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La protection de la nature et des paysages en Suisse

CHAPITRE 3. CADRE THÉORIQUE

3.4. La protection de la nature et des paysages en Suisse

Depuis le début du XIXe siècle, l’Europe, et la Suisse en particulier, ont connu une forte diminution tant de la quantité que de la qualité des paysages dits « naturels ». Les Révolutions industrielle et touristique (intimement liées) ont fortement augmenté la pression humaine sur ces espaces. Sont alors nés différentes associations de protection de la nature et des paysages ainsi qu’une foule d’outils légaux et juridiques, de portée nationale et/ou internationale, permettant de conserver ces éléments territoriaux et patrimoniaux.

En Suisse, les premiers efforts de protection de la nature se sont faits autour d’objets ponctuels vers la milieu du XIXe siècle. C’est le domaine du patrimoine géomorphologique qui fut le premier concerné puisque c’est le bloc erratique « Pierre-à-Bot » à Neuchâtel qui bénéficia, le premier, d’une protection en 1838. Par la suite, l’Académie suisse des Sciences lança en 1867 un « appel aux Suisses » pour préserver les blocs erratiques à l’échelle nationale (REYNARD 2004b). Cette approche de protection s’étendit à d’autres objets ponctuels (arbres centenaires ou cascades par exemple) et fut poursuivie jusque dans les années 1960. Avant cela aucune protection

« globale », « intégrale » de la nature n’est imaginée, seuls quelques articles à l’intérieur de certaines lois font référence à des aspects isolés de la protection de la nature.

En 1962, une modification de la Constitution fédérale octroie le droit à la Confédération de légiférer sur la question de la protection de la nature et du paysage (art.24sexies).

Malgré la faiblesse théorique de ce dernier concept, la Confédération adopte en 1965 la Loi sur la protection de la nature et du paysage (LPN : RS 451) (REYNARD ET

GENTIZON, 2003). Un de ses outils majeur est l’Inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels (IFP) entré en vigueur en 1977 (voir pt. 2.5.1). D’autres bases de la protection de la nature et des paysages sont inscrites dans La Loi sur l’aménagement du territoire (LAT : RS 700) entrée en vigueur en 1979.

Finalement, la Loi sur la protection de l’Environnement (LPE : RS 814.01), adoptée en 1983, constitue le troisième pilier de la stratégie helvétique de protection des milieux naturels. Ces derniers sont ainsi protégés sous l’angle de trois domaines principaux : leur entretien, leur aménagement et leur gestion (REYNARD ET GENTIZON, 2003). Dans le cadre de ce travail, nous nous attarderons surtout sur la LPN de laquelle découlent les inventaires paysagers tel que celui réalisé ici (détaillé au pt. 3.5.2). C’est aussi au nom de cette Loi que les géoparcs pourraient être reconnus (voir pt. 3.3.3.) et avec l’un desquels nous collaborerons pour les projets de valorisation géotouristique (pt. 4.2.).

3.4.1. La Loi fédérale sur la protection de la nature et du paysage

Entrée en vigueur le 1er juillet 1966, elle « découle directement de l’article 78 (alinéas 2 à 5) de la Constitution fédérale » (SCHEURER, 2002 : 81). Son but principal est : « de ménager et de protéger l’aspect caractéristique du paysage et des localités, les sites évocateurs du passé, les curiosités naturelles et les monuments du pays, et de promouvoir leur conservation et leur entretien » (art.1 al.1 et a)) et : « de protéger la faune et la flore indigènes, ainsi que leur diversité biologique et leur habitat naturel » (art.1 al.1 et d)23) (SCHEURER, 2002 : 81).

L’outil principal pour appliquer cette loi sont les inventaires fédéraux. Une fiche descriptive et évaluative est réalisée par divers organes (Confédération, cantons, communes, bureaux d’études ou centres de recherches) pour le compte de la Confédération. Les sites qui y sont inscrits sont considérés d’importance nationale et bénéficient d’une protection accrue. Les cantons ou les communes peuvent étayer ces inventaires et en réaliser à leur échelle respective (LEIMBACHER 2001).

Les plus anciens sont basés sur l’article 5 de la LPN, ils relèvent de la compétence de la Confédération et comme le rôle des cantons et des communes ne sont pas bien définis, ils n’ont pas de réelle force contraignante (LEIMBACHER 2001).

Dans le Val de Bagnes, des sites ont été classés dans deux de ces inventaires :

• IFP (Inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels : IFP ; RS 451.11) ;

• ISOS (Inventaire fédéral des sites construits à protéger en Suisse : ISOS ; RS 451.12) (Tableau 4.).

