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LE BILAN DU PROTOCOLE DE KYOTO ET LE RÉSULTAT DE LA COP-21 : UN NOUVEAU TRAITÉ PERMETTRAIT-IL CONTINUER À LUTTER CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE À PARTIR D’UN PERMETTRAIT-IL CONTINUER À LUTTER CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE À PARTIR D’UN

ENVIRONNEMENTALES : LE MARCHÉ DU CARBONE COMME INSTRUMENT DE LUTTE CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE

1.3. LE BILAN DU PROTOCOLE DE KYOTO ET LE RÉSULTAT DE LA COP-21 : UN NOUVEAU TRAITÉ PERMETTRAIT-IL CONTINUER À LUTTER CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE À PARTIR D’UN PERMETTRAIT-IL CONTINUER À LUTTER CONTRE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE À PARTIR D’UN

MARCHÉ ?

Dans la partie précédente, nous avons discuté l’expérience du fonctionnement du MDP dans le scénario mondial d’un point de vue social et environnemental. Cette discussion sur le bilan du mécanisme comprend des analyses sur la première période d’engagement du mécanisme (2008-2012) ainsi que sur

la deuxième période (2013-2020). La dernière période intitulée « Doha Amendement to the Kyoto

Protocol » a été négociée lors de la COP-18 pour assurer une transition entre le traité de Kyoto et le prochain traité. Le nouveau traité a été négocié lors de la COP-21, en 2015. De ce fait, dans cette partie nous allons discuter brièvement des résultats du Protocole de Kyoto après environ 15 ans d’application. Cette étape s’avère indispensable pour ensuite mettre en lumière les discussions sur le nouvel Accord de Paris qui remplace le Protocole de Kyoto à partir de 2020 (UNFCCC, 2018h). Les négociations dans ce nouveau traité détermineront l’avenir du MDP ou éventuellement d’un nouveau marché du carbone mondial.

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La première période d’engagement du Traité allant de 2008 à 2012 a fixé pour les pays de l’Annexe I l’objectif de réduction de 5 % de GES par rapport à la moyenne des émissions de 1990 (année de référence). Toutefois, dans la réalité, le Protocole, censé être un instrument juridique global, n’a été pas

ratifié par tous les pays du globe. La sortie des États-Unis en 2001, le pays le plus émetteur de GES49 dans

le monde a mis en péril la capacité du traité à être efficace au niveau global (Bohringer, 2003)50. Quoique

les États-Unis aient retiré leur engagement, la ratification du Protocole a représenté un soutien politique d’autres pays signataires de la Convention à la gouvernance climatique globale. Ainsi, l’Union européenne a pris un avantage politique en étant le seul bloc de pays parmi les plus riches de la planète à ratifier le Traité. Du point de vue de l’Union européenne, continuer l’engagement du traité s’est avéré une opportunité politique pour renforcer l’orientation de sa politique extérieure vers une image de leadership mondial plutôt qu’un engagement purement environnemental (Aykut & Dahan, 2015 ; Hovi et al, 2004). En outre, l’aspect économique du traité était aussi en convergence avec la posture européenne d’adoption du paradigme de la théorie de Modernisation Ecologique. Il s’agit là d’une stratégie de promotion, de diffusion et de développement de technologies « plus écologiques » de la part des entreprises européennes vers les pays du sud. Finalement, l’engagement au Protocole ouvrait des opportunités politiques et économiques pour l’Europe (Aykut & Dahan, 2015).

Du point de vue environnemental, malgré la ratification du traité par les pays représentants51 au moins

55 % des émissions globales de GES, la planète a assisté à une augmentation de ses émissions par rapport à 1990, l’année de référence (Maljean-Dubois, 2015). Selon un communiqué de presse de l’UNESCO, une étude réalisée par l’Organisation Météorologique Mondiale en 2013 souligne que nous avons subi une augmentation de 34 % des émissions entre les années de 1990 et 2013 (UNESCO, 2013). Un autre aspect contribuant à « l’échec » environnemental du traité portait sur l’exclusion des grands émergents d’un objectif contraignant pour leurs émissions. Il a été observé une augmentation considérable des émissions dans les pays de la Non-Annexe I, comme montre le graphique ci-dessous (Maljean-Dubois & Wemaere, 2015 ; Peters et al, 2012).

49 Emetteur d’environ 36% du total des émissions mondiales à l’époque de la ratification du Traité (Aykut & Dahan, 2015).Selon les données de 2017 du Global Carbon Atlas, la Chine est actuellement en tête du classement. Le pays figure comme le pays le plus émetteurs des émissions de GES dans le monde. Les États-Unis figurent comme le deuxième. ( Global Carbon Atlas, 2019).

