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La problématique de la localisation du contrat virtuel en droit irakien du contrat virtuel en droit irakien

Conclusion Titre 1

Chapitre 1 La problématique de la localisation du contrat virtuel en droit irakien du contrat virtuel en droit irakien

272. Tout d’abord, rappelons l’importance de la détermination juridique d’un État compétent en matière de contrats à distance : d’une part, cette détermination impliquera toutes les procédures à suivre pour régler le litige ; d’autre part, elle assura l’exequatur d’un jugement rendu par un tribunal étranger qui devrait être exécuté sur le territoire d’un autre État.

273. Toutefois, pour témoigner de cette compétence, il faudra néanmoins vérifier au préalable que le contrat présente un élément qui le rattache avec le tribunal élu et les éléments du litige. En d’autres termes, le contrat à distance ne pose pas toujours un problème de conflits de juridictions de droit international privé. Cela dépend des circonstances qui entourent la transaction du contrat. Ainsi, nous constatons que la désignation d’un tribunal compétent, en cas de litiges liés aux contrats électroniques, n’est pas sans complexité en raison de l’hétérogénéité des formes, de la vitesse de propagation et/ou de connectivité avec les autres pays et sa dématérialisation qui ôte toutes lois purement étatiques. Dans ces difficultés, les normes pour déterminer la compétence d’une juridiction se sont divisées en deux segments : l’une se base sur le territoire et l’autre sur le côté personnel. Le territoire touche des questions sur l’élément d’extranéité et le côté personnel se penche sur les critères de conclusion et exécution des contrats électroniques.

274. Que ce soit dans un contrat exécuté par voie électronique matériel (livraison de biens ou de services), ou que ce soit dans un contrat exécuté et conclu d’immatériel, un autre problème vient se greffer en plus de l’élément d’extranéité : la distinction à faire entre produit et service. Pour ce faire, en tentant de répondre aux différents problèmes mis en cause par la nature d’Internet, nous aborderons cela en deux sections : La première s’axera sur la difficulté à déterminer l’extranéité du contrat, en cas de litige sur Internet (section 1). La seconde s’orientera vers les difficultés issues de la conclusion et de l’exécution même du contrat (section 2).

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Section 1 : L'élément d'extranéité du contrat virtuel

275. Dans un premier temps, si nous observons la doctrine irakienne, nous pouvons voir qu’elle a essayé de construire des normes qui déterminent un certain rapport contractuel. Ces normes ne sortent pas des textes législatifs qui existent dans le droit international privé314. Si l’on prend les dires de Stéphanie Chatillon315. celui-ci soutiendrait que certaines de ces normes se réfèrent directement au droit international comme c’est le cas avec les normes de nationalités, de contrats de mariage, … Une norme qui donne une base attribuable en matière de statut personnel.

276. Dans notre cas, il s’agit d’une situation différente car ce sont des contrats en général même pour les contrats en vue d’un commerce international ; en raison de leur nature particulière (norme de conclusion et d’exécution dans un contrat) qui est rigide dont elle ne relève pas du tribunal compétent mais dont elle a besoin d’une interprétation indispensable des juges pour que l’application soit effectuée. Cet élément est parfois difficilement interprétable, ce qui nous amène à voir cette section en deux paragraphes : la première partie se focalisera sur la définition même de l’élément d’extranéité (Paragraphe 1), et la seconde partie se penchera sur les confusions possibles de ce concept (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La définition de l’élément d’extranéité

277. Cette notion d’extranéité reste difficile à cerner tant elle parait hétérogène : elle varie selon les cadres juridiques et les langues issues de l’État. Par exemple, entre la version du droit international privé et le droit international public, il y a une légère différence. L’un penche pour une vision liant l’économie et l’autre vers une description plus juridique, ne se souciant que de la répartition des éléments de rattachement qui peuvent réunir plusieurs juridictions. Mais, il est possible d’apercevoir une certaine conciliation entre le domaine juridique et le domaine économique dans une définition qui

314 Cf. H. AL DABBAGH., « Regards critiques sur les règles de conflit de lois en droit international privé irakien »,Op. cit., p.885s.

