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Influence de l’hybridation et de la séquence d’empilement sur les propriétés mécaniques

Les composites hybrides peuvent être fabriqués à base de fibres naturelles uniquement (exemple lin/chanvre), de fibres synthétiques (carbone/kevlar) ou encore une combinaison de fibres naturelle et synthétique (lin/carbone).

Dans le but d’améliorer les propriétés des fibres naturelles, une hybridation avec des fibres synthé- tiques peut être intéressant. Dans cette optique, plusieurs chercheurs se sont penchés sur l’hybridation des fibres naturelles avec des fibres synthétiques notamment des fibres de verre.

Davoodi et al. [94] ont étudié un composite hybrde kénaf/verre avec une matrice époxy. Leur maté- riau trouvait son application dans les pare-chocs de voiture. Ils avaient pour but de trouver une solution alternative à un composite renforcé par des mats de verre dans une matrice thermoplastique. Leurs résul- tats ont montré que les propriétés mécaniques du composite émanant de la combinaison du kénaf avec du verre étaient clairement supérieures à celles du composite verre seul. L’hybridation du verre avec du kénaf a donc apporté de la résistance mécanique au composite initial en verre.

Des études ont été menées sur le comportement en traction et à l’impact de composites hybrides renforcés par des fibres de verre et de palmier au sein d’une résine époxy [95]. L’hybridation des fibres de verre avec des fibres de palmier a clairement amélioré les propriétés en traction et à l’impact du composite palmier seul. Une meilleure résistance à l’impact a été observée pour les composites hybrides lorsque les fibres de verre sont placées à l’extérieur.

L’hybridation de plis de verre et de jute dans une résine polyester a été analysée dans [96]. Des tests de traction, de flexion et de cisaillement ont été faits. Il a été montré que l’intégration des plis de verre dans le composite jute/époxy a amélioré les propriétés mécaniques du composite jute/époxy de départ. Ils ont pu observer que le changement de séquence d’empilement avait un grand effet sur la contrainte en flexion et en cisaillement des composites hybrides. En guise de conclusion, il a été souligné que le

stratifié hybride possédant deux couches de verre de part et d’autre des couches de jute était la meilleure combinaison en termes de propriétés mécaniques et d’un point de vue coût.

L’influence de l’hybridation sur des composite lin-verre avec une résine phénolique a été étudiée [97], en faisant varier la fraction volumique de verre. Les renforts sont des UD. Les auteurs ont également étudié l’influence de la séquence d’empilement entre plis de lin et plis de verre. En dehors des tests expérimentaux, ils ont utilisé la loi des mélanges pour prédire les propriétés des stratifiés hybrides en traction. Au vu des résultats, le composite verre présente évidemment des propriétés mécaniques élevées comparées à celles du composite lin comme le montre la figure 1.18a.

Deux types de rupture ont été considérés dans leurs travaux vu la différence entre l’allongement à la rupture des fibres de lin et celui des fibres de verre. Les fibres de lin rompent en premier si la fraction volumique du verre est importante mais le composite hybride devrait rompre pour un allongement à la rupture égal à celui du composite verre. Cependant, si la fraction volumique des fibres de lin est importante, le stratifié hybride devrait atteindre la rupture pour un allongement à la rupture égale à l’allongement à la rupture du composite lin. La figure 1.18b montre l’évolution de l’allongement à la rupture en fonction de la fraction volumique des fibres de verre. On pourra remarquer que l’allongement à la rupture augmente avec la fraction volumique des fibres de verre.

Ils ont aussi démontré qu’avec l’augmentation de la fraction volumique des fibres de verre, les propriétés mécaniques, notamment le module d’Young des composites hybrides, se sont améliorées. Ce résultat est montré par la figure 1.19.

La séquence d’empilement a également un impact important sur les propriétés mécaniques des com- posites stratifiés hybrides. Nous pouvons remarquer ce résultat sur la figure 1.18a. Selon les auteurs de l’étude, la séquence d’empilement a un effet sensible sur la résistance en traction contrairement au module d’Young.

