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Chapitre II : Techniques expérimentales

II- 1-1. Principe général

La méthode sol-gel peut être utilisée pour l’élaboration de nombreux composés inorganiques ou hybrides organiques-inorganiques dans une large variété de structures telles que des films minces, des fibres optiques, des verres monolithiques ou encore des nano-poudres calibrées, comme le présente la figure II-1.

Figure II-1: Potentiel de la chimie sol-gel.

L’obtention d’un matériau solide par voie sol-gel découle d’une solution liquide (sol) contenant des précurseurs chimiques constitués des atomes métalliques du matériau souhaité entourés par des ligands organiques ou minéraux. En fonction de la nature chimique des ces ligands, les précurseurs peuvent être classés en deux catégories différentes :

Film xérogel

Film dense Verre monolithique

Xérogel Aérogel Gel

Sol Nanoparticules calibrées

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- Les précurseurs inorganiques, souvent des sels inorganiques tels que les nitrates, les sulfates, les chlorures, ou encore les acétates. Ils requièrent une élimination supplémentaire des anions inorganiques après réaction sol-gel.

- Les précurseurs organo-métalliques, en général des alkoxydes métalliques (M(OR)xR’y), qui possèdent des liaisons alkoxy (OR), éventuellement en association avec des chaînes alkyles (R’), liées à l’atome de métal (M). Les groupements alkoxy réagissent avec une large variété de solvants. Ce sont ces précurseurs alkoxydes, les plus fréquemment utilisés en chimie sol-gel, qui ont été employés dans ce travail. Dans ce qui suit, on décrit dans leurs grandes lignes les mécanismes impliqués dans les réactions sol-gel basées sur ces précurseurs. Une analyse plus détaillée des mécanismes fera partie des résultats expérimentaux et sera abordée aux chapitres V et IX.

Les alkoxydes métalliques sont premièrement dilués dans un solvant organique (généralement de l’alcool). Leur transformation sol-gel (solidification) intervient à travers un mécanisme de polymérisation inorganique basé sur deux réactions : l’hydrolyse et la condensation des alkoxydes. Les alkoxydes métalliques, qui sont généralement des composés fortement hydrolysables, réagissent avec l’eau ajoutée dans le sol. Par conséquent, un groupe hydroxyle se lie à l’atome métallique via l’équation II-1 suivante :

M-(OR) 4 + H2O → HO-M-(OR) 3 + ROH (II-1)

Dans cet exemple, le métal (M) est supposé tétravalent, e.g. Si4+ ouTi4+, sans liaison avec aucun groupe alkyl (y=0), et OR représente un groupe alkoxy. En fonction de la quantité d’eau insérée et de la présence de catalyseurs acides ou basiques, l’hydrolyse peut être complète, c’est-à-dire que tous les groupes OR sont remplacés par des groupes OH (équation II-2) :

M-(OR) 4 + 2 H2O → M-(OH) 4 + 4 ROH (II-2)

Cependant, l’hydrolyse est généralement stoppée avant que la réaction ne soit complète donnant lieu à la présence d’espèces (HO)n-M-(OR)4-n. Deux molécules (partiellement) hydrolysées peuvent ensuite être liées grâce à une réaction de condensation, et le retrait des espèces protonées

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intervient sous la forme d’alcool (alcoxylation) ou d’eau (oxolation) d’après les équations II-3 ou II-4:

(OR)3-M-OR + HO-M-(OR)3→ (OR)3–M-O-M-(OR)3 + ROH (II-3) (OR)3-M-OH + HO-M-(OR)3 → (OR)3–M-O-M-(OR)3 + H2O (II-4)

Les réactions II-1 à II-4 reposent sur des mécanismes d’attaque nucléophile. Ces mécanismes peuvent donc être activés par l’utilisation de catalyseurs acido-basiques, lesquels permettent une séparation des réactions d’hydrolyse-condensation et une activation sélective des mécanismes réactionnels (voir chapitre V) [1]. Classiquement, les catalyseurs acides (e.g. HCl ou HNO3) augmentent les taux d’hydrolyse, alors que les catalyseurs basiques favorisent la condensation.

