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CHAPITRE 3 : Diffractomètre prototype du laboratoire réalisé avec le détecteur XPAD

3.6 Intégration des intensités mesurées avec CrysAlisPRO

Nous parlerons ici uniquement de l’intégration des intensités pour les expériences de mesures ‘classiques’ telles que décrites plus haut. Pour les images prises en mode IPI (expériences en temps résolu), c’est un logiciel spécifique créé par Paul Allé avec l’outil de développement LAbView qui est utilisé et que nous ne décrirons pas ici.

3.6.1 Matrice d’orientation

Après avoir introduit les paramètres instrumentaux déterminés avec le cristal test Ylid et la distance cristal-détecteur de la collecte, la procédure de recherche des pics est lancée sur l’ensemble des images collectées. Le mode automatique donne généralement un résultat satisfaisant si les pixels chauds ont bien été retirés des images. Sinon, il est assez aisé en éditant la table de pics de les repérer et de les éliminer ; ils ont toujours la même position sur les images.

Après cette recherche, on peut utiliser l’outil implémenté dans CrysAlisPRO et nommé Ewald

explorer pour estimer visuellement la qualité de notre mesure et de la recherche de pics. On peut à ce stade, déceler les problèmes de macles, de cristaux multiples, d’incommensurables ou simplement de décentrage/désorientation de l’échantillon pendant la collecte.

On utilise ensuite un algorithme de recherche de la matrice d’orientation du cristal qui propose des paramètres de maille et un taux d’indexation de la table de pics avec cette matrice d’orientation. Si ce taux d’indexation est suffisamment élevé (supérieur à environ 70%), et si le nombre de pics est suffisamment important (quelques centaines), on peut commencer à affiner les paramètres de maille et instrumentaux en intégrant éventuellement des contraintes géométriques (par exemple, pour une maille orthorhombique, on peut imposer α = β = γ = 90°, ce qui réduit le nombre de paramètres à affiner).

Une fois la matrice d’orientation bien affinée avec comme critère de convergence un taux d’indexation le plus proche de 100% possible, on peut procéder à l’intégration de l’intensité des pics de diffraction.

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3.6.2 Intégration

Il faut utiliser une procédure d’intégration non-automatique des images qui se lance avec la

commande ‘data reduction with options’ du menu ‘start/stop’ de CrysAlisPRO. Les captures

d’écran des différentes étapes sont détaillées dans l’annexe 3. Tout d’abord avant l’intégration de l’intensité elle-même, les contributions de la diffusion de tout ce qui ne provient pas de la

diffraction du cristal (tout ce qui est hors des pics de Bragg) est soustraite en calculant sur n

images successives ce fond continu plus ou moins commun. L’opération d’estimation de ce fond

diffus est répétée toutes les m images. Une première analyse des images est ensuite faite pour

déterminer une forme de masque d’intégration décrivant au mieux la tache de diffraction dans le plan du détecteur. Ce masque est préalablement positionné à l’endroit prédit du pic par la matrice d’orientation. Si le maximum d’intensité du pic n’est pas centré dans ce masque, la matrice d’orientation est affinée en jouant sur tous les paramètres instrumentaux pour centrer au mieux les masques d’intégration sur les maxima d’intensité des pics. Cette opération d’affinement de la

matrice est répétée toute les p images. Elle permet de corriger les problèmes de décentrement du

cristal pendant la mesure ou les erreurs de repositionnement d’XPAD après une opération de vérification du centrage du cristal (pour cette opération, on recule XPAD et on le repositionne ensuite à la distance de collecte, mais pas exactement au même endroit).

Toutes les mesures ‘classiques’ réalisées avec XPAD pendant cette thèse ont été faites avec des largeurs d’oscillation de 1°. Ce qui représente plus du double de la largeur de raie des échantillons que nous avons mesurés. Une fois la forme et la position des masques déterminés pour chaque réflexion dans chaque image, l’intensité du pic est intégrée par simple sommation de l’intensité de chaque pixel appartenant au masque.

3.6.3 Corrections d’absorption

Des corrections d’absorption sont nécessaires du fait de la non-isotropie du monocristal mesuré. La meilleure méthode consiste à utiliser une correction d’absorption analytique basée sur l’indexation des faces du cristal et la mesure de celles-ci (Coppens et al., 1965). Un modèle tridimensionnel du cristal est alors construit qui permet, en lien avec la matrice d’orientation, de calculer le chemin parcouru par les rayons X dans l’échantillon pour une orientation donnée et une réflexion donnée. Mais ceci n’est pas très aisé sur notre diffractomètre expérimental. En effet, la caméra vidéo permettant le centrage de l’échantillon n’est pas reliée au logiciel de pilotage du

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goniomètre ; on ne peut donc pas facilement lier la matrice d’orientation avec l’orientation et la dimension des faces du cristal visibles sur l’image de la caméra.

