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LES PAYSAGES GEOMORPHOLOGIQUES ET LEUR ORIGINE

3.2. LES RELIEFS CARACTERISTIQUES DES PIEMONTS

3.2.3. LA PSEUDO-PEDIPLAINE DE KAELE-MINDIF

3.2.3.1. LA PSEUDO-PEDIPLAINE PROPREMENT DITE

3.2.3.1. LA PSEUDO-PEDIPLAINE PROPREMENT DITE

A la limite sud et sud-ouest des plaines extrême-nord-camerounaises s’étendent de part et d’autre d’un bombement de socle de grandes surfaces aux horizons presque plans à 400-430 m d’altitude, dominés par quelques inselbergs. La différence d’altitude entre les vallées et les sommets des interfluves est très faible, de un à une dizaine de mètres. Cette topographie plonge vers le Nord avec une pente de 0°33 et vers le Sud avec 0°15 de pente : c’est la pseudo-pédiplaine de Kaélé-Mindif.

Une coupe topographique entre Kaélé et Mindif montre un profil en enclume d’où le qualificatif « pseudo » pour cette pédiplaine. En effet, son centre se trouve à une position plus haute (400-450 m d’altitude) que les pédiments (380–390 m) qui la bordent à l’Ouest et au

Figure 12. Coupe topographique à travers la pseudo-pédiplaine de Kaélé – Mindif.

Du mayo Boula au Nord, et se raccordant aux monts Mandara par les pédiments de Mousgoy et celui de Bossoum au-delà du mayo Louti, la pseudo-pédiplaine prolonge les piémonts vers l’Est. Vers le Sud, elle s’étend jusqu’au-delà de la frontière camerouno-tchadienne. Au Sud-Ouest, elle se poursuit vers Guider, où elle est séparée du bassin de la Bénoué par des montagnes. Son altitude y est comprise entre 350 et 400 m.

FIGURE 13. PAYSAGE GEOMORPHOLOGIQUE DE LA PSEUDO-PEDIPLAINE DE KAELE - MINDIF

Le décapage actuel de la surface y est total. En plus des berges des cours d’eau qui s’éboulent, les effets de l’érosion dans cette pédiplaine peut aussi se vérifier au pied des inselbergs et des inselgebirge qui la parsèment. Que ce soit au pied des reliefs granitiques des monts Virni et Biwara 701 m, des monts Gadas 650 m, Boboyo 627 m et Lara 702 m, ou de la dent syénitique de Mindif, le modelé est partout identique ; on a un système de pentes divergentes portant une pellicule de matériaux détritiques que dominent de petits pointements rocheux et que dissèquent des lits étroits à écoulement saisonnier. La disparition des chicots rocheux marque la limite entre la pellicule détritique qui recouvre le socle et des formations plus épaisses dans lesquelles les cours d’eau s’encaissent de 5 à 10 m. Dans la plupart des cas, il y a 2 niveaux de pédiments au pied des inselbergs: un haut pédiment ancien (400-430 m) et un bas pédiment, (385-399 m). L’interprétation des photographies aériennes N° 394, 395 et 396 de la Mission N.C 33XIV-XV montrent par exemple, au pied du mont Biwara, un haut pédiment à matériau détritique disséqué et depuis longtemps séparé du massif. Le bas pédiment, encore ancré au mont, est séparé du haut pédiment par une dépression périphérique, soulignée par un petit mayo. Le pédiment s’y comporte comme un ensemble de cônes de déjection au débouché des vallons qui entaillent les versants du montinsule suivant les lignes de fracture du socle. Pareille dynamique a dû prédominer pendant la construction du haut pédiment, à un moment où les produits d’altération étaient plus abondants. (Figure13).

Il en est de même des piémonts des hossérés Gadas, Boboyo, et Lara. En effet, l’examen des photographies aériennes N° 398 et 399 de la mission précitée montrent par exemple un petit mayo qui semble prendre en écharpe le massif de Gadas et le bas pédiment appuyé sur le massif et incliné suivant une pente de 2 à 3°. Le haut pédiment quant à lui, domine la vallée par un talus net et s’incline doucement vers un affluent de la rive gauche du mayo Binder.Malgré le festonnement des formes au pied du massif de Mindif à cause d’un réseau hydrographique plus dense, on peut deviner une situation analogue, où le bas pédiment récent qui porte la localité de Mindif est circonscrit par les deux principaux affluents du mayo Louga, marquant la dépression périphérique ; le haut pédiment lui, ne subsistant que sous forme de lambeaux limono-argileux à une altitude de 400 m. Le sens d’écoulement nord-sud du mayo Louga indique la déclivité du secteur. (Wakponou, 1988).

