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Malgré les études qui révèlent une corrélation significative entre une formation qui associe l’expertise linguistique, professionnelle et culturelle et l’avantage compétitif des diplômés sur le plan de l’employabilité (Commission Européenne, 2007; Grosse, 1998), entre la valeur ajoutée accordée aux entreprises sur le plan de la compétitivité sur le marché mondial (ELAN, 2006a; Enderwick & Akoorie, 1994; Grosse, Tuman, & Critz, 1998; P. R. Harris, 2004), et le rôle fondamental des compétences communicatives et langagières dans la nouvelle économie mondialisée, l’information sur les formations offertes sur le marché canadien et la pertinence des formations qui associent une expertise en langue de spécialité et en contenu professionnel, semblent faire défaut. Des études révèlent qu’une formation universitaire efficace doit favoriser le développement des compétences reliées au domaine spécifique (domaine- related competences) (Douglas, 2000), c’est-à-dire la connaissance des concepts de base, les compétences génériques, les compétences linguistiques et les connaissances culturelles, qui permettent aux diplômés de communiquer le contenu spécifique, à l’oral et à l’écrit, en dépit des contraintes contextuelles de l’emploi de la langue.

Les activités de la nouvelle économie mondialisée entraînent un accroissement des communications, un besoin accru de main-d’œuvre disposant de compétences communicatives, et la mise en oeuvre de nouvelles pratiques langagières et de ressources linguistiques. En outre, la nouvelle économie exige les habiletés langagières standardisées et scolarisées qui sont plus valorisées dans ce contexte socioéconomique. Par conséquent, les formations de l’enseignement supérieur doivent mettre l’accent sur le développement des habiletés communicatives et la relation entre l’acquisition et l’utilisation des connaissances spécialisées. Il y a un besoin croissant de fournir des programmes de langues de spécialité et des savoir- faire professionnels intégrés qui sont pertinents pour la nouvelle économie socioéconomique.

Pourtant, il n’est pas certain que les établissements d’enseignement supérieur canadien tiennent compte de la valeur et de l’utilité d’une formation en langue de spécialité qui pourrait répondre dans une certaine mesure aux besoins scolaires, sociaux, professionnels et économiques des étudiants. Par exemple, pour connaître la situation des formations en langues des affaires aux États-Unis, le Centre for International Business Education and Research12 (CIBER) a réalisé plusieurs sondages depuis 1982. La base de données pour les années 2004-2006 compte 31 centres CIBER dans des universités américaines dont dix-huit offrent les cours de Languages for Specific Business Purposes (LSBP) jusqu’à un maximum de dix langues (Grosse, 2008).

À notre connaissance, il n’existe pas d’études empiriques semblables au Canada. On pourrait penser qu’il manque des formations en langues de spécialité ou que les langues de spécialité n’ont pas encore atteint le statut de sous-discipline formelle des sciences du langage (Swales, 2000) pour mériter une étude en profondeur. Afin de combler cette lacune, notre recherche a pour objectif l’examen des formations et des programmes d’études des langues de spécialité offerts par les unités de langues ou par

12 Les 31 Centres for International Business Education and Research ont été établis dans les

des unités professionnelles au sein des établissements d’enseignement supérieur canadiens. Les questions de recherche guidant cette étude sont les suivantes :

• Quels établissements d’enseignement supérieur canadiens offrent des programmes d’études professionnalisant intégrant des compétences langagières sur objectifs spécifiques et le savoir-faire professionnel ?

• Quels sont les enjeux principaux compte tenu de la nature et de la fonction des programmes et des cours de langues de spécialité au sein des établissements d’enseignement supérieur ?

• Compte tenu de la nature et de la fonction des programmes et des cours de langues de spécialité, quelles sont les recommandations les plus fréquentes dans les rapports des évaluateurs externes ?

Pour répondre à nos questions, nous proposons d’abord d’établir une liste des universités et des unités qui offrent des formations en langues de spécialité. Ensuite, il faut repérer les programmes qui ont fait l’objet d’une évaluation périodique de programme d’études. Nous proposons une démarche méthodologique assez originale en analysant les mécanismes d’évaluation de programme d’études de la dernière évaluation produite par l’unité, c’est-à-dire le rapport d’autoévaluation, le rapport du comité interne, le rapport des experts externes, la réponse produite par l’unité, le rapport institutionnel final et le plan d’action. Nous avons choisi d’analyser ces mécanismes parce qu’ils permettent d’identifier les points forts des formations en langues de spécialité, le jugement sur la qualité du programme, les enjeux majeurs, les aspects à améliorer et les recommandations quant aux suites à donner à l’évaluation. Ils permettent aussi de mettre en évidence la pertinence des formations en langue de spécialité pour les parties prenantes. Finalement, ils fournissent les pistes à suivre pour la conception et l’amélioration des cours et des programmes d’études de langues de spécialité.

Cet encadrement de l’évaluation de programme pourrait être considéré comme un point fort du système universitaire. Il s’inscrit dans la panoplie des mécanismes de

reddition de comptes et d’imputabilité que les universités ont mis en place au fil des ans pour assurer, auprès de l’État comme auprès de la société en général, la crédibilité de la qualité de la formation qu’elles dispensent. Nous revenons en plus de détail sur les mécanismes de l’évaluation de programme dans notre cadre conceptuel et nous discuterons de notre choix d’examiner les documents d’évaluation de programmes dans le chapitre sur la méthodologie.

Le chapitre suivant examine les retombées de la nouvelle économie mondialisée pour la didactique des langues et des langues de spécialité en particulier. Notamment, les bénéfices des compétences bilingues, plurilingues et pluriculturelles, les avantages des formations en langues de spécialité attribuables à la spécificité de la formation en langue de spécialité, et les modèles d’évaluation de programme sont discutés.

Introduction

Au chapitre précédent, trois hypothèses liées à l’impératif d’offrir des formations en langue de spécialité dans les établissements d’enseignement supérieur au Canada ont été formulées. Premièrement, l’accent mis sur les emplois du secteur tertiaire attribuable à la nouvelle économie mondialisée, et sur la fonction organisationnelle du langage, nécessite une main-d’œuvre hautement qualifiée en compétences communicationnelles. Deuxièmement, le développement des compétences en langues de spécialité et des compétences interculturelles permet aux étudiants de bénéficier d’un avantage compétitif sur le marché de la main-d’œuvre. La troisième hypothèse concerne le manque de formation adéquate en langues de spécialité et le besoin d’étudier la pertinence et la qualité des formations en langues de spécialité associées à une formation professionnelle au sein des établissements universitaires. Dans la première partie de ce chapitre, nous proposons d’étayer ces trois hypothèses. Dans la deuxième partie, nous exposons les approches en ce qui a trait à l’évaluation des programmes et des services, et les facteurs du développement de l’évaluation périodique des programmes d’études universitaires. Nous terminons avec quelques exemples d’initiatives en évaluation des formations en langues et en langues de spécialité.

2.1 Bénéfices des compétences en langues