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3.2 Etat de l’art sur l’ergonomie des emballages de liquides alimentaires

3.2.5 Quelques références sur l’emballage et son ouverture

L’intégration de l’ergonomie à l’étude de l’ouverture de différents contenants a suivi le développement de l’ergonomie de produit initié pendant les années 1970. Les résultats d’une étude récente par questionnaire résument les données majeures de la relation utilisateur-emballage pour concevoir une ouverture plus facile (DTI, 2002). Cette enquête, réalisée auprès de designers, concepteurs, ergonomes et consommateurs, a permis de mettre en évidence les données manquantes et utiles pour la bonne conduite des activités des différentes professions impliquées. La majorité des réponses indiquait un manque de données sur la force physique des différents groupes d’âge, complétant les données de base déjà utilisées dans les différents travaux sur l’ouverture, à savoir l’âge, la mesure de la force et la gestuelle.

Le critère d’âge est une des origines principales du champ d’étude sur la facilité d’ouverture. La prise en compte du vieillissement de la population devient depuis quelques années une question majeure en ergonomie, et de nombreux travaux sur cet aspect portent leur attention sur cette évolution démographique (Rohles, 1983 ; Imrhan & Loo, 1988 ; Voorbij & Steenbekkers, 2002) et sur les différences que l’on trouve entre les populations féminines et masculines (Steenbekkers & Beijsterveldt, 1998). D’autres études soulignent la nécessité de connaître le geste d’utilisation, l’impact de la forme sur les modalités d’ouverture, et la force qu’un sujet peut réellement appliquer (Janson & al., 2005).

La notion de geste peut prendre en compte plusieurs aspects. Tout d’abord la latéralité (fig. 25), pour connaître les proportions de gauchers et droitiers et leur mode de saisie.

Figure 25 : Schématisation de la latéralité pour l’ouverture de contenants

Source : Voorbij et Steenbeck (2002).

Ensuite, elle peut s’intéresser au positionnement de la main en fonction de la forme de l’emballage. La préhension de l’emballage par les mains et la saisie de la capsule d’ouverture peuvent varier selon les caractéristiques dimensionnelles de l’objet. La modalité de saisie peut d’ailleurs être extrêmement variable. De l’ouverture d’un pot ou d’une bouteille qui nécessite une main pour tenir le contenant et une main pour tourner la capsule, on peut également observer une implication des deux mains pour l’ouverture si la forme de l’emballage le nécessite (fig. 26).

Figure 26 : Influence des caractéristiques de l’emballage sur la modalité de saisie à l’ouverture

Source : DTI (2002).

Etudier l’ouverture d’un emballage amène souvent à vouloir mesurer la force nécessaire pour accomplir le geste. L’évaluation de la force d’ouverture d’un emballage à capsule ronde est possible grâce à des moyens de mesure permettant de connaître le couple de torsion appliqué par l’utilisateur. La figure 27 illustre quelques uns de ces moyens de mesure.

Figure 27 : Moyens de mesure de la force d’ouverture

Sources : Imrhan & Loo (1988) ; Janson & al (2005).

Ces systèmes cherchent à mesurer ce couple de torsion en vue de connaître les forces développées et d’en déduire des critères de conception (Berns, 1981 ; Janson & al., 2005), ou à modéliser les phénomènes

d’interaction entre la main et la capsule pour intégrer les données récoltées à la réflexion globale sur la facilité d’ouverture (Carus & al., 2006 ; Yoxall & al., 2006a). En terme de force développée, le tableau 5 ci-dessous regroupe quelques exemples de couples de torsion appliqués à des emballages à capsule ronde, ouverts à une main pour des produits de la vie quotidienne.

Surface (mm²) Torsion mesurée (Nm) Diam. capsule (mm) Taille capsule

(mm) Matériau Texture Forme

Contenant scellé

Oignons 5765 4.52 68 10 Métal Lisse Plat Oui

Beurre 8070 1.79 69 20 Plastique Lisse Arrondi Non

Jus de

citron 1670 2.06 28 12 Plastique Bords à crêtes Plat Non

Betterave 6475 6.13 73 10 Métal Lisse Plat Oui

Marmelade 5285 6.16 66 9 Métal Lisse Plat Oui

Ketchup 2098 1.69 33 12 Métal Lisse Plat Oui

Confiture 4710 3.25 60 10 Métal Bords à crêtes Plat Oui

Café 7159 1.29 60 23 Plastique Lisse Octogonal Non

Moutarde 3285 1.49 45 12 Métal Lisse Plat Oui

Tableau 5 : Mesures de couples de torsion pour différents emballages de produits alimentaires

Source : Crawford & al. (2002).

Les résultats présentent des variations importantes (de 1 à 6 Nm), qui sont notamment fonction des caractéristiques de la capsule et de ses propriétés physiques (dimensions et matériau).

Il faut également tenir compte du fait que la valeur de l’effort qui est recueillie est fonction de la position des segments corporels (main, avant-bras et bras), en plus du type de saisie. L’intensité de l’effort n’est donc pas toujours un critère témoignant de la facilité d’ouverture, ou plus généralement de la facilité de réalisation d’un geste.

