• Aucun résultat trouvé

Chapitre 3 : De l’électronique et l'électrochimie de nouveaux complexes modèles des

A) Réduction des protons ou "hydrogen evolution reaction" (her):

4) Les techniques et les conditions opératoires

Deux grandes techniques électrochimiques ont été utilisées pour caractériser l'activité des nos composés en réduction des protons: la voltampérométrie cyclique et l'électrolyse à potentiel contrôlé. Les électrodes de travail fournissent le pouvoir réducteur nécessaire à la production d’hydrogène à partir des protons.

a) La voltampérométrie cyclique :

La réduction des protons par un catalyseur homogène peut être suivie par voltampérométrie cyclique à conditions que l’électrode utilisée ne catalyse pas cette réaction dans la gamme de potentiels étudiés. En milieu acide, une vague cathodique peut être détectée. Si le système est lent, elle est irréversible car l'hydrogène produit s'échappe rapidement de la proximité de l’électrode. En l'absence de catalyseur homogène, la vague de réduction des protons apparaît à un potentiel qui dépend des conditions opératoires (voir pages suivantes).

Le comportement d’une vague électrocatalytique est illustré Fig. 4 dans le cas simple d’un mécanisme EC (réaction électrochimique suivie d'une réaction chimique). Si une réaction chimique suit un processus électrochimique, le potentiel de pic associé à cette vague diminue en valeur absolue par rapport au processus électrochimique pur. Si la réaction chimique régénère l'espèce de départ, le processus devient catalytique et la vague précédente augmente en intensité. La vague propre du catalyseur peut aussi être observée si la vitesse de catalyse est très élevée car le catalyseur aura consommé tout le substrat de la couche de diffusion.

Chapitre 5 : Activité de type hydrogénase de nouveaux complexes modèles du site actif des hydrogénases [NiFe]

Page 17058 Fig. 4 : Evolution d'une vague électrochimique en voltampérométrie cyclique en fonction du

mécanisme.

Il a été montré pour un mécanisme EC électrocatalytique que lorsque des quantités croissantes de substrat sont ajoutées, la hauteur de cette vague augmente et qu'en régime de "catalyse totale" le potentiel de pic de cette vague augmente aussi en valeur absolue.2 La "catalyse totale" correspond

à un régime dans lequel le catalyseur est si rapide que la diffusion devient limitante. Le processus de réduction des protons est plus complexe puisque dans le plus simple des cas, le mécanisme comprend deux étapes de transfert monoélectronique et deux réactions chimiques. Cependant ces résultats sont transposables dans une certaine mesure à l'her.35 En effet, la surtension d'activation de la vague de réduction des protons est fortement diminuée en présence d'un catalyseur homogène. De plus, l'intensité et le potentiel de la vague de réduction dépendent de la quantité d’acide et de la fréquence de cycle du catalyseur.

La voltampérométrie cyclique ne permet de détecter que des réactions qui sont relativement rapides. Pour une réaction du second ordre, la constante de vitesse minimale a été estimée à 100 mol–1.L.s–1.3 En supposant que la vague électrocatalytique de l’her s’étale sur 500 mV, avec un balayage de 500 mV.s–1, la réaction ne peut être observée que pendant 1 seconde. Les études des

catalyseurs d’her utilisent rarement des vitesses de balayages inférieures à 20 mV.s–1 ce qui permet d’étudier la réaction sur une échelle de temps de 25 secondes.

L’avantage de cette technique par rapport aux tests chimiques est que l’on balaye une large gamme de potentiels. A condition que la catalyse soit rapide, on accède ainsi directement au potentiel de réduction des protons même pour les catalyseurs qui ont des surtensions d’activation importantes. Par ailleurs, l'intensité de la vague électrocatalytique nous renseigne sur la fréquence de cycles du catalyseur. Certaines informations mécanistiques peuvent être déduites de l’allure des voltampérogrammes et les modélisations de ces derniers permettent alors d'accéder à des données cinétiques et thermodynamiques.

