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4.6 Propriétés des composites lin et carbone

4.6.4 Propriétés d’amortissement

4.6.4.1 Méthodes de mesure de l’amortissement

L’amortissement mécanique est défini comme le phénomène de dissipation d’énergie dans un ma- tériau. Ce facteur est une caractéristique importante du comportement dynamique du matériau. Cette dissipation d’énergie peut être attribuée à plusieurs phénomènes tels que les frottements internes (frotte- ments dans le matériau), les frottements externes comme la résistance de l’air, les frottements visqueux, etc.

(a) Vue de devant (face impactée) (b) Vue de derrière (c) Vue de profil

FIGURE4.22 – Modes de rupture observés après les essais de choc pour les séquences non-hybrides : la

première ligne est relative au composite carbone et la seconde au composite lin

(a) Point d’impact du composite carbone (b) Point d’impact du composite lin

(c) Zoom sur la tranche des éprouvettes carbone (d) Zoom sur la tranche des éprouvettes lin FIGURE4.23 – Mécanismes d’endommagement des éprouvettes composites carbone et lin

Le facteur de perte ou cœfficient d’amortissement, souvent noté η, est le paramètre couramment utilisé pour caractériser l’amortissement d’un matériau. Dans la littérature, il existe plusieurs méthodes d’identification de ce paramètre. Celles qui sont le plus souvent utilisées seront énumérées dans les sections suivantes [54].

— La méthode -3dB

Avec cette méthode, il faut se servir de la courbe de la fonction de réponse en fréquence pour déterminer l’amortissement du matériau. En réalité, le facteur de perte est dépendant de la largeur de la bande de fréquence prise à -3dB du pic de fréquence. Le facteur de perte est donné par la relation 4.22 :

η= f2− f1

f0 (4.22)

où f0est la fréquence de résonance et, f1et f2sont les fréquences correspondant aux abscisses des

points d’intersection de la droite horizontale Amax− 3dB avec la courbe de la fonction de réponse.

La figure 4.26, donnée dans la section 4.6.4.2, illustre parfaitement cette méthode. — La méthode du facteur d’amplification

Ici également, on peut obtenir le facteur de perte connaissant la courbe de réponse en fréquence. En réalité, il se déduit du facteur d’amplification dynamique Q. Le facteur d’amplification dynamique est exprimé comme suit (relation 4.23) :

Q=

s 1+η2

η (4.23)

— La méthode du décrément logarithmique

Cette méthode consiste à mesurer la décroissance logarithmique de la réponse du système dans le domaine temporel (figure 4.24). L’équation 4.24 donne l’expression du décrément en fonction de l’amortissement. δ = 1 mln xn xn+m (4.24) avec : — δ : le décrément logarithmique ;

— n : le numéro de pseudo-période choisi ;

— m : le nombre de pseudo-périodes considérées dans le calcul du décrément. — La méthode énergétique

La méthode énergétique s’appuie sur la quantité d’énergie dissipée dans la structure au cours du mouvement. Dans le cas présent, on considère qu’on peut exprimer en fonction de l’amortissement et de l’énergie emmagasinée de chaque élément de la structure le cœfficient d’amortissement d’une structure donnée (relation 4.25).

η= n ∑ i=1ηiUi n ∑ i=1Ui (4.25)

FIGURE4.24 – Courbe montrant la décroissance de la réponse d’un système pseudopériodique [54]

4.6.4.2 Évaluation des propriétés dynamiques des poutres

L’étude de la réponse du matériau suite à une excitation donnée permet d’analyser expérimentalement son comportement modal. Il est ainsi possible de connaître la réponse vibratoire du matériau en lui appliquant une excitation ponctuelle à l’aide d’un marteau d’impact. Cette analyse modale peut être réalisée en un point ou en plusieurs points de la poutre. On peut aussi déterminer cette réponse vibratoire en faisant un balayage d’une plage de fréquences au travers d’un pot vibrant.

Les caractéristiques dynamiques du matériau sont ensuite déduites de la réponse temporelle du ma- tériau ou à partir d’une fonction de réponse en fréquence.

L’analyse vibratoire expérimentale a été réalisée sur des poutres en configuration encastrée-libre. Tous les modes de vibration exploités dans le cadre de cette étude sont des modes de flexion. Une analyse numérique a été réalisée avec un logiciel d’éléments finis pour vérifier effectivement la nature des modes de vibrations (flexion ou torsion), en comparant les valeurs de fréquence obtenues par le calcul avec les valeurs expérimentales.

