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CHAPITRE 3 : Physique du feu et caractérisation des incendies en Kabylie

3.5 Processus de transfert de chaleur

La chaleur joue un rôle important, avant, au moment et après le départ d’un feu.

Avant le départ d’un feu, la chaleur produite par les rayons du soleil participe à l’échauffement du combustible, après avoir participé à l’évacuation d’une grande partie d’eau disponible dans les tissus, facilitant ainsi l’éclosion puis la propagation du feu (CARREGA, 1988).

Au moment du départ du feu, la chaleur produite par la source initiale provoque l’inflammation des éléments fins de la litière et de la strate herbacée et la végétation commence à prendre feu et la chaleur est transférée entre tous ces éléments. Après que le feu se soit déclaré, la chaleur produite par celui-ci se transmet selon deux principaux processus ; rayonnement et convection, mais aussi par conduction, mais ce dernier processus transmet une quantité très infime d’énergie, dans le cas des feux de forêts, par rapport aux deux autres. L’énergie émise intervient sous deux différentes formes : chaleur latente et chaleur sensible.

 Chaleur latente

Elle change l’état physique d’une matière, appelée également enthalpie en thermodynamique, c’est la quantité d’énergie échangée avec le milieu extérieur au changement d’état de la matière sans changement de température (solidification, liquéfaction, évaporation…).

Faire passer de l’eau présente dans les tissus végétaux sous sa forme liquide, souvent associée à d’autres composés, vers sa forme de vapeur, nécessite une quantité d’énergie sous forme de chaleur (enthalpie de vaporisation) qui est la chaleur latente. L’état hydrique du végétal est déterminant dans ce processus, car la combustion des gaz de décomposition du bois ne peut commencer avant l’évaporation d’une importante quantité d’eau présente dans les tissus, donc, plus l’eau est disponible en grande quantité dans les tissus végétaux, comme par exemple en hiver ou au printemps, plus la quantité d’énergie nécessaire pour la faire évaporer est importante.

Si l’humidité est importante, l’énergie sera utilisée à chasser l’eau plutôt qu’à faire monter la température (VAN WAGNER, 1972) et la combustion aura du mal à démarrer, par conséquent le feu peut s’atténuer rapidement.

En été, le feu se maintient plus facilement grâce notamment à la quasi-rareté des précipitations, à la faible humidité relative, à la déshydratation des plantes et à la chaleur fournie par le milieu (températures élevées). Pendant cette période, une part importante de

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chaleur est déjà disponible dans l’atmosphère avec la hausse des températures, donc non seulement l’apport énergétique nécessaire pour la source de chaleur ne serait pas important pour l’inflammation, mais également pour la combustion.

Avant que la température ne dépasse 120°C toute l’eau doit être évaporée (localement, dans la partie qui s’enflammera) (VAN WAGNER, 1972). A 100 °C et sous 1 atmosphère de pression, la quantité de chaleur nécessaire pour évaporer 1 kg d’eau est de 2 257 kJ. La chaleur de vaporisation est de 2454 kJ/kg à 20 °C et de 2501 kJ/kg à 0 °C. Il est donc un peu plus facile à une goutte d’eau de passer à l’état de vapeur lorsqu’elle se trouve déjà à des températures très élevées.

Inversement, il faut 333 kJ d’énergie pour faire passer 1 kg de glace à l’état liquide; quelques rayons de soleil suffiront à liquéfier l’eau gelée dans les tissus végétaux, contrairement au processus d’évaporation qui est plus énergivore.

L’énergie nécessaire pour porter une brindille de bois à son point d’inflammation est de 24 kJ/kg par unité de % d’humidité (tableau 3.1).

Tableau 3.1: Énergies d’inflammations pour différentes teneurs en humidité (VAN WAGNER, 1972) Teneurs en humidité 0% 5% 20% 100% 120% Énergies d’inflammation kJ/kg 410 530 890 2810 3290  Chaleur sensible

C’est la quantité de chaleur échangée sans changement d’état ou de phase physique de la matière. La chaleur sensible modifie la température d’une matière, par opposition à la chaleur latente qui modifie l’état physique d’une matière. Il en résulte un effet qui peut être observé ou mesuré. Elle concerne l’élévation ou la baisse de la température d’un corps. La chaleur qui résulte d’un feu de forêt et qui sert à chauffer le combustible en amont du front du feu, c’est la chaleur sensible.

 Chaleur spécifique

« C’est la quantité de chaleur nécessaire pour élever la température d’un gramme de combustible de 1 °C. La chaleur spécifique de l’eau, par définition, est de 4,18 J.g-1. C° -1. Celle de la matière végétale est d'environ 1 ,41 J.g-1. C° -1 » (VALETTE, 1988).

