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CHAPITRE 1 : Détecteurs de rayons X

1.5 Détecteurs ponctuels à scintillation

1.5.1 Principes de fonctionnement

Il est intéressant d'en détailler précisément le fonctionnement car un détecteur à pixels hybrides peut être considéré comme une matrice de centaines de milliers de détecteurs ponctuels.

Les détecteurs ponctuels à scintillation ou compteur à scintillation détectent indirectement les photons X. Les photons X sont convertis en photons visibles dans un scintillateur : un cristal fluorescent, par exemple de l’iodure de sodium NaI, qui émet des photons visibles lorsqu'il absorbe un photon X (Fig. 1.8). Ces photons visibles sont convertis en électrons dans un semi-conducteur (photocathode), puis ces électrons sont multipliés dans les dynodes successives et l'on

obtient à la sortie du photomultiplicateur une impulsion dont l'amplitude est proportionnelle à

l'énergie du photon X incident (Figure 1.8). Un amplificateur discriminateur vient alors valider

l'évènement qui sera ensuite simplement compté.

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Un photomultiplicateur (PM) est composé d'une photocathode, qui est en général une mince couche d’un alliage métallique alcalin, dans laquelle les photons visibles issus du scintillateur sont convertis en électrons par effet photo-électrique et d'une série d’électrodes appelées dynodes (pouvant aller de dix à quatorze), formées d’un alliage particulier, souvent CuBe, portées à des potentiels électriques croissants. Les photoélectrons générés par la photocathode sont accélérés par une différence de potentiel de l’ordre de cent volts entre deux dynodes successives. Chaque dynode réémet entre deux et quatre électrons pour un électron reçu, c’est ainsi que le signal est amplifié. Le même mécanisme d’amplification se reproduit sur chacune des dynodes successives,

produisant un gain pouvant atteindre 107après quatorze étages.

Ces quelques millions d’électrons génèrent une impulsion électrique aux bornes de la résistance à haute impédance R (Fig. 1.9). Les impulsions générées par le PM sont ensuite amplifiées, discriminées, et comptées. La réalisation de ces opérations successives est schématisée à la figure 1.9.

Figure 1.9 : Principe de la chaîne de comptage d’un détecteur à scintillation.

- Discriminateur, seuillage en énergie, bruit de fond :

On a vu que l’amplitude des impulsions venant de la photocathode et ensuite du PM est proportionnelle à l’énergie des photons détectés. Il est donc possible de discriminer les impulsions électriques en comparant leurs amplitudes avec différentes valeurs de seuil et d'ainsi filtrer en énergie les photons incidents. Sur la figure 1.10, on considère en A l’impulsion d’un photon donné et en B, celle d’un photon de plus grande énergie. La hauteur du seuil Vs va déterminer si ces impulsions seront validées ou non. On peut donc adapter cette valeur de seuil à l’énergie de la source de rayons X que l’on va utiliser. Dans le cas de comptage de photons X, il n’y a pas de

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bruit de fond, car pour que la mesure soit faussée en comptant un photon de trop il faudrait un parasite d'un niveau supérieur au seuil. Il suffit donc de garder un niveau de seuil sensiblement au-dessus du niveau du bruit pour éliminer totalement le bruit.

Figure 1.10 : Illustration du principe de seuillage. En A, l’impulsion est sous le seuil, elle n’est pas validée, en B, elle est au-dessus, elle est validée.

Le bruit (en dessous du seuil) ne perturbe nullement la mesure.

- Comptage, problème de temps mort :

Les impulsions générées par le PM sont espacées dans le temps ce qui permet à la chaîne de comptage de les séparer. Si le flux de photons est trop important, ces impulsions se rapprochent. Certaines finiront par se toucher, se mélanger et être indiscernables. Le détecteur va voir moins d’impulsions que de photons : le comptage n'est plus proportionnel au flux de photons.

Comme montré sur la figure 1.11, en A les deux impulsions sont espacées d’un temps t1

suffisamment important qui permet de séparer les deux impulsions. Au contraire, dans la situation

B, avec (t2) trop petit, les deux impulsions sont trop rapprochées, elles se recouvrent et se

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Figure 1.11 : Illustration du problème de temps mort. En haut, le signal électrique, en bas les impulsions mise en forme et prêtes à être comptées.

Le temps mort est défini comme le temps pendant lequel le détecteur est aveugle, juste après avoir détecté un photon, c’est-à-dire le temps minimum pour pouvoir séparer deux impulsions. Il est généralement de l’ordre de quelques centaines de nanosecondes.

L’effet de ce temps mort sur la mesure de l’intensité est représenté à la figure 1.12. Si le flux de photons devient trop important sur le détecteur, on voit que l’on perd la linéarité avec l’intensité mesurée ; cette dernière est inférieure à l’intensité réelle.

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Figure 1.12 : Illustration de la non-linéarité de la réponse des détecteurs à scintillation pour les fortes intensités due au problème de temps mort.

La non-linéarité aux fortes intensités peut se compenser par un traitement subséquent, tant que l'on ne sature pas complètement le détecteur. On peut appliquer la correction suivante : si l’on observe

n0coups dans le temps Δt, le nombre n de coups réels reçus par le compteur est donné par :

𝑛 = 𝑛0

(1 − 𝜏.𝑛∆𝑡)0

Où τ est la constante de temps mort, facilement déterminable expérimentalement. (Chipman, 1969, Rigoult, 1979). Une telle correction était intégrée dans les logiciels de réduction de données de diffraction X (Blessing, 1987)

1.5.2 Utilisation pour la cristallographie

Les détecteurs de ce type mesurent environ une dizaine de centimètres de long pour un diamètre de 5 cm pour ce qui est du détecteur en lui-même ; à cela, il faut ajouter le châssis électronique

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(amplificateur, discriminateur et compteur) et l’alimentation haute tension. Ils équipaient les premiers diffractomètres automatiques dans les années 1965-2000. On peut citer à titre d’exemple, le diffractomètre Enraf-Nonius CAD4 (Fig. 1.13) dont le successeur sera le diffractomètre à quatre cercles Bruker-Nonius MACH3 à partir duquel nous avons réalisés le prototype qui fait l’objet de cette thèse. Le détecteur d’origine, qui sera remplacé par le détecteur à pixels hybrides XPAD, est montré à la figure 1.14.

Figure 1.13 : Diffractomètre Enraf-Nonius CAD4 avec à gauche son détecteur ponctuel à scintillation.

Figure 1.14 : Détecteur ponctuel à scintillation du diffractomètre Bruker-Nonius Mach3. Le mécanisme de fentes automatiques a été retiré pour permettre une meilleure vue.

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Les détecteurs à scintillations ne captent que les photons X qui arrivent par leur fenêtre d’entrée. Celle-ci est généralement de quelques centimètres carrés. Il faut y associer un système de fentes fines, dont la largeur est estimée par le cristallographe, pour restreindre le champ de mesure et l’adapter à la tache de diffraction mesurée. Un goniomètre permet le positionnement à la fois du cristal et du détecteur pour le placer dans la direction de la réflexion diffractée par le cristal lorsque les conditions de diffraction sont réunies. On utilise une méthode de mesure des réflexions par balayage en fonction des angles ω et 2θ pour reconstituer un profil d’intensité et intégrer ensuite cette intensité numériquement. Les pics de diffraction d’un monocristal doivent être mesurés un par un avec le fond continu correspondant ; chaque mesure d’intensité diffractée est précise mais le temps de mesure est allongé par rapport à l’utilisation d’un détecteur 2D qui mesure simultanément plusieurs dizaines voire centaines de réflexions.