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Chapitre 2 : Synthèse et caractérisation des complexes inspirés du site actif des

2) Comparaison des données cristallographiques:

Les données cristallographiques de quatre complexes ont été obtenues. Il s'agit des composés suivants: [“C3S2”Ru(p-cymène)Cl]Cl, [Ni(xbsms)ClRu(CO)3Cl], [Ni(xbsms)Ru(p-cymène)Cl]

+ et

[Ni(xbsms)Ru(CO)2Cl2]. Les complexes bimétalliques ont des structures similaires caractérisées

par un double pont thiolate entre le nickel et le ruthénium formant le motif {Ni(µ-S)2Ru}. Le

nickel est dans un environnement plan-carré pour les complexes [Ni(xbsms)Ru(p-cymène)Cl]+ et

[Ni(xbsms)Ru(CO)2Cl2]. Dans le complexe [Ni(xbsms)ClRu(CO)3Cl], l'atome de nickel est

toujours coordiné par quatre atomes de soufre plan mais il pointe au dessus de ce plan et est aussi lié à un atome de chlore. Le ligand xbsms adopte la même configuration dans tous les complexes : le cycle benzénique du ligand est presque parallèle au plan des atomes de soufre. L'atome de ruthénium pointe au dessus du plan formé par les quatre atomes de soufre. Cette structure en papillon est semblable aux composés contenant le motif {Ni(µ-S)2M} décrits dans la

littérature.43

L'environnement du ruthénium est pseudo-octaédrique pour ces composés. En effet, au sein des complexes [Ni(xbsms)Ru(CO)2Cl2] et [Ni(xbsms)ClRu(CO)3Cl], le ruthénium possède six ligands.

La géométrie octaédrique est cependant déformée à cause du cycle Ni(µ-S)2Ru avec des angles

S1-Ru-S4 se situant entre 72,82(3)° et 79,82(4)°. L'environnement du ruthénium au sein du complexe [Ni(xbsms)Ru(p-cymène)Cl]+ ressemble à celle d'un tabouret de piano caractéristique de

ce type de composé. Le ruthénium possède quatre ligands dont le p-cymène qui apporte 6 électrons. Ce dernier est coordiné par les trois doubles liaisons du cycle aromatique. Il équivaut donc à trois ligands de type L. Lorsque l'on regarde les angles séparant les ligands (en considérant le milieu de chaque double liaison comme barycentre des positions de coordination de l'arène), on constate que les anglesd sont tous très proche de 90° à l'exception de l'angle S(1)-Ru-

S(4)=71,10(5) ° qui est contraint pour les mêmes raisons que pour les composés précédents. On peut donc considérer que le ruthénium de ce complexe est dans un environnement pseudo- octaédrique.

Il en va de même pour le complexe [“C3S2”Ru(p-cymène)Cl]Cl qui est dans un environnement

très similaire. L'angle S(2)-Ru(1)-S(1)=88,63(4)° est plus proche de 90° car le cycle à six chaînons

d

Chapitre 2 : Synthèse et caractérisation des complexes inspirés du site actif des hydrogénases [NiFe]

induit par le ligand soufré bidentate est bien moins contraint que pour le complexe [Ni(xbsms)Ru(p-cymène)Cl]+.

Le tableau 1 montre que les angles diédriques à l'intersection des plans S1-Ni-S4 et S1-Ru-S4 sont compris entre 124,4° et 131,5° pour les trois composés bimétalliques dont nous connaissons la structure. Ces valeurs correspondent à celles de composés voisins comportant le motif {Ni(µ- S)2W(CO)4} pour lesquelles le ligand du nickel est tétradentate avec deux coordinats azotés et

deux coordinats thiolates.63 Les angles diédriques de ces composés se situent entre 107 et 136° et

sont caractéristiques de la structure en papillon de ce type de motif {Ni(µ-S)2M}. Cet angle

dépend en partie de l'encombrement stérique de la sphère de coordination du ruthénium. Pour le site actif des hydrogénases [NiFe], cet angle varie de 82,18° pour D. vulgaris miyasaki56 à 133,86°

pour Desulfovibrio fructosovorans57. Les faibles valeurs de ces angles observées chez les hydrogénases

par rapport aux complexes modèles peuvent s’expliquer par la présence d’un ligand pontant entre les atomes de nickel et fer dans certains états redox de ces enzymes.

