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PARTIE 2 UNE STRATEGIE HABITAT QUI SE VEUT AU SERVICE DE LA MIXITE SOCIALE

II. Un programme d’habitat diversifié en cœur de quartier : un espoir de regagner en attractivité

A. La logique de reconstitution de l’offre sociale : une reconstitution au « 1 pour 1 » débattue entre acteurs locaux

Pour remédier à l’échec de mixité sociale enregistré sous le PNRU, « le NPNRU s’inscrit dans une dynamique globale de peuplement et de rééquilibrage de la sociologie des quartiers visant à infléchir les mécanismes ségrégatifs qui stigmatisent le quartier prioritaire en regard de l’ensemble du territoire »58.

58 Dossier de point d’étape du protocole de préfiguration du nouveau programme de renouvellement urbain de Valenciennes Métropole, le 4 septembre 2017.

Pour Valenciennes Métropole, il s’agit d’offrir aux ménages du quartier de Chasse Royale le choix tant en termes de mobilité géographique que de produit logement pour que ce dernier corresponde à leurs besoins et attentes. C’est promouvoir un parcours résidentiel ascendant aux ménages particulièrement qualifiés de « captifs » voire « vulnérables ». C’est, en ce sens, que l’intercommunalité souhaite promouvoir une mixité sociale à l’intérieur et en dehors des quartiers, par une mixité qui soit à la fois endogène ou exogène selon les secteurs.

Cette stratégie doit s’accompagner d’une politique d’habitat soutenue simultanément par des actions de diversification résidentielle et de répartition géographique de l’offre nouvelle de logements sociaux. Cette démarche doit permettre de réduire les écarts entre les quartiers et l’unité urbaine dans lequel ils se situent, à plusieurs échelles :

- des quartiers prioritaires par la réduction du taux de logements sociaux et par la construction d’une offre diversifiée ;

- de la commune-centre par la production de logements sociaux dans les quartiers « intermédiaires » (autres que QPV) ;

- des communes périphériques ayant un caractère urbain pour un rééquilibrage de l’offre sociale (notamment pour les communes dépourvues de logements sociaux).

La reconstitution de l’offre est guidée par plusieurs grands principes, dictés par l’intercommunalité : - privilégier une localisation dans les communes déficitaires en matière de logements sociaux

(au regard de la loi SRU) ;

- s’assurer de la qualité de la desserte en transports en commun et des aménités commerciales et servicielles ;

- maintenir le volume démographique (nombre d’habitants) dans chacune des communes éligibles aux dispositifs de la politique de la ville.

L’objectif visé à l’horizon 2040 sur le quartier de Chasse Royale est de tendre vers 50% de logements sociaux par la déconcentration de ce type d’habitat et par la promotion d’une programmation d’habitat diversifiée.

Le volume de demande de logements sociaux élevé (6 000 demandes actives sur la Valenciennes Métropole) et la nécessité de ne pas obérer l’objectif annuel de production de logement neuf, inscrit au PLH actuel, fixé à 270 logements, plaident en faveur d’une reconstitution de l’offre sociale démolie au 1 pour 1 pour éviter de créer une tension supplémentaire sur la demande.

Cette offre nouvelle de logements sociaux semble également fondamentale pour pouvoir la mobiliser partiellement pour le relogement des ménages NPNRU, notamment l’offre PLAI. Cependant, le bailleur démolisseur s’oppose à la reconstruction au « 1 pour 1 ».

Ce principe de reconstitution de l’offre rencontre un blocage particulier. La SIGH souhaite que la reconstitution se réalise dans une logique de reconstruction d’un logement social pour deux logements sociaux démolis.

SIGH explique que l’un des critères en matière de reconstitution défendu par l’ANRU est la reconstruction à hauteur de 60% en PLAI. Selon le bailleur, cette prescription est déconnectée de la réalité des contextes économiques globaux des territoires qui atteste « les 60% de PLAI, ce n’est

pas une règle raisonnable ».