Les inselbergs disséminés dans le secteurs sont des points de départ de produits détritiques vers les petits pédiments jointifs aux pentes divergentes et relativement faibles (0°5 à 2°).

Le modelé décrit est propre aux régions sèches. Le façonnement fait intervenir des processus hydriques. Ce sont les phénomènes de ruissellement qui déshabillent une tunique d’altération mise en place lors d’une phase climatique plus altérante. Le degré de décapage est fonction de la proximité des reliefs d’appui. Encore très minces autour des affleurements rocheux ou aux pieds immédiats des inselbergs (1 à 5 cm) où ces formations se plaquent en biseau sur le socle, leur épaisseur dépasse 3 m dans les vallées.

La coupe représentative dans les formations superficielles de la pseudo-pédiplaine a

Figure 14a. Situation de la coupe de Kaélé

La coupe de Kaélé (CAM 2002–2) présente 5 niveaux comme suit :

Figure 14b. La coupe de Kaélé

Figure 14d. Courbes et paramètres granulométriques

A la base de la coupe niveau (a), les matériaux ont des caractères sédimentologiques peu évolués à en juger par la courbe granulométrique parabolique, ce qui nous fait penser à des altérites.

La courbe granulométrique à faciès linéaire à tendance parabolique du niveau (b) et les caractères morphoscopiques colluviaux de 60 à 80 % du stock témoignent des altérites transportés par un courant hydrique assez fort (SK = 0,19). Actuellement stabilisées (N = -0,04), elles subissent une évolution pédologique traduite par l’état rubéfié des grains.

Les pisolites mangano–ferrugineux du niveau (c) résulteraient de la remobilisation des produits d’une cuirasse dont les lambeaux, taillés en pédiments, cernent le pied de la colline de Kaélé à environ 1 km en amont.

Les caractères sédimentologiques aussi non évolués (courbe cumulative parabolique) du niveau (d) traduiraient des remblaiements holocènes, s’il était prouvé que la formation à concrétions carbonatées au-dessus de laquelle repose ces sables est contemporaine de l’assise limono-argilo-sableuse de Doyang datée du post-Acheuléen (après 35 000 BP). Ces remblaiements de sables fins (60 %) (Md = 72) montrent en effet des caractères sédimentologiques colluviaux (grains de quartz C.A. = 68 % du stock). Ce sont des sédiments mal classés (Qdϕ = 0,48),

Les deux échantillons du lit vif nous donnent une idée sur la dynamique de transport du

tarissement progressif au cours de la saison sèche le fuide ne peut plus transporter que du matériau de plus en plus fins.

Du pied de la « dent » syénitique de Mindif vers l’Est, on passe du socle à une couverture de sables éolisés [ 40 % des grains de quartz arrondis mats dans les sables prélevés sur la rive berge gauche du mayo Tchouaké (N 10° 24’–E 14° 27’, altitude 405 m)]. C’est un matériau pris en masse de teinte jaune rouge (N 60 7,5 YR). Cette couverture sableuse est façonnée en dunes surbaissées, vêtues par une végétation de type fourré arbustif à Gueira senegalensis.

Les sols ferrugineux tropicaux qui la portent sont selon Letouzey (1968); Brabant et Gavaud (1985) lessivés et à développement solonetz-gleyique. Le sable rubéfié réapparaît le long de la piste Gagadjé-Kodoki, immédiatement sur la rive droite du mayo Gagadjé (10° 25’–14° 28’, altitude 410 m). Cette mince couverture sableuse fossilise une formation hydromorphe qui, dans la plaine alluviale du Diamaré, s’observe sous les vertisols. La couverture sableuse se poursuit de façon discontinue jusqu’à Kobbo, où une ravine (N 10° 18’–E 14° 37’, altitude 424 m) permet de déceler une formation limono-argileuse à nodules calcaires, à concrétions ferrugineuses et à taches d’hydromorphie, considérée de prime abord par Sieffermann (1967) comme étant lacustre. A la base de cette formation apparaît des migmatites riches en quartz filoniens profondément météorisés, sur lesquelles se voient des poches lenticulaires de pisolithes ferrugineuses de diamètre inférieur à 1 cm. Tout cet ensemble est fossilisé par une couverture de sable éolien jaune rouge (N 60 7,5 YR) pris en masse.

Sur la piste Gadas–Péténé à 4 km de Zacklang (N 10° 14’-E 14° 24’, altitude 441 m) la petite remontée du pédiment se voit bien même si la denivelée n’y est que de quelques 2 à 5 m, en pente douce de 2 à 3°, sans véritable talus bordier ; on passe ainsi de la pédiplaine proprement dite au plateau de Doyang (Mainguet et Wakponou, 2002).