L’objectif principal de cette th`ese ´etait d’inf´erer l’histoire ´evolutive de l’esp`ece
X. arboricola en incluant les souches commensales. En effet, ces souches sont tr`es
proches phylog´en´etiquement des individus pathog`enes et ont ´et´e retrouv´ees en
sym-patrie avec celles-ci, on peut donc s’interroger sur les flux de g`enes existant entre
elles. La question de recherche que je me suis pos´ee est donc : Ces souches
com-mensales repr´esentent-elles un risque pour de nouvelles ´emergences ?
Le premier chapitre pr´esente l’´etude de structuration g´en´etique de l’esp`ece
X. arboricola, ainsi que l’´etablissement et l’´evolution des r´epertoires de facteurs
im-pliqu´es dans les traits d’histoire de vie (ET3, MCP, TonB-Dependent Transporters
(TBDT), et adh´esines). Ici, l’objectif ´etait tout d’abord de connaitre les relations
g´en´etiques entre souches commensales et pathog`enes et de d´eterminer l’intensit´e
des forces ´evolutives qui s’exercent au sein des populations identifi´ees, c’est-`a-dire
de comparer l’intensit´e de la recombinaison homologue par rapport `a la mutation.
Le second objectif ´etait d’´etudier le contenu en g`enes impliqu´es dans les traits
d’histoire de vie chez les diff´erentes populations et d’identifier les ´ev´enements de
gains et de pertes de facteurs de virulence au sein de cette esp`ece. Cette ´etude a
´et´e r´ealis´ee en utilisant une collection de 187 souches, pathog`enes et commensales,
dont les s´equences partielles de 7 g`enes de m´enage ´etaient disponibles. De plus,
les r´epertoires de facteurs de virulence ont ´et´e ´etablis par PCR
6dans une
sous-collection de 47 souches. Dans ce chapitre, nous avons montr´e l’existence de trois
6
groupes g´en´etiques au sein de l’esp`ece X. arboricola : le groupe A, compos´e des
pathovars pruni,juglandis et corylina, le groupe B, compos´e d’un grand nombre de
souches commensales et des pathovarsarracaciae, guizotiae, fragariae, celebensis et
zantedeschiae ainsi que les souches pathog`enes du piment, et le groupe C, compos´e
de quelques souches commensales et du pathovarpopuli.
Dans le deuxi`eme chapitre, nous nous sommes interrog´es sur l’existence d’un
flux de g`enes entre populations pathog`enes et commensales. Nous avons ´etudi´e, en
particulier, les ´ev´enements de recombinaison homologue et h´et´erologue, par le biais
de la recherche des ´el´ements g´en´etiques mobiles entre les groupes g´en´etiques identifi´es
au sein de l’esp`eceX. arboricola sur la base de s´equences g´enomiques. L’objectif de
cette ´etude ´etait de d´eterminer le flux g´enique entre les diff´erents groupes g´en´etiques
ainsi que son intensit´e et son orientation. Cette ´etude a ´et´e r´ealis´ee sur une collection
de 44 g´enomes de souches de X. arboricola comprenant 36 g´enomes de souches
ca-ract´eris´ees dans le chapitre 1, et les 8 g´enomes disponibles publiquement en d´ecembre
2014. Dans ce chapitre, nous avons montr´e que le groupe C n’appartenait pas `a
l’esp`ece X. arboricola et donc le flux g´enique a ´et´e ´etudi´e entre les groupes A et
B, uniquement. Nous avons montr´e la persistance d’un flux de g`enes au cours de
la divergence entre ces deux groupes, ainsi qu’une asym´etrie du flux de g`enes du
groupe A vers le groupe B.
La persistance du flux de g`enes au cours de la divergence sugg`ere que les
souches des groupes A et B vivent en sympatrie. L’objectif du troisi`eme chapitre
´etait de mieux comprendre l’´ecologie des souches commensales sur la plante et de
d´eterminer si elles partagent les mˆemes niches ´ecologiques que les souches pathog`enes.