50 Le Canada s’est également retiré du traité en 2011.

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Figure 7 : La tendance des émissions de C02 par production des biens et matières premières et consommation entre les pays de l’Annexe I et non-Annexe I entre 1990 et 2010.

Source : Peters et al., 2012.

Malgré la crise de 2008, durant laquelle une légère baisse des émissions de GES dans les pays développés est observable, les pays en développement n’ont pas accompagné cette tendance de réduction des émissions. En réalité, la tendance de ses émissions est à la hausse durant cette période. Il est important de souligner qu’après cette crise, l’augmentation des émissions de GES a perduré au niveau mondial. Voigt et Bohringer (2003) précisent qu’en raison du pouvoir dévolu au marché, le traité n’a pas représenté un encouragement vers des efforts effectifs pour changer les modalités de production et consommation dans les territoires. En réalité, les pays souhaitaient adopter une politique climatique pour des objectifs politiques, sans payer le cout d’une réduction des émissions pouvant menacer leurs processus industriels ni leurs politiques économiques. De telle manière que le pouvoir du Traité s’est restreint au « business as usual » (Voigt & Bohringer, 2003). Autrement dit, le Protocole n’était le vecteur d’aucun changement dans l’exécution et la diffusion des nouvelles technologies. Son attachement au marché a seulement encouragé une logique de transmissions technologiques déjà existante dans le

scénario mondial. Bien qu’il y ait eu une relative stabilisation dans les émissions des pays de l’Annexe I52,

52 La stabilisation des émissions provenant des pays de l’Annexe I s’explique aussi par la globalisation de la production, où plusieurs processus industriels ont été délocalisés vers les pays émergents, mais sans pour autant faire baisser les émissions dans leurs territoires. Un nouvel ordre international de la répartition du travail issu du processus de globalisation économique

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les émissions des pays de la Non-Annexe I ont explosé. Ainsi, contrairement à son objectif initial, la première période d’engagement du Protocole voit une augmentation mondiale des émissions de GES.

« Déjà marginal dans la période 2008-2012, le Protocole n’a plus qu’une portée symbolique dans la

période 2013-2020, puisque les pays engagés dans son cadre ne représentent, comme nous l’avons vu, qu’une part marginale, environ 13 %, et décroissante des émissions mondiales face à l’explosion des

émissions des pays du Sud. » (Maljean-Dubois & Wemaere, 2015 : 157). Un prolongement de

l’engagement du Kyoto a été négocié lors de la COP-18 à Doha en 2012. En l’occurrence, cette deuxième période a été établie afin de ne pas laisser le protocole « mourir » en raison de ses maigres résultats et des failles dans son architecture. Ainsi, la deuxième période n’est l’objet d’aucun changement dans la structure du traité de sorte à ne pas « perturber » les négociations avec les pays en voie de développement (Maljean-Dubois & Wemaere, 2015). Les négociations à Doha ont eu un caractère « pragmatique » puisque la deuxième période d’engagement ne fixe pas d’objectifs de réductions au pays du Sud, malgré le constat d’une augmentation des émissions GES chez eux (Weissenberger, 2012). Le

« Doha Amendment » a été caractérisé comme une phase de transition vers un nouvel accord qui

envisageait une participation mondiale plus conséquente (la participation des États-Unis et du Canada) et l’établissement des objectifs de réductions de GES pour les « grands émergents ».

En revanche, il est intéressant de souligner que, en conséquence de la crise financière de 2008, les prix des crédits du carbone ont plongé (Newell et al, 2013). Cette évolution a affaibli le pouvoir du marché du carbone, ce qui a ainsi été impacté sur la deuxième période d’engagement du Protocole de Kyoto. Le prix des CER provenant des projets MDP est passé d’environ 20 dollars la tonne53 avant 2008, à moins de 10 dollars durant la période de la crise financière (The Economist, 2012). Les incertitudes quant à l’avenir du mécanisme avant le renouvellement de la deuxième période d’engagement du Protocole ont aussi entrainé une baisse de la demande en crédits. Cela a aussi contribué à une chute de leur prix. Un autre argument pouvant expliquer ce déclin continu dans le prix des CER serait le déclin dans la demande en crédits issus des projets MDP résultants d’une restriction du Parquet Climat Énergie de l’Union européenne.

doit être pris en compte dans la question de réduction des émissions territoriales (Roberts & Parks, 2007 ; Aykut & Dahan, 2014).