Toujours dans la même démarche que les auteurs précédents, Amico et al. [98] ont mené des inves- tigations sur des composites hybrides à base de sisal et verre avec une matrice polyester. Divers tests ont été réalisés sur ces matériaux. Ils ont montré que la séquence d’empilement influence les propriétés mé- caniques des matériaux hybrides. Leurs résultats ont également démontré que les composites hybrides sisal-verre avaient des propriétés mécaniques (module de flexion et résistance à l’impact, particulière- ment) proches de celles d’un composite verre.

D’après ces différentes études, les meilleures propriétés mécaniques sont obtenues lorsque les couches dont les fibres ont des performances mécaniques élevées (rigidité, résistance) sont placées à l’extérieur du composite.

1.6 Notion de porosité

1.6.1 Porosité dans les renforts fibreux

Un renfort à base de fibres, de par le degré d’organisation de son agencement, qu’il soit unidirec- tionnel, bidirectionnel, multidirectionnel ou mat, est un milieu considéré comme poreux. Et un milieu poreux est défini comme un solide qui contient des pores (petit interstice ou cavité contenue dans un solide, débouchant ou pas). Ces pores sont assimilés à des espaces vides dispatchés d’une manière plus ou moins régulière à travers le solide.

Dans un milieu poreux, il peut y avoir plusieurs classes de pores où chacune définit une possible échelle d’étude. Un renfort fibreux, comme le montre la figure 1.20 peut être caractérisé par trois diffé- rentes échelles [99] :

— échelle macroscopique : décrit l’ensemble du renfort ;

— échelle mésoscopique : liée aux pores situés entre les mèches et appelés macropores ou volumes inter-mèches ;

FIGURE1.18 – Effet de l’hybridation et de la séquence d’empilement sur des composites lin-verre/époxy.

(a) Contrainte en fonction de la déformation et (b) Allongement à la rupture en fonction de la fraction volumique de verre [97]. (F : Flax (lin), G : Glass (verre), FFRP : Flax fiber reinforced Polymer (com- posite renforcé par des fibres de lin), GFRP : Glass fiber reinforced Polymer (composite renforcé par des fibres de verre), ROM : Rule of Mixtures (loi des mélanges)

FIGURE1.19 – Module d’Young de composites hybrides lin-verre/époxy en fonction de la fraction volu-

mique des fibres de verre [97]

— échelle microscopique : relative aux pores situés entre les filaments au sein des mèches. Ils sont appelés micropores ou volume intra-mèches.

FIGURE1.20 – Échelles liées aux renforts à base de fibres [99]

D’après Binetruy [99], les renforts fibreux peuvent être vus comme des milieux hétérogènes et po- reux caractérisés par une distribution bimodale de tailles de pores : les macropores et les micropores. Le comportement des mats est régi par les macropores alors que celui des renforts textiles (UD, 2D, etc.) est plutôt régi par les micropores.

Il faut également noter que la distribution des pores conditionne l’écoulement de la résine dans les ren- forts.

Un certain nombre de paramètres définissent les milieux poreux en l’occurrence les renforts fibreux [100]. Ces grandeurs sont listées ci-dessous :

— nombre de plis dans la séquence d’empilement du renfort n ; — épaisseur de la séquence d’empilement H ;

— masse surfacique du renfort G ; — masse volumique du matériau ρ ; — taux volumique de fibres Vf.

Cette dernière grandeur (Vf) est équivalente au rapport du volume occupé par les renforts sur le

volume du composite (assemblage matrice-renfort). Elle est donnée par la relation suivante : Vf = n G

ρ H (1.1)

C’est un paramètre déterminant en termes de propriétés mécaniques du matériau composite.

Quant à la porosité d’un renfort, elle est notée Φ et correspond au rapport du volume occupé par le vide Vvau volume du composite Vtotal.