La majorité de ces travaux donnent lieu par exemple à un certain nombre de recommandations sur la prise en compte des utilisateurs et des critères de conception des capsules.

Par exemple, la DTI (1999) recommande d’une façon générale de tenir compte systématiquement de la question du vieillissement dans les problématiques de conception d’ouverture de contenants. Elle préconise notamment de faire en sorte de concevoir pour limiter les risques d’accidents dus à l’utilisation d’un outil quelconque employé comme aide à l’ouverture. D’autres auteurs préconisent une modification des paramètres de hauteur et de diamètre d’une capsule ronde (Imrhan & Loo, 1986 ; Nagamachi & Konz, 1986), ou une modification de la forme de la capsule (en passant du rond au carré) ou des éléments de forme au contact avec les doigts sur les bords de la capsule (Crawford & al., 2002).

Il a été montré récemment que les emballages deviennent de plus en plus difficiles à ouvrir, et qu’à ce titre les efforts de conception pour faciliter l’ouverture doivent être accentués (Yoxall & al., 2006b), notamment pour limiter les risques d’accidents.

3.2.5.1 L’exemple des risques et des accidents à l’ouverture de contenants

Les risques à l’ouverture lors de l’utilisation d’emballages sont souvent liés à une inadéquation entre les caractéristiques des utilisateurs et les modalités de conception de l’emballage (DTI, 1999). Certains systèmes de fermeture sont plus compliqués que d’autres à ouvrir, ou ne sont pas suffisamment explicites ou simples

pour être ouverts sans effort, sans frustration et/ou sans outils. Ces outils sont par exemple des couteaux pour soulever ou percer la capsule, ou de l’eau chaude appliquée sur la capsule (DTI, 2000).

En 1994, les emballages ont été impliqués dans 67000 accidents requérant un traitement hospitalier. Quel que soit le matériau et quelle que soit l’étape d’utilisation, le nombre d’accidents relatifs à l’ouverture représente 40% de ce nombre total (tab. 6).

Glass Plastic

Age Initial opening Reuse Age Initial opening Reuse

0-15 years 20 1540 0-15 years 310 6700

5-15 years 20 280 5-15 years 60 530

>15 years 510 450 >15 years 240 390

Tableau 6 : Nombre d’accidents relatifs à l’ouverture d’emballages en verre ou en plastique

Source : DTI (1994).

Dans son ensemble, le verre sous forme de bouteille, bocal ou pot représente approximativement 30% des accidents relatifs au packaging (Winder & al., 2002). En termes de conception, la recherche indique que la forme, la taille, le poids et l’aspect de surface jouent un rôle dans la facilité d’ouverture (DTI, 1997).

L’ergonomie représente un des moyens d’éviter les accidents en optimisant la facilité d’ouverture des emballages, et ces critères font partie des domaines d’étude à l’origine de la recherche d’amélioration de leur usage. L’une des voies empruntées par les industriels du packaging est un travail sur la forme de l’emballage. Très étudiée en design, elle est mise en avant comme argument pour attirer le consommateur, et de plus en plus régulièrement présentée comme ergonomique.

Pour poursuivre notre exposé, nous présenterons maintenant le cas de l’innovation par la forme, en prenant appui sur l’exemple des bouteilles d’eau.

3.2.5.2 Un exemple d’innovation en emballage : le cas de l’eau minérale

L’eau est un exemple symptomatique des nombreuses évolutions apportées au packaging. Son statut est passé d’emballage fonctionnel à celui de média attractif (Peltier, 2006), respectant un certain nombre de conclusions pour en faire un produit séducteur. A ce titre, l’insistance est portée sur la créativité des designers et du marketing à l’origine de ces tendances. En matière d’ergonomie, la forme est ainsi identifiée comme la base fondatrice d’une eau minérale.

Par cette forme, les industriels cherchent à :

• Développer l’identité : l’emballage est non seulement l’apparence physique du produit, mais aussi son premier porte-parole (fig. 28).

• Améliorer l’emballage : la praticité de l’emballage, l’amélioration de la gestuelle et de l’usage sont citées en

Figure 28 : L’emballage, porte-parole du produit

Source : Peltier (2006).

• Travailler la prise en main : l’amélioration de la préhension est un réel « plus » offert au consommateur. S’adapter à la morphologie de la main en l’invitant à saisir la bouteille au niveau d’une zone resserrée est un exemple de solution proposée (fig. 29).

Figure 29 : Formes d’emballages dessinées pour faciliter la prise en main

Source : Peltier (2006).

• Offrir un service : cette offre est appréciée des consommateurs, tout comme elle l’est des clients

des industriels (fig. 30).

Figure 30 : Emballages offrant un service supplémentaire (prise en main, ouverture, nomadisme…)

Source : Peltier (2006).

Au-delà de la forme et de l’usage, le recyclage, l’allègement et les biomatériaux sont aussi des facteurs d’amélioration. On le voit, l’ergonomie des emballages de liquides alimentaires passe par un travail sur la forme en vue d’améliorer l’usage de la bouteille.

Avant d’exposer les méthodes d’étude de ces usages, intéressons-nous à ce que revêt, d’un point de vue plus général, l’usage des emballages.

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