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Procédés enzymatiques d’acylation en solvants organiques

I. Etude bibliographique

5. Les milieux réactionnels classiques et innovants utilisés pour l’acylation enzymatique

5.1. Les solvants organiques

5.1.4. Procédés enzymatiques d’acylation en solvants organiques

L’acylation par voie enzymatique a été appliquée à diverses molécules susceptibles d’être soit O-acylées dans le cas de molécules d’alcools primaires et secondaires, soit N-acylées dans le cas de molécules aminées de type amines primaires ou encore à des molécules polyfonctionnelles telles que des alcools aminés, acides aminés et peptides qui peuvent être O et/ou N-acylées.

a) O-acylation en solvant organique de molécules polyfonctionnelles

Les solvants organiques sont le siège de nombreuses réactions de O-acylation soit par estérification directe résultant de la condensation entre une fonction carboxylique et une fonction alcool soit par trans-acylation résultant d’un transfert d’un groupe acyle d’un ester sur une fonction alcool. Dans cette partie, la O-acylation de molécules de type alcool primaire, largement traitée dans la littérature, ne sera pas abordée (Zaks et al., 1985 ; W. Chulalaksananukul 1990 ; Borzeix et al., 1992 ; Yahya et al., 1998). Un aspect intéressant, par contre, est la sélectivité de certaines enzymes à catalyser spécifiquement l’acylation d’une

vinyldiols en solvants organiques tels que le toluène ou le tétrahydrofurane, catalysée par différentes lipases a conduit dans certains cas à la synthèse de composés monoacylés. La lipase immobilisée de Rhizomucor miehei n’est pas du tout régio-sélective pour ces substrats contrairement à la lipase B de Candida antarctica immobilisée (Cruz Silva et al., 2005). Beaucoup d’études rapportent aussi la régio-sélectivité de l’acylation enzymatique de flavonoïdes (molécules polyhydroxylées) dans le 2-méthyl-2-butanol (Ardhaoui et al., 2004 ; Chebil et al., 2006 ; Mellou et al., 2006 ; Chebil et al., 2007). Remarquons, que l’efficacité de l’estérification de composés tels que des sucres en solvants organiques catalysées par Novozym 435® a été améliorée par traitement continu au cours de la réaction aux ultra-sons. Le rendement a ainsi été augmenté dans la plupart des cas de 20% sans affecter la sélectivité de l’enzyme (Xiao et al., 2005).

Par contre, dans certains cas, et plus particulièrement au cours de l’acylation enzymatique de résidus aminés hydroxylés, l’estérification est loin d’être évidente. Plusieurs études ont soulevé le problème de la O-acylation de la sérine et de la thréonine catalysée par des lipases en milieux organiques. L’hypothèse avancée pour expliquer l’absence de réaction est la faible solubilité de ces substrats. Celle-ci a d’ailleurs été contournée en greffant un groupe amide sur la fonction carboxylique de ces résidus. Ainsi, les auteurs sont parvenus à obtenir des rendements de conversion de ces substrats en O-lauroyl sérinamide et O-lauroyl thréoninamide de respectivement 93 % et 53 % dans le 2-méthyl-2-propanol en présence de la lipase de Candida antarctica immobilisée (Chirazyme®) (Zhang et al., 2005).

b) N-acylation en solvants organiques.

La N-acylation enzymatique, quant à elle, a été nettement moins étudiée jusqu’à présent à cause probablement de la faible proportion d’enzymes capable de catalyser spécifiquement la synthèse de liaison amide. La synthèse de la liaison amide a été beaucoup étudiée pour la synthèse de peptides catalysée par des protéases. Dans certaines conditions, les lipases possèdent la propriété de catalyser la synthèse de la liaison amide, notamment pour la synthèse de lipoacides aminés non naturels, à partir de D-acides aminés ou de peptides contenant des L-lysines (Zaks et al., 1985). Aujourd’hui, il est reconnu que beaucoup de lipases présentent la capacité de catalyser la N-acylation (Djeghaba et al., 1991). L’étude des conditions réactionnelles de la N-acylation apparaît donc nécessaire en vue de la synthèse de lipoacides aminés et/ou de lipopeptides. Une étude a consisté à utiliser des lipases comme catalyseurs pour la préparation de dérivés acylés d’aminoacides et à combiner des procédés de synthèse enzymatique et chimique. Dans cette étude, les lipases de Pseudomonas sp. et

