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Proposition d’un scénario d’endommagement d’un CMC alumine/alumine à renfort

CHAPITRE 3 : CARACTÉRISATION DU COMPORTEMENT MÉCANIQUE ET ÉTUDE DES

2. MISE EN ÉVIDENCE DE LA PRÉSENCE D’ENDOMMAGEMENT INITIAL PAR

4.5. Proposition d’un scénario d’endommagement d’un CMC alumine/alumine à renfort

alumine/alumine à renfort tridimensionnel sollicité en traction

Les observations au MEB réalisées sur des éprouvettes s’étant rompues ainsi que sur des éprouvettes sollicitées à différents niveaux de contrainte, dans les directions 0° et ±45°, ont permis de proposer un scénario d’endommagement pour le CMC à renfort tridimensionnel soumis à une sollicitation en traction.

Le matériau, après élaboration, présente de nombreuses fissures matricielles perpendiculaires au plan des fils de trame (cf. Figure 117.a). Ces fissures matricielles sont présentes à la fois dans les zones inter-torons riches en matrice, il s’agit alors de fissures déjà ouvertes, et dans les zones matricielles intra-torons, i.e. entre les fibres d’un même toron. Ces fissures sont principalement dues au retrait de frittage qui a lieu lors de l’élaboration du CMC. Sous l’effet d’une sollicitation mécanique en traction, ces fissures matricielles s’ouvrent et se propagent (cf. Figure 117.b). De nouvelles fissures matricielles apparaissent, dans une direction perpendiculaire à la direction de sollicitation (cf. Figure 117.b). Elles peuvent dans certains cas être amorcées au niveau des macropores, peu nombreux dans le matériau mais néanmoins présents. Au contact des fibres, les fissures matricielles sont stoppées : elles ne sont effectivement pas déviées au niveau de l’interface fibre/matrice, comme cela devrait être le cas dans un CMC à matrice faible. Au fur et à mesure que la contrainte de sollicitation augmente, le nombre de fissures matricielles croît et, lorsque la contrainte atteint un niveau suffisamment élevé, certaines fissures traversent les torons transversaux (fils de trame), tandis que d’autres sont déviées au niveau de l’interface fibre/matrice (cf. Figure 117.c). La longueur de décohésion est cependant très faible. Les fissures matricielles se propagent dans la matrice et à travers les torons transversaux, dans toute l’épaisseur du matériau. Finalement, le matériau cède lorsque la matrice est totalement fissurée dans un même plan, ce qui, du fait de la forte cohésion entre les fibres et la matrice, entraîne la rupture des torons. Au sein des torons rompus, on distingue plusieurs « paquets » de fibres s’étant rompues au même niveau. La différence entre les niveaux de rupture des différents « paquets » est faible et le faciès de rupture du matériau est net. Dans le cas d’une sollicitation dans la direction ±45°, cependant, les fissures matricielles sont déviées au contact de certaines fibres et se propagent alors autour des torons, ce qui explique un faciès de rupture présentant du pull out. Bien que le phénomène d’extraction de fibres soit plus présent dans cette direction, les longueurs de décohésion fibre/matrice sont faibles et la longueur des fibres extraites l’est, par conséquent, aussi.

Figure 117 Schémas représentatifs des mécanismes d’endommagement successifs d’un CMC Nextel™610/alumine à renfort tissé tridimensionnel sollicité en traction. a. Matériau après élaboration : fissures matricielles perpendiculaires au plan des fils de trame. b. Sous l’effet d’une sollicitation en traction, propagation des fissures matricielles préexistantes dans le matériau après élaboration et apparition de nouvelles fissures matricielles. c. Propagation et ouverture des fissures matricielles, dont certaines traversent les torons transversaux. Au contact des fibres, certaines fissures sont déviées au niveau de l’interface fibre/matrice, mais, dans la majorité des cas, les fissures sont stoppées.

5. CONCLUSION

L’étude du comportement mécanique et des mécanismes d’endommagement d’un CMC Nextel™610/alumine à renfort tissé tridimensionnel développé par Herakles a permis de déterminer les propriétés mécaniques du matériau soumis à une sollicitation en traction et de le comparer au CMC Nextel™610/alumine à renfort tissé bidimensionnel développé à l’Onera.

Les propriétés mécaniques à rupture du CMC à renfort tridimensionnel sont inférieures à celles du CMC à renfort bidimensionnel. Les modules de Young, de cisaillement plan et de cisaillement interlaminaires des deux matériaux sont équivalents. Les différences entre les propriétés mécaniques à rupture des deux matériaux peuvent s’expliquer par des microstructures différentes, responsables de mécanismes d’endommagement différents. Les deux matériaux, après élaboration, sont dans un état pré-endommagé. Les nombreux macropores du CMC à renfort bidimensionnel et la multifissuration du CMC à renfort tridimensionnel, notamment dans les zones inter-torons riches en matrice, constituent les principaux pré-endommagements de ces deux matériaux. Bien que les deux CMC soient normalement soumis au même traitement thermique, la matrice du CMC à renfort tridimensionnel est moins poreuse que celle du CMC à renfort bidimensionnel et la cohésion entre les fibres et la matrice semble être plus importante dans le cas du CMC à renfort tridimensionnel. Ainsi, au contact des fibres, les fissures matricielles ne sont pas déviées au niveau de l’interface fibre/matrice, ce qui est le principe même des CMC à matrice faible. La fissuration de la matrice entraîne donc une rupture des fibres à des contraintes bien inférieures à celles auxquelles les fibres cèderaient si elles étaient indépendantes de la matrice (cas du CMC à renfort bidimensionnel). Ainsi, afin d’améliorer les propriétés mécaniques du CMC à renfort tridimensionnel, il faudrait augmenter le taux de porosité matricielle. Bien qu’il s’agisse du même traitement thermique dans le cas des deux matériaux, il est possible que, pour des raisons techniques, le CMC à renfort tridimensionnel ait

(a) (b)

été soumis à une température ou une durée de frittage plus élevée que le CMC à renfort bidimensionnel. En supposant que les traitements thermiques des deux matériaux soient effectivement identiques, le taux de porosité plus faible du CMC à renfort tridimensionnel par rapport à celui du CMC à renfort bidimensionnel peut s’expliquer par un taux de compaction en cru plus élevé dans le cas du procédé d’élaboration par APS, ce qui induit un taux de densification plus important pour un même traitement thermique.

Enfin, l’étude des mécanismes d’endommagement des matériaux à renforts bi- et tridimensionnels présentée dans les chapitres 3 et 4 laisse penser que les propriétés mécaniques des matériaux oxyde/oxyde étudiés peuvent être améliorées grâce une optimisation des procédés d’élaboration.