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CHAPITRE 3. CADRE THÉORIQUE

3.1. Géomorphologie, géoconservation et géotourisme : quelles relations ?

3.2.1. Définitions et concept:

Etymologiquement, le géotope est « un lieu de la terre », venant du grec : «gê» = terre et

«topos» = lieu (KOZLIK 2006). Dans sa version la plus simple, ce terme, encore relativement méconnu, désigne dans le contexte des Sciences de la Terre « des objets géologiques ou géomorphologiques présentant une valeur scientifique intéressante pour la compréhension de l’histoire de la Terre, des espèces et du climat » (GRANDGIRARD

1997, 1999).

Cette définition restrictive a été proposée dans le rapport stratégique sur les géotopes en Suisse par STRASSER ET AL. (1995) qui la complètent ainsi : « Les géotopes sont des portions de territoire dotées d’une valeur pour les sciences de la Terre. Ce terme comprend donc des montagnes, des collines, des vallées, des vallums morainiques, des ravins, des grottes, des phénomènes karstiques, des berges et rivages, des carrières, des gravières, des mines, des portions de routes ou de chemins ou des blocs erratiques, des sites qui apportent des informations indiscutables et caractéristiques sur une situation ou un évènement que la Terre a connu au cours des temps géologiques ou sur l’histoire de la vie et du climat. Les géotopes permettent de comprendre l’évolution spatio-temporelle d’une région, la signification de processus superficiels et l’importance des roches en tant qu’élément de l’édification du paysage. Les géotopes, dans ce sens, sont des monuments naturels d’une grande importance, voire même indispensables, aussi bien pour le public que pour la science ».

Certains auteurs ont quant à eux adopté une définition plus large selon laquelle peut être considéré comme géotope « tout objet géologique ou géomorphologique présentant une certaine valeur, qu’elle soit scientifique, historico-culturelle, esthétique ou encore socio-économique » (PANIZZA & PIACENTE, 2003, REYNARD 2004, KOZLIK 2006). géo(morpho)logiques existants, tous ne sont pas des géotopes, il faut pour ceci que ces objets aient une certaine valeur. En outre, ces deux définitions ne sont pas exclusives, il s’agit d’employer l’une ou l’autre selon le travail que l’on veut réaliser. Ainsi, la définition restrictive correspond mieux à un travail de protection de géotopes ; c’est en effet principalement sur la valeur géoscientifique d’un géotope que des mesures de protection seront prises (REYNARD, 2004, CORATZA & GIUSTI 2005).

Par contre, lors de travaux de valorisation de sites d’importance, dans un contexte touristique par exemple, on utilisera plutôt la définition large qui permet d’intégrer l’idée que le patrimoine géologique ou géomorphologique fait partie intégrante du patrimoine culturel au sens large défini par PANIZZA & PIACENTE (2004) et qui en définitive indique la valeur touristique d’un site (PRALONG 2006).

Dans le cadre de ce mémoire, c’est cette deuxième définition « large » qui sera utilisée car elle correspond mieux aux objectifs de travail (voir pt. 1.2) et c’est également elle qui est utilisée dans la méthode d’évaluation développée par l’IGUL et employée ici sauf en ce qui concerne l’évaluation purement scientifique (intégrité, rareté, représentativité et importance paléogéographique) pour laquelle la définition restrictive est suffisante (REYNARD ET AL. 2007). Toutefois, comme nous ne nous limitons pas à cette seule évaluation scientifique dans le cadre du présent travail, la définition « large » nous permet d’englober les autres critères pertinents au reste de l’évaluation.

REYNARD (2004) précise encore qu’il n’existe pas de taille standard pour les géotopes, ni de taille minimale ou maximale, certains sont ponctuels et d’autres plus vastes (respectivement un bloc erratique et un glacier rocheux par exemple) mais ils doivent être bien délimités dans l’espace et se distinguer des secteurs environnants.

On peut encore caractériser un géotope par le fait qu’il soit en lien avec les processus et les conditions géo(morpho)logiques et climatiques responsables de sa formation : géotope actif, ou que ce lien n’existe plus : géotope passif. Finalement il existe des géotopes naturels et des géotopes crées par les activités humaines appelés artificiels.

REYNARD (2004) propose une typologie en dix grandes catégories des géotopes qui est basée sur la constatation de GRANDGIRARD (1999) qui estime que l’on peut distinguer autant de types de géotopes que de sous disciplines des sciences de la Terre (Tableau 3.)

TYPES DE

GEOTOPES BREVE DESCRIPTION

Structuraux Surtout des objets géologiques de grandes tailles : plis, anticlinaux, synclinaux, failles, chevauchements, etc. Ces structures sont taillées, façonnées par l’érosion.

Paléontologiques

Affleurements rocheux contenant des fossiles et gisements de fossiles dans des terrains meubles, des milieux anaérobies (marais, tourbières) ou la glace (pergélisol). Grand importance pour la reconstitution de l’histoire de la Vie : éléments fossilisés (restes d’animaux, de végétaux), empreintes (dinosaures par exemple) et paléosols.

Sédimentologiques

Sites dans lesquels on peut observer les conditions typiques d’un milieu de sédimentation ((péri)glaciaire, fluviatile, éolien, lacustre, etc.). Géotopes actifs où sont visibles les processus de sédimentation en action (zones alluviales, sandurs, cônes torrentiels) ou passifs (rôle d’archives).

Minéralogiques, pétrographiques et

géochimiques

Englobent les géotopes minéralifères et/ou métallifères, les localités-types de certaines pétrographies de roches et de lieux où on été mesurés des indices géochimiques particuliers, ainsi que les roches présentant un intérêt particulier.

Stratigraphiques

Affleurements présentant un profil type pour un âge géologique donné (stratotype), un faciès, une succession stratographique ou une transition paléoenvironnementale (i.e. transition glaciaire-interglaciaire). Affleurements rocheux ou dans des sédiments meubles quaternaires (formations superficielles).

Hydro(géo)logiques

Sites formés par l’écoulement particulier des eaux de surface et/ou souterraines et où l’eau est l’élément dominant de la dynamique et des caractéristiques physico-chimique : sources thermales, minérales et karstiques par exemple.

Spéléologiques

Cavités (grottes et gouffres) et réseaux souterrains présentant une valeur scientifique, écologique ou historique particulière.

Souvent recoupés ou en liaison avec des géotopes géomorphologiques (karst superficiel) ou hydro(géo)logiques (pertes, sources).

Géohistoriques Aussi bien des sites de découvertes clés dans l’histoire des sciences de la Terre que des lieux historiques d’exploitation des ressources géologiques. d’éboulis) et les processus d’érosion et/ou de sédimentation qui en sont à l’origine (marges proglaciaires, action physico-géo-chimique de l’eau, laves torrentielles). Formations superficielles meubles du Quaternaire (moraines, glaciers rocheux) et formes d’érosion dans la roche (marmites glaciaires, lapiés d’un karst superficiel).

Tableau 3. : Typologie des géotopes dans le domaine des sciences de la Terre (Tiré et modifié de Reynard 2004).