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Chapitre 1 Génération du plasma par effet piézoélectrique

1.3 Le plasma pour des applications biomédicales

1.3.1 Les plasmas hors-équilibre thermodynamique

Le plasma a été identifié par William Crookes en 1879. Environ 99% de l'univers visible est constitué de plasma, appelé le quatrième état de la matière en plus des états liquides, gazeux et solides. Il s’agit d’un gaz partiellement ionisé avec des ions, des électrons et des particules non chargées telles que des atomes, des molé- cules et des radicaux. Les plasmas les plus communément utilisés lors des re- cherches sur la décontamination et désinfection sont ceux que l’on appelle les plasmas froids, en référence à leur température globale et leur faible taux d’ionisation. Leurs particules (radicaux, ions) possèdent des températures beau- coup plus basses que celles des électrons d’énergie moyenne, environ dix fois infé- rieures. Aux pressions types d’environ 10 mbar, les plasmas froids sont caractérisés par une énergie électronique moyenne comprise entre de 1 et 5 eV.

Les électrons sont indispensables à la formation et l’entretien des plasmas, ils sont notamment à l’origine des ruptures de liaisons des espèces initialement stables, en permettant d’élever suffisamment le niveau énergétique des molécules provoquant la formation d’ions et de radicaux.

Le processus de transmission énergétique par collision permet des rendements énergétiques de bonne qualité, et limite les pertes d’énergie sous forme de chaleur. Ceci permet de s’affranchir des problèmes liés au refroidissement, et permet l’utilisation de chambres de décharge assez simples en verre (typiquement du Py- rex) ou en métal.

En règle générale, la température du gaz de décharge augmente avec la pression et suivant la nature du gaz, pouvant atteindre quelques centaines de degrés à pres- sion atmosphérique. Cependant, suivant le moyen de génération, notamment au moyen de champs électriques pulsés, la température des gaz en décharge peut être équivalente à la température ambiante.

La stérilisation à faible température par exposition directe au plasma est sou- vent obtenue par l’utilisation d’un champ électrique [8]. Dans la partie suivante, les moyens les plus couramment utilisés pour la génération de ce type de plasma sont présentés.

1.3.2 Sources et procédés de génération

La génération d’un plasma froid utilise la décomposition électrique d'un gaz neutre, en présence d'un champ électrique externe. Les porteurs de charge accélérés dans le champ électrique couplent leur énergie dans le plasma via des collisions avec d'autres particules. Les électrons conservent la plus grande partie de leur énergie dans les collisions élastiques avec les atomes et les molécules en raison de leur petite masse et transfèrent leur énergie principalement dans les collisions iné- lastiques. Les rejets sont classés en décharges en courant continu ou courant alter- natif, radioélectriques ou pulsées, sur la base du comportement temporel du champ électrique de maintien et en décharges micro-ondes. La génération du plasma au moyen des décharges à barrières diélectriques (DBD) ainsi que la méthode tendan- cielle utilisant des jets de plasmas atmosphériques seront également abordées. Les caractéristiques spatiales et temporelles du plasma dépendent bien entendu de l'application particulière à laquelle le plasma sera destiné.

1.3.2.1 Décharges à barrières diélectriques

En 1857, W. Von Siemens a été le premier à mener des expériences sur les dé- charges à barrières diélectriques (DBD) [9]. Pouvant fonctionner à des pressions allant jusqu’à l’atmosphérique et en courant alternatif comme en courant continu, il utilisait ce type de décharge pour la production d'ozone à partir de l'air ou de l'oxygène. Aujourd'hui, ces dispositifs évoluent dans plusieurs domaines d’applications comme la stérilisation des tissus vivants, l'inactivation des bactéries, le traitement de surface et la formation des excimères [10]–[14].

La cellule d’une DBD est constituée de deux électrodes métalliques, souvent plates, séparées par un matériau diélectrique. Entre les deux se déplace un gaz por- teur, lequel sera ionisé sous l’application d’un champ électrique suffisamment im- portant pour générer un plasma. De ce fait, la première électrode est soumise à une haute tension tandis que l’autre est mise à la terre. Des alimentations HT permet- tent la génération d’une tension allant de 1 à 100kV à des fréquences de l’ordre de quelques kHz, nécessaires à l’allumage et au maintien de la décharge pour une

énergie comprise entre 10 et 100 W [15]–[17]. À partir du principe de fonctionne- ment de base, plusieurs configurations des électrodes sont proposées dans littéra- ture. Dans certains cas, les électrodes plates sont remplacées par des électrodes cy- lindriques, ou parfois le matériau diélectrique ne recouvre qu'une seule électrode au lieu des deux.

Plus récemment, Fridman et al. [18] ont développé une DBD à électrode flot- tante (FE-DBD). Similaire à la configuration précédente, elle se compose de deux électrodes : une électrode haute tension isolée et une électrode dite active, ce qui signifie que celle-ci n’est plus une électrode métallique mise à la terre mais peut être une peau humaine, un échantillon ou même un organe.