Pour chacun des stratifiés, quatre tests ont été réalisés dont nous avons récupéré en sortie l’évolution de l’amplitude en fonction de la fréquence. Un exemple de fonction de réponse en fréquence est montrée sur la figure 4.25. Une bonne répétabilité a été observée pour les essais. Le coefficient d’amortissement retenu ici est la moyenne des coefficients calculés pour tous les essais relativement aux premiers modes de vibration.

En raison de sa simplicité, nous avons dans le cadre de ce travail, utilisé la méthode -3dB, pour identifier les cœfficients d’amortissement des différents stratifiés en nous basant sur leurs réponses fré- quentielles. Les valeurs fréquentielles correspondant aux pics de résonance sont les fréquences propres du matériau. Les coefficients d’amortissement ou facteurs de perte sont obtenus à partir de ces fréquences propres grâce à cette méthode (figure 4.26).

4.6.4.3 Analyse des résultats

La figure 4.27 présente l’évolution du cœfficient d’amortissement des composites lin et carbone en fonction de la fréquence. Ce résultat montre une augmentation des cœfficients d’amortissement avec la fréquence. De plus, on remarque que les cœfficients d’amortissement pour le stratifié lin[LLLL]s, sont nettement plus élevés que ceux du stratifié carbone, [CCCC]s. Le stratifié lin affiche alors le meilleur

0

500

1000

1500

2000

Fréquence (Hz)

-80

-60

-40

-20

0

20

Amplitude (dB)

essai 1

essai 2

essai 3

essai 4

FIGURE4.25 – Exemple d’une fonction de réponse en fréquence. Bonne répétabilité des essais

(a) 0 500 1000 1500 2000 2500 Fréquence (Hz) -80 -60 -40 -20 0 20 Amplitude (dB) (b)

FIGURE4.26 – Méthode -3dB pour la détermination du cœfficient d’amortissement appliquée à un mode

pouvoir amortissant. Ce constat est en adéquation avec plusieurs travaux de la littérature [190–193]. Les écarts observés entre les facteurs de perte entre composite lin et composite carbone peuvent être liés, à différentes échelles, à divers facteurs. Ces facteurs sont le caractère viscoélastique des fibres de lin, l’architecture des fibres de lin, à l’interface entre les fibres ainsi qu’à l’interface fibres/matrice [6, 190– 192, 194].

— À l’échelle de la fibre

Duc et al. [195] ont montré dans leurs travaux que ces différences sont principalement attribuées à la structure morphologique des fibres de lin. En réalité, la structure de la fibre de lin favorise mieux la dissipation d’énergie que celle de la fibre de carbone. Cette dissipation d’énergie s’effectue d’une part par le frottement de la paroi intra-cellulaire entre la cellulose et l’hémicellulose. Ces deux éléments structuraux sont contenus dans la couche S2 de la fibre de lin tel que nous l’avons vu au chapitre 1. D’autre part, la dissipation d’énergie est dû aussi au frottement entre les parois cellulaires.

— À l’échelle du fil

Les fibres unitaires de lin ne sont pas toutes parfaitement séparées. Ces fibres, dans notre cas, sont assemblées en fils, au sein desquels la résine peut avoir du mal à s’infiltrer durant la mise en œuvre du composite. Ces zones non ou mal imprégnées créent des mécanismes de friction entre les fibres formant le fil.

— À l’échelle du composite

Le problème d’adhésion entre fibres de lin et la matrice peut favoriser la dissipation d’énergie dans les composites lin. En effet, des frottements peuvent avoir lieu au niveau des microfissures laissées par cette mauvaise adhésion interfaciale. Ce mécanisme contribue à l’amélioration de l’amortissement.

— L’architecture du tissu de lin

Les paramètres de fabrication des tissus tels que l’angle de torsion des fils et l’ondulation des mèches ont une importante influence sur le mécanisme de dissipation d’énergie à l’intérieur du matériau composite [190]. La torsion des fils du tissu toile et l’ondulation que présentent ses mèches provoquent une baisse de rigidité dans le plan du composite lin comparativement au composite carbone où les tissus ont une structure plus redressée et plate. Une quantité importante d’énergie se dissipe par frottement entre les mèches et les fils du renfort toile. Cette dissipation d’énergie explique l’amélioration de l’amortissement du composite lin.

Le tableau 4.11 montre les valeurs des fréquences et des cœfficients d’amortissement associés aux modes de vibration des composite de carbone et de lin. Les fréquences propres du composite lin sont 10,45 à 12 % inférieures à celles du composite carbone. Ce résultat semble logique parce que la fréquence propre est proportionnelle à la rigidité du matériau. Par ailleurs, ses cœfficients d’amortissement sont 283,78 % à 490 % supérieurs à ceux du composite carbone.