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Chapitre 1 Génération du plasma par effet piézoélectrique

1.4 La piézoélectricité pour la génération des décharges plasma

1.4.1 Piézoélectricité et propriétés des céramiques

1.4.1.3 Propriétés ferroélectriques pour le plasma

Dans le cadre de la génération du plasma, les propriétés particulières telles que l’émissivité électronique que possèdent les matériaux ferroélectriques suscitent l’intérêt de plusieurs chercheurs, d’où l’intérêt de les aborder. Même si l’idée dans cette partie n’est pas d’expliquer finement ces mécanismes, une brève synthèse permet d’expliciter ces effets.

Les propriétés ferroélectriques des PZT ont fait l’objet de plusieurs études de- puis maintenant une cinquantaine d’année, notamment pour leur aptitude à favori- ser l’émission électronique ferroélectrique (FEE) pouvant potentiellement partici- per à l’amorçage du plasma et ainsi contribuer dans la conception des générateurs dits sources plasmas ferroélectriques (FPS). Pour comprendre l’effet de la FEE, il est bon de rappeler le principe physique de l’émissivité électronique et de la comparer avec un diélectrique classique.

Dans un matériau quelconque, le déplacement des charges s’effectue sur des bandes dites de conduction dépendantes de la structure cristalline de celui-ci. Les électrons de cette bande d’énergie ne sont en moyenne soumis à aucune force, du fait de l’attraction des ions qui sont régulièrement répartis dans le cristal. En se rapprochant de la surface, cette répartition n’est plus homogène ce qui conduit à une rétention des électrons aux frontières du domaine, ce qui donne naissance à des charges de surfaces. Ceci implique l’apparition d’un champ électrique orienté vers l’extérieur du matériau, qualifié par le terme « barrière de potentiel ». Cette barrière est définie suivant une fonction de travail de sortie (𝜒 = 𝑞𝑉𝑚), qui n’est franchis-

sable que par un apport d’énergie suffisamment important pour provoquer une émission électronique, Figure 1.11.

Figure 1.11. Illustartion de l’émission électronique et de la fonction de travail dans un diélectrique classique (a) et dans matériau ferroélectrique (b) [64]

Pour un matériau diélectrique classique, le franchissement de cette barrière de potentiel nécessite l’utilisation d’une source d’énergie extérieure pour exciter la surface de celui-ci soit par effet thermique (émission thermoïnique), par effet élec- tronique (émission secondaire) ou encore par effet de champ électrique. En ce qui concerne les matériaux ferroélectriques, la bande de conduction et la répartition homogène des ions ne sont pas différentes d’un autre matériau. Ils peuvent être représentés sous forme de mono-domaines, équivalents chacun à un dipôle élec- trique dont l’ensemble, orienté dans le même sens, donne naissance à un champ de polarisation. Cependant, ce qui distingue leur émission électronique réside dans le degré de séparation des charges. En effet, la distribution non-homogène de polari- sation qui subsiste à proximité de la surface crée un champ de dépolarisation et un déséquilibre des charges locales, qui doit être compensé pour respecter l’état d’équilibre dans cette zone [64]. Ainsi, il est admis qu’au niveau de la surface, les charges de polarisation sont compensées par des charges appelées « charges

écrans » qui permettent un état de polarisation stable. La présence de ces charges sera conséquente sur la fonction de travail selon les deux surfaces polarisées positi- vement ou négativement, ainsi que sur les niveaux de densité de courant et l’émission électronique. Finalement, un écart de la polarisation rémanente au sein du milieu conduit à une rupture de l’état d’équilibre des charges à la surface et provoque ainsi l’apparition d’un champ électrostatique conduisant à une émission électronique.

Alors que l’émission électronique dans un matériau classique est due à des changements dans le sous-système électronique du solide (modification de la fonc- tion de travail, effet tunnel dans la barrière de potentiel, etc.) et n’implique aucune modification de la structure, il est pensé que celle-ci soit liée à des interactions dans le réseau cristallin dues à la polarisation rémanente dans le matériau ferroélec- trique.

Les premières observations de ce phénomène remontent aux années 1974 – 1980 et sont attribuées à B. Resenblum [65] et G. I. Rosenman [66] qui ont provoqués une FEE par effet pyroélectrique (modification de la température du matériau) et par effet piézoélectrique (application d’une contrainte mécanique). Depuis, plusieurs autres moyens de provoquer le déséquilibre de charges et ainsi obtenir cette émis- sion sont utilisés [67], [68], à savoir, l’application d’un champ électrique externe pour inverser la polarisation rémanente ou une modification drastique de la tempé- rature conduisant à une transition forcée de la phase du matériau.

À l’issue de ces travaux, les deux catégories principales d’émission FEE identi- fiées dont les suivantes :

Emission électronique faible : observée uniquement dans les phases ferroé- lectriques du matériau, elle est générée grâce à la déviation de la polari- sation rémanente autour de son état d’équilibre initial en présence de charges écrans. Elle est caractérisée par une intensité de champ n’excédant pas 3×106 V/cm et une densité de courant d’émission élec-

tronique de l’ordre de 10-14 jusqu’à 10-9 A/cm2, quel que soit la sollicita-

tion. L’énergie électronique peut atteindre les 105 eV sans nécessité de

source de tension externe.

Emission électronique forte : découverte en 1989 par Gundel et al. [69], elle nécessite la présence d’une électrode partielle (ou segmentée) à la sur- face du matériau. Son activation se fait principalement au moyen de l’application d’un champ électrique pulsé de l’ordre de quelques kV entre les électrodes. Les observations expérimentales ont ainsi montré que ce type d’émission électronique apparaît aux zones non couvertes de la surface. Grace à cette configuration, des densités de courant avoisi- nant les 102 voire 105 A/cm2 ont pu être observées, justifiées soit par les

propriétés spécifiques des matériaux ferroélectriques (transition de phase forcée, inversion de la polarisation), soit par l’apparition d’un plasma en surface qui « assiste » cette émission.

En termes d’application des matériaux ferroélectriques pour le plasma, ces pro- priétés ont été exploitées pour la mise en œuvre de plusieurs dispositifs, notam- ment les diodes à cathode ferroélectrique assisté par plasma [36], [70], écran plat émissif ferroélectrique, etc. Les travaux menés par D. L. Sullivan et al. [71] sur une source plasma ferroélectrique opérant à pression atmosphérique ont montré l’apport de l’effet piézoélectrique favorisant la génération d’une décharge excité par une source RF, dans une configuration similaire à celle favorisant l’émission ferroé- lectrique forte. B. T. Hutsel et al. [72] ont également soulignés le couplage intéres- sant de l’utilisation des propriétés piézoélectriques dans un dispositif de généra- tion du plasma utilisant des céramiques ferroélectriques.

Ainsi, du fait de l’apport de ce type de matériaux qui s’avère favorable à la gé- nération du plasma, la partie suivante aborde une approche tout à fait innovante pour la mise en œuvre de dispositifs piézoélectriques pour l’allumage des dé- charges plasma.