Pour SIGH, reconstruire en PLAI engendre une baisse significative de la valeur actuelle nette ; autrement dit, la rentabilité de l’investissement serait divisée par treize. A cet effet, le bailleur social explique que l’investissement financier dans la construction de produit logement en PLAI serait porteur que de faibles capitaux/recettes notamment du fait de la faible masse de loyer perçue. Cette logique économique complexe encourage le bailleur à ne reconstruire que 0,5 logement pour un logement démoli.

Le bailleur social s’engage donc à reconstituer 37,5% de l’offre sociale sur site et seuls 50 logements sociaux hors site en PLAI : « Pour les 50 logements prévus en reconstitution hors site

programmés au protocole de préfiguration, nous avons bien 60% de PLAI mais pour les 154 logements reconstitués sur site nous sommes à 100% en PLUS ».

B. La reconstitution d’une offre en logements sociaux individuels sur site : un réel produit de diversification de la composition sociale du quartier ?

Le taux global de reconstitution sur site s’élève à 37,5%, soit 90 logements locatifs sociaux pour un total de 240 logements démolis. En d’autres termes, 62,5% de la reconstitution s’effectuera en dehors du site de Chasse Royale.

Cette ambition, portée par l’intercommunalité, de reconstituer sur site est alimentée par différents motifs. La reconstitution permettra, à la fois, d’enrayer la chute de la fréquentation des équipements scolaires, de maintenir l’activité commerciale de proximité, de maintenir les ménages « équilibrants » dans les quartiers et d’atteindre les objectifs de densification urbaine déterminés dans le Schéma de cohérence territoriale (SCoT).

Au regard de faible possibilité d’attirer les promoteurs privés sur Chasse Royale, Valenciennes Métropole a redéfini sa stratégie de diversification des produits logements. Elle envisage de produire du logement locatif social individuel, produit logement qu’elle considère comme un outil de mixité sociale. Elle explique que pour attirer des ménages issus des déciles supérieurs aux ménages du 1er

et 2ème déciles impactés par les démolitions, le logement social individuel peut être vecteur de

diversification sociologique des quartiers : « si un certain nombre de ménages issus des 3ème, 4ème et

5ème déciles sont les cibles préférentielles pour les logements en diversification qui seront produits

dans le cadre des projets, l’analyse des attributions 2016, sur le territoire de Valenciennes Métropole, montre que la production de logements sociaux constitue un levier pour attirer également de nouvelles populations sur les quartiers NPNRU. En effet, 50% des attributions 2016 de logements locatifs sociaux concernent des ménages issus des 3ème, 4ème et 5ème déciles, soit une « part de

marché » substantielle qu’il conviendra de pouvoir « capter » pour diversifier le peuplement des quartiers »59. Valenciennes Métropole démontre qu’il est donc primordial, sous peine de ne pas avoir

la capacité à attirer toutes les cibles potentielles de ménages « équilibrants », de pourvoir conserver une programmation en logement social individuel sur le quartier qui permette d’attirer une catégorie de population, somme toute différente, de celle des ménages-locataires des logements prévus en démolition (quasi-exclusivement issus des 1er et 2ème déciles). Cette offre de logements permettra de

répondre à une part de la demande de logement social.

Les résultats rendus par une étude de marché informent qu’il y a une réelle part de marché dans les QPV et que dernièrement des ménages du cinquième décile sont venus s’installer dans ces quartiers. Elle démontre : « en produisant du logement neuf sur site, on attire des ménages du 3ème,

4ème et 5ème déciles puisqu’il y a au sein du 5ème décile des ménages qui ne possèdent pas le désir

ou les moyens d’acquérir ». La production de logements sociaux individuels neufs devrait, selon

Valenciennes Métropole, pouvoir attirer des ménages de la classe moyenne n’ayant pas la volonté ou la capacité financière suffisante de se loger dans le parc privé ou d’accéder à la propriété.

