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Sur 50 commerçants urbains interrogés en mars 2005, 49 déclaraient payer une taxe ou une amende pour le transport des produits (enquêtes Gazull et Kouyaté 2005). Les

3/ Enfin, pendant le comptage des acteurs urbains, un sondage sur les flux d’approvisionnement, sur les lieux d’achat des produits et sur les types de

8.3. Producteurs, commerçants et intermédiaires de la filière charbon de bois

8.3.1 Les charbonniers

L’histoire du charbonnage dans la région de Bamako est relativement récente. Elle débute environ dans les années 1980. Cette pratique a été introduite essentiellement par de jeunes migrants venus de la région de Bougouni au sud du pays. En 1996, 60% des charbonniers n’étaient pas originaires du village où ils officiaient (CCL, 1998). Mais cette situation a très vite évolué. Au contact des migrants, les populations locales ont appris les différentes techniques

de fabrication des meules. L’intérêt économique de l’activité a suscité de nombreuses jalousies à l’encontre de ces travailleurs allochtones et, dès la fin des années 1990, de nombreux migrants se sont fait chasser des villages ou remttre à leur place par les chefs de village (Mbodj, 2006 ; Hautdidier, 2001). Comme nous l’avons signalé auparavant, la commercialisation du bois-énergie est allée de pair avec une territorialisation et donc une appropriation croissante des ressources. Actuellement, il est très difficile, voire impossible dans les monts Mandingues, pour un charbonnier de s’installer dans un village qui n’est pas le sien.

D’après une enquête menée en 2003-2004 auprès de 100 ménages de trois villages du bassin d’approvisionnement de Bamako, le charbonnage et le bûcheronnage représentent la deuxième source de revenus des ménages ruraux après la production et la vente des produits agricoles alimentaires (Hautdidier et Gautier, 2005). Les charbonniers comme les bûcherons

sont avant tout des paysans, et le calendrier agricole conditionne leur activité.

D’après nos enquêtes menées en 2005 auprès de plus de 200 commerçants bamakois, la production est assurée à 90% par des charbonniers travaillant à leur compte et à 10% par des charbonniers tâcherons employés par des tiers.

8.3.1.1 Les charbonniers « tâcherons »

Les «tâcherons» sont employés par des grossistes bamakois qui les payent à la tâche (au nombre de sacs de charbon produits). Cette main-d’œuvre est soit locale, embauchée dans le village où se fait la production ; soit elle provient de Bamako ; soit elle est composée d’autochtones et d’allochtones. Le droit de coupe sur un territoire donné est négocié entre le grossiste et le chef de village ou ses représentants. En général, le grossiste fait l’avance à ses employés des frais de nourriture et de logement. Il se rembourse par la suite au moment de « l’achat » de la production aux employés.

Ces producteurs travaillent en équipe. L’équipe est en général composée de deux charbonniers experts, chargés de la mise en meule et de la surveillance de la carbonisation, et de bûcherons chargés de l’abattage. Les équipes peuvent compter jusqu’à 20 personnes. Une équipe de 20 employés peut produire plus de 300 sacs (plus de 20 tonnes) de charbon par mois, ce qui correspond à 3 grosses meules. La productivité d’abattage d’une telle équipe est donc de l’ordre de 150 tonnes de bois/mois, soit environ 250 kg de bois/pers/jour.

La production est à son maximum pendant la saison sèche et ralentit ou s’arrête pendant la saison des pluies.

8.3.1.2 Les charbonniers « indépendants »

Le charbon de bois est un moyen pour les populations rurales de disposer d’argent liquide rapidement. Il offre aux paysans en particulier l’opportunité d’obtenir de l’argent pour le fonctionnement de leur exploitation agricole et pour leurs besoins familiaux sans attendre la vente de la récolte ou sans toucher à leur stock de céréales.

Même si dans l’absolu ce revenu n’est pas très élevé, pour la majorité des producteurs, il est considéré comme important voire indispensable à la satisfaction de leurs besoins familiaux. Les analyses menées par B. Hautdidier et D. Gautier (Hautdidier et Gautier, 2005) sur trois villages producteurs du bassin d’approvisionnement de Bamako montrent que le charbonnage est une source d’enrichissement importante, notamment pour les groupes sociaux défavorisés, qui leur permet de pallier une mauvaise année agricole et, dans certains cas, d’investir dans de l’équipement. Il représente une opportunité remarquable pour les foyers pauvres, mais il constitue également une activité individuelle dans laquelle les cadets et les femmes vont s’investir résolument, afin de se réserver des revenus en propre et de gagner ainsi en autonomie par rapport à la tutelle familiale (Hautdidier, 2001).

Les enquêtes les plus récentes sur le secteur de la production de charbon de bois datent de 2001. Elles ont été menées par la CCL auprès de 145 producteurs indépendants de charbon dans 45 villages du bassin d’approvisionnement de Bamako. Une Classification Hiérarchique Ascendante sur les deux variables : nombre de meules par mois et taille de la meule révèle trois grands types de charbonniers (cf. Tableau 19)

1. les « permanents » représentent 15% de la population des charbonniers. Ils maîtrisent suffisamment les techniques de carbonisation pour faire de grosses meules de 66 sacs en moyenne. Ces meules brûlent pendant environ 15 jours. La production est en moyenne de deux meules par mois. Ces acteurs sont à 95% des hommes. Ils travaillent en général à plusieurs (2 à 3 personnes) pour la confection de la meule et pour sa surveillance. Le charbonnage est leur activité principale et ils produisent toute l’année (9 mois par an en moyenne). La plupart d’entre eux achètent leur bois à des bûcherons.

2. les « intermittents » représentent 53% des effectifs. Ils confectionnent en moyenne deux meules par mois d’environ 12 sacs chacune. Ces charbonniers, composés à 75% d’hommes peuvent se faire ponctuellement aider au moment du montage de la meule et pour la coupe du bois. Ils ne produisent qu’en saison sèche soit 5.5 mois par an. La saison humide est consacrée à l’agriculture. Certains d’entre eux achètent tout ou partie de leur bois.

3. les « occasionnels » représentent 32% des effectifs. Ce sont majoritairement des femmes (à 61%). Elles confectionnent en moyenne quatre meules par mois. Ce

rythme correspond au rythme hebdomadaire de vente de la production sur les marchés locaux. Ce sont de petites meules de 5 à 6 sacs, correspondant au contenu d’une charrette de bois, qui ne nécessitent pas l’aide de personnes tierces. En général, ces charbonnières coupent elles-mêmes leur bois. Dans l’année, la production se fait au gré des besoins financiers ponctuels et du temps laissé par les autres occupations (agriculture, tâches ménagères …). Les enquêtes menées en 2001 montrent que cette production couvre 8.5 mois par an. La productivité des « occasionnels » est donc moins importante que celle des « intermittents » mais leur durée annuelle de production est plus longue.

Variables Permanents (1) Intermittents (2) Occasionnels (3) Significativité

(Test de Fisher ou Test du Khi2) Effectifs/ répartition 21 (15%) 78 (53%) 46 (32%) Nb meules/mois 2.0 1.9 4.6 ** entre (1,3) et (2,3) NS entre (1,2) Nb sacs/meules 66.4 12.0 5.6 ** Nb mois travail/an (1 mois = 22 j) 9.0 5.7 8.2 ** entre (1,2) et (2,3) NS entre (2,3) Quantité produite par an (T/an)