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Le milieu de l’enseignement supérieur est le siège de développements importants en matière de pratiques évaluatives. Depuis plusieurs années, l’évaluation s’est développée sous plusieurs formes: évaluation institutionnelle, évaluation des apprentissages, évaluation de l’enseignement, évaluation de la recherche, évaluation du personnel et ainsi de suite. L’évaluation de programme est « apparue comme une des clés du développement d’un nouveau mode de gouvernance dans les systèmes éducatifs, marqué par l’autonomie locale ainsi que ses contreparties, l’imputabilité (ou redevabilité) et la reddition de compte » (D'Arrisso, 2003, p. 11). Par conséquent, à travers la multitude de mécanismes d’évaluation qui se mettent en œuvre au sein

des établissements d’enseignement supérieur, les mécanismes d’évaluation de programme occupent une place de choix.

3.5.1 Facteurs de développement

Depuis une trentaine d’années, les mécanismes d’évaluation de programme sont en forte croissance dans l’enseignement supérieur. Plusieurs facteurs expliquent le développement des mécanismes de l’évaluation de programmes: les difficiles choix budgétaires effectués lors de la crise des finances publiques, les innovations introduites au nom de l’internationalisation et guidées par les évaluations afin de répondre aux forces du marché, et le développement d’un nouveau mode de gouvernance marqué par l’imputabilité et la reddition de compte. Dans une revue de littérature sur la mesure de la qualité de l’activité universitaire, Robitaille (1996) souligne les facteurs suivants qui poussent à un plus grand recours aux pratiques évaluatives au sein des universités: la massification de l’enseignement supérieur, l’accroissement des frais de scolarité, la crise des finances publiques, la perspective de voir l’enseignement supérieur jouer un rôle plus important dans le développement des économies nationales et l’internationalisation des échanges commerciaux.

À l’égard de l’efficacité des institutions qui sont financées par des fonds publics, certaines inquiétudes s’expriment à l’échelle internationale, et l’on tente de plus en plus d’exercer un contrôle sur les activités institutionnelles. Par conséquent, dans plusieurs pays, des pressions s’exercent sur les universités pour qu’elles démontrent que leurs programmes d’études sont effectivement de haute qualité, qu’ils répondent aux besoins de la société, qu’elles gèrent de façon responsable les fonds qui leur sont attribués à cette fin et que leurs procédures d’évaluation sont transparentes (CREPUQ, 2004). Pour répondre à ces pressions de l’imputabilité, de la reddition de compte et de l’obligation des résultats, les établissements d’enseignement supérieur ont recours à des processus institutionnels d’évaluation pour assurer la qualité de l’enseignement supérieur. C’est aussi dans ce contexte que l’on peut situer la demande pour la mise au point d’indicateurs quantitatifs comme outils de régulation d’un système éducatif sur les plans local, national et international (Blais, et coll.,

2001). On les valorise de plus en plus pour comprendre et comparer des systèmes d’éducation diversifiés, complexes et dynamiques.

On trouve six buts attribués à l’évaluation de programme au sein des établissements d’enseignement supérieur: évaluer la qualité de l’offre de programme dans une institution, porter un jugement sur la valeur d’un programme, aider à la prise de décisions relative à la programmation, améliorer les programmes, éliminer les programmes inefficaces, et la reddition de compte au public (Saterlee, 1992). Ces pressions ont aussi amené certains pays à créer des agences nationales indépendantes qui vérifient la qualité des programmes d’enseignement supérieur. Les agences veillent aussi à la qualité des évaluations de programmes d’études en s’assurant que ces évaluations correspondent aux standards appropriés, rendent un jugement utile aux clients et soient solides en général. La section suivante résume les politiques institutionnelles qui assurent la qualité de l’enseignement supérieur aux provinces et territoires canadiens.

3.5.2 Politique universitaire

En ce qui concerne le Canada, l’éducation relève des gouvernements provinciaux et territoriaux. Chaque province et chaque territoire ont établi ses propres lois, politiques et procédures qui régissent le fonctionnement des établissements postsecondaires. Les gouvernements de chacune des dix provinces et de chacun des trois territoires du Canada ont recours à la législation pour établir, régir, reconnaître et assurer la qualité de l’éducation postsecondaire. Par conséquent, de solides politiques et processus institutionnels sont à la base du régime d’assurance de la qualité de l’enseignement supérieur au Canada (AUCC, 2007). Par exemple, pour assurer la qualité des évaluations, les processus ont souvent recours à des méthodes d’autoévaluation et font appel à des compétences universitaires externes, pour examiner la qualité des programmes.

