• Aucun résultat trouvé

La propagation des ondes électromagnétiques dans les milieux homogènes

Chapitre 1 : L’exobiologie et Mars, ExoMars

2.2 La propagation des ondes électromagnétiques dans les milieux homogènes

La propagation d’une onde électromagnétique dans un milieu ainsi que les pertes d’énergie associées peuvent être décrites à l’aide du formalisme mathématique développé par Maxwell (Maxwell, 1864) et les relations constitutives du milieu, qui caractérisent l’interaction du champ électromagnétique avec la matière. La propagation des ondes électromagnétiques dans un matériau, outre les effets purement géométriques que nous décrirons un peu plus bas, est gouvernée par les 3 paramètres constitutifs décrits précédemment.

Nous faisons l’hypothèse des milieux continus, nécessaire pour l’utilisation de la théorie des champs : bien que la matière soit constituée d'un ensemble discontinu d’atomes et de charges, on s'intéresse aux interactions électromagnétiques d'un point de vue macroscopique, on considère donc que les propriétés au sein d’un matériau évoluent de manière continue.

2.2.1 Les équations de Maxwell

Les équations de Maxwell constituent la base de la formalisation de l’électromagnétisme. Elles relient les paramètres électriques et magnétiques à leur source. Deux champs vectoriels sont définis, le champ électrique et le champ magnétique . Ce sont eux qui sont à l’origine des mouvements des charges dans le milieu comme l’atteste l’expression de la force de Lorenz qui s’applique à une charge q en mouvement à la vitesse .

= + ⋀ (2.1)

L’interaction de ces champs avec la matière est traduite à l’aide des deux vecteurs d’induction : l’induction électrique (exprimée en C.m-2), qui caractérise le déplacement électrique, et l’induction magnétique (exprimée en A.m-1), qui sont elles-mêmes dépendantes des caractéristiques du milieu considéré. Toutes ces grandeurs dépendent à la fois des variables d’espace et de temps t (ou de

fréquence f en régime harmonique). Pour simplifier la lecture des équations, nous éviterons cependant de le préciser dans leur formulation.

L'équation de Maxwell-Faraday : La loi de Gauss électrique : L'équation de Maxwell-Ampère : La loi de Gauss magnétique : Avec :

le champ électrique (V.m-1), l’induction électrique (C.m−2), l’induction magnétique (A.m-1), le champ magnétique (T), la densité volumique de charge, la densité de courant superficielle et la densité de courant de conduction (qui décrit le mouvement des charges libres) (A.m−2).

Ces équations traduisent le fait que la variation temporelle d’un champ magnétique génère un champ électrique. Inversement, les sources de champ magnétique sont les courants électriques et la variation d'un champ électrique, comme l’illustre l’équation de Maxwell-Ampère. Enfin, la loi de Gauss magnétique exprime l’idée qu’une source ponctuelle ne peut être à l’origine d’un champ magnétique, autrement dit qu’il n’existe pas de monopôle magnétique.

Les termes et constituent les sources des champs électrique et magnétique et ne sont pas considérés lorsque l’on s’intéresse à un problème dit de propagation dans un milieu.

2.2.2 Les relations constitutives du milieu

Les relations constitutives décrivent l’interaction entre le champ électromagnétique et le milieu continu, en faisant intervenir les trois paramètres constitutifs que sont la permittivité électrique ε, la conductivité σ et la perméabilité magnétique µ. On se place dans le cadre d’un milieu continu et linéaire (2.1.1). Lorsqu’un matériau donné est soumis à un champ électromagnétique, l’induction électrique résultante peut être reliée au champ électrique grâce à la permittivité. De la même façon, on peut relier l’induction magnétique au champ magnétique appliqué à l’aide de la perméabilité. Les phénomènes physiques liés au transport des perturbations font qu'en toute généralité, ces relations constitutives lorsqu’elles ne sont ni locales, ni instantanées prennent la forme suivante :

, = , , , , ′ ′ (2.6) , = 1/ , , , , ′ ′ (2.7) = − (2.2) = + + (2.4) = (2.3) = 0 (2.5)

Lorsqu’on se place dans un milieu local, le vecteur induction au point ne dépend que du champ au même point . Si l’on ajoute la condition d’invariance dans le temps, les champs ne dépendent alors plus de l’origine des temps et les expressions ci-dessous deviennent alors des produits de convolution :

, = , − , ′ ′ (2.8)

, = 1/ , − , ′ ′ (2.9)

Si l’on tient compte de la causalité3, on sait que la valeur de à l’instant t ne peut dépendre que des valeurs de à des instants t’ antérieurs à t, il en est de même pour et , soit

, = , − , ′ ′ (2.10)

, = 1/ , − , ′ ′ (2.11)

On ajoute à ces deux équations la loi d’Ohm, qui, dans la plupart des milieux, se simplifie pour donner une simple relation de proportionnalité entre la densité de courant de conduction , et le champ électrique , :

, = , − , ′ ′ (2.12)

Dans le domaine fréquentiel, le produit de convolution devient un produit simple, et les relations se simplifient pour donner :

, = , , (2.13)

, = , , (2.14)

, = , , (2.15)

Les quantités vectorielles soulignées correspondent aux transformées de Fourier des champs vectoriels temporels et sont a priori des vecteurs complexes.

Dans le cas particulier d’un milieu homogène, sans termes de source, la combinaison des équations de Maxwell et des relations constitutives dans le domaine fréquentiel permet d’aboutir à l’équation des ondes :

∇ + − = 0 (2.16)

La même équation vectorielle est valable pour le champ , en le substituant au champ .

