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Chapitre 2 Méthode de recherche

2.4 Déroulement

2.4.1 Procédure de collecte de données

moments de danse, de jardinage en jardin collectif, en ateliers d’écriture, de groupes de paroles) et ont permis de suivre les expériences quotidiennes telles que vécues par la chercheure-participante. À travers les nouvelles lectures scientifiques, le journal de recherche a ainsi contribué à l'enrichissement du cadre théorique, tel qu’il doit se faire au fur et à mesure de la recherche HSSI (Sela-Smith, 2001). Le contenu du journal a également rassemblé des données provenant des milieux professionnels auxquels la chercheure- participante était exposée (Service d’aide aux néo-Canadiens, milieu scolaire). Ce contenu pouvait inclure les pensées, les actions, les sentiments que vivait la chercheure en lien avec les impasses relationnelles telles que ressenties subjectivement lors de divers contacts relationnels en milieu de travail (p. ex. lors de formations offertes ou reçues, de réunions de co-développement, de communications, de contacts cliniques, etc.). Une trace du processus créatif visant à outrepasser les impasses relationnelles rencontrées dans ces divers contextes a ainsi pu être préservée.

Par ailleurs, tant au niveau personnel que professionnel, les données n’ont inclus en aucun cas des informations permettant d’identifier les personnes ni les situations précises qu’évoquent les impasses relationnelles. Puisque la visée principale de la recherche est d’explorer le développement de la créativité relationnelle de la thérapeute, les données ont ciblé essentiellement le cheminement parcouru par la chercheure-participante pour favoriser sa créativité. Par l’écriture en style métaphorique et la cueillette des données selon la perception subjective de la chercheure-participante, l’identité des personnes qui côtoient la chercheure-participante a pu être préservée.

Les deux entretiens d’explicitation qui ont été réalisés ont, quant à eux, été enregistrés puis retranscrits manuellement sur ordinateur pour un total de 37 pages à simple interligne. Suite à chacun des EdE, la transcription de l’entretien a été faite en moins d’une semaine afin de préserver la nature vivante et détaillée de l’entretien.

Pendant la retranscription et avant d’entamer les étapes de l’analyse, en ajout aux données brutes incluses dans le journal de recherche, quelques mots clés qui avaient une connotation particulièrement forte étaient surlignés et des annotations témoignant d’idées émergeant spontanément ont pu être notées dans les marges. L’ensemble des données de l’étude, tant celles en provenance du journal de recherche que des deux EdE, ont été recueillies jusqu’à saturation théorique, ce qui signifie que la collecte s’est terminée lorsque les données entrantes n’étaient plus significativement nouvelles face aux informations existantes (Glaser & Strauss, 1999).

Il importe d’ajouter que les deux entretiens d’explicitation ont fait suite à la sélection de deux situations professionnelles choisies non seulement sur une base intuitive, mais également en fonction de l’orientation de la question de recherche. D’après Paillé et Mucchielli (2012), le travail d’analyse qualitative s’inscrivant dans une perspective de découverte, les choix méthodologiques sont dépendants de divers facteurs dont la construction du sujet à l’étude, l’orientation du chercheur, la sensibilité théorique et expérientielle du chercheur. La chercheure a ainsi fait le choix des situations à expliciter par l’entremise de la question qu’elle s’est posée mentalement : en quoi ces données peuvent répondre à la question de recherche? Ce sont des situations relationnelles entretenues auprès de collègues provenant du milieu scolaire ainsi que du milieu de la santé et des

services sociaux et qui ont été sélectionnées par la chercheure comme étant des moments clés. Voici un bref descriptif des deux situations qui ont fait office des EdE.

La première situation a eu lieu lors d’une rencontre de co-développement entre collègues. Cette rencontre visait entre autres à présenter un nouveau modèle d’intervention à l’équipe. Lors de la rencontre, trois psychologues, se présentaient un à un au sein d’un petit groupe de collègues. Chacun leur tour, leur but était de favoriser la discussion et d’orienter les professionnels vers des pistes de solutions en vue d’une meilleure implantation et d’une mise en action concrète de cette nouvelle approche par les psychologues au sein de leur milieu respectif. Cette situation a tout d’abord fait émerger une tension grandissante et observable au sein des membres du groupe lors du passage des deux premiers psychologues. Ceux-ci ont suscité des désaccords, des interruptions et une certaine impatience au niveau des échanges entre les individus par leur discours prescriptif quant à la façon d’opérationnaliser la nouvelle approche. C’est une situation qui a été particulièrement inspirante par le sentiment qu’elle a suscité chez la chercheure d’avoir vécu un moment d’impasse relationnelle, puis, par l’espoir et la mobilisation qui a été créée au passage du dernier psychologue. Par l’EdE, la chercheure souhaitait expliciter cet instant où l’impasse relationnelle était dépassée afin de mieux en comprendre les processus qui restaient encore imperceptibles à ce moment.

La deuxième situation a eu lieu lors d’une invitation reçue par la chercheure pour offrir une présentation sur la notion de créativité relationnelle au sein d’un milieu de la santé. La présentation a été offerte en présence d’une vingtaine de professionnels. C’est une présentation qui a permis non seulement à la chercheure de partager sa propre expérience

de la créativité relationnelle en tant qu’unique participante à l’étude, mais également de viser à faire vivre à un public le processus de créativité relationnelle comme tel. En effet, au fil de la présentation, un moment de distance et de déconnection avec le public s’est fait sentir lorsque plusieurs individus détournaient le regard, semblaient perdre leur attention et n’offraient plus d’indices de participation active. Ceci a été perçu comme un moment d’impasse relationnelle par la chercheure-participante et le sentiment d’avoir dépassé cette impasse a intuitivement été vécu par la chercheure comme une manifestation de créativité relationnelle. C’est ce processus qui a été explicité en deuxième-temps afin de mieux comprendre ce qui avait été créé au sein de la relation de groupe pendant la présentation.

Le Tableau 1 démontre comment les différents volets de la méthode « heuristic self- search inquiry » (HSSI) se sont déployés à travers 11 étapes qui se sont échelonnées sur une période d’environ quatre ans au total dans le cadre de la présente étude.

Cette synthèse rend compte du caractère itératif de la démarche, telle qu’elle a été vécue, notamment avec les étapes d’immersion, d’incubation et d’illumination qui se sont présentées chacune deux fois. On remarque également que la résistance, telle que décrite par Sela-Smith (2001), s’est inscrite dans ce processus comme une étape à part entière puisqu’elle a occupé une place prépondérante, à deux reprises, dans ce processus. Chacune de ces étapes sera brièvement décrite dans la présente section accompagnée de citations en provenance du journal de recherche à titre illustratif.