Φ= Vv

Vtotal (1.2)

Dans un renfort, la relation entre le taux volumique de fibres et la porosité est régie par l’équation suivante :

Φ=1 −Vf (1.3)

1.6.2 Porosité dans les matériaux composites

1.6.2.1 Le concept

Dans un matériau composite, le défaut de porosité est défini comme étant de très petites cavités emprisonnant à priori de la matière gazeuse (figure 1.21).

Selon [101], on distingue deux types de pores (figure 1.22) : les porosités ouvertes composées de vides intercommunicants connectés à la partie extérieure du matériau et les porosités fermées qui sont isolées à l’intérieur du matériau et qui ne permettent aucune perméabilité.

En ce qui concerne la classification des porosités dans les matériaux (applicable donc aux compo- sites), on parle, d’après les mesures de Schoeller réalisées en 1955 [101] au microscope optique, de microporosité lorsque le rayon des pores est inférieur à 0,1 µm, de mésoporosité si le rayon est compris entre 0,1 µm et 2,5 mm, et de macroporosité lorsque ce rayon est supérieur à 2,5 mm.

FIGURE1.21 – Exemple de porosités dans un composite (Image MEB) [102]

Le concept de porosité est donc indépendant de la forme et des connexions entre les pores. Ce qui est uniquement considéré est le volume. Il est important de remarquer que pour les composites, les porosités correspondent, comparées aux fissures ou aux délaminages, à des interstices de petites tailles (inférieur ou égal à l’ordre du millimètre).

FIGURE1.22 – Classification des porosités dans un composite [101]

1.6.2.2 Effet de la porosité sur les propriétés mécanique d’un stratifié

La porosité est une propriété très recherchée dans la fabrication de certains matériaux comme les mousses. Cependant, elle est très néfaste aux matériaux composites hautes performances.

Ce défaut qu’est la porosité a fait l’objet de plusieurs études durant ces dernières années. Selon la quasi totalité des études, en-dessous d’un certain seuil (0.5 à 1% en volume, suivant le matériau étudié) la porosité n’a pas d’impact sur les propriétés du composite si elle est répartie de façon équilibrée. Par contre, pour des taux de porosités élevés, les propriétés mécaniques du matériau se voient significative- ment affectées.

Même si les propriétés mécaniques en traction, compression et cisaillement plan [103,104] sont aussi affectées par la présence des porosités, ce sont les propriétés en cisaillement interlaminaire (ILSS) qui sont les plus touchées.

Plusieurs auteurs ont travaillé sur l’impact de la porosité sur le cisaillement interlaminaire pour des composites carbone/époxy. La figure 1.23 montre les résultas issus de leurs travaux et la disparité entre les résultats vient du fait que les travaux ont été menés sur différents types de fibres de carbone et sur différents types résines. On voit bien que pour l’ensemble de ces travaux la résistance en cisaillement interlaminaire diminue très rapidement avec le taux volumique de porosité. Ces résultats montrent donc que le cisaillement interlaminaire est très sensible à ces inclusions gazeuses que sont les porosités. Pour ces stratifiés carbone/époxy, la chute de la résistance en cisaillement interlaminaire a été évalué à 6% par unité de taux volumique de porosité.

Pour comprendre cette diminution de la résistance en cisaillement interlaminaire, les travaux de Wis- nom et al. [105] montrent que des fissures trouvant leur origine dans les porosités sont initiées dès que ces dernières ont un diamètre équivalent supérieur à 2 mm. Ils démontrent aussi que la présence des porosités contribue à une diminution de la surface d’adhérence entre les fibres et la matrice, favorisant ainsi une rupture en cisaillement interlaminaire.

Afin d’expliquer la diminution des propriétés mécaniques des composites en traction et en compres- sion des matériaux composites, en particulier la contrainte à rupture, une des raisons évoquées dans [106] est la déformation locale des fibres due à l’apparition et aux mouvements des porosités dans la matrice pendant le cycle de cuisson.