Composés [Ni(xbsms)Ru(p-

cymène)Cl]+ [Ni(xbsms)Ru(CO)2Cl2] [Ni(xbsms)ClRu(CO)3Cl] [Ni(xbsms)]

d Ni-Ru 3,288 3,192 3,316 d Ni-S1 2,1692(15) 2,1864(11) 2,3681(12) 2,1802 (6) d Ni-S2 2,2192(15) 2,2118(11) 2,4108(12) 2,1909 (6) d Ni-S3 2,2112(16) 2,2134(11) 2,4259(13) 2,1756 (5) d Ni-S4 2,1858(14) 2,1886(11) 2,3520(12) 2,1869 (6) d Ru-C21 1,881(5) 1,929(5) d Ru-C22 1,883(4) 1,901(5) d Ru-C23 1,947(5) d Ru-S1 2,4020(14) 2,4423(11) 2,4389(12) d Ru-S4 2,4210(14) 2,4481(10) 2,4302(11) d Ru-Cl1 2,3955(14) 2,4040(10) d Ru-Cl2 2,4085(10) 2,4166(12) d Ni-Cl 2,3141(13) S1-Ni-S4 80,16(5) 83,13(4) 82,88(4) S2-Ni-S3 94,69(5) 92,81(4) 95,89(4) S1-Ru-S4 71,10(5) 72,82(3) 79,82(4) C21-Ru- C22 91,89(18) 93,0(2) S1-Ru-Cl1 90,12(5) 91,60(4) 89,61(4) Dièdre 129,8° 124,4° 131,5°

Tableau 1 : Distances et angles significatifs des complexes Ni-Ru, les soufres pontant sont S1 et S4, les distances sont en Ǻ et les angles en degrés

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Page 100 L'environnement du nickel dans les complexes nickel-ruthénium diffère de celui du [Ni(xbsms)]. En effet, les quatre distances nickel soufre du complexe [Ni(xbsms)] sont quasiment égales bien que les soufres soient engagés dans deux types de fonctions différentes: métal-thioéthers vs métal-thiolates. Ce phénomène est général pour tous les complexes de nickel à ligands mixtes thiolates-thioéthers.8 Pour un complexe de nickel plan-carré, si les quatre positions coordinantes

sont occupées par des thiolates, les distances sont légèrement plus longues que s’il s’agit de quatre thioéthers (respectivement 2,18-2,19Å contre 2,17-2,18 Å). Cette légère différence peut s'expliquer de deux manières. Il peut d’abord simplement s'agir de la contrainte imposée par la fermeture du cycle. La seconde explication est électronique : les thiolates apportent une charge négative qui devrait renforcer la liaison σ métal-soufre. Mais ils ont aussi deux doublets non liants π-donneur qui créent une interaction anti-liante Ni(dπ)-S(pπ) (cf Fig. 53).58 En comparaison, le

soufre du métal-thioéther n’a qu’un doublet non liant et est donc moins répulsif.59

Pour les trois complexes bimétalliques, l'introduction du ruthénium provoque une asymétrisation des longueurs nickel-soufre. Les distances nickel-thioéthers deviennent significativement plus longues que les distances nickel-thiolates. Le même phénomène est aussi observé avec le complexe [Ni(xbsms)FeCl2]2.33 Deux raisons peuvent être invoquées. D'une part, le nickel est

appauvri en électrons puisqu’une partie de sa densité électronique se trouve transférée via les thiolates pontants vers le second métal. Par ailleurs, la coordination avec le ruthénium mobilise un doublet non-liant du thiol pontant. Ces deux effets diminuent les interaction anti-liantes Ni(dπ)-S(pπ) des thiols du ligand avec le nickel. Ainsi, c'est le caractère σ de la liaison nickel-soufre

qui prédomine et il est plus fort pour les nickel-thiolates-ruthénium que pour les nickel- thioéthers.60

Les distances nickel-soufres du complexe [Ni(xbsms)ClRu(CO)3Cl] sont nettement plus longues

(+0,2 Å) que celles des autres complexes nickel ruthénium et de [Ni(xbsms)]. Au sein de ces derniers, le nickel est dans un environnement plan-carré alors que le nickel de [Ni(xbsms)ClRu(CO)3Cl] est dans un environnement pyramide à base carré. Le nickel se situe au

dessus du plan des atomes de soufres, ce qui allonge les distances nickel-soufres.

