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la carte des ressources ligneuses du bassin de Bamako

Planche 3. Le conditionnement du bois et du charbon

4.3. Les lieux de consommation

4.3.1 A la recherche d’indicateurs spatialisés de la demande

Nous ne disposons malheureusement pas d’enquêtes de consommation spatialisées pour dresser une carte de la demande en bois-énergie dans Bamako. Les renseignements de localisation des enquêtes de consommation de 1997 ont été perdus lors de la dissolution de la CED en 2000. Seules les informations de synthèse ont pu être retrouvées. La spatialisation de la demande passe alors nécessairement par une spatialisation d’indicateurs indirects.

L’exploitation statistique des résultats de l’enquête consommation de 1997 détaillée dans la partie II (profils des consommateurs) nous a permis de mettre en évidence un certain nombre de relations entre les profils de consommation des ménages, leurs caractéristiques (âge du

chef de famille, taille du ménage, dépenses moyennes) et leur logement (type de logement, accès à l’eau courante et connexion au réseau électrique). La démarche suivie est donc de chercher à lier les préférences en combustibles des ménages avec des critères spatialisables : densité de population, taille des ménages, nombre de ménages par concession, type de logement, confort des logements, etc …

Selon cette analyse, il apparaît que les critères taille du ménage et type de logement discriminent assez bien les comportements de consommation de bois-énergie et permettent de dresser les grands traits de cette dernière à l’échelle d’un quartier.

Une grande taille de ménage signe une préférence forte pour le bois. Deux facteurs

expliquent ce phénomène :

– une grande taille révèle une grande ancienneté de la famille dans son logement. Un grand ménage est souvent un ménage propriétaire, stable, et arrivé en ville depuis longtemps (Vuarin, 1991). Une grande famille est donc le plus fréquemment une famille « traditionnelle » tendant vers une alimentation traditionnelle, vivant dans une concession et cuisinant au bois.

– une grande taille révèle également souvent un niveau de richesse faible. 90% des ménages de grande taille ont une dépense inférieure ou égale à la dépense médiane. Ainsi les grandes familles (plus de 13 personnes) ont tendance à être pauvres ce qui les oriente naturellement vers le bois, seul combustible financièrement accessible aux pauvres. L’inverse n’est pas vrai. Si les ménages de petite taille sont majoritaires dans la tranche de dépense la plus haute, il n’en reste pas moins qu’ils sont représentés significativement dans toutes les autres classes de dépense.

Dépense annuelle (milliers FCFA/pers/an) Ménages de petite taille (< 6 pers) Ménages de taille moyenne (7 - 12 pers) Ménages de grande taille (> 13 pers) 0-100 (très pauvre) 08 % 02 % 23 % 100-200 (pauvre) 17 % 32 % 40 % 200-300 (médian) 21 % 34 % 27 % 300-400 (aisé) 22 % 18 % 06 % > 400 (très aisé) 32 % 14 % 04 % Total 100 % 100 % 100 %

Sources : Enquête Malienne sur l’Evaluation de la Pauvreté - DNSI - 2001

Tableau 7. Répartition des ménages selon leur taille et leur niveau de dépense annuelle.

Une petite taille signe un ménage jeune préférant le charbon et le gaz. Les ménages

variables « taille » et « âge » met clairement en évidence ce phénomène : plus la taille du ménage est petite plus son âge est bas (Tableau 8). Économiquement, ces jeunes ménages peuvent correspondre à des arrivants récents au statut résidentiel souvent précaire partageant une concession (hébergement, location, ou occupation illégale), ou à de jeunes cadres relativement aisés ayant fait le choix « moderne » de la famille conjugale et vivant dans une petite concession, une villa ou un appartement. Dans les deux cas, le charbon est le combustible préféré ; il allie la « modernité », une accessibilité financière et une adaptation aisée aux faibles quantités nécessaires à ces petits ménages.