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Cet organisme appartenant à l’Union européenne a interdit l’achat des crédits CO2 des projets MDP provenant des pays émergents par les pays européens. Cette interdiction concerne seulement les projets ayant commencé à partir la deuxième période d’engagement du Traité, autrement dit, après 2012

(Maljean-Dubois & Wemaere, 2015)54. En effet, cette action vise l’encouragement à l’inclusion des « pays

moins avancés » (PMA) dans le MDP. De ce fait, pour la deuxième période, les pays européens sont assujettis à acheter des crédits provenant seulement des projets MDP mis en œuvre dans les pays plus pauvres de la catégorie de pays « en voie de développement » du Traité. Cela a limité la mise en œuvre de projets par les « grands émergents » (Chine, Inde et Brésil). Cette démarche de l’Union européenne et crée une chute de la demande et de l’offre en crédits, menaçant ainsi l’avenir du MDP (Newell et al, 2013). La figure ci-dessous montre la chute des prix de crédits CO2 du MDP à partir de 2008 ainsi que son déclin continu jusqu’à en 2012.

Figure 8 : La tendance des prix des crédits CO2 dans le cadre du MDP en comparaison aux autres types de marchés de CO255.

Source : Newell et al., 2013.

Malgré la faiblesse financière du MDP dans la deuxième période du Traité56, sa force symbolique initiée

par le Protocole de Kyoto a transmis un message fort : la consolidation de la tendance de l’économisation de l’environnement au sein des politiques climatiques (Voigt & Bohringer, 2003 ; Aykut & Dahan, 2014).

54 Plus précisément, les projets enregistrés jusqu’à 2012 sont éligibles pour la commercialisation des crédits CO2. Cette règle est valable seulement aux projets enregistrés à partir de 2013 (année de début de la deuxième période d’engagement)

55 Marché européen et marché volontaire.

56 La deuxième période d’engagement du Kyoto est marquée par une baisse très importante d’enregistrement des nouveaux projets MDP. Selon les données officielles de la CCNUCC, après l’année de 2013, il y a eu une baisse assez importante d’enregistrement des projets, pouvant arriver à presque zéro en 2016 (UNFCCC, 2018i).

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Ce fut présenté au sein de la gouvernance climatique mondiale comme une promesse de lutter contre le changement climatique en combinant les dimensions écologiques et les exigences de croissance économique. Cependant, c’est l’absence de régulation globale auprès des projets et des pays hébergeurs qui a été frappante dans le fonctionnement du marché du carbone lors de la première période d’engagement du Traité de Kyoto (Aykut & Dahan, 2014a).

1.3.1. L’accord de Paris : un nouvel espoir pour un renouvèlement de l’esprit du MDP ?

En décembre 2015, les pays signataires de la CCNUCC se sont réunis à Paris afin de négocier le nouveau traité qui remplacera les engagements du Protocole de Kyoto à partir de 2020. Ce nouveau traité, intitulé « Accord de Paris », a conservé l’essentiel de la structure du Protocole de Kyoto. En revanche, quelques modifications ont été effectuées sur des aspects défaillants ayant été mis en lumière par des scientifiques et des critiques pendant les deux décennies d’existence du traité. Nous allons discuter ici notamment les aspects relatifs au nouvel « habillage » du MDP dans l’Accord de Paris. Toutefois, il convient au préalable de souligner deux points sur ce nouveau traité.

Le premier consiste dans le fait que, contrairement à celui de Kyoto, l’Accord de Paris reconnait l’augmentation inévitable de la température globale. Il établit des efforts pour que cette augmentation de température ne dépasse pas le seuil de 1,5 et 2° Celsius par rapport aux niveaux préindustriels afin

d’atténuer les risques du phénomène57 (Accord de Paris, 201558). Par conséquent, il reconnait

officiellement que les conséquences du changement climatique existent et affecteront la population mondiale. En reconnaissant ces risques, l’accord encourage la nécessité d’adaptation. Ainsi, au lieu de fixer des objectifs contraignants à chaque pays, l’accord a adopté une nouvelle méthode : « la transparence » associée à l’engagement dans une action globale (Obergasse et al, 2015). Il invite chaque pays à créer une politique nationale afin qu’ils puissent contribuer, à son échelle, à la lutte contre le changement climatique. Chaque pays doit alors communiquer son niveau de contribution à la lutte contre

57 Tandis que le traité de Kyoto se contentait de vouloir réduire les émissions pour chaque pays développé par rapport à l’année 1990.

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le phénomène59. Les résultats de ces contributions devraient être communiqués tous les cinq ans lors

d’une Conférence des Parties (COP). « Instead of legal sanctions, the Paris Agreement relies on a

mechanism of ‘naming and shaming’ to ensure implementation: it creates a reputational risk through the

establishment of mandatory transparency and review provisions.” (Obergassel et al, 2015 : 243).

