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La question du fonds de péréquation de la part de la RFA revenant aux communes

Il s’agirait de maintenir les avantages durables que les populations riveraines tirent de la forêt, notamment en promouvant l'utilisation et la vente de produits par les mesures suivantes :

B. La question du fonds de péréquation de la part de la RFA revenant aux communes

Malgré une disposition précise de l’article 11 de la loi de finances n°2000/08 du 30 juin 2000, portant loi de finances de la république du Cameroun pour l’exercice 2001 – 2002, et instituant un fonds de péréquation pour « la rationalisation de la répartition du produit de la redevance forestière revenant aux Communes et Communautés villageoises » et instruisant que « Les modalités de fonctionnement du Fonds de péréquation sont fixées par voie réglementaire » aucun texte règlementaire organisant ces modalités d’application n’a été pris à ce jour.

Il ressort cependant des différentes discussions avec les responsables du Ministère de l’administration territoriale et de la décentralisation (institution de tutelle) que le projet reste en éveil dans les couloirs de ce ministère. Si l’on se réfère aux comptes rendus des réunions de réflexion et des notes ministérielles auxquelles nous avons pu accéder, la réflexion s’est limitée à appuyer le principe d’une péréquation effective appliquée aux 40% de la RFA destinés aux communes.

Les responsables de l’administration semblent en outre pencher naturellement pour un fonds localisé et géré par le FEICOM, sur la base de l’expérience que cet organisme possède déjà en matière de

gestion des fonds de péréquation, notamment la gestion des Centimes additionnels Communaux (CAC).

Quant au système de péréquation proprement dit, l’administration camerounaise n’a pas exploité les recommandations contenues dans le rapport de la mission Pierre et Kaltjob (2001) consacrée à la question de la péréquation au Cameroun. La même administration avoue en outre, n’avoir pas poussé la réflexion plus loin que des réunions de concertation. Les responsables contactés disent «attendre beaucoup» des recommandations de l’audit en cours et espèrent de ces recommandations, qu’elles leur fournissent des éléments techniques qui pourraient servir de base pour le passage à une phase véritablement exécutive de la péréquation.

Au delà des simples lenteurs administratives, la mise en œuvre d’un système de péréquation dans le contexte camerounais souffre aussi de sa forte connotation politique. Pour les populations et les responsables des exécutifs communaux bénéficiaires de la RFA, la soumission de la RFA à la péréquation apparaît comme « la reprise d’une main de ce qui leur a été donné de l’autre »

Il est un fait réel et vérifiable : les communes aujourd’hui bénéficiaires de la RFA, comptaient naguère parmi les plus démunies du Cameroun . L’institution du partage de la RFA et des autres mesures de gestion participatives, apparaît pour elles comme la réparation d’une injustice sociale. Ces communes ne sont pas de ce point de vu sensibles à l’argument de solidarité nationale, arguant que ce même argument aurait dû jouer en leur faveur du temps des « vaches maigres et des budgets étriqués » Cette aversion vis – à – vis d’une péréquation appliquée à la RFA, est relayée par une élite puissante, jusqu’au niveau de l’administration centrale, où certains hauts responsables de l’administration la qualifie d’hérésie. A ce niveau là, des considérations politiques (partisanes conviendrait mieux) viennent se mêler aux premières considérations économiques et budgétaires. En effets, les responsables politiques craignent fort de provoquer une colère généralisée de leur électorat, et que celui – ci en représailles ne les sanctionnent par un vote défavorable.

Cette argumentation fort pessimiste est surtout localisée au sein de l’élite politique et administrative. Elle est motivée par un clientélisme politique et est aussi en déphasage avec les réalités effectives du terrain. En effet, il ressort des différents entretiens avec les populations locales que l’absence de retombées pertinentes issues de la gestion de la RFA, constitue déjà en soi une raison suffisante de désaveu politique.

Dans l’ensemble des communes visitées pendant la mission, les exécutifs communaux (Maire, Percepteurs municipaux et comptables matières) sont à couteaux tirés avec les administrés et quelques fois les conseils municipaux. L’unique raison en est l’absence d’investissements en faveur du développement local.

Il devient donc logique que des populations qui ne profitent déjà pas des revenus de la RFA qui leurs sont dû, soient méfiantes à l’égard d’une institution qui viendrait réduire l’enveloppe globale de ces revenus, si en plus quelques « éclairés » prennent le soin de leur donner une explication erronée du principe de la péréquation et le leur présente comme la fin d’un privilège greffé sur un « héritage ancestral ».

Compte tenu des explications ci dessus, il est clair que la question de la péréquation ne peut être traité au Cameroun sans tenir compte des perceptions et des représentations qui entourent la notion même de péréquation.

La quasi totalité des personnes interrogées n’ont de la péréquation qu’une seule image : celle d’un partage équitable d’une somme entre toutes les communes. Ce qui a pour unique conséquence selon cette représentation la diminution de la part des communes de production (d’origine) du bien mis en péréquation. Aucune autre variante ne leur est connue.

1. Le cadre juridique instituant un fonds de péréquation au Cameroun

L’idée de soumettre les revenus de la RFA à une péréquation est une des recommandations du premier audit économique et financier du secteur forestier camerounais qui s’est déroulé en 1999 /2000. L’institution d’un fonds de péréquation applicable à la RFA trouve ses fondements théoriques d’abord dans l’importance des sommes générées en faveur des collectivités territoriales décentralisées, ensuite par l’extrême localisation de ces fonds qui ne profitent qu’aux communes dans lesquelles une activité forestière est en cours. Enfin, par le décalage manifeste entre l’importance des sommes ainsi reversées aux communes et l’amélioration des conditions du développement local dans les zones forestières. Suite à ces recommandations, l’État du Cameroun dans la loi de finances de l’année budgétaire 2000 /2001, a institué la péréquation à l’article 11 en ces termes « Il est institué un Fonds de péréquation

pour la rationalisation de la répartition du produit de la redevance forestière revenant aux Communes et aux Communautés villageoises.

