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4.6 Propriétés des composites lin et carbone

4.6.2 Propriétés en indentation

4.6.2.2 Méthodes d’analyse des courbes d’indentation

Plusieurs méthodes existent dans la littérature pour analyser les courbes charge-décharge d’inden- tation. Ces méthodes permettent d’extraire les propriétés du matériau indenté à savoir le module et la dureté. L’analyse de ces courbes repose essentiellement sur la bonne détermination de la surface de contact entre l’indent et le matériau. Cette surface de contact peut être obtenue en observant directement l’empreinte résiduelle laissée par l’indenteur sur le matériau ou par calcul. Les méthodes qui permettent de déterminer cette aire afin de remonter aux propriétés du matériau reposent sur les équations de contact

de Sneddon [166] et de Hertz [167]. Vu que la réponse du matériau est élastoplastique, l’idée est de pouvoir dissocier la phase élastique de la phase plastique afin de procéder au traitement des résultats sur la contribution élastique au moyen des équations de Sneddon et de Hertz. De toutes les techniques de traitement de résultat que l’on peut retrouver dans la littérature, il y en a trois qui permettent d’approcher au mieux le problème. Tout d’abord, il y a la méthode de Doerner et Nix [168] ; c’est la plus ancienne. Ensuite, il y a les méthodes d’Oliver et Pharr [169], et de Field et Swain [170] qui ont été récemment développées. La méthode d’Oliver et Pharr (améliorant l’approche de Doerner et Nix) est sans doute la plus répandue et la plus utilisée de ces trois méthodes d’analyse. Elle sera par conséquent la seule qui sera succinctement présentée dans cette étude. Nous donnerons par la suite les raisons qui nous ont amenés à choisir cette méthode pour traiter nos données.

Méthode d’Oliver et Pharr

En examinant des données expérimentales issues d’essais d’indentation menés sur un grand nombre de matériaux, Oliver et Pharr ont montré que les courbes d’indentation en particulier la courbe de dé- charge est rarement voire jamais linéaire (hypothèse sur laquelle se base la formule de Doerner et Nix), même dans les premiers instants de la décharge. Ces auteurs considèrent que la courbe de décharge est mieux décrite par une loi de type puissance qui s’écrit :

F=α(h − hr)m (4.11)

avec :

— F la charge instantanée ;

— h la profondeur d’indentation (déplacement de l’indent) ;

— hrla profondeur résiduelle d’indentation (profondeur de l’empreinte résiduelle) ;

— α constante ajustable en fonction des données expérimentales ;

— m cœfficient donné par le fittage de la portion initiale de la courbe de décharge (entre environ 98% et 40% de l’effort maximal) grâce à la loi de puissance donnée par la relation 4.11.

Les observations faites par Oliver et Pharr remettent en cause l’hypothèse faite par Doerner et Nix selon laquelle l’indenteur Berkovich est assimilé à un indenteur de type poinçon plat.

Afin de comprendre la démarche proposée par cette méthode, il est nécessaire de définir les différents déplacements qui y sont inhérents (figure 4.15).

Aire de contact projetée Aire de contact projetée résiduelle À charge maximale hm hc hs À la fin de la décharge hm he hr

FIGURE 4.15 – Schéma montrant les différents déplacements intervenant dans la méthode d’Oliver et

Le déplacement total de l’indent ou la profondeur totale de pénétration hmest défini comme la somme

de la profondeur de contact hc et du déplacement de la surface autour de l’indenteur hs appelé aussi

déflexion élastique.

hm=hc+hs (4.12)

À la fin de la décharge, une empreinte résiduelle est laissée sur le matériau. La profondeur de cette empreinte résiduelle est notée hret, le déplacement dû à la réponse élastique du matériau sera noté he.

L’addition de ces deux déplacements est égale au déplacement maximal atteint par l’indent lors de l’essai.

hm=hr+he (4.13)

L’idée de cette loi est de calculer la raideur de contact S en un point spécifique : le point de charge maximale (figure 4.16). Pour ce faire, un simple calcul de dérivation suffit. On dérive l’équation 4.11 par rapport à h et on pose h = hm. Nous avons donc :

S=dF

dh 

h=hm

=α m(hm− hr)m−1 (4.14)

où hmest la profondeur d’indentation maximale. F h hm he hr Fm S= dFdh h=hm

FIGURE4.16 – Courbe charge-décharge illustrant la méthode d’Oliver et Pharr

Les auteurs supposent ici que le déplacement du matériau lors de la charge est élasto-plastique et que lors de la décharge il n’y a que la contribution élastique qui est retrouvée. Par conséquent, la profondeur résiduelle laissée sur le matériau correspond au déplacement plastique induit par l’indenteur. Pour les

matériaux ayant un comportement plastique inverse, des études [171] ont montré que le déplacement dû à la plasticité inverse peut être également négligé, puisque cette méthode ne devrait pas marcher pour ce genre de matériaux.

