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La quête d’un Orient marocain:

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 131-134)

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Durant le siècle des Lumières, l'Orient a suscité en occident un immense attrait sur tous les plans. Les intérêts commerciaux et les projets de mise en ordre de l'univers connu tiennent une place privilégiée dans les stratégies de la future réalité politique. Mais, l'Occident aspire aussi à la différenciation que l'Orient entraîne et le meilleur moyen de la reconnaissance de cet espace inconnu demeure donc la pénétration par le biais du voyage. Les expéditions et les voyages donnent lieu à de nombreux récits et tableaux qui constituent un savoir inépuisable sur des contrées qui n'ont jamais cessé de hanter l'imagination des artistes et des hommes de lettres. Dans cette tentative de prospecter la connaissance de l'Autre, rien n'est laissé au hasard, les récits traitent aussi bien de l'histoire, des traditions, des sciences, des Arts que de la politique, de la religion et des sectes…

Pourtant, rares sont les considérations prudentes et les constatations honnêtes à caractère ethnographique d'où ressort une vision rigoureuse, dotée d'une vigueur pertinente. La plupart abondent de spéculations générales, de rituels dépréciatifs et de préjugés négatifs qui prévalent jusqu'alors en Europe.

Durant cette époque, un engouement sans précédent et une véritable nécessité de s'évader s'emparent des écrivains et des artistes qui courent vers l'Orient pour jouir de ses influences exotiques qui empreignent le commencement de l'Orientalisme1 et enrichissent la fantaisie d'un nouveau style composé d'éléments originaux. C'était l'Orient asiatique qui séduisait les peintres. Certains étaient partis jusqu'à Constantinople, et y avaient demeuré pendant de nombreuses années. L'histoire de la peinture française révèle l'étrange existence de ces

«Peintres du Bosphore».

Par ailleurs, en France, durant le siècle des lumières, la Turquie, tout comme la Chine, était à la mode. Elle fut longtemps considérée comme une des contrées privilégiées du rococo.

1-Selon Edward Said « L’orientalisme exprime et représente cette partie, culturellement et même idéologiquement, sous forme d’un mode de discours, avec, pour l’étayer, des institutions, un vocabulaire, un enseignement, une imagerie, des doctrines et même des bureaucraties coloniales et des styles coloniaux », voir Said, Edward, L’Orientalisme, L’Orient créé par L’Occident, Paris, Seuil, 1980, p.14.

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Les tableaux du XVIIIe siècle qui évoquent des scènes de l'Orient ne montrent que des aspects fantaisistes apprêtés au goût de l'époque. Ils avaient produit des impressions et précipité un essor brusque et inopiné d'attention des occidentaux vers les choses d'Orient. Ils avaient contribué à développer le goût et la mode des «turqueries» et des «chinoiseries».

Toutefois, c'est durant les dernières décennies du XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle qu'une vigoureuse attirance pour l'Orient se fait sentir chez une élite intellectuelle sous l'influence de la littérature, la Campagne d'Egypte, la conquête de l'Algérie et la volonté de connaître l'étranger devienne une préoccupation de l'Etat qui n'hésite plus à financer ses propres observateurs. Ces éléments tous réunis ne participèrent qu'à la divulgation d'un Orient farouche et singulier.

La révélation de l'Orient s'avère donc un fait essentiel dans l'histoire de la peinture occidentale du XIXe Siècle. La découverte de la civilisation Nord Africaine au cours de ce siècle par les hommes de lettres et les artistes occidentaux a permis l'extension de la notion d'Orient qui recouvre désormais, aussi bien le bassin de la méditerranée que l'Afrique du Nord. L'entrée d'une terre africaine dans l'histoire européenne ne pouvait qu'amplement participer à faire mieux connaître les hommes et les mœurs de ces contrées qui ne cessent de fasciner l'imaginaire des Occidentaux. Le Maroc, en tant que pays nord africain, charma aussi bien l'élite intellectuelle et les artistes de talent qui furent éblouis par l'avantage et l'ampleur qu'offre une nature encore fraîche et tellement originale. Ce contact favorisa ainsi l'élaboration d'une vision plus juste et plus précise d'une civilisation conçue au préalable comme énigmatique et inaccessible.

Ainsi, les séjours et les voyages français à la deuxième moitié du siècle des Lumières donneront lieu à des témoignages écrits sur le pays et son peuple. Louis Chénier - père du célèbre poète, André Chénier- qui fut pendant quinze ans consul au Maroc ne l’a pas empêché d’idéaliser la représentation des Marocains, illustrant par là même son attachement aux doctrines des philosophes du XVIIIe siècle.

Au début du XIXe sicle, période riche en événements politiques et militaires, c’est en peinture que le vrai visage du pays allait être révélé dans la conscience française. Eugène Delacroix, dans ses tableaux, dans ses aquarelles comme dans ses écrits, donnera une image qui allait rompre avec la représentation traditionnelle. Le voyage marocain du peintre en 1832 marque la fin d’une période

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où le pays n’était connu que par touches et n’était représenté que par des récits disparates où l’imaginaire a souvent joué le premier rôle.

De son voyage, le peintre a rapporté, non seulement de nombreux croquis et dessins, mais aussi un carnet de route qui fut publié, plus tard, dans le journal de l’artiste. En outre, il a adressé à ses amis plusieurs lettres du Maroc. A travers ces écrits, nous suivrons le voyage de Delacroix de Tanger jusqu’à Meknès.

Dans le même dessein, qui consiste à chercher au Maroc un Orient débarrassé des conventions, les successeurs du peintre, vont se compléter pour nous donner une vision exotique du pays. L’œuvre du journaliste Gabriel Charmes annoncera celle de Pierre Loti, qui contient en germe l’interprétation que fera André chevrillon du Maroc.

Chapitre I

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