Les modalités de fonctionnement du Fonds de péréquation sont fixées par voie réglementaire ».

Aux termes de cette disposition, le législateur de la loi de finances, précise son désir de soumettre l’intégralité des 50% de la RFA reversés aux communes et aux populations riveraines à la péréquation. Le souci de rationalisation mentionné confirme aussi l’idée que plus de communes devraient profiter des retombées de l’exploitation forestière au Cameroun

2. Les voies possibles d’amélioration

D’un point de vue politique, il est envisageable de faire admettre la péréquation auprès des populations locales, par la sécurisation de la gestion des revenus tirés de la RFA au niveau des communes, la sanction effective des responsables des nombreux détournements de ces fonds, et une forte sensibilisation sur les impératifs de solidarité nationale.

Il est bien entendu fondamental de veiller à ne pas faire retomber les communes actuellement bénéficiaires de la RFA dans le dénuement par l’absorption d’une part trop grande de leurs budgets actuels par le fonds de péréquation.

Afin de tenir compte de la situation socio – politique et de la nécessité de gérer les craintes des populations riveraines des zones exploitées, nous proposons :

Deux échelles de répartition du fonds (à l’échelle des seules communes productrices et de celles qui

ont des aires protégées dans leur circonscription, ou à l’échelle de toutes les communes de la zone forestière en prenant pour référence le plan de zonage forestier).

Deux scénarios de péréquations : un premier scénario basé uniquement sur les 40 % qui reviennent

aux communes et un autre basé sur l’ensemble des 50 % qui reviennent aux communes et aux populations riveraines.

Un système de répartition basé sur les 40% semble plus facile à promouvoir. Il enlève leur meilleur argument aux détracteurs du fonds de péréquation. En effet les populations riveraines méfiantes, ne sentiraient pas directement l’impact de la péréquation, puisque leur 10% continueraient d’arriver au même taux

Le choix du système de répartition doit impérativement tenir compte des sensibilités locales, notamment celles des populations. De ce point de vue, les trois systèmes ne sont pas égaux, ni dans leur capital de légitimité, ni dans le quotient des fonds qui arriveraient finalement dans les caisses des communes.

Les communes forestières du Cameroun se trouvent dans 6 provinces : Centre ; Sud ; Est ; Sud-Ouest ; Littoral ; Sud-Ouest

Dans la province du Centre, on pourrait exclure les communes du département du Mfoundi (Yaoundé et ses communes d’arrondissement), et ne retenir dans la province du littoral que les communes des deux départements forestiers que sont la Sanaga Maritime et le Nkam et la commune de Massagam dans la province de l’Ouest.

Tableau 33 : Nombre de communes par province

Provinces Nombre de communes Remarque/observation

Centre 64 Sauf Mfoundi

Sud 25

Est 33

Sud – Ouest 27

Littoral 13 Sanaga Maritime et Nkam

Ouest 01 Massangam

Total 163

Conformément aux dispositions de la loi de finances instituant la création d’un fonds de péréquation, c’est la totalité de la part de RFA destinée aux communes et aux populations riveraines qui doit être soumise à la péréquation.

Toutefois, nous proposons des simulations qui portent à la foi sur la totalité des 50% et sur les 40% uniquement.

La simulation basée sur les 40% uniquement, répond au besoin de tenir compte de la sensibilité de la question du fonds de péréquation dans les communes de production de cette RFA.

3. Le principe et les scénarios possibles:

Le principe est de fixer un plafond (en termes réels) à la RFA reversée à chaque commune (principe d’« écrêtement »). La mission a simulé différents scénarios à cet égard (voir dernier point).

Les sommes récupérées seront reversées (scénario 1) :

– Aux communes qui verraient leur RFA diminuer du fait des mécanismes de compensation pour la gestion durable (baisse de la possibilité annuelle de récolte liée à la remontée des DME lors du passage en aménagement, certification…)

– Aux communes forestières situées en bordure des aires protégées (et qui ne bénéficient pas de recettes d’exploitation)

Des alternatives peuvent être envisagées (scénarios 2 et 3) :

– Scénario 2 : péréquation totale des sommes dégagées entre les communes en dessous du plafond, quelle que soit leur niveaux relatifs de RFA

– Scénario 3 : affectation prioritaire aux communes les moins bien dotées (choix d’une redistribution plus forte)

• Les 10% aux populations ne seraient pas affectés par ce mécanisme

• Le mécanisme ne nécessite pas la constitution ou le rattachement à un « fonds », la gestion peut être faite par le PSRF

Propositions du seuil maximum :

– Soit plafonner la RFA versée à la moyenne reçue par les communes en 2005 (84,7 millions de F)

– Soit adopter un seuil plus élevé mais facile à retenir (par exemple 100 millions de FCFA). En 2005, 17 communes (sur les 163 de la zone forestière dépassaient ce seuil). La somme théorique à mettre en péréquation serait de 14,4 milliards de FCFA. Si on devait les répartir sur les 146 communes en dessous du plafond, cela représenterait environ 14 millions par commune.

Ces différents points nécessitent des décisions de nature politique, qu’il revient au gouvernement de discuter. En ce qui concerne la mauvaise gestion présumée des fonds de la RFA par nombre de communes, la mission recommande au gouvernement de décider que l’une des premières missions de la Cour des Comptes nouvellement créée sera consacrée à l’examen des finances publiques locales des

communes de la zones forestière, notamment celles qui ont bénéficié le plus des revenus de la RFA ces dernières années.