Afin d’exprimer la fonction d’aire nécessaire au calcul des propriétés mécaniques du matériau (mo- dule d’indentation et dureté), il faut connaître la profondeur de contact hc. Or cette profondeur n’est pas

expérimentalement mesurable. Donc la solution est de l’exprimer en fonction des paramètres que l’on peut déterminer à partir des données expérimentales. Ainsi, grâce à l’équation 4.12 on réécrit hc:

hc=hm+hs (4.15)

Le paramètre hmétant le seul mesurable expérimentalement dans cette équation, il faut alors détermi-

ner hs. Et donc pour ce faire, Oliver et Pharr émettent l’hypothèse suivante : la déflexion hsde la surface

à l’extérieur de la zone de contact est purement élastique. Cette hypothèse valable pour un contact pu- rement élastique ne l’est pour des contacts élasto-plastiques que si on considère un point de la surface assez éloigné de la zone plastique. Ces auteurs se placent donc dans le cas d’un matériau homogène, élasto-plastique et linéaire. Se basant sur les solutions de Sneddon [166], et en supposant que le com- portement plastique du matériau indenté est de type « sink-in » (donc effet « pile-up » négligeable), la formule suivante est établie par Oliver et Pharr :

hc=hm− εFSm (4.16)

où : ε est un paramètre lié à la géométrie de la pointe. Quant aux différentes valeurs qu’il prend en fonction de la géométrie de l’indent, se référer au tableau 4.6.

Valeur du paramètre ε Type d’indent 2(π − 2) π ≈ 0,72 Conique 0,75 Paraboloïdal de révolution 0,75 Pointe Berkovich 0,75 Sphérique 1 Poinçon plat

Tableau 4.6 – Valeurs du paramètre ε selon le type d’indent [166, 171, 172]

Oliver et Pharr ont montré que la formule du module d’indentaton proposée par Doerner et Nix peut être appliquée à n’importe quel type d’indent (sphère, cône, Vickers, Berkovich . . . ). Ils ont alors repris cette formule et y ont ajouté un paramètre correcteur noté β qui a pour but de compenser la non- axisymétrie de l’indenteur [172]. Ainsi, ils définissent le module comme suit :

Er= 1 β √ π 2 S pApro j (4.17) Sest la raideur de contact donnée par l’équation 4.14. Le terme β est un terme adimensionnel qui a fait et fait l’objet de beaucoup d’études. King [173] préconise qu’il vaut 1 dans le cas de petites déforma- tions d’un matériau élastique indenté par une pointe rigide axisymétrique homogène. Mais en réalité les poinçons d’indentation sont loin d’être parfaitement axisymétriques. Plusieurs valeurs ont été proposées dans la littérature mais pour une pointe Berkovich, celle qui est la plus utilisée est donnée par King et est égale à 1,034.

Les auteurs ont montré que l’équation 4.17 est applicable à toute géométrie d’indent dans le cas d’un contact élastique et élasto-plastique.

Avec la connaissance de la géométrie exacte de l’indent, la dureté au sens d’Oliver et Pharr s’exprime par :

H= F

Apro j (4.18)

où F et Apro j sont respectivement l’effort appliqué et l’aire de contact projetée.

Le résultat que fournit cette approche de calcul de dureté peut être différent du résultat donné par le traditionnel calcul de dureté surtout dans le cas d’un important recouvrement élastique pendant la décharge. En effet, le calcul classique de dureté repose sur le rapport entre l’effort appliqué et la surface de l’empreinte résiduelle après chargement alors que celle donnée par Oliver et Pharr considère l’aire de contact projetée sous charge. Cette dernière méthode prend en compte la déformation élastique et la déformation plastique. Donc, elle tient plus de la pression élasto-plastique moyenne du contact que de la dureté au sens classique (dureté macroscopique).

Cette méthode a été choisie pour analyser nos résultats expérimentaux parce qu’elle est non seule- ment applicable à n’importe quel matériau ayant un comportement élastique, plastique ou élasto-plastique mais aussi applicable à n’importe quel type d’indenteur. En effet, les matériaux qui font l’objet de notre étude que sont les composites appartiennent à ces classes de matériaux. En plus, cette méthode est par- faitement adaptée pour le type de poinçon (sphérique) que nous avons utilisé pour faire nos essais. Aussi, la méthode d’Oliver et Pharr nous permet de nous affranchir de la condition de linéarité de la courbe de décharge requise par la méthode de Doerner et Nix, car selon eux la courbe de décharge est très rarement voire jamais linéaire même dans les premiers instants de décharge. Pour les pointes sphériques, il a été prouvé que les méthodes d’Oliver et Pharr et de Field et Swain, toutes issues de l’équation de contact élastique de Hertz, sont équivalentes [172, 174]. La différence majeure entre ces deux méthodes est que les derniers auteurs (Field et Swain) modélisent un couple de données à savoir la charge maximale et un pourcentage donné de la décharge, tandis que les premiers (Oliver et Pharr) modélisent la pente à la décharge initiale par dérivation de l’équation de Hertz.