A défaut, et pour toutes les mesures présentées dans le chapitre 4, ce sont donc des corrections d’absorption empiriques modélisant la surface d’absorption du cristal par des harmoniques

sphériques qui sont utilisées. Elles sont appliquées avec le programme SCALE3 ABSPACK inclus

dans CrysAlisPRO (Agilent, 2010).

3.6.4 Finalisation du fichier hkl, estimation des erreurs

Les différences fondamentales du détecteur XPAD avec les détecteurs de type CCD ou APS (cf. Chap. 1 : comptage direct contre intégration dans des puits de potentiels et post-traitements respectivement) demandent une méthode différente de calcul des erreurs sur les intensités. XPAD étant une matrice de détecteurs ponctuels, une approche logique consiste à estimer les erreurs comme pour ces derniers. On l’exprime alors de la façon suivante (McCandlish et al., 1975) :

σ²(I) = A.σ²(Icount) + B.<I>²

Le premier terme représente l’erreur statistique de comptage (Poisson) à un facteur d’échelle A près, auquel on ajoute un facteur d’instabilité instrumentale B calculé à partir de la dispersion des

intensités équivalentes. Le modèle 4 proposé par le logiciel CrysAlisPRO permet de calculer les

erreurs de cette façon (Cf. Annexe 3). Pour donner un ordre de grandeur, pour les mesures à haute

résolution sur le composé 4-benzyloxy-3-methoxybenzaldehyde qui seront présentées dans le

chapitre 4, on a obtenu les valeurs :

A = 0.6 et B = 0.003

Le terme B est très faible et comparable à ce que l’on observe avec un détecteur ponctuel, signe que notre instrument est stable et précis.

Remarque : Pour les détecteurs de types CCD ou APS-CMOS, les différentes sources de bruits électroniques générés par le détecteur en lui-même (cf. Chapitre 1) conduisent à séparer les

contributions aux erreurs venant de l’intensité diffractée par l’échantillon Iraw d’une part, de

l’intensité attribuée au bruit détecteur Iback d’autre part. Un facteur d’instabilité instrumentale B est

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autres sources d’erreurs sur la mesure tels que les fluctuations de la source de rayons X, les erreurs sur le temps d’exposition, les erreurs de positionnement du goniomètre, etc.

L’erreur peut s’écrire alors sous la forme :

σ(I)² = A

1

. σ(I

raw

)² + A

2

. σ(I

back

)² + B.< I

Dans le logiciel CrysAlisPRO, cette méthode de calcul des erreurs s’obtient avec le modèle 5 :

gains séparés

A

1 pour l’intensité et

A

2 pour le bruit détecteur, et ajout de l’erreur machine, B.

Nous avons voulu vérifier expérimentalement que la statistique de comptage de Poisson donnée par le détecteur XPAD conduit à une distribution normale des intensités si le nombre de coups est suffisamment grand (typiquement quelques dizaines) comme l’indique la figure 3.18.

Figure 3.18 :Probabilité en fonction du nombre d’occurrences k. Lorsque le paramètre λ de la loi de Poisson devient grand (courbe bleue), la courbe de probabilité est correctement approchée par une loi normale d'espérance et de variance égales à λ.

L’expérience suivante a donc été réalisée : 199 clichés de diffraction d’un monocristal (temps d’exposition de 20 s et goniomètre fixe) ont été enregistrés. 400 pixels constituant un pic de Bragg ont été sommés. Un diagramme Quantile-Quantile (Q-Q plot) a été généré pour vérifier si

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l’intensité mesurée suit bien une loi normale (Fig. 3.19). Dans le cas d’une loi normale en

cristallographie, ce diagramme est également nommé normal probability plot. En abscisse sont

reportées les valeurs de quantiles donnés par la loi normale (valeur moyenne λ=2223) et en

ordonnée, x représente les quantiles normalisés observés. La courbe obtenue suit bien la droite y =

x, la réponse du détecteur suit donc bien la loi normale, limite de la loi de Poisson lorsque le nombre de coups est assez grand.

Figure 3.19 : Diagramme quantile-quantile (normal probability plot cf. annexe 4.3.2) obtenu avec le détecteur XPAD à partir d’un pic de Bragg sur 199 clichés de diffraction.

Du fait des différentes sources de bruits (dark current, lecture) présents sur les détecteurs de type

CCD ou APS-CMOS, cette expérience aurait probablement révélé une non linéarité du diagramme

quantile, dû à un écart à la statistique de Poisson (σ ≠ √𝜆). Mais, il est difficile de réaliser une

expérience similaire avec ces détecteurs en raison de la difficulté à accéder à l’intensité brute mesurée causée par les nombreuses étapes de traitement du signal nécessaires (cf. chapitre 1).

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