A + e

-

B

Mécanisme E

E

i

A + e

-

B

B + C

D

Mécanisme EC

E

i Mécanisme EC électrocatalytique

A + e

-

B

B + C

D + A

E

i

Chapitre 5 : Activité de type hydrogénase de nouveaux complexes modèles du site actif des hydrogénases [NiFe]

i. Nature du solvant:

Le site actif des hydrogénases se situe dans un environnement protéique qui le stabilise par exemple par formation de liaisons hydrogènes avec les ligands cyanures du fer.

Les modèles structuraux de ces enzymes sont généralement étudiés dans les solvants organiques car ils y sont plus solubles qu'en milieu aqueux. Les solvants utilisables doivent posséder un domaine d'électroinactivité cathodique important afin de permettre l'observation de la réaction de réduction des protons. De plus, nous avons choisi d'utiliser des solvants polaires, protophiles et aprotiques comme le DMF et l'acétonitrile afin de favoriser la solubilisation et la dissociation de sels acides comme le chlorure de triéthylammonium.

ii. Nature de l'électrode et de l'acide:

Nous avons vu que la plupart des électrodes métalliques catalysaient l’her, la meilleure en terme de densité de courant d'échange étant le platine. D’autre part, on ne connaît pas avec précision le potentiel thermodynamique E0 de réduction des protons de chaque acide dans les solvants organiques. Nous supposons qu’il correspond à celui de la réaction catalysée par le platine. Le potentiel de la vague d’her diffère selon l’électrode, les solvants et les acides (cf Tab. 1et Tab. 2).

Acide Acétonitrile DMF DMSO

Et3NH + (vs acide picrique) 18,7 9,25 9 p-CNPhNH3 + 7,6 N.D. N.D. H2SO4 7,2 3 0

Tab. 1 : Valeurs des pKa de quelques acides dans différents solvants6

Acide 10mM Electrode : Pt Solvant : DMF Electrode : Pt Solvant : MeCN Electrode : Carbone vitreux Solvant : DMF Electrode : Carbone vitreux Solvant : MeCN Et3NHCl –0,93 V –1,00 V <–2V <–2V Et3NHBF4 –0,93 V –0,99 V –1,55 V –1,54 V p-CNPhNH3BF4 –0,348 V [–0,2; – 0,3 V] ≈–1,8 V –1,31 V HBF4 –0,345 V –0,18 V –1,60 V –1,08 V CF3COOH –0,52 V –0,44 V ? –1,45 V

Tab. 2 : Potentiel de la vague d’her en fonction du solvant, de l’électrode et de l’acide vs Ag/AgCl/KCl à 100 mV.s–1

Chapitre 5 : Activité de type hydrogénase de nouveaux complexes modèles du site actif des hydrogénases [NiFe]

Page 17258 Les conditions choisies doivent permettre d'observer l'activité spécifique de notre composé. En aucun cas, l'électrode de platine ne doit être utilisée car elle masque tout ou partie de l'activité intrinsèque du catalyseur. Elle a malgré tout été utilisée dans certains travaux pour caractériser l'activité de complexes de nickel.4 Nous avons donc retenu comme électrodes de travail celles à

base de carbone (graphite, carbone vitreux) ou de mercure pour les électrolyses. Le mercure est un des métaux présentant la plus forte surtension d'activation pour l’her.5

Le potentiel de la vague de réduction d’her dépend fortement de la nature de l’acide. Cela peut se rationaliser par analogie avec le milieu aqueux : plus le pH est faible (et donc l'acide fort), plus le potentiel de réduction des protons sera haut (E=E°– 0,06pH). En milieu organique, plus le pKa d'un couple acido-basique est fort, plus l'acide sera dissocié et plus la concentration en protons solvatés sera grande. Il est difficile de comparer le même acide dans des solvants différents car la nature du proton solvaté change. L’acide le moins fort de cette série est le chlorure de triéthylammonium qui ne donne pas de vague électrocatalytique sur électrode de carbone vitreux. Le tétrafluoroborate de triéthylammonium se réduit à un potentiel supérieur au chlorure correspondant dans les solvants utilisés. Le pKa du couple triéthylammine/picrate de tiéthylammonium est de 9,25 dans le DMF et 18,7 dans l’acétonitrile (cf Tab. 1).6

