] varient

entre 30 et 58 %.

L’utilisation du complexe [Fe(CN)2(CO)3Br]

avec le [Ni(xbsms)] semblait prometteuse. Dans le

dichlorométhane, à température ambiante, il ne se passe rien. Le milieu réactionnel est donc chauffé à 38°C pendant 20h. Le milieu passe alors du brun foncé au rouge et le suivi par CCM permet d’identifier l’apparition de nouveaux produits dont un rouge. Le milieu est filtré sur silice grâce à un dispositif Schlenk et 10 mg d’un produit rouge ont pu être isolés. En spectroscopie de masse (FAB matrice NBA), on peut observer un pic correspondant à ([Ni(xbsms)Fe(CN)2(CO)2]-

2 HCN)+. Le spectre RMN montre une forte rigidité probablement imposée par la présence du

complexe de fer. Les protons en α des thiolates supposés pontants sont différenciés.

Néanmoins, cette première expérience a été réalisée sur de très petites quantités ne permettant pas toutes les analyses nécessaires notamment par spectroscopie infrarouge et analyse élémentaire. La réaction a été relancée de nombreuses fois, dans les mêmes conditions puis en les changeant. On observe toujours le changement de coloration et la présence de la tache rouge en CCM (éluant : THF/pentane : 3/1 ; Rf= 0,3) correspondant au produit recherché. L’étape clef de la purification est le passage sur silice. En dépit des différentes méthodes utilisés (colonnes de gel de silice en dispositif Schlenk, en boite à gant…), elles n’ont pas permis d’isoler de nouveau le composé désiré. C’est pourquoi, malgré le premier résultat très encourageant, cette voie de synthèse d’un modèle atomique complet a été abandonnée.