En réintroduisant la notion de permittivité effective relative (2.1.2.3) qui découle de l’expression des parties réelles et imaginaires des paramètres constitutifs dans l’équation de propagation en régime harmonique, l’équation (2.16) devient :

∇ + = 0 (2.17)

2.2.3 Cas idéal de l’onde plane harmonique en milieu homogène

Parmi l’infinité de solutions de l’équation de propagation possibles, la solution onde plane harmonique est intéressante car elle permet par combinaisons linéaires de modéliser une onde de n’importe quelle structure spatiale ou temporelle. Nous négligerons les ondes évanescentes (qui s’atténuent exponentiellement dans la direction orthogonale à la direction de propagation de l’onde) pour nous concentrer sur les ondes propagatives.

Pour illustrer les phénomènes mis en jeu lors de la propagation des ondes dans un milieu, nous nous intéressons par exemple à une onde plane harmonique propagative de vecteur de propagation . En notation complexe, cette onde s’écrit

, = (2.18)

où ω est la pulsation = 2 .

Dans le cas d’une onde plane et harmonique, contient les informations de phases et amplitude des composantes du champ électrique et notamment l’information de polarisation de l’onde.

Cette solution injectée dans l’équation des ondes permet de montrer que le vecteur est complexe, soit = ′ + ′′ et de relier les modules des parties réelle et imaginaire à la pulsation et aux paramètres caractéristiques du milieu. Lorsque le milieu est à perte ( ′′ ≠ 0 , ′ et ′′ ne sont pas orthogonaux. Comme précisé plus haut, nous étudions le cas où ′ et ′′ sont colinéaires. Dans ce cas,

= ′ " ; " = 1 + " − 1

2 (2.19)

L’expression du vecteur champ électrique devient alors :

, = " (2.20)

On voit que le terme de propagation est déterminé par ′ alors que ′′ est responsable d’une décroissance exponentielle de l’amplitude de l’onde.

= (2.21) Si la partie imaginaire de la permittivité électrique effective (liée aux phénomènes d’absorption) est faible devant sa partie réelle (ε''<< ε '), ce qui est très généralement le cas hormis pour les matériaux très conducteurs, on peut alors simplifier les formulations précédentes :

et " ≅ 2 " √ ′ ≅ 0

(2.22)

Ceci donne finalement une formulation simple pour la vitesse de propagation de l’onde directement dépendante de ′ (lorsque " ≪ ′) :

= = ′

(2.23)

En considérant un milieu non magnétique avec = 1, on obtient :

√ ′=

(2.24)

où n est l’indice de réfraction du milieu et ′ la partie réelle de la permittivité effective relative du milieu (notre fameuse constante diélectrique) : = ′.

L’impact de la tangente de perte sur l’atténuation d’une onde se propageant dans un milieu naturel homogène est illustré

Figure 2.2-1, pour 3 fréquences de 10 MHz à 1 GHz. On considère que l’atténuation augmente linéairement avec la fréquence (Grimm et al., 2008).

Figure 2.2-1 : Atténuation d’une onde se propageant dans un milieu homogène en fonction de sa tangente de perte pour 3 fréquences centrales (1 GHz, 100 MHz, 10 MHz)

Dans le cas d’une onde se propageant à partir d’un point source, comme pour le radar, on observe de surcroît la divergence géométrique du faisceau à partir du point source, qui conduit en champ lointain à une atténuation de l’onde inversement proportionnelle à la distance à la source.

Les milieux naturels sont en général plus complexes que le cas idéal homogène que nous venons de décrire. Au cours de son trajet dans un milieu réel non homogène, outre les phénomènes d’atténuation et de divergence du faisceau qui sont présents même dans un milieu homogène, la propagation de l’onde va être modifiée par des phénomènes physiques liés au fait que le milieu est hétérogène. Le principe de base du fonctionnement du radar repose sur l’exploitation de ces interactions onde/milieu non homogène. Les effets macroscopiques de terrain, tant au niveau topographique (rugosité) qu’au niveau des propriétés électriques des matériaux (hétérogénéités), sont directement dépendants de la longueur d’onde du rayon incident : lorsque les hétérogénéités sont très petites devant la longueur d’onde, le milieu peut être considéré comme homogène. Lorsqu’elles sont au contraire très grandes devant la longueur d’onde, le trajet de l’onde suit les lois de la réflexion. On observe alors des phénomènes de réflexion et de réfraction au passage des dioptres4. Enfin, si les hétérogénéités du milieu sont du même ordre de grandeur que la longueur d’onde, on observe des phénomènes de diffusion volumique qui engendrent des pertes.

Figure 2.2-2 : Pertes estimées (par atténuation et diffusion) en fonction de la fréquence de sondage pour des terrains volcaniques martiens à partir de mesures effectuées sur des analogues terrestres (Heggy et al., 2006). On

voit que selon la fréquence, la diffusion peut avoir un impact prépondérant sur les pertes au sein du milieu.

Tous ces effets s’accompagnent potentiellement de changements de polarisation du vecteur champ électrique. Nous illustrerons certains de ces phénomènes par modélisation dans le Chapitre 4 de ce manuscrit, mais maintenant que nous avons décrit les tenants et les aboutissants de la propagation des ondes électromagnétiques dans les milieux naturels, intéressons-nous à cette fameuse technique GPR.

2.3 Introduction à la technique GPR