La communauté d’agglomération affirme qu’il est important d’envisager d’autres produits logements en diversification pour pouvoir « mixer » les statuts d’occupation, les formes d’habiter et les populations. : « il est en effet fondamental de pouvoir proposer une palette de produits adaptés à

59 Dossier de point d’étape protocole de préfiguration du nouveau programme de renouvellement urbain de Valenciennes Métropole, le 4 septembre 2017.

tous les types de ménages : collectifs sociaux pour les 1er60 et 2ème déciles, individuels sociaux pour

le 3ème, 4ème et 5ème déciles, et logements privés pour le haut du 3ème, 4ème et 5ème déciles »61. Pour

cela, elle prévoit de construire, sous le temps du NPNRU, dans le quartier Chasse Royal, 50 logements sociaux en collectif et 40 logements individuels et en intermédiaire.

C. Un programme de diversification de l’habitat prudent et phasé : une gestion foncière en vue d’un regain d’attractivité à terme

Dans le cadre du volet « immobilier » du programme local de l’habitat (PLH), Valenciennes Métropole a travaillé en partenariat avec un prestataire extérieur sur la question du ciblage dans les politiques de peuplement.

La démarche de l’intercommunalité est qu’au travers des opérations de démolition de logements sociaux, les ménages des 1ers et 2èmes déciles soient relogés à l’extérieur des quartiers prioritaires de

la politique de la ville.

Valenciennes Métropole a choisi d’appliquer, dans les QPV, la mixité sociale « par le haut ». Autrement dit, elle estime provoquer un changement de la composition sociale du quartier par l’intégration des ménages ayant des revenus similaires voire supérieurs au troisième décile. « Dans

le cadre d’une étude de marché qui a été réalisée, on peut viser à partir du troisième jusqu’au cinquième voire sixième quartile, ça c’est du ciblage en matière de mixité. Au-delà c’est très compliqué parce qu’il y a d’autres attentes ».

Pour cela, elle engage une réflexion sur le type et les caractéristiques des produits logements qu’elle pourrait potentiellement produire sur le foncier disponible dans les quartiers dans l’objectif de provoquer une diversification résidentielle par une politique de l’offre différenciée. « Nous avons

réussi à bâtir une programmation tant en termes de ciblage qu’en termes de typologie de produit et de prix de sortie avec un certain nombre de facteurs clés de succès en matière de positionnement des produits et de surface ».

L’étude sur l’immobilier résidentiel a conduit à définir une cible de ménages précise et préconise une construction, en frange du quartier, dans la continuité du pavillonnaire avenue de Denain et à la

60 Selon la DREAL (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement), le 1er quartile des demandeurs les plus pauvres sur Valenciennes Métropole possède un niveau de ressources annuel équivalent à 6 446€ par unité de consommation (soit 537€/mois).

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Sentinelle, avec un volume potentiel de 24 lots à bâtir, 38 en accession abordable, 20 logements en accession sociale et 30 logements en locatif intermédiaire. Le volume de construction est limité à 10 logements/an.

La stratégie de diversification résidentielle retenue sur site est la construction de 115 logements privés situés principalement sur les emprises libérées des « barres rouges ».

Plan masse du projet de renouvellement urbain : programmes de reconstitution de l’offre et de diversification

Source : Dossier de présentation pour le comité national d’engagement, Nouveau programme de renouvellement urbain de Valenciennes Métropole, le 30 mars 2018.

Au regard des programmes fléchés en diversification de l’offre, une interrogation peut porter sur la commercialisation des produits en diversification. Le programme de diversification de l’habitat parait ambitieux par rapport à la faible tension du marché immobilier. Des effets de concurrence de l’offre résidentielle pourraient se développer avec les zones périurbaines. Une question peut être soulevée sur les potentiels acquéreurs.

Ces interrogations ont été appréhendées par le porteur de projet, qui a réalisé un travail précis sur les conditions de succès des opérations de mixité résidentielle.