Les politiques institutionnelles peuvent être autonomes ou s’insérer dans un régime des politiques et des processus qui garantissent un second palier d’assurance de la

qualité des systèmes d’enseignement supérieur, par exemple en Colombie- Britannique, en Alberta, en Ontario, au Québec, en Nouvelle-Écosse, au Nouveau- Brunswick et à l’Île du Prince-Édouard (Association des universités et collèges du Canada, 2008). Dans certains cas, il s’agit d’un mécanisme qui s’applique aux établissements d’enseignement supérieur d’une seule province, et dans d’autres cas, d’un mécanisme régional qui s’applique aux établissements de deux provinces ou plus. Les mécanismes provinciaux ou régionaux relèvent soit d’un organisme qui représente les universités, soit d’une entité du gouvernement provincial. Quelquefois, ils relèvent à la fois du gouvernement et des établissements d’enseignement supérieur. Ces mécanismes peuvent servir à garantir que les méthodes d’assurance de la qualité des programmes universitaires sont adéquates et correspondent à une norme convenue. Dans le cas contraire, ils peuvent donner lieu à une révision des programmes. Concernant les nouveaux programmes, le processus provincial ou régional d’évaluation peut servir à guider l’implémentation des plans d’action et à évaluer les résultats intérimaires quand le programme est en voie de réalisation.

3.5.3 Mécanismes d’évaluation de programme dans l’enseignement supérieur Sur le plan de la pratique, différents mécanismes d’évaluation de programme ont été mis en œuvre au sein des établissements de l’enseignement supérieur. Ce qui suit est une description des mécanismes provinciaux et régionaux d’assurance de la qualité mis en œuvre par des établissements publics d’enseignement supérieur canadiens (AUCC, 2007).

La Colombie-Britannique a constitué un Conseil d’évaluation de la qualité des diplômes (Degree Quality Assessment Board) et a établi les critères servant à évaluer les demandes d’établissements privés ou de l’extérieur de la province qui souhaitent offrir des programmes menant à un grade ou utiliser l’appellation « université » dans la province.

En Alberta, la loi prévoit la mise sur pied du Conseil de la qualité Campus Alberta (Campus Alberta Quality Council) qui examine les demandes d’établissements

publics et privés désireux d’offrir des programmes menant à des grades. Les établissements doivent montrer qu’il existe un besoin de grades additionnels et que les programmes satisfont aux normes de qualité. Des prix monétaires sont accordés par Alberta Learning pour reconnaître et récompenser le rendement d’établissements d’enseignement supérieur, et pour encourager et soutenir l’amélioration continue.

Il n’existe aucun processus formel d’assurance de la qualité imposé par la loi en Saskatchewan. Les deux universités de la province sont autorisées à offrir des programmes menant à un grade, et chaque établissement utilise des processus internes pour assurer la qualité de ses programmes. Saskatchewan Learning a mis sur pied un comité directeur, au sein duquel sont représentés les universités et collèges de la province, pour surveiller lʼélaboration d’un plan de rendement stratégique du secteur de l’éducation.

Au Manitoba, il n’existe aucun processus pour évaluer les programmes continus. Cependant, le Conseil de l’enseignement postsecondaire surveille la qualité grâce à des sondages menés tous les cinq ans sur le degré de satisfaction des diplômés et des étudiants. De plus, les universités du Manitoba et de la Saskatchewan sont membres du Conseil de vérification de l’évaluation des programmes du Manitoba et de la Saskatchewan (Manitoba-Saskatchewan Universities Program Review Audit Council). Composé de six établissements, le conseil surveille la fréquence, la qualité, les conséquences et l’efficacité des évaluations des programmes d’études, fournit des commentaires et des conseils aux établissements membres, et diffuse la réflexion la plus à jour et la plus éclairée en matière d’évaluation de programmes.