Le deuxième point consiste dans le fait que le principe de coopération entre les « pays développés » et « pays en développement » reste un principe inchangé dans cette nouvelle politique climatique internationale. Toutefois, les modalités de coopération ont subi quelques modifications. De ce fait, nous revenons à la question de l’avenir du MDP. L’Accord de Paris a ressuscité l’esprit structurel du MDP (Olsen et al, 2018). Cependant, contrairement à l’article 12 du Kyoto, l’Accord ne mentionne pas directement la mise en place d’un marché du carbone entre les « pays développés » et « les pays en voie développement ». Dans les articles 6 et 15, il établit la création d’un mécanisme de coopération afin d’aider les pays en développement à mener des actions d’atténuation des émissions et de promotion du

développement durable. « Il est établi un mécanisme pour contribuer à l’atténuation des émissions de gaz

à effet de serre et promouvoir le développement durable, placé sous l’autorité de la Conférence des Parties agissant comme réunion des Parties au présent Accord, dont il suit les directives, à l’intention des Parties,

qui l’utilisent à titre volontaire. (…) » (Accord de Paris, 2015 : art 6, paragraphe 4).

Ce mécanisme « financier et technologique » (comme mentionnée dans l’Accord) viendrait notamment en aide aux « pays moins avancés ». Cette nouvelle catégorie a été créée afin de résoudre les défaillances du Protocole de Kyoto lorsque ce dernier a instauré une bilaporisation catégorique entre « pays développés » et « pays en voie de développement ». Le manque de nuances dans les catégories et les changements économiques et géopolitiques au fur et à mesure des années ont engendré des problèmes d’équité au sein du MDP comme évoqué précédemment. À part « les responsabilités communes, mais différenciées », l’Accord adopte aussi le principe d’équité associé à ce postulat. En théorie, cela

permettrait les pays plus pauvres de participer à ce nouveau mécanisme. « Les institutions concourant à

l’application du présent Accord, y compris les entités fonctionnelles du Mécanisme financier de la Convention, visent à garantir l’accès effectif aux ressources financières par le biais de procédures d’approbation simplifiée et d’un appui renforcé à la préparation en faveur des pays en développement

59 Les niveaux de contribution n’étant pas figés, lorsqu’un pays parvient à réunir les conditions socio-économiques pour adopter une contribution plus ambitieuse, il doit communiquer à la COP pour ce faire.

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Parties, en particulier des pays les moins avancés et des petits États insulaires en développement, dans le cadre de leurs stratégies et leurs plans nationaux relatifs au climat. » (Accord de Paris, 2015 : article 9, paragraphe 9)

L’autre facette de ce MDP « revisité » serait la promotion du développement durable au cœur de ses modalités d’exécution. Bien que le MDP issu du Protocole de Kyoto vise la promotion du « développement durable », l’évaluation du degré de la contribution du mécanisme à ce type de développement local

n’était pas une dimension importante dans le modus operandi de cet outil (Maljean-Dubois, 2015a). Ainsi,

le nouveau mécanisme serait le produit du retour d’expérience de son prédécesseur (Olsen et al, 2018). De sorte que la renaissance du MDP se ferait sous la forme d’un mécanisme ayant l’évaluation de la notion de développement durable dans son noyau dur et sur le même niveau d’importance que la promotion de la baisse des émissions de GES. Ce nouvel outil envisage de combiner réduction des émissions avec promotion des meilleures conditions socio-économiques à la population locale. Un autre

aspect novateur de ce mécanisme, dont le nom provisoire reste « Sustainable Mitigation Mechanism », est

que sa mise en œuvre ne sera pas 60restreinte seulement aux « pays en développement ». En réalité, le

« SMM » donnera accès à la mise en place des projets à tous les pays signataires de l’Accord (Marcu, 2016 ; Olsen et al, 2018). Le dessin d’un nouveau marché du carbone corrobore l’argument théorique de que le marché reste un choix politique pour résoudre la crise écologique globale. Ainsi, comme Aykut & Dahan (2015) l’ont souligné, nous observons la perpétuation de la victoire de l’approche de l’économisation de l’environnement comme la seule alternative pour transformer l’enjeu environnemental qui touche notre planète.

60 Son cahier de charge est en train d’être dessiné par la CCNUCC. Nous n’avons pas d’informations sur quand les règles de participation à ce nouveau mécanisme d’échange des quotas de CO2 seront publiées.

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CHAPITRE II : LA GOUVERNANCE DU MDP AU BRÉSIL LES REFLETS DES