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Chapitre III Structure et dynamique à court terme du picoplancton eucaryote

PYROSEQUENÇAGE SUR AMPLICONS (454 ROCHE)

Outre une approche quantitative par TSA-FISH qui a déjà fait l‘objet des travaux précédents, une quantification de la communauté picoeucaryote lacustre par la technique de PCR en temps réel et une approche innovante de séquençage massif de type pyroséquençage normalisé (basé sur la méthodologie proposée par Gifford et al. (2010)) ont été réalisées au cours de ce travail. Le détail du protocole d‘application de ces deux techniques étant repris dans la section ―matériel et méthodes‖ de l‘article qui suit, nous nous attacherons ici à décrire le principe des deux approches.

Principe de la qPCR

La PCR quantitative est une technique automatisée permettant de quantifier précisément et rapidement un gène d‘intérêt dans de nombreux échantillons. La PCR quantitative est une amplification PCR classique couplée à la quantification d‘un signal fluorescent. L‘intensité de la fluorescence à chaque cycle est directement proportionnelle à la quantité d‘amplicons produite, elle-même directement proportionnelle à la quantité initiale d‘ADN présente dans le milieu réactionnel. La quantification est dite absolue lorsque la quantification est basée sur l‘utilisation d‘une gamme étalon du gène d‘intérêt dont on connaît les concentrations initiales. La quantification relative est basée sur le calcul du niveau d‘expression du gène cible contre un ou plusieurs gènes de référence dont on ne connaît pas forcément la concentration. La méthode au SYBR Green est une des approches les plus utilisées en qPCR (la seconde étant l‘approche TaqMan non décrite ici) dans laquelle l‘incorporation du colorant SYBR Green I dans la réaction

de PCR permet de détecter l‘ADN double brin généré durant la PCR (Figure VII-2), via un

signal fluorescent. Dans cette étude, le principal avantage de cette technique a été l‘utilisation du même jeu d‘amorces que pour l‘approche par pyroséquençage décrite ci-dessous. Il nous a ainsi été possible de quantifier le nombre de copies d‘ADNr 18S présent au sein de chaque échantillon

(calculé selon Zhu et al. (2005)) afin d‘ajouter dans de mêmes proportions (1%) un ADN interne

standard. Ce dernier, absent de la fraction picoplanctonique lacustre (plasmides du sous-type 7 de

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d‘intérêt avant que ces derniers soient amplifiés en vu de leur séquençage. Ainsi, une estimation de la profondeur de séquençage a pu être réalisée.

Figure VII-2 Réaction d‘incorporation du SYBR Green durant la réaction de PCR (d’après le site :

http://homepages.strath.ac.uk/~dfs97113/BB310/lect403.html)

De par son degré élevé de sensibilité et la possibilité d'analyser simultanément un nombre élevé d'échantillons (Klein, 2002), la méthode de PCR en temps réel s‘est développée ces dernières années en écologie microbienne afin de caractériser, en parallèle des techniques

d‘hybridation in situ fluorescente (FISH), les variations quantitatives des communautés

procaryotes et eucaryotes à différentes échelles de résolution. Ainsi, les abondances de grands groupes (Suzuki et al., 2001, Lefèvre et al., 2010), de genres (Skovhus et al., 2004), d‘espèces (Audemard et al., 2004, Park et al., 2007), voir d‘écotypes microbiens spécifiques (Becker et al., 2002) ont été caractérisées. Son application s‘est également développée aux populations picoplanctoniques eucaryotes, essentiellement marines, afin de caractériser notamment les

dynamiques d‘espèces phytoplanctoniques des genres Ostreococcus, Bathycoccus et Micromonas (Zhu et

al., 2005, Countway et Caron, 2006, Demir-Hilton et al., 2011). Par ailleurs, la PCR quantitative

constitue également un outil moléculaire efficace dans l‘évaluation du rôle de certains microorganismes par le ciblage de gènes fonctionnels. Ainsi, à titre d‘exemple, l‘implication potentielle des communautés bactériennes et archéennes dans le cycle de l‘azote à travers l‘étude

du gène amoA (codant pour l‘enzyme ammonium monooxygenase impliquée dans les premières

étapes de la nitrification) a notamment été étudiée ces dernières années en systèmes marins et d‘eau douce (e.g. Agogué et al., 2008, Galand et al., 2010).

Principe du pyroséquençage 454 sur amplicons

Le principe de base de la méthode de pyroséquençage consiste à lier une amorce à l‘ADN cible de taille inférieure à 500 pb initialement préparé, puis à ajouter séquentiellement et dans

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l‘ordre une base (A, T, C ou G) à partir de l‘extrémité de l‘amorce (Ronaghi, 2001) (Figure

VII-3).