L'électrode de carbone permet la réduction de certains acides sans l’aide d’un autre catalyseur. Il est donc important de bien choisir l'acide et le solvant en fonction de l’activité de notre catalyseur. Le premier acide qui doit être testé est le chlorure de triéthylammonium car c’est le plus faible de ceux décrits Tab. 2. Cela correspond aux conditions les plus douces. L’utilisation d’un acide plus fort peut être utile pour protoner le complexe et permettre de catalyser la réduction des protons selon un autre mécanisme nécessitant de plus faibles surtensions d’activation.

b) Electrolyse

La voltampérométrie cyclique permet de savoir si un composé catalyse l'électroréduction des protons et à quel potentiel. Cependant, cette technique ne permet pas d'analyser et de quantifier le dihydrogène produit et d'étudier la stabilité de l'activité du catalyseur sur un temps plus long et donc sur un grand nombre de cycles. Ceci justifie l'emploi de l'électrolyse à potentiel contrôlé qui permet d'étudier l'activité de ces catalyseurs sur plusieurs heures.

La densité de courant qui est mesurée dépend en partie de l'aire de la surface de l'électrode de travail. Ce paramètre n'est pas intrinsèque au catalyseur. Afin de contrôler l'état de surface de l'électrode de travail, nous avons utilisé le mercure. D'autre part, afin de maîtriser l'aire de cette électrode, nous avons conçu une cellule électrochimique contenant un réservoir à mercure de

Chapitre 5 : Activité de type hydrogénase de nouveaux complexes modèles du site actif des hydrogénases [NiFe]

géométrie cylindrique. Ainsi, l'aire de la surface de mercure reste identique même si les quantités de mercure ne le sont pas. Les données obtenues sont alors directement comparables entre elles. L’idéal serait d’utiliser une électrode dont la surface serait tellement grande que l’activité du catalyseur serait limitante. Dans ces conditions, une modification de l’aire de l’électrode ne changerait pas l’intensité du courant. Les électrodes utilisées sont trop petites pour remplir de telles conditions. Le transport (diffusion mais surtout convection et migration) des espèces électroactives au cours de l'électrolyse est aussi potentiellement limitante. Il s'agit d'une des principales différences avec la voltampérométrie cyclique. En voltampérométrie cyclique, l'étude est localisée dans la couche de diffusion des composés qui est très inférieure à 0,1cm.a La

diffusion de type naturelle se fait donc dans un faible volume. La cinétique de la réaction n'est pas limitée par la convection. Pour les électrolyses à potentiel contrôlé, le transport des espèces vers l'électrode se fait à une échelle bien plus grande, celle de la cellule d'électrolyse. De nombreux paramètres comme la migration d'espèces chargées à travers le fritté séparant les compartiments de la cellule d'électrolyse influencent la cinétique de la réaction. Cette limitation de la cinétique par la géométrie de la cellule est caractérisée par la constante de diffusion de la cellule.

Lors d’une expérience d’électrolyse faisant intervenir un catalyseur, deux cas peuvent se produire : -si la vitesse de catalyse est très grande, le paramètre limitant sera le transport de matière à l’électrode, caractérisé par la constante de cellule. L’évolution du courant sera alors la même que celle observée lors de la détermination de la constante de cellule.

-si la vitesse de catalyse est plus faible, à en devenir limitante, le courant sera moins important que celui obtenu lors de la mesure de la constante de cellule mais pourra diminuer plus lentement, voir être constant pendant un certain temps.