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Chapitre 4 Discussion

4.1 Principaux liens entre les résultats et les connaissances scientifiques existantes

4.1.2 Les manifestations de la créativité relationnelle

Amabile, 2010; Runco, 2004a; Simonton & Damian, 2013). Simonton (2012) ajoute à ces deux critères le fait de provoquer un effet de surprise. Ces trois caractéristiques semblent faire écho avec les résultats émergeants de la présente recherche.

En effet, les résultats suggèrent que l’énergie nouvelle témoignant de la créativité relationnelle est observable tout d’abord par l’apparition d’un engagement pour alimenter la relation. Cette première caractéristique nous semble s’apparenter au critère adapté ou efficace du produit créatif dans le contexte où il se trouve en ce sens qu’un individu qui parvient à susciter l’envie chez son interlocuteur d’être en relation peut croire en son efficacité à entretenir l’interaction. Deuxièmement, le sentiment d’avoir créé quelque chose de nouveau comme résultat de la présente recherche invite pour sa part à établir un parallèle évident avec le critère de nouveauté qui définit la créativité. Enfin, l’effet de surprise proposé par Simonton (2012) peut être associé à la curiosité face à la relation qui se dégage dans la présente étude comme indicateur de CR, la charge affective provoquée par ces deux sentiments apparaissant similaire.

Cette notion d’énergie nouvelle envisagée à titre de produit créatif apparaît novatrice puisqu’elle n’a jamais été mentionnée, à notre connaissance, dans les travaux d’autres chercheurs s’étant intéressés au produit créatif en contexte relationnel. Généralement, ceux-ci réfèrent plutôt à de nouvelles techniques créatives d’intervention produites par le thérapeute (Laroche-Provencher, 2013) ou à de nouveaux comportements, cognitions ou émotions produits par les participants à l’interaction (Selby, 2005).

4.1.2.2 Flow relationnel. Le deuxième élément qui ressort des analyses de la

présente étude comme produit créatif est celui du flow relationnel, défini comme un état où l’individu est autant connecté à l’autre qu’à lui-même. Ce moment de flow relationnel semble être vécu telle une prise de conscience au sein de la relation d’un sentiment de proximité, d’être dans le moment présent et de concentration profonde survenue chez la chercheure. Le parallèle principal à faire avec la documentation existante renvoie sans contredit aux travaux de Csikszentmihalyi (1990), qui ont d’ailleurs inspiré la chercheure- participante dans son choix de terminologie.

L’état psychologique de flow a été relevé par Csikszentmihalyi (1990) alors que celui-ci cherchait à étudier l’expérience optimale souvent associée à l’état créateur. Selon Csikszentmihalyi, le flow se caractérise par une expérience optimale où une harmonie est ressentie entre l’activité et l’individu qui la réalise. L’activité en question doit être dirigée par un but et être vécue comme agréable, pour qu’il soit question de flow. Plus précisément, cet état se caractérise : par une impression de l’individu de parvenir à optimiser naturellement et sans effort particulier sa maîtrise de l’activité et l’efficacité de son autoévaluation dans l’action, au profit d’un objectif clair et pleinement conscient; par une concentration si grande qu’aucune préoccupation extérieure à l’activité ne s’introduit dans celle-ci; et par des défis vécus comme étant en équilibre optimal avec les capacités de l’individu. Ces éléments offrent une expérience si positive que le temps est oublié au profit d’un investissement complet dans le moment présent, une pleine authenticité est possible dans la réalisation de l’activité puisque l’image de soi n’est aucunement préoccupante, la prise de risque est envisagée puisqu’il existe peu de craintes face à un

échec éventuel et l’action comme telle devient une fin en soi, pour le plaisir intrinsèque de l’accomplir (Csikszentmihalyi, 1990). Des exemples de moments de flow cités par l’auteur sont notamment : le surfer qui déferle sur la vague, un individu en pleine création artistique, un père qui observe son enfant répondre à son sourire pour la première fois.

Une telle description de la notion de flow par l’auteur qui a introduit ce concept (Csikszentmihalyi, 1990) permet d’établir des parallèles entre le flow relationnel proposé ici comme produit créatif et les travaux d’autres chercheurs décrivant des expériences semblables en contexte relationnel. Par exemple, l’étude citée précédemment sur la créativité en contexte clinique menée auprès de 142 thérapeutes suggère que cette créativité inclurait la spontanéité et le courage du thérapeute d’être dans le moment présent, la volonté de prendre des risques et d’improviser ainsi que la connexion avec une partie plus intuitive de soi (Carson et al., 2003). Abordant le contexte de thérapie familiale, Deacon et Thomas (2000) proposent pour leur part que pour qu’il y ait un changement au sein de la thérapie, il doit nécessairement exister un sentiment de sécurité, de soutien et de défi cohabitant de façon optimale, ainsi qu’un état de flow. Ils renvoient également aux travaux de Csikszentmihalyi (1996) pour appuyer combien les moments de transformation au sein de la thérapie familiale sont similaires à l’expérience de flow par ce sentiment d’être totalement absorbé par le moment présent tout en ayant un objectif qui oriente l’action au sein de la relation thérapeutique (Deacon & Thomas, 2000).

Finalement, la seule étude offrant une définition de la notion de créativité relationnelle à proprement parler (Laroche-Provencher, 2013) propose que celle-ci permet à deux individus de partager au sein de la relation qui ils sont réellement, de façon

authentique. Selon l’auteure, la créativité relationnelle s’illustrerait par un lien unique et authentique au sein de la thérapie. Ces notions aussi peuvent se comparer aux résultats de la présente étude à travers l’authenticité qui cohabite avec l’état de flow relationnel.

À travers les analyses de la présente étude, un modèle du processus de la créativité relationnelle (CR) a été proposé pour illustrer et synthétiser les résultats de façon intégrée. Six étapes sont proposées pour illustrer ce processus, dont : l’action d’entrer en relation, l’impasse relationnelle, la transition relationnelle, le flow relationnel, la création d’énergie nouvelle et le désir de maintenir la relation. Ces étapes sont traduites à travers un cercle vertueux où la continuité et l’aspect dynamique de la figure peuvent être représentés.

Les résultats qui s’apparentent le plus à ceux-ci émergent de l’étude de Laroche- Provencher (2013) sur la créativité relationnelle en contexte thérapeutique. Selon l’auteure, le processus de la créativité relationnelle renvoie principalement à trois étapes soit, 1) l’évaluation et la création de l’alliance thérapeutique, 2) le traitement de l’information et l’autorégulation du thérapeute ainsi que 3) le travail effectué à travers la relation thérapeutique. Quoique ce processus semble de prime abord distinct des résultats qui ressortent de la présente étude, des parallèles apparaissent si l’on se fie à la description faite par l’auteur de ces trois étapes. Ainsi, au sein de l’évaluation et de la création de l’alliance thérapeutique, Laroche-Provencher stipule que le thérapeute y développe une compréhension approfondie du problème à travers l’alliance thérapeutique. Ceci peut s’apparenter à la première étape du processus créatif qui émerge de la présente étude, soit