121 est approchée par certains pays effectuant des échanges commerciaux importants entre les États. Donc, comme dit précédemment, l’extranéité, dans sa définition, se divise en deux parties : l’aspect juridique (point A) et l’aspect économique (point B). Dans ces analyses, il nous faut admettre dès lors que la définition de territoire prendra une place majeure car l’extranéité ne peut se défaire de sa surface physique.

A. Le critère juridique

278. En fait, le droit international privé ne donne nulle part une définition de l’élément d’extranéité. Tout ce que l’on sait, c’est que le droit international privé met de côté les règles substantielles de droit interne pour mettre en avant des règles de droit international privé. L’extranéité, qu’elle soit situable avec ses critères géographiques (situation réelle) ou qu’elle soit fondée sur des critères purement personnels tels que la nationalité (situation personnelle), se définit, si l’on rejoint la doctrine, « comme une limite juridique au champ

d’application dans l’espace de la loi du for316

».

279. Généralement, pour qualifier une relation qui met en jeu le caractère international, il faut qu’elle ait un lien de rattachement avec l’étranger. Comme en témoigne Jean Christophe Pommier317, il s’agit du « facteur d’extranéité ». En droit international privé, l’extranéité de la relation juridique est une condition requise pour que la juridiction puisse avoir un assouplissement en vue des intérêts de l’ordre interne mais aussi des parties qui sont intégrées dans ces rapports internes, tout comme les intérêts de l’ordre international318.

280. Nous voyons bien l’importance de l’extranéité au sein des litiges entrainant une réflexion autour des règles de compétences des tribunaux. Mais malgré l’importance de ce point, le Code civil Irakien n’offre en rien un indice pouvant répondre à la question même de l’extranéité. De ce fait, il existe d’emblée des lacunes dans la Loi irakienne et devant ce

316 C. ALRIC, « L'élément d'extranéité préalable en droit international privé » Legal News Affaires

internationales (Doctrine), 2003. D’après l’édition de 2013 ; S. CHATILLON, Le contrat international,

Paris, Vuibert, 4e édition, 2011. p.12s.

317 J-C. POMMIER., préface Y. LOUSSOUARN, Principe d’autonomie et loi du contrat en droit international privé conventionnel, Economica n°139, Paris, 1992, p.141.

122 constat, si l’on observe Hassan Mohamed et Ali Ghaleb Daoudi319, la doctrine s’est efforcée de mettre à jour une définition de l’extranéité. D’autre part, la jurisprudence irakienne a le droit de recours au droit comparé comme le souligne l’article 30 du Code civil irakien, comme vu dans les chapitres antérieurs320. Par contre, par comparaison, le législateur français, avant l’abrogation de 1966, avait mis l’accent sur l’aspect économique tout comme l’indique l’article 1492 du Code civil français : « est international l’arbitrage

qui met en cause des intérêts du commerce international », ce que Maen Al Qudah321

qualifia comme étant un bon exemple du critère économique dans la définition de l’extranéité. Par ailleurs, Messieurs les Professeurs Cadiet Loïc et Jeuland Emmanuel définissent l’élément d’extranéité comme :

« un élément constitutif de la relation juridique litigieuse localisé à l’étranger. L’extranéité peut tenir aux parties en cause : l’une d’elle au moins est étrangère ou l’objet du différend : l’immeuble dont l’attribution successorale est contestée se situe à l’étranger.322

»

281. Dans ce sens, nous pouvons mettre en lien le droit international privé tunisien323 avec son second article. Comme le rappelle le doyen Batiffol, à propos de l’aspect juridique de l’extranéité, un contrat est juridiquement international lorsque

« par les actes concernant sa conclusion ou son exécution, ou la situation des parties quant à leur nationalité ou leur domicile, ou la localisation de son objet, il a des liens avec plusieurs systèmes juridiques.324 »

319 H. MOHAMED et A. GHALEB DAOUDI, Le droit international privé, les conflits de lois, de

juridiction et d'exécution des jugements étrangers [titre traduit de l’arabe], deuxième partie, 4ème édition, Alatk Caire, 2011, p.19.

320 Cf. chapitre 2 titre 1, p. 107

321 M. AL QUDAH., L’exécution du contrat de vente international de marchandises, P.U de Reims Champagne – Ardenne, 2007, p. 29.