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Il est donc plus facile de chauffer un gramme de matière végétale qu’un gramme d’eau. Une fois asséchée et chauffée la végétation prend facilement feu.

3.5.1 Conduction

Elle désigne la transmission de chaleur à travers le combustible (ALEXANDER et al., 1986).

Le bois est caractérisé par une faible conductivité thermique, il est même isolant, donc joue un rôle minime dans la diffusion de la chaleur. Généralement, moins de 5 % de l’énergie produite par un incendie est transmise par conduction ce qui reste très peu significatif. En revanche, le feu peut se conserver par incandescence pendant plusieurs jours dans une grande masse de combustible et donner lieu à une reprise d’incendie ultérieure.

La conduction de chaleur est régie par la loi de Fourier où le flux de chaleur va dépendre du gradient de température. La loi de Fourier est donnée par la formule suivante :

 grad(T)

Où  est la densité du flux thermique, s’exprime en (W.m-2)

λ est la conductivité thermique, s'exprime en (J.m-1

.K-1.s-1)

T est la température en degré Kelvin

L’efficacité de la conduction est déterminée par le coefficient de conductivité thermique, qui est propre à chaque matière. Il est de 0,36 pour le bois, de 0,038 pour le liège et de 350 pour le cuivre. Ce qui montre la très faible conductivité du bois par rapport aux métaux.

Selon VALETTE (1988), l’énergie thermique correspond à l’énergie cinétique des particules d’un milieu donné. Cette énergie est échangée totalement ou partiellement par interaction thermique directe avec des particules voisines. Dans le cas de la conduction, la chaleur se propage de proche en proche sans transfert de matière et pour ce qui concerne les incendies de forêts la quantité de chaleur transmise par conduction est négligeable.

3.5.2 Rayonnement ou radiation

C’est la transmission de la chaleur produite par la combustion. Cette chaleur contribue à la propagation des feux en causant à courte distance le dessèchement de la végétation et l’élévation de la température en avant du front du feu. La quantité d’énergie transmise par radiation et captée par les combustibles est inversement proportionnelle au carré de la distance qui les sépare du front des flammes (VELEZ, 1991).

Le foyer peut émettre, du fait de sa température, un important rayonnement thermique qui se propage à grande vitesse. La quantité d’énergie émise est proportionnelle à la puissance

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quatrième de la température thermodynamique. Elle est exprimée en W.m-2 et régie selon la loi de Stefan Boltzmann : E = e × s × T4.

E représente la quantité d’énergie émise, e coefficient d’émissivité, s constante de Stefan Boltzmann, T température en degré Kelvin (VALETTE, 1988).

La végétation soumise au rayonnement absorbe tout ou une partie de cette énergie, dont une partie sert à échauffer le combustible et une autre à évaporer une partie de l’eau contenue dans les tissus en prédisposant ainsi la végétation à l’inflammation.

3.5.3 Convection

La chaleur est également transmise par convection qui reste un moyen important de transport de la chaleur lors d’un feu de forêt. La transmission s’opère grâce à des mouvements d’air chaud appauvri en oxygène, qui plus léger, tend à monter et forme ce qu’on appelle une colonne de convection (TRABAUD, 1992 ; BRANKA, 2001).

Dans le cas des incendies de forêts, la convection est l’un des différents modes de transfert de chaleur qui implique le déplacement de l’air et des gaz de combustion, c'est-à-dire de la matière.

Ce sont les mouvements ascensionnels de l’air chauffé par rayonnement thermique et combiné au mélange de gaz de décomposition au voisinage de la zone de combustion qui crée cette colonne de convection.

La convection se dit forcée lorsque les mouvements d’air sont amplifiés par l’action d’un facteur extérieur comme le vent ou les flammes. Le flux thermique diffusé par convection est exprimé en W.m-2, il dépend d’un coefficient de convection exprimé en W.m-2. C° -1 et de la différence de température entre le foyer et l’air ambiant (VALETTE, 1988).

Le transfert est régi par la loi de Newton :

Φ = hs (T

s

T

)

Φ

flux de chaleur (W.m-2)

h

coefficient d’échange convectif (W.m-2

. C° -1).

s

surface du front

T

s température du foyer

T

température du fluide (air) au large (loin du foyer)

Le phénomène de convection permet le transfert de 80 à 90% de la chaleur sous forme de gaz brûlés et d’air chaud (DFCI, 2002).

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