Taille \ Age < 25 ans De 26 à 45 ans De 46 à 65 ans > 65 ans De 1 à 5 pers. (+) *** (+) * (-) *** (-) * De 5 à 10 pers. (-) * (+) ** (-) NS (-) * De 10 à 15 pers. (-) ** (-) ** (+) *** (+) ** Plus de 15 pers. (-) NS (-) *** (+) *** (+) ***

(+) / (-) : effectif observé supérieur / inférieur à l'effectif théorique NS, *, **, *** tests du Khi² significatifs au seuils alpha=0.100, 0.05, 0.01

Tableau 8. Relation entre l’âge et la taille des ménages (test du Khi² effectué sur l’échantillon de 945 ménages interrogés en 1997).

Une taille moyenne (5 à 10 personnes) signe un ménage bamakois relativement aisé, bien intégré dans la vie urbaine, variant les combustibles.

Au final, la taille du ménage apparaît comme un bon révélateur des habitudes de consommation, comme l’indique le graphique ci-dessous.

4.3.2 Vers un classement des quartiers en fonction de leur niveau de

consommation

L’unité spatiale la plus petite sur laquelle il est possible d’obtenir aisément de l’information sur la population est le quartier : le recensement de la population de 1998 donne, par quartier, la population, le nombre de concessions et le nombre de ménages.

y = -0.1744Ln(x) + 0.8714 y = 0.2049Ln(x) - 0.019 y = -0.0123Ln(x) + 0.1465 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 1 6 11 16 21 26 31 Taille du ménage N iv e a u de c o ns om m a ti on *

Tendance de consommation en charbon Tendance de consommation en bois

Tendance de consommation en gaz

Figure 15. Niveau de consommation en Bois, Charbon et Gaz selon la taille du ménage.

Les travaux de R. Vuarin (Vuarin, 1991), soulignent le lien fort qui existe à Bamako entre les conditions de résidence qu’offre un quartier et la composition des groupes familiaux. Les conditions d’accès au foncier, l’agencement des logements sont autant de contraintes que l’espace urbain peut imposer à la vie sociale. « L’espace disponible et la disposition de l’espace

décideront, en ville en particulier, de la forme que pourra prendre le groupe de parenté localisé (ou de son niveau maximal dans l’emboîtement hiérarchique du lignage) et qui fourniront au chef de famille les limites de sa stratégie d’expansion ».

Vuarin propose une typologie des quartiers de Bamako selon le type d’unité familiale dominante. Cette typologie est fondée sur un arbre de classification dichotomique portant sur trois critères aisément accessibles: le nombre de ménages par concession, le nombre de personnes par concession, et le nombre de personnes par ménage.

Figure 16. Typologie des ménages - d’après (Vuarin, 1991)

Cette classification, donnée Figure 16, est sans doute très théorique et trop détaillée mais elle correspond néanmoins à une certaine réalité de la vie sociale bamakoise.

Cependant, comme nous l’avons vu précédemment, les quartiers de Bamako sont très hétérogènes dans leur composition sociale. Il est alors illusoire et inutile de raffiner à l’extrême leur typologie. Ainsi au vu de la relation peu équivoque entre la taille des ménages et les préférences observées de consommation, nous en resterons à ce seul critère de classement illustré par la Figure 15 et formalisé par les équations ci-dessous.

[Niveau de consommation en Bois] = -0.70 * Ln([Taille moyenne des ménages]) + 3.49

[Niveau de consommation en Charbon] = 0.82 * Ln([Taille moyenne des ménages]) -0.08

On retrouve sur cette dernière le clivage entre les quartiers centraux historiques grands consommateurs de bois, les quartiers tramés plus récents alliant bois et charbon et les quartiers périphériques où le charbon prédomine.

Les vieux quartiers coloniaux abritent majoritairement de grandes familles traditionnelles, installées de longue date dans de grandes concessions et qui ont l’habitude de cuisiner au bois.

Les quartiers tramés plus récents abritent également de vastes familles autochtones. les fonctionnaires de tous niveaux y sont majoritaires depuis l’origine. Mais de nombreuses concessions ont été divisées au cours du temps et accueillent aujourd’hui de jeunes couples et des célibataires migrants. La consommation de charbon y rivalise avec celle du bois.

Les quartiers périphériques continuent d’absorber la jeune population additionnelle de Bamako mais ils accueillent aussi les habitants du centre accédant à la propriété dans de nouvelles concessions ou de nouvelles villas. Ces quartiers alliant jeunesse et habitat moderne, font essentiellement le choix du charbon.