En Ontario, le Conseil des universités de l'Ontario a rédigé des lignes directrices pour la vérification régulière des politiques et des procédures à suivre pour l’évaluation périodique de la qualité des programmes de premier cycle des universités ontariennes. L'organisation et la gestion des vérifications sont confiées au Conseil ontarien de vice-présidents d’université à l'Ontario (Council of Academic Vice-Presidents – OCAV), et le processus est confié à un comité de l'OCAV, le Comité de vérification

de l’examen des programmes de premier cycle (UPRAC). Les vérifications ont pour but d’offrir aux établissements des conseils objectifs sur la manière d’améliorer leur processus d’examen de la qualité, ainsi que d'assurer au gouvernement et à la population de l'Ontario que la qualité des programmes de premier cycle est maintenue et améliorée.

Les universités du Québec ont confié à la CREPUQ la tâche d’évaluer la qualité des programmes menant à un grade de premier, de deuxième ou de troisième cycle. En 1991, la CREPUQ a adopté une politique-cadre pour l’évaluation périodique des programmes universitaires existants. Depuis, chaque établissement universitaire québécois est tenu d’évaluer au moins tous les dix ans la qualité et la pertinence de tous les programmes qui mènent à l’obtention d’un grade. Pour assurer la mise en œuvre de sa politique-cadre, la CREPUQ a institué la Commission de vérification de l’évaluation des programmes dont le rôle est de vérifier la conformité des politiques et des pratiques institutionnelles avec les buts, les critères et les modalités du processus d’évaluation établi. Les recommandations de la Commission sont directement adressées à l’établissement concerné et ne sont pas soumises à l’approbation de la CREPUQ. Les rapports de vérification de la Commission sont rendus publics et peuvent être consultés sur le site web de la CREPUQ.

Le mandat de la Commission de l’enseignement supérieur des provinces maritimes (CESPM) englobe le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et l’Île du Prince- Édouard. La commission est chargée d’examiner toutes les propositions de nouveaux programmes et de modifications de programmes, et de surveiller les mécanismes d’assurance de la qualité des établissements. La CESPM rend compte directement au Conseil des premiers ministres des Maritimes. En 2000, la CESPM a entrepris la mise en œuvre de sa politique sur lʼassurance de la qualité dans le but de garantir que les procédures utilisées pour évaluer la qualité des programmes existants sont des mécanismes adéquats d’assurance et dʼamélioration de la qualité. Le Comité responsable de la vérification de l’assurance de la qualité, formé par l’Association des universités de l’Atlantique et la CESPM, a pour mandat de conseiller et d’aider la

CESPM dans l’amélioration continue de la qualité des programmes et de l’enseignement universitaires.

À Terre-Neuve-et-Labrador, il n’y a qu’une université. La qualité de ses programmes fait l’objet d’un processus interne d’autoanalyse et d’examen. Chaque département passe en revue ses propres programmes et prépare des rapports qui sont présentés à un comité d’examen composé de deux représentants de l’extérieur de l’université et de deux représentants de l’université qui ne font pas partie du département visé. Le comité étudie les rapports et prépare des réponses qui aident le département dans sa planification stratégique. Ces procédures d’assurance de la qualité sont appliquées tous les sept ans.

Le seul établissement postsecondaire des Territoires du Nord-Ouest est un collège communautaire. L’Aurora College est chargé de l’enseignement postsecondaire, offre des programmes de niveau universitaire et décerne des certificats, des diplômes et des grades conférés par des universités. Les normes des programmes sont prévues dans les accords avec certaines universités et maintenues grâce au processus d’examen en vigueur au sein de chaque établissement.

Le seul établissement postsecondaire du Yukon est un collège communautaire. Le Yukon College a pour mandat d’offrir des programmes menant à un certificat, à un diplôme ou à un grade. Le collège n’est officiellement affilié à aucune université.

Le seul établissement postsecondaire du Nunavut est un collège communautaire. Le Nunavut Arctic College offre des programmes d’enseignement aux adultes et des programmes de niveau universitaire en vertu d’accords avec certaines universités, et décerne des certificats et des diplômes. La loi prévoit la création d’un bureau des gouverneurs du collège qui doit rendre des comptes au ministre. Le bureau est chargé de lui faire des recommandations sur les priorités en matière de programmes et de cours, et d’établir un règlement sur les normes d’enseignement.