L'électrode alimentée (HT) doit alors être assez proche de la surface à traiter (distance < 3 mm) pour créer la décharge. Ce dispositif a été utilisé dans la stérilisa- tion des tissus vivants ainsi que dans la désactivation des bactéries Bacillus stratos-

phericus [19]–[21], Figure 1.1. Des jets plasma à même vocation utilisant une confi-

guration DBD ont également été développés [22], [23].

a b

Figure 1.1. Configuration d’une DBD classique (a) et d’une DBD à électrode flottante (b) destinée à la stérilisation des tissus vivants [19]–[21]

1.3.2.2 Jets de plasma atmosphérique Jets de plasma radiofréquence

Un des jets plasmas largement utilisés pour la stérilisation bactérienne est le jet plasma à pression atmosphérique dit APPJ pour Atmospheric Pressure Plasma Jet [24]. Ce dispositif se compose de deux électrodes coaxiales entre lesquelles un gaz composé d’un mélange d'hélium et d'oxygène, s'écoule à un débit élevé. L'électrode extérieure est mise à la masse tandis qu'une puissance de radiofréquence (RF de 50 à 100 W) à environ 13,56 MHz est appliquée à l'électrode centrale, ce qui permet la génération d’une décharge. Les espèces réactives produites sortent de la buse à grande vitesse et sont exposées à la zone à traiter. Ce type de jet a fait l’objet de plu- sieurs recherches pour l'inactivation de plusieurs micro-organismes [7], [12], [25], [26].

Le premier jet plasma froid radiofréquence a été introduit par Koinuma et al. [27] en 1992. La cathode est constituée d’une électrode aiguille en tungstène ou en acier inoxydable avec un diamètre de 1 mm, connectée à une source RF (typique- ment 13,56 MHz). Celle-ci est placée dans un tube en quartz, tandis que l'électrode anode est mise à la terre. Selon l'application, de l'hélium ou de l'argon ont été mé- langés avec divers gaz. En 2002, Stoffels et al. ont développé un jet de plasma at- mosphérique miniature qu'ils ont appelé Plasma Needle [28] puis une version amé- liorée en 2004 [29]. La micro décharge plasma est générée lorsque la puissance RF à 13,05 MHz comprise entre 10 mW et plusieurs watts est appliquée à l'aiguille. Sa petite taille lui permet d'être utilisée pour traiter de petites zones où la précision est requise comme en dentisterie ainsi que pour les traitements de bactéries de type E.

Coli [30]–[32]. Une illustration des deux dispositifs est donnée sur la Figure 1.2.

a b

Figure 1.2. Configuration du jet plasma RF atmosphérique (a) [27] et du Plasma Needle RF (b) [29]

Jets de plasma pulsé à courant continu pulsé

Laroussi et al. sont parmi les premiers à développer un jet plasma miniature qu'ils ont appelé Plasma Pencil [33], [34]. Ce dispositif se compose d'un tube cylin- drique diélectrique de 2,5 cm de diamètre où deux électrodes cylindriques de même diamètre que le tube sont insérées. Les deux électrodes sont séparées par un inters- tice (la distance peut varier de 0,3 à 1 cm) et consistent en un anneau de cuivre fin attaché à un disque diélectrique. Pour créer le plasma, des impulsions de haute ten- sion inférieures à la µs sont appliquées entre les deux électrodes tandis que le gaz plasmagène (He, He-O2) est injecté à travers les trous des électrodes. Lorsque la

décharge est allumée, le jet plasma froid se propage à travers le trou de l'électrode externe dans l'air ou dans l’hélium, comme dans [35]. Un générateur d’impulsions haute tension, alimenté par une source HT continue, permet l’alimentation des élec- trodes. Ce stylet plasma a été utilisé principalement pour traitement des bactéries E.

Entrée flux de gaz

HT

Figure 1.3. Schéma du dispositif Plasma Pencil développé par Laroussi et al.

Ainsi, les sources de plasma citées ci-dessus présentent quelques inconvénients majeurs soit de par leur nécessité d’utiliser des générateurs de hautes tensions et donc transformateurs HT ou bien des générateurs RF dans la gamme des MHz, voire des GHz. De plus, pour des raisons de faisabilité et sécurité, notamment pour éviter l’exposition de l’utilisateur à des tensions élevées, l'alimentation haute ten- sion et le dispositif de génération de plasma sont souvent conçus dans équipements séparés pour la plupart des sources précédemment citées. Ces solutions sont donc souvent encombrantes et volumineuses. Toutefois, l’environnement d’aujourd’hui exige des dispositifs de haute performance pour la génération des plasmas froids, qui seront compacts, légers et facile à manipuler. C’est ce besoin d’innovation qui alimente la quête vers de nouvelles sources de génération. Une des solutions en vogue depuis maintenant quelques années, consiste en l’utilisation des matériaux ferroélectriques et de tirer profit particulièrement de leur effet piézoélectrique, du fait des avantages apportés par leurs propriétés intrinsèques dans le cadre de la génération du plasma. Ainsi, dans la partie suivante nous nous intéressons au fonc- tionnement du générateur plasma piézoélectrique, en exposant ses propriétés fonc- tionnelles du microscopique au macroscopique.