Les inventaires plus récents font eux référence aux articles 18a, 23b et c de la LPN et à l’art.11 de la LChP (Loi fédérale sur la chasse et la protection des mammifères et oiseaux sauvages : RS 922.0). Etablis de façon bien plus détaillée, ils relèvent de tâches partagées entre les cantons et les communes et ont force contraignante à tous les niveaux institutionnels (LEIMBACHER 2001). Malgré tout, les objectifs de protection des sites : une définition claire des droits et des interdictions liés aux sites protégés, sont souvent lacunaires. La nature des sites est mal connue ou mal décrite et la protection ou la conservation de l’objet inventorié est alors difficile (LEIMBACHER 2001).

23En vigueur depuis le 1er janv. 2004 (RS 814.91)

Dans le Val de Bagnes, on retrouve :

• un District Franc fédéral qui relève de l’article 11 de la LChP ;

ainsi que des sites classés dans des inventaires relevant de l’art. 18a de la LPN :

• Ordonnance sur la protection des zones alluviales d’importance nationale (OZA ; RS 451.31) ;

• Ordonnance sur la protection des hauts-marais et des marais de transition d’importance nationale (OHM ; RS 451.32) ;

• Ordonnance sur la protection des bas-marais d’importance nationale (OBM ; RS 451.33) et

• Inventaire des prairies et pâturages secs de Suisse (OPPS).

Le Tableau 4. résume ces différents classements et associe les géotopes du présent inventaire aux sites classés au niveau fédéral dans le Val de Bagnes.

Inventaire fédéral

Bruson village Terrasse de Bruson BAGgla002 Le Châble Trâce de la débâcle du 1168 Corbassière Système glaciaire de

Corbassière BAGgla010

1167 Petit Combin Marge proglaciaire du Petit

Combin BAGgla009 géotopes du présent inventaire associés (Inspiré de FOURNIER 2007).

3.4.2. La protection de la nature et des paysages sur le plan cantonal

D’un point de vue législatif, la protection de la nature dans le canton du Valais est classée dans le chapitre Ecole – Science – Culture. Il existe une loi principale : la Loi sur la protection de la nature, du paysage et des sites du 13 novembre 1998 (451.1) et une ordonnance : l’Ordonnance sur la protection de la nature, du paysage et des sites (OcPN) du 20 septembre 2000 (451.100), qui régulent ce domaine au niveau cantonal (CANTON DU VALAIS).

24 A fait l’objet d’une « Décision de protection » du canton du Valais (www.vs.ch).

Cette loi a pour but de : « protéger et de permettre la mise en valeur de la diversité et de la richesse du patrimoine naturel, architectural et archéologique du canton. […] Les bases naturelles de la vie humaine, animale et végétale seront ainsi protégées, et la beauté et les particularités de la nature, du paysage et des sites préservées. » (CANTON DU VALAIS). Techniquement, elle complète la législation fédérale sur la protection de la nature, du paysage, des sites bâtis, des monuments historiques et du patrimoine archéologique et en assure également l'exécution.

D’un point de vue de l’aménagement du territoire (AT), deux des chapitres de la loi d’application de la législation fédérale en la matière nous concernent tout particulièrement. Il s’agit du chapitre D « Tourisme et Loisirs » et du chapitre F

« Nature, Paysage et Forêt » des objectifs de l’AT. du canton . Dans le premier, il est précisé aux points D.1 et D.2 que le tourisme doit s’orienter vers un tourisme qualitatif (plutôt que quantitatif) et que les zones naturelles doivent être exploitées de manière extensive (CANTON DU VALAIS). Le point D.3 renforce cette vision et précise qu’il faut :

« Renforcer le tourisme extensif en veillant à la sauvegarde et à la mise en valeur accrue des sites, des monuments historiques, des objets naturels, ainsi que des paysages naturels et culturels ». Au point F « Nature, Paysage et Forêt », les objectifs de l’AT.

cantonal sont de préserver les surfaces naturelles (biotopes, flore et faune) mais surtout de : « Respecter la diversité et les éléments structurants du paysage naturel et culturel » (points F.1, 2 et 4 ; CANTON DU VALAIS).

Ainsi, certains objectifs que nous nous sommes fixés dans le présent inventaire tels que la préservation de la géodiversité et sa mise en valeur géotouristique s’inscrivent parfaitement dans les objectifs législatifs tant de la protection de la nature que de l’aménagement du territoire du canton du Valais. On peut même considérer que ce dernier relève l’importance des géomorphosites dans le patrimoine valaisan.