Plusieurs facteurs clés de succès considérés comme déterminant pour garantir la réussite de commercialisation des produits en diversification sur le quartier :

« Ces facteurs clés de succès sont les suivants :

- changer l’image du quartier (démolitions, constructions neuves de logements sociaux qualitatifs, équipements attractifs, espaces publics qualitatifs) en préalable à la commercialisation des programmes privés ;

- élaborer une stratégie de commercialisation par les franges pendant que le cœur de quartier engage sa mutation ;

- proposer une offre qui ne soit pas en concurrence avec l’ancien qui sera la plupart du temps moins cher et qui soit contemporaine, confortable et performante ;

- favoriser de petites unités de voisinage qui permettent à des acquéreurs de se projeter ;
 - envisager une commercialisation en « réseau » qui permette aux acquéreurs de rencontrer

leurs futurs voisins et ainsi les rassurer sur leur achat ; 


- construire en dernière tranche de projet d’éventuels programmes en collectif (pas de marché pour la diversification en collectif à court et moyen termes sur les quartiers NPNRU) »62.

Une véritable stratégie foncière de l’attente a été définie par l’intercommunalité. Certains fonciers libérés par les démolitions ne se verront pas être réinvestis immédiatement. L’agglomération se constituera une réserve foncière qu’elle investira post-NPNRU. Des constructions en diversification prendront le jour lorsque le quartier de Chasse Royale se saura doté d’une image plus valorisée. Le bailleur social SIGH souligne que les réserves foncières non investies dans le cadre du NPNRU conforteront davantage la diversification résidentielle : « le changement d’image aura commencé et

permettra d’attirer des promoteurs privés que l’on trouve en centre-ville ». Le bailleur, comme

l’intercommunalité, compte sur le nouveau projet de renouvellement urbain pour apporter une restructuration urbaine qualifiée ainsi qu’une nouvelle représentation du quartier.

Pour éviter de reproduire l’échec des programmes de diversification vécu dans le premier programme de renouvellement urbain, l’intercommunalité se positionne davantage sur les questions techniques liées à la politique de l’offre.

62 Dossier de point d’étape protocole de préfiguration du nouveau programme de renouvellement urbain de Valenciennes Métropole, le 4 septembre 2017.

Pour cela elle souhaite dans le cadre du NPNRU réitérer l’expérience qu’elle est en train de mettre en place dans le cadre du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD). L’intercommunalité a lancé à la fois un appel à idées du côté des architectes et un appel à manifestation d’intérêt auprès des opérateurs privés dans l’objectif de créer un mariage entre ces deux corps et favoriser le développement de produits répondant à la demande, économiquement viables et adaptés au contexte urbain. Si cette expérience fonctionne bien, elle souhaiterait la mettre en application après le NPNRU, sur les emprises foncières libérées et conservées.

Ayant bien pris conscience que les opérateurs privés ne sont pas attirés par les opportunités foncières situées dans les secteurs peu valorisés, l’intercommunalité veut s’engager dans une démarche proactive afin de pouvoir attirer sur les quartiers d’habitat social ces investisseurs. « Nous,

en tant que porteur de projet, notre travail est de créer les conditions pour que les opérateurs viennent ». Pour cela, Valenciennes Métropole possède des moyens de financement solides « prime de la région, une TVA réduite, du foncier que l’on peut mettre à disposition des opérateurs, des primes de l’agglomération en matière d’accession à la propriété, ce sont autant d’éléments qui permettent de diminuer et d’atténuer le prix de sortie des opérations privées neuves ». Ce travail a

été mené en collaboration avec les élus communaux et les habitants.

L’ensemble de ces moyens de financement permettront de proposer des logements au prix de vente relativement bas ce qui correspondrait à la cible d’acquéreurs potentiels visés. « L’intercommunalité

part du principe que la demande de logement en NPNRU concernera majoritairement les ménages du bas de la classe moyenne (3ème au 5ème décile – soit de 1 100 € nets à 2 100 € nets mensuels et à la marge le bas du 6ème décile) avec des budgets inférieurs à 170 000€, soit des prix inférieurs à 2 100 €/m2 »63.

III. Une reconstitution hors QPV principalement prévue dans les