322 L. CADIET et E. JEULAND, Droit judiciaire privé, 7e édition, LexisNexis, 2013, p.132.

323 L’article 2 du Code de droit international privé tunisien a défini l’internationalité en ces termes : « est international le rapport de droit rattaché au moins par l’un de ses éléments déterminants à un ou plusieurs ordres, autres que l’ordre juridique tunisien ». Ainsi, l’internationalité du litige nécessite un élément d’extranéité qui soit déterminant. [En ligne] http://www.droit-afrique.com (consulté le 13/03/2016).

324 H. BATIFFOL, « Droit international » in Contrats et Conventions, n° 9, Encyclopédie Dalloz, 1972. (Parmi les exemples rencontrés en jurisprudence, on relèvera notamment la nationalité différente des cocontractants retenue dans la célèbre affaire American Trading (Cass. civ. 5 décembre 1910, Grands arrêts jurispr. DIP n° 11), leurs résidences dans des pays différents (Cass. com., 19 janvier 1976, préc.) ou le lieu d'exécution du contrat à l'étranger (Cass. 1re civ. 9 janvier 1968, JDI 1968, p. 717, note M. SIMONDEPITRE ; JCP 1968, II, n° 15451, note G. LYON-CAEN ; Cass. soc. 8 juillet 1985, Rev. crit. DIP 1986, p. 113, note H. GAUDEMET-TALLON ; Cass, soc. 6 novembre 1985, Rev. Crit. DIP 1986, p. 501, note P. LAGARDE. Contra Cass. 1re civ. 7 octobre 1980, JCP 1980, II, n° 19480, concl. GULPHE ;

123 282. Selon cette dernière définition, la notion d’extranéité se fonde sur des éléments objectifs de la relation avec le contrat : le domicile ou le lieu des intérêts commerciaux est mis en avant. L’extranéité est inhérente, dans cette définition, à sa localisation étrangère par rapport aux éléments (sujets et objets) du litige. Dans ce cas de figure, le principe d’extranéité consiste à introduire la mise en avant d’un système international dérogatoire du droit commun, résultant vers deux conditions :

 Premièrement, le rapport juridique doit conserver un ou divers éléments d’extranéité, ce qui signifie qu’il y aura un rapport mis en contact avec un ou plusieurs ordres (économique et/ou juridique) étrangers325.

 Deuxièmement, s’il y a des rapports avec les pays étrangers, le contrat peut revêtir un autre aspect plus international, en fonction de la nationalité des parties, de leurs domiciles, de la localité de l’objet conclu ou même du moment et du lieu de la conclusion du contrat326.

283. Si l’internationalité juridique est d’actualité, comme l’indique l’article 3 du Règlement de Rome I 327, des variantes existent : dans certains cas, il y aura une considération vis-à-vis d’une internationalité objective qui ne prend en compte que des éléments de fait pouvant être rattachés aux ordres juridiques mais d’autres considèreront cette internationalité de manière plus subjective découlant de la volonté seule des parties. La Convention de Vienne328 rapporte que la notion d’extranéité est celle qui prévaut dans un contrat international. Ce qui implique un contact entre deux États au moins, mettant de

Rev. Crit. DIP 1981, p. 313, note J. MESTRE (dont la solution n'est sans doute pas étrangère à des considérations d’espèce).

325 La doctrine distingue l’internationalité de l’extranéité. On peut poser que l’internationalité est une appartenance relationnelle à au moins deux ordres juridiques différents, dont un est étranger à l’ordre juridique de référence ; l’extranéité serait, en revanche, une appartenance relationnelle à un ordre juridique étranger au for qui suppose défini un ordre juridique de référence sur la distinction. Cf. E.WYLER. et A. PAPAUX ., « Extranéité de valeurs et de système en droit international privé et en droit international public » In L’extranéité ou le dépassement de l’ordre juridique étatique, 1999, pp.239- 241.

326

S. CHATILLON. Op. cit., p.13s.

327 Règlement (CE) n°593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (dit « Rome I » , Cf. L’article 3 du règlement Rome I. Journal officiel de l'Union européenne» L 177 du 4 juillet 2008).