Pour cela, les principaux m´ecanismes impliqu´es dans les phases de colonisation et
d’installation `a savoir la mobilit´e, l’adh´esion et la formation de biofilm, ont ´et´e
recherch´es dans une collection de 40 souches pour lesquelles les g´enomes ont ´et´e
s´equenc´es pour ce projet de th`ese. De plus, des analyses d’antibiose ont ´et´e r´ealis´ees
en confrontant deux `a deux les souches pathog`enes et les souches commensales, afin
de d´eterminer si elles peuvent coexister sur une mˆeme plante. Dans ce chapitre,
nous avons montr´e que les souches commensales sont capables de r´ealiser les phases
pr´ecoces du cycle infectieux bien que, contrairement aux souches pathog`enes, elles
soient incapables d’engager un processus infectieux. Enfin, les analyses d’antibiose
ont montr´e que les deux types de souches peuvent coexister.
L’importance du SST3 et des ET3 dans l’´emergence des clones ´epid´emiques a
´et´e mise en ´evidence dans le chapitre 1. Ces analyses sugg`erent aussi le caract`ere
ancestral du SST3 chez l’esp`eceX. arboricolaet sa perte chez certaines souches
com-mensales. Dans le quatri`eme chapitre de cette th`ese, nous avons retrac´e l’histoire
´evolutive du SST3 qui est le principal facteur de virulence, au sein du genre
´etude ´etait de d´eterminer si ce syst`eme avait ´et´e acquis chez l’ancˆetre commun
desXanthomonas puis perdu, et ´eventuellement r´e-acquis chez certaines souches ou
s’il avait ´et´e acquis de mani`ere ind´ependante dans plusieurs lign´ees de ce genre.
Cette ´etude a ´et´e r´ealis´ee en utilisant une collection de 82 g´enomes repr´esentant
l’ensemble des esp`eces appartenant `a ce genre, telles que d´efinies par Young et al.
2008. Nous montrons que le syst`eme de s´ecr´etion a ´et´e acquis de mani`ere
ances-trale dans l’histoire ´evolutive du genre, puis il a ´et´e perdu dans certaines lign´ees de
souches commensales.
Enfin, dans le dernier chapitre, je discuterai ces r´esultats dans leur globalit´e
et essaierai de montrer en quoi ils contribuent `a une meilleure compr´ehension des
´emergences d’agents pathog`enes chez les Xanthomonas. Je pr´eciserai ´egalement
comment ils peuvent contribuer `a la pr´ediction des ´emergences de nouveaux agents
pathog`enes dans ce genre.
Introduction
Afin de d´eterminer le rˆole que peuvent avoir les bact´eries commensales dans
l’´emergence de nouvelles maladies, l’objectif de ce premier chapitre
7´etait de
d´etermi-ner la structure de population de l’esp`eceX. arboricola en int´egrant sa composante
commensale et d’inf´erer les ´ev´enements de gains et de pertes de g`enes li´es `a
l’interac-tion avec la plante au cours de l’histoire ´evolutive de cette esp`ece. En effet, X.
ar-boricola est compos´ee `a la fois de souches commensales et pathog`enes (Vauterin et
al. 1996 ; Vandroemme et al. 2013, Essakhi et al. 2015 ; Cesbron et al. 2015). Une
premi`ere analyse de diversit´e de grande ampleur de l’esp`ece a port´e principalement
sur la composante pathog`ene ; elle n’incluait pas de souches commensales
(Fischer-Le Saux et al. 2015). L’´etude de la diversit´e g´en´etique des souches pathog`enes
et commensales isol´ees de noyer a montr´e que ces derni`eres ´etaient diff´erentes des
souches pathog`enes et formaient plusieurs groupes monophyl´etiques (Essakhi et al.