Pour le complexe [Ni(xbsms)Ru(p-cymène)Cl]+, les distances nickel-thiolates diminuent par

rapport à [Ni(xbsms)] alors que pour le complexe [Ni(xbsms)Ru(CO)2Cl2], elles augmentent

sensiblement. De la même façon, les distances Ru-S sont plus courtes pour [Ni(xbsms)Ru(p- cymène)Cl]+ que pour [Ni(xbsms)Ru(CO)

2Cl2]. Pour l'expliquer, on peut invoquer le fait que

l'entité {Ru(p-cymène)Cl}+ est moins riche en électrons que {Ru(CO)

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une partie de la densité électronique des atomes de soufre pontant est transféré sur le motif {Ru(p-cymène)Cl}+ ce qui diminue la répulsion Ni(d

π)-S(pπ) et renforce la liaison nickel-thiolate.

Le complexe [«C3S2»Ru(p-cymène)Cl]+ devrait avoir des distances soufres-ruthénium plus longues

que les complexes bimétalliques car le ligand soufré est composé de thioéthers. Or elles sont significativement plus courtes : 2,3737(11) et 2,3825(10) Å contre au moins 2,40-2,45 Å pour les complexes bimétalliques. Dans ce complexe [«C3S2»Ru(p-cymène)Cl]+, le ruthénium et le soufre

sont engagés dans un cycle à six chaînons, beaucoup moins contraint que le cycle à quatre précèdent. Les distances soufres-ruthénium sont donc plus courtes. Dans ces composés nickel- ruthénium, la contrainte imposée par ce cycle à quatre est assez importante.

Comme les distances nickel-soufres et soufres-ruthénium sont plus courtes pour le complexe [Ni(xbsms)Ru(p-cymène)Cl]+ que pour [Ni(xbsms)Ru(CO)

2Cl2], le cycle à quatre atomes {Ni(µ-

S)2Ru} est plus contraint pour [Ni(xbsms)Ru(p-cymène)Cl]+ que pour [Ni(xbsms)Ru(CO)2Cl2].

Les complexes du type {Ni(µ-S2)RuCp*} (cf Fig. 25) ont des distances nickel-thiolates plus

courtes que nos composés mais les cycles {Ni(µ-S2)Ru} de nos complexes sont plus contraints.

Cela est probablement dû à la différence entre les ligands du nickel.

Les distances soufres-ruthénium de nos complexes sont dans la gamme (2,40-2,47Å) des complexes type {Ni(µ-S2)RuCp*} décrits dans la littérature42.

Pour le complexe [NiCl(xbsms)Ru(CO)3Cl], les longueurs ruthénium-soufres sont peu différentes

de celles des autres complexes nickel-ruthénium. En revanche le cycle Ni(µ-S)2Ru est moins contraint (S1-Ru-S4= 79,82(4)° contre par exemple 72,82(3)° pour [Ni(xbsms)Ru(CO)2Cl2]) à

cause de la différence d'environnement du nickel.

Pour tous ces modèles et ceux décrits au chapitre 1, les distances entre le nickel le fer s'étalent sur une gamme assez large se situant entre 2,486 Ǻ et 3,123 Ǻ (et jusqu'à 3,899Ǻ pour les composés avec un seul pont thiolate).43 Le ruthénium est un métal plus volumineux que le fer ce

qui explique que les distances nickel-ruthénium soient plus élevées (entre 3,192 et 3,316 Ǻ) pour nos composés. Les complexes du type {Ni(µ-S2)RuCp*} (cf Fig. 25) ont des distances nickel-

ruthénium supérieures à 3,3 Ǻ. Dans ces complexes, le nickel est dans un environnement plan- carré. Le nickel des complexes [Ni(xbsms)Ru(p-cymène)Cl]+ et [Ni(xbsms)Ru(CO)

2Cl2] est aussi

dans cet environnement, les distances nickel-ruthénium de ces composés sont plus courtes d'au moins 0,08 Ǻ que celles décrites dans la littérature.

Tous les atomes de nickel des modèles des hydrogénases [NiFe] sont dans un environnement plan-carré ou pyramide à base carré à l'exception de [Ni(dppe)(pdt)Fe(CO)3] dont

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Page 102 l'enzyme, le nickel est dans un environnement distordu avec quatre ou cinq ligands selon l'état redox. Les distances nickel-fer au sein de ces protéines varient entre 2,5 et 2,9 Ǻ selon l'état redox et la technique de mesure utilisée. Nos complexes, ainsi que la plupart de ceux de la littérature ont des distances nickel-métal plus longues.