Figure VII-3 Illustration des différentes étapes de la technique de pyroséquençage sur amplicons (d’après le site :

http://www.454.com/)

Pour cela, une amplification des ADN génomiques (extraits de différents milieux) par

des amorces ―fusionnées‖ est réalisée dans un premier temps afin de générer un fragment d‘ADN cible d‘une taille suffisante et contenant les adaptateurs A et B nécessaires au pyroséquençage (étape 1). Ces amorces ―fusionnées‖ sont constituées de l‘amorce spécifique de la région de l‘ADNr 18S ciblée fusionnée à un marqueur (clé nucléotidique ou ―tag‖) et d‘un adaptateur spécifique. Au cours de ce travail de doctorat, nous avons opté pour un séquençage unidirectionnel à partir du seul adaptateur A. Aussi, seul ce dernier fusionné avec l‘amorce sens (―forward‖) est associé à une clé nucléotidique spécifique d‘un échantillon donné. S‘en suit une amplification clonale des molécules d‘ADN simple brin après fixation de ces dernières à des microbilles possédant à leur surface l‘amorce complémentaire à l‘adaptateur A. Une mise en émulsion de cet ensemble ―microbille-ADN simple brin‖ en présence des réactifs pour PCR est alors réalisée (étape 3). Après amplification, les microgouttelettes (ensembles ―microbille-ADN

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simple brin‖) sont dissociées et enrichies puis déposées sur une plaque en fibres optiques (plaque PicoTiter™) d‘1,6 million de puits (étape 4). Les puits possèdent un diamètre qui assure le dépôt d‘une microbille par puits. Dans chacun de ces puits est alors réalisé le séquençage des ADN simple brin selon le principe de pyroséquençage décrit ci-dessus (étape 5). Brièvement, après incorporation d‘un nucléotide dans le brin d‘ADN en synthèse, une libération d‘un pyrophosphate (PPi) se produit. S‘en suit une transformation de ce PPi en ATP par une ATP sulfurylase. Une luciférase couple alors cet ATP à une luciférine ce qui produit une oxyluciférine en émettant un signal lumineux capté par le scanner du séquenceur. Les nucléotides en surplus dans le milieu réactionnel sont alors dégradés par une apyrase. Dans le cadre de ce travail, le pyroséquençage a été réalisé par le séquenceur de deuxième génération par la technologie Roche 454 GS-FLX Titanium par GATC.

La technique de pyroséquençage, de par l‘absence d‘étape préalable de clonage, s‘est révélée rapide et fructueuse, permettant la génération d‘un grand nombre de séquences (jusqu‘à 1,6 million) d‘une taille moyenne de 400 pb. Cette technique a ainsi fait l‘objet d‘un intérêt grandissant en écologie microbienne afin de caractériser la diversité des communautés aquatiques procaryotes (Sogin et al., 2006, Galand et al., 2009) et eucaryotes (Amaral-Zettler et al., 2009,

Cheung et al., 2010) de façon la plus exhaustive possible.

IV. RESUME DE L’ETUDE

Le suivi estival des variations à court terme (2-3 jours) de la diversité et des abondances de la communauté picoeucaryote lacustre (0,2-5 µm) a été effectué au sein du lac Léman (mésotrophe) par le couplage de trois approches moléculaires (pyroséquençage sur amplicons normalisé, qPCR et TSA-FISH). Pour une meilleure comparaison entre échantillons et une estimation de la profondeur de séquençage, une approche normalisée des données de pyroséquençage a été réalisée par l‘utilisation d‘un ADNr standard interne introduit à des proportions connues (1%) dans chaque échantillon lors de leur préparation. Ainsi, un seuil d‘identité de 95% a pu être défini, permettant une définition d‘une unité taxonomique opérationnelle (OTU) adaptée à notre jeu de données. Par cette méthode de séquençage massif haut débit, une diversité bien plus importante (1017 OTUs) que précédemment décrite dans les bases de données issues de construction de librairies de clones a été mise en lumière au sein de l‘assemblage picoeucaryote. La grande majorité de cette diversité est représentée par des taxa rares (<0,01% des séquences totales), appartenant principalement aux groupes hétérotrophes des LKM11 et Dikaryomycètes et à des organismes photosynthétiques (Chlorophyta, Bacilliarophyta

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and Dynophyceae). Cet assemblage d‘organismes rares s‘avère extrêmement stable, la plupart des taxa (97%) n‘étant jamais abondants dans aucun des 23 échantillons réalisés au cours de ce suivi. La communauté des protistes et fungi lacustres est, par ailleurs, caractérisée par d‘importants et continuels remaniements au sein de la communauté picoeucaryote impliquant principalement des changements de dominance au sein des 21 ―core taxa‖ (>1% des séquences) définis au cours de l‘étude. Quelques OTUs d‘abondances intermédiaires (0,01-1%), qui ponctuellement deviennent abondants, sont particulièrement impliqués. Ces réassemblages sont essentiellement le fait de taxa potentiellement bactérivores (Ciliophora, Cercozoa) et de putatives parasites-saprophytes (Perkinsozoa, LKM11). Par ailleurs, d‘importantes variations quantitatives à court-terme à l‘échelle de la communauté et de divers groupes phylogénétiques sont observées et doivent être considérées plus attentivement afin d‘éviter toutes interprétations biaisées des dynamiques de ces microorganismes, notamment au vu d‘étude à long terme où le nombre d‘échantillons peut être limitant. Enfin, cette étude constitue la première ayant observé dans les systèmes lacustres de potentielles infections de microalgues par des cellules appartenant au clade 2 des Perkinsozoa. De cette étude découlent de nombreuses questions concernant à la fois les facteurs qui régissent ces remaniements rapides de la communauté picoeucaryote et la possible biogéographie de ces organismes.

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Article IV

The short-term dynamics of lacustrine small eukaryotes provide