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DES PEDIMENTS EN COLLERETTES CIRCUMINSELBERGS A DOS DE BALEINE

LES PAYSAGES GEOMORPHOLOGIQUES ET LEUR ORIGINE

3.2. LES RELIEFS CARACTERISTIQUES DES PIEMONTS

3.2.2. D ES PEDIMENTS COUVERTS EN SITUATION TRANSITOIRE ENTRE LES STADES FONCTIONNEL ET MORT

3.2.2.2. DES PEDIMENTS EN COLLERETTES CIRCUMINSELBERGS A DOS DE BALEINE

Les pédiments occupent plus du 1 / 3 des paysages géomorphologiques des basses terres extrême-nord-camerounaises. Ils s’épanouissent entre la retombée orientale des monts Mandara et les massifs plus ou moins isolés qui font barrage aux produits d’épandage descendus des versants de multiples inselbergs et inselgebirge, à l’intérieur des montagnes même et aux piémonts du bourrelet montagneux des massifs de Mora et des Matakam. Leur altitude varie de 400 à 600 m (figure 6 ci-dessous).

La topographie parsemée de dômes rocheux en forme de dos de baleines et/ou de chicots résiduels s’incline doucement vers le N-E, suivant des pentes irrégulières divergentes, linéaires ou concaves, variant du Nord au Sud de 0°74 à 0°24. De fait, cette vaste surface est formée de la coalescence de petits pédiments aux piémonts orientaux des Mandara et de ceux qui ceinturent le pied des inselbergs. Ces pédiments sont le plus souvent découpés en

"badlands" par les petits mayos qui rayonnent au pied des montagnes et des montinsules. Ces petits cours d’eau sont rapidement rassemblés dans les collecteurs principaux.

Photographie 5. Un pédiment en collerette à dos de baleine ( Sérawa, 17-I-2003 ).

La photographie montre :

- au plan médian, une surface de glaçage servant d’aire de battage de mil, à en juger par la présence d’amas de feuilles et de fagots d’éteules. Cette surface de glaçage est séparée des versants rocheux (arrière plan) par une végétation plus fournie (arbres et graminées), soulignant la dépression annulaire (secteur plus humide) au pied de l’inselberg ;

- au premier plan, un secteur déclive à multiples croupes d’affleurements rocheux ( dos de baleine).

Figure 6.Pédiment du secteur de Méri au pieds des monts Mandara

Le pédiment dans le secteur de Tokombéré (figure 7 ci-dessous) est l’exemple type de pédiment couvert. De forme rectangulaire, de près de 66 km2, il s’étend entre l’abrupt du bourrelet montagneux des Mandara à l’Ouest, les hossérés (inselbergs) Mouyengué 837 m à l’Est ; Gouada-Gouada 1088 m au Nord ; Dza Mboukou 882 m et Molkoa 1059 m au Sud. A 440 m d’altitude moyenne, la topographie est faiblement déclive ouest-est de 0°29. A la sortie immédiate des montagnes, les principaux mayos (Taparé, Ougda) et leurs multiples affluents, gardant la fougue érosive de leurs cours torrentiels dans les montagnes, incisent les formations colluviales descendues des versants. Ces cours d’eau confluent à Makalingay, où le liséré de pédiment d’une vingtaine de kilomètres de large s’ouvre à l’Est par une large vallée sur la plaine Maroua-Bogo.

Le pédiment de Tokombéré est séparé de celui de Warba (440 m d’altitude) au Nord par l’inselgebirge Gouada-Gouada. De dimensions plus réduites (quelque 24 km2), il est limité au Nord par les hauteurs de Dargala et le mont Dza-Ourza 764 m . Il s’ouvre à l’Est sur la plaine du secteur de Mora.

La terminaison sud du bourrelet montagneux à l’Est des Mandara et le hosséré de Hina-Marbak insèrent le pédiment de Gawar au sein même des monts Mandara à une altitude moyenne de 560 m.

Presque symétrique au pédiment de Gawar, celui de Koza, contrairement aux autres qui occupent des alvéoles correspondant aux secteurs d’anatexites érodés au sein des granites, est un petit graben. Celui-ci s’étire entre les massifs de Moskota et de Dzamouna sur 28 km, à 480 m d’altitude.

La localité de Mora (N 11° 03’-E 14°08’) est bati sur un pédiment qui s’étale en contre-bas de la terminaison du bourrelet montagneux à l’Est des monts Mandara, au pied des inselbergs d’Igawa et de Télaké. Il s’est formé aux dépens des granites calco-alcalins qui ont été érodés.

Sa surface localement parsemée de dunes de sables rubéfiés (à Mora, Goleldadji…) est irrégulière et entaillée par de lits étroits des mayos descendant du massif de Mora et rayonnant sur toute son étendue. En certains secteurs, le pédiment est creusé de dépressions tapissées par des formations de type karal* (terme foulfouldé, dialecte local, désignant des sols hydromorphes sur des argiles noires tropicales. Il s’agit en fait du « black cotton soil » des anglo-saxon) de dimensions variées ; ce karal porte du muskwari* (terme foulfouldé, dialecte locale, désignant le sogho de contre saison. Ce mot viendrait par évolution linguistique du terme haoussa « mussawa » du Nord du Nigeria qui veut dire littéralement « le mil de Moïse ». En effet, une légende voudrait que Moïse dans l’Ancien Testament ait nourri son peuple dans le désert pendant 40 ans à sa sortie d’Egypte vers la terre promise avec ce

« mil » qui, selon la volonté de Dieu pouvait assurer son cycle végétatif : germer, croître et produire sans pluie), du coton tandis que le mil pluvial est cultivé sur des sols sableux plus légers. Le pédiment s’étale du Sud vers le Nord, de Mora jusqu’au -delà de Doulo sur près de 10 km. Il s’abaisse doucement dans le même sens de 0°63. D’Ouest en Est, il s’étend sur 12 km, entre le mayo Zakota et le haut mayo Sava. La confluence de nombreux petits mayos au Nord à la hauteur de la courbe 360 m et l’alignement NO-SE de petits pitons rocheux résiduels (Sra Warda 569 m ; Doulo 570 m ; Birdjidji 506 m ; Talaké 410 m ; Igawa 569 m et Aissa Kardé 420 m) laissent supposer sa limite car il est en continuité topographique ave

Figure 7.Paysage géomorphologique du pédiment couvert du secteur de Tokombéré.

Au pied du mont Loulou 855 m, inselberg ruiniforme présentant à 750 m d’altitude une cuvette (Marbaï) surmontée d’un pain de sucre monolithique de plus de 100 m de dénivelée, dans un paysage similaire, les collecteurs principaux conduisent les eaux vers le bassin de la Bénoué au Sud et plus au Nord, vers celui du Tchad. La limite entre les pédiments et les dépôts alluviaux des mayos est difficile à discerner. Les matériaux détritiques s’épaississent à mesure qu’on avance vers les cours d’eau. Les pentes se prolongent alors en remblais plats, à bords relevés en bourrelet ou découpés en terrasses dominant de 1 m à une dizaine de mètres les terrassettes annuelles de laisses de crue limono-argileuses plus basses, ou directement le lit mineur du mayo, donnant ainsi lieu le plus souvent à un "pédiment - terrasses".

Figure 8. Pédiment au pied du mont Loulou

Figure 9. Coupes à trvers les pédiments