d’Aspergillus niger catalysaient sélectivement la réaction entre l’acétate de trifluoroéthyle et la fonction aminé en ε de la lysine de la molécule L-Phe-α-L-Lys–O–tBu et de la L-Ala-α -L-Lys–O–tBu dans l’acétonitrile. Les rendement obtenus étaient supérieur à 50 % (Gardossi et al., 1991). La synthèse de Nε-acyl-lysine a été réalisée grâce à une lipase immobilisée de

Rhizomucor miehei (Lypozyme®) à 90 °C dans des solvants organiques (différents éthers et hexane) en présence de triglycérides. Cette température de 90 °C peut paraître surprenante pour une enzyme, mais les auteurs démontrent que cette lipase immobilisée, en présence d’une phase aqueuse très limitée, présente une stabilité thermique remarquable. Dans ces conditions, ils obtiennent un rendement de 75 % et une régio-sélectivité en faveur de l’amine en position ε de la lysine de 100%. Cette étude a révélé que cette lipase catalyse facilement la réaction de trans-amidification entre l’acide oléique constitutif des triglycérides utilisés et l’acide aminé lysine (Montet et al., 1990). Cependant les rendements obtenus pour l’acylation de la lysine dans cette étude sont controversés notamment par d’autres auteurs qui pour une même réaction trouve un rendement de 10% (Jauregi et al., 1994). Ce faible rendement (2-9 %) a également été mis en évidence par Valivety et al., (1997) pour l’acylation d’acides aminés ( L-sérine et L-lysine) libres ou éthyle/méthyle esterifiés, avec Novozyme 435® (lipase B immobilisée de Candida antarctica) et Lipozyme® (lipase immobilisée de

Rhizomucor miehei). Les auteurs n’ont pu améliorer le rendement de l’acylation qu’en utilisant la α-Cbz-L-sérine (92 %), réalisant, alors, non pas une liaison amide mais une liaison ester. Notons que le paramètre jugé limitant dans ces réactions est toujours la solubilité des substrats en solvants organiques d’où l’alternative d’augmenter leur hydrophobie par dérivation chimique. Seule cette méthode, jusqu’à maintenant, est décrite dans la littérature. Il est très rare que la fonction amine en position α des résidus aminés et/ou des peptides soit acylé. Cette difficulté d’acylation est montrée dans le cas de l’acylation d’homologues d’ alanine, due à la présence de groupes donnant lieu à un encombrement stériques dans son environnement proche (Izumi et al., 1997). Enfin, une étude méthodologique a permis d’optimiser le procédé de N-acylation de la lysine par l’acide oléique catalysée par le Lipozyme® en jouant à la fois sur la température, les concentrations en substrats, l’hydrophobie du solvant et la teneur en biocatalyseur. La figure I.20. illustre l’influence de l’hydrophobie du solvant organique et de la température sur le taux de conversion.

Figure I.20. Relation entre l’hydrophobie du solvant, la température et le taux de conversion du substrat relative à la synthèse de Nε-oléyl lysine biocatalysée par Lypozyme® d’après Soo et al., (2004).

Ainsi, les auteurs ont suggéré que les conditions optimales de synthèse de ce dérivé acylé de lysine nécessitent une mise en œuvre du procédé dans l’hexane, une concentration en enzyme de 62 g/L, des concentrations en substrat et donneur d’acyle respectivement de 33 mM et 99 mM et une température de 57 °C pour obtenir un rendement optimal de 33 % après 96 h (Soo

et al., 2004).