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Producteurs, commerçants et intermédiaires de la filière bois de feu

Organisation verticale du marché du Charbon de bois

8.4. Producteurs, commerçants et intermédiaires de la filière bois de feu

8.4.1 Les bûcherons

D’après nos enquêtes menées en 2005 auprès de plus de 200 commerçants bamakois, la production de bois est assurée à plus de 99% par des bûcherons indépendants. L’emploi de

bûcherons par des commerçants bamakois est une pratique qui a disparu alors qu’elle perdure encore dans le secteur du charbonnage.

D’après les enquêtes de la CCL, en 1997, 65% des bûcherons étaient des femmes. Les hommes pratiquent le bûcheronnage entre 6 et 8 mois par an, et les femmes pendant 9 à 12 mois. Les exploitants sont avant tout des paysans ou font partie d’une famille de paysans. L’exploitation du bois de feu entre dans leurs stratégies de diversification des revenus familiaux. En hivernage, la priorité est donnée aux activités agricoles, mais le bûcheronnage ne s'arrête pas pour autant. Les femmes et les jeunes y jouent alors le rôle principal. Les femmes communément chargées de l’approvisionnement de leur foyer ont toutes une grande expérience du bûcheronnage. Elles ont néanmoins tendance à couper de plus petits bois que les hommes et surtout à couper plus près de leur foyer.

La coupe se fait à la main au moyen de haches traditionnelles. Une fois coupé, le bois est façonné en brins d’un mètre environ et rassemblé en tas. Puis, si le village du bûcheron est peu accessible, le bois est acheminé jusqu’à un point de vente en bord de route, ou jusqu’à un village plus accessible, ou encore jusqu’à un village disposant d’un marché hebdomadaire attirant les commerçants bamakois (cf. photos Planche 8).

Le bois peut être emmené le jour même ou être laissé à sécher en brousse une à deux semaines, voire plus en fonction de la disponibilité d’une charrette pour le transport. En 1997, pour l’acheminement du bois, 25% des bûcherons possédaient une charrette, 50% en louaient une et 25% transportaient le bois par d’autres moyens (sur la tête, en vélo, autres).

Peu de données exhaustives existent sur la productivité du travail des bûcherons. Les auteurs s’accordent à dire que les bûcherons coupent en général seuls ou à deux, de l’ordre d’une petite charrette en deux jours. Sur deux jours, une journée est consacrée à la coupe, l’autre journée est consacrée au rassemblement du bois, à son chargement et à son acheminement soit vers un lieu de stockage à proximité du foyer, soit directement sur un point de vente accessible. En général, le chargement et le transport nécessitent deux personnes au minimum.

En considérant un chargement moyen d’une stère par charrette, la productivité moyenne d’un bûcheron est d’environ 350 Kg de bois par jour pour un homme et de 300 kg par jour pour une femme (cf. Tableau 22).

Variables Femmes Hommes

Répartition 65% 35%

Quantité de bois coupée par jour 300 kg 350 kg

Nb mois travail/an

(1 mois = 22 j) 10 7

Quantité produite par an (T/an) 66 54

Nb d’emplois équivalent temps plein

nécessaire à la production 1.25 0.88

Productivité moyenne (T/emploi/an) 52.8 61.3

Tableau 22. Productivité moyenne des bûcherons indépendants - source (CCL, 1998)

8.4.2 Les transporteurs grossistes

Contrairement aux grossistes en charbon, très peu de grossistes en bois assurent la vente au détail. En revanche, ces grossistes en bois assurent pratiquement tous les fonctions de collecte et de transport. Ils sont d’ailleurs appelés « transporteurs de bois » par les détaillants.

Ces acteurs représentent les opérateurs historiques de l’approvisionnement énergétique de la ville. Regroupés au sein de l’Association des Professionnels du Bois-Energie de Bamako (APB), ils ont dominé le commerce du bois-énergie jusque dans les années 1995-1996, date à partir de laquelle le charbon de bois a supplanté le bois dans les préférences des consommateurs. Ces commerçants historiques ont longtemps maitrisé l’ensemble de la chaîne depuis la production jusqu’à la livraison en ville directement aux particuliers ou sur les marchés. Mais ce type de fonctionnement « intégré » allait à l’encontre de la SED et des revendications territoriales des acteurs locaux. Ils ont dû peu à peu abandonner la production au profit des bûcherons indépendants et se sont fait peu à peu grignoter le marché par les grossistes de charbon. En 1995, le syndicat regroupait encore près de 150 membres, et en 1999, plus de 400 selon les chiffres (non vérifiés) donnés par le président du syndicat. Mais en 2005 l’association était dissoute. Actuellement, l’activité des commerçants reste totalement désorganisée et les représentants « historiques » ne sont plus représentatifs de la profession.