2015). Des souches commensales isol´ees d’un grand nombre d’esp`eces hˆotes ont ´et´e
incluses dans l’´etude pr´esent´ee ici ; de plus, l’ensemble de la diversit´e des souches
pathog`enes est repr´esent´e. Cette ´etude porte donc, sur une collection repr´esentative
de la diversit´e connue de cette esp`ece (187 souches) pour laquelle une analyse de
g´en´etique de population bas´ee sur 7 g`enes de m´enage a ´et´e r´ealis´ee. Elle a permis
de mettre en ´evidence que les souches commensales forment un r´eseau de souches
recombinantes. Au sein de ce r´eseau, on retrouve certaines souches pathog`enes
7
Diff´erentes personnes ont particip´e `a l’´elaboration de ce travail. Sophie Bonneau a r´ealis´e le s´equen¸cage des g`enes de m´enage d’une partie de la collection ainsi que la recherche des effecteurs de type 3 par PCR pour l’ensemble de la collection, et a r´ealis´e les premi`eres analyses d’inf´erence de gains et de pertes au cours de l’histoire ´evolutive. Au cours de son stage de Master 2 r´ealis´e avant mon arriv´ee dans l’´equipe, Jean-Fran¸cois Guimbaud a s´equenc´e les g`enes de m´enage d’un grand nombre de souches commensales, ce qui a permis d’identifier celles appartenant `a l’esp`ece
X. arboricola. Karine Durand et Chrystelle Brin ont r´ealis´e la recherche par PCR de l’ensemble des facteurs impliqu´es dans les phases pr´ecoces de l’interaction (MCP et adh´esines), Tristan Boureau a aid´e pour la r´ealisation des PCR et l’interpr´etation des r´esultats li´es aux effecteurs de type 3. Christophe Lemaire a particip´e aux discussions concernant les analyses de g´en´etique des popula-tions, leur interpr´etation et la r´edaction du manuscrit. Marie-Agn`es Jacques et Marion Fischer-Le Saux m’ont encadr´ee tout au long de ce projet pour les questions biologiques, l’analyse des donn´ees, leur interpr´etation et la r´edaction du manuscrit. Pour ma part, j’ai r´ealis´e l’ensemble des analyses de g´en´etique des populations, j’ai continu´e celles concernant les facteurs impliqu´es dans les traits d’histoire de vie, et r´edig´e le manuscrit.
appartenant `a des pathovars `a faible incidence (unsuccessful pathovars) car leur
ex-pansion est limit´ee ainsi que leur impact ´economique. Les pathovars responsables
d’´epid´emies `a l’´echelle mondiale avec un impact ´economique majeur, quant `a eux,
forment des clones ´epid´emiques. Ainsi, l’esp`eceX. arboricola pr´esente une structure
´epid´emique, telle que d´efinie par Maynard-Smith et al. en 1993. La seconde partie
de l’´etude est bas´ee sur l’analyse d’une matrice de pr´esence/absence des g`enes
im-pliqu´es dans les traits d’histoire de vie (g`enes du syst`eme de s´ecr´etion de type 3 et
ses effecteurs et g`enes codants des Methyl-accepting Chemotaxis Proteins (MCP),
adh´esines et TonB Dependent Transporters (TBDT). Ces donn´ees ont ´et´e acquises
par PCR et les profils de certaines souches ont ´et´e valid´es en utilisant les g´enomes
disponibles publiquement. Les r´epertoires d’effecteurs de type 3 sont tr`es contrast´es
entre les souches commensales et les pathovars non performants d’une part, et les
pathovars performants d’autre part. Au contraire, les r´epertoires de g`enes impliqu´es
dans les phases pr´ecoces de l’interaction (MCP, adh´esines, TBDT) n’ont pas montr´e
de diff´erence notable suivant le profil pathologique des souches. Ainsi, l’inf´erence de
gains et de pertes de g`enes au cours de l’histoire ´evolutive de l’esp`ece a montr´e que
l’ancˆetre commun de l’esp`ece poss´edait un syst`eme de s´ecr´etion de type 3 et un
nom-bre restreint d’effecteurs, `a partir de celui-ci les souches pathog`enes ont acquis de
nouveaux effecteurs, tandis que certaines souches commensales ont perdu ces g`enes.
D’autres souches commensales, quant `a elles, ont conserv´e le r´epertoire ancestral.
De plus, il a ´et´e montr´e que huit g`enes d’effecteurs avaient ´et´e acquis par l’ancˆetre
commun des trois clones ´epid´emiques et pourraient donc ˆetre `a l’origine de leur
caract`ere ´epid´emique. Cette ´etude a ´et´e publi´ee dans “ Environmental
Microbio-logy Report ”. Dans ce chapitre, les souches commensales
8sont appel´ees “souches
non pathog`enes”, ce qui correspond au terme utilis´e au d´ebut de ma th`ese pour ces
souches.
8
Parmi les souches commensales, nous avons inclus les souches du pathovar fragariae.
Cepen-dant, l’article de Karamura et al. (2015) a ´et´e publi´e plus tard, donc les souches du pathovar
Recombination-prone bacterial
strains form a reservoir from
which epidemic clones emerge in
agroecosystems
Merda D.*, Bonneau S.*, Guimbaud J F., Durand K., Brin C., Boureau T., Lemaire
C., JacquesM A
$., Fischer-Le Saux M
$.
* These authors contributed equally to this work. $ These authors contributed equally to this work.