328 Cf. La convention de Vienne de 1980 sur Les contrats de vente internationale de marchandises. La Convention définit le critère de l’extranéité avec l’établissement, domicile ou résidence de l’acheteur et vendeur, lorsque les deux se trouvent dans différents pays, l’élément d’extranéité est donné.

124 côté les contrats internes. Bien entendu, ces éléments, qui prouvent l’internationalité d’un contrat, devront être suffisants et visibles.

B. Le critère économique

284. Bien que le critère juridique paraisse lisible et facile pour la détermination du type de contrat (international ou non), il est cependant insuffisant et inflexible car dans un contrat, il se peut que l’élément d’extranéité soit fortuit ou inefficace, comme nous l’indique par exemple le doyen Battifol329

. C’est pour la raison suivante que la doctrine a proposé un second critère, cette fois-ci économique. Un critère selon lequel la jurisprudence admet souvent, selon Monsieur le Professeur Jean-Michel Jacquet330, une internationalité du contrat même s’il ne comporte en rien des éléments d’extranéité. Elle mise sur le fait que les marchandises sont d’origines étrangères, ou destinées à une exportation, ou encore dans lequel une activité futur de l’une des parties se déroulerait à l’étranger… Autrement dit, dans ces hypothèses, l’on pourrait sous-entendre que les intérêts du commerce international viennent par anticipation. Comme le dit Jean-Michel Jacquet, le contrat serait d’ordre économique international car il met en commun des parties extérieures lors de l’exécution contractuelle331.

285. Pour que la notion d’économique vienne en jeu, le contrat doit contenir un mouvement de biens, de services ou de paiements vers l’extérieur. Et pour que ce même contrat ait une reconnaissance internationale, il doit contenir un élément qui se soit déplacé d’un pays à un autre que celui qui a proposé la conclusion du contrat332

. Une note de Niboyet333 met en évidence la réciprocité dans les valeurs au moment de la conclusion du contrat en évoquant que la Cour de cassation a estimé que le contrat de vente est international du fait qu’il met en double action une importation et une exportation. En parallèle, la Cour de cassation a jugé qu’

329 A titre d’exemple, la Cour de cassation a refusé, dans ce contexte, la qualification de contrat

international au contrat d’un agent commercial français qui devait exercer son activité en Colombie pour le

compte d’un autre Français. Cass.com, H. BATTIFOL., « note » in Revue Critique de Droit International

Privé (R.C.D.I.P), 1976, p.503.

330 J.-M. JAQUET., Le contrat international, Editions Dalloz, 2ème édition, 1999, p.12.

331 Ibid

332

S. CHATILLON. Op. cit.,p.17 et ss.

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« il fallait entendre par opérations celles se traduisant par un double mouvement de marchandises ou de valeurs de la France vers un pays étranger et celui-ci vers la France.334 »

286. Enfin, nous pouvons conclure qu’un contrat international est reconnu comme tel s’il y a ce mouvement intérieur vers extérieur. L’objet marchand ou le service est mis au centre de ces mouvements car il suffit à lui seul de définir si le contrat est international, où il pourra être soumis au droit international contrairement dans le cas d’un contrat strictement interne, ce qui rejoint les propos de Philippe Kahn335. Dans cette perspective, toujours par le biais de la Cour de cassation, celle-ci a estimé que :

« … le caractère international d’une opération ne dépend pas nécessairement du domicile des parties et du lieu stipulé pour imprimer aux mouvements de fonds qu’elle comporte un caractère dépassant le cadre de l’économie interne.336

»

287. Ces deux critères (juridique et économique) sont applicables sur des litiges ou faits traditionnels (nous avions utilisé des exemples assez datés) mais que se passe-t-il si ces critères sont remis en question par Internet et son espace bien spécifique ? Au demeurant, le territoire reste le moyen le plus coutumier pour déterminer la situation contractuelle à la catégorie d’une relation internationale. Ce qui implique que la notion d’extranéité est aussi conçue pour des faits matériels avec un espace géographique, avec des frontières circonscrites, avec des États bien distincts où un pouvoir exécutif est visible sur les biens et les personnes. C’est pourquoi, dans le second paragraphe, la question du brouillage causé par Internet, en plus des différends dans sa définition initiale, sera très pesante sur la qualification même de l’extranéité que peut avoir un contrat.