Malgré tout, ces « dinosaures » du bois-énergie semblent encore actifs auprès de l’administration forestière et leur discours sur un retour à un oligopole du commerce plus facile à contrôler pour l’administration a encore des oreilles attentives à la DNCN. En 2006, circulait au Ministère de l’Environnement, un projet de réorganisation de la filière qui consisterait à labelliser un très petit nombre de grossistes « concessionnaires » chargés de collecter le bois (et le charbon) des Marchés Ruraux de Bois-Energie pour le transporter sur de grands marchés

périurbains situés aux portes de Bamako, où il pourrait alors être acheté par des détaillants strictement urbains (communications personnelles).

Comme on le voit là, des évolutions des chaînes d’approvisionnement sont encore à prévoir et les mutations induites par les nouvelles politiques forestières sont en cours.

Bien que devenus minoritaires par rapport aux commerçants de charbon, les transporteurs grossistes de bois continuent en 2005 de dominer le marché du bois de feu. Ce mode de distribution représente 83% des quantités de bois de feu entrant en ville. Un transporteur grossiste vend en moyenne 100 T de bois par mois (cf. Tableau 23).

Ces commerçants :

– achètent le bois à des bûcherons ruraux indépendants. L’achat se fait directement sur le lieu de production ou sur des marchés hebdomadaires ;

– transportent le bois sur Bamako dans leur propre véhicule ;

– ne possèdent pas de place de vente mais sillonnent la ville (marchés et rues) en quête d’acheteurs ;

– vendent le bois en gros à des détaillants. La vente au détail par ces transporteurs ambulants est pratiquement inexistante.

Ces transporteurs ont des profils très variables : des routiers généralistes qui saisissent occasionnellement l’opportunité de rapporter du bois sur Bamako ; des transporteurs routiers commandités par un ou plusieurs détaillants bamakois ; des grossistes ruraux qui assurent le transport du bois d’un ou deux villages et cherchent des détaillants en ville.

8.4.3 Les détaillants

Les détaillants s’approvisionnent majoritairement auprès des transporteurs de bois. Ils représentent 78% des vendeurs et assurent la distribution de 83% des flux. Cependant, on observe également deux autres types de détaillants en bois :

– des détaillants collecteurs qui vont directement s’approvisionner sur des marchés hebdomadaires. Ils représentent 12% des vendeurs et distribuent 15 % des flux de bois. Comme les semi-grossistes de charbon, ils louent seuls ou à plusieurs un camion ou un minibus.

– des détaillants producteurs (10% des vendeurs). Ce sont exclusivement des femmes qui coupent le bois dans les brousses en périphérie Nord de la ville, qui le transportent sur leur tête et le vendent sur les marchés périphériques de Bamako. Les quantités acheminées par cette voie sont difficiles à évaluer précisément mais on peut les estimer à environ 2% des flux de bois.

Les quantités vendues mensuellement par les détaillants varient entre 1T/mois pour un détaillant producteur et 15T/mois pour un détaillant s’approvisionnant auprès des producteurs.

Type de distributeur % Effectifs Nb d’approv. par mois Qtité collectée par mois (T) Nb de mois travail par an % de femmes

Transporteur grossiste - Très variable 100.0 12 ?

Détaillant producteur 10% 20 ? ? 100%

Détaillant collecteur 12% 3.1 6.8 12 80%

Détaillant 78% 3.4 8.4 9 58%

Tableau 23.Productivité du travail des distributeurs de charbon Source enquêtes L. Gazull, G. Raton et sources bibliographiques diverses

8.4.4 Les chaînes d’approvisionnement en bois de feu

La Figure 29 représente les différents niveaux de transaction intervenant dans la chaîne d’approvisionnement en bois de feu. La répartition des acteurs et des flux de bois a été calculée selon la même méthodologie que celle utilisée pour les flux de charbon.

Comme l’illustre la Figure 30, l’approvisionnement en bois de feu est dominé par une chaîne qui met en relation trois grands types d’acteurs :

– des bûcherons indépendants qui coupent majoritairement leur bois eux-mêmes ;

– des grossistes collecteurs qui possèdent leur propre moyen de transport ou qui en louent un, qui récoltent le bois auprès des producteurs ruraux et qui le distribuent à un réseau des détaillants ;

– des détaillants urbains qui vendent aux consommateurs finaux, sur les marchés ou en bord de rue.

Producteur indépendant Détaillant-collecteur (2.5-5T/mois) Détaillant (7-8T/mois) Consommateur (17.5kg/mois)

Transporteur Grossiste collecteur (100T/mois)

83%

15%

15% 83%