Les espèces inorganiques polymériques croissent dans la solution liquide à travers de multiples réactions d’hydrolyse-condensation (polycondensation), créant des clusters de plus en plus larges et menant à la formation d’un gel humide. La formation de ce gel peut être activée par une concentration croissante des espèces réactives induite par l’évaporation du solvant intervenant rapidement lors de la préparation de films minces. L’évaporation totale du solvant conduit finalement à la transformation du gel humide en un gel sec. Ce gel séché est appelé xérogel et son volume est souvent réduit d’un facteur 5 à 10 par rapport au gel initial. Dans le cas des films minces, la transformation sol → gel → xérogel dure uniquement quelques secondes. Les films sol-gel sont déposés par des méthodes de dépôt en phase liquide bien connues telles que le spin-coating, le dip-coating ou le spray-coating. Il est intéressant de noter que la transformation complète liquide-solide (du sol au gel) s’effectue à température ambiante. Le xérogel final est un composé oxyde poreux et amorphe constitué de chaînes M-O-M avec des groupes alkoxy hydrolysés ou pas en bout de chaîne. Aux chapitres V et IX, ces mécanismes réactionnels seront analysés respectivement dans le cas d’alkoxydes de silicium Si(OR)4 et Si(OR)3R’.

Dans le but d’améliorer les caractéristiques, comme par exemple les propriétés mécaniques, le xérogel est ensuite généralement traité thermiquement à plus ou moins haute température. Le traitement thermique à une température suffisamment haute permet la pyrolyse des groupes alkoxy restants et la condensation des derniers groupes hydroxyles, menant à un oxyde pur. Ce traitement induit également une densification du réseau d’oxyde. L’oxydation et la densification améliorent généralement la résistance à l’abrasion des films minces sol-gel. Ces films ont, en

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général, de très bonnes qualités optiques. Cependant, pour obtenir des films de haute qualité optique, il est recommandé d’utiliser des protocoles très précis d’élaboration des sols. En effet, certains alkoxydes, comme les alkoxydes de titane, sont très réactifs vis-à-vis des réactions d’hydrolyse-polycondensation et peuvent ainsi favoriser la croissance de précipités dans la solution incompatibles avec le dépôt de films de bonne qualité optique. Par conséquent, il est nécessaire de contrôler précisément la réactivité des sols polymériques. Ce contrôle peut être réalisé par la complexation des alkoxydes avec des ligands spécifiques (e.g. l’acide acétique ou l’acetylacetone) qui diminuent la fonctionnalité de l’alkoxyde et réduisent leur réactivité. De telles approches requièrent des traitements thermiques post-dépôts à plus ou moins haute température pour éliminer complètement les ligands organiques des films. La réactivité des alkoxydes peut aussi être contrôlée via des effets de peptisation induits par des agents acides ou basiques qui retardent la réaction de polycondensation (voir chapitre V). Dans ce cas, aucun traitement à haute température n’est requis pour éliminer les agents acides ou basiques des films. Des oxydes cristallins peuvent également être obtenus après un traitement à suffisamment haute température. La cristallisation est, par exemple, nécessaire pour tirer avantage des propriétés semi-conductrices des films d’oxyde. Elle requiert une pyrolyse totale des résidus alkoxy (ou des ligands organiques ajoutés). Or, ces espèces sont en principe très stables, d’un point vue thermique, et jouent le rôle d’impuretés structurales qui inhibent la cristallisation à basse température. C’est pour cette raison, par exemple, que les films sol-gel de TiO2 cristallisés sont usuellement obtenus après un traitement thermique à une température relativement haute de 350°C ou plus [2-5]. Au chapitre V, nous montrerons que des particules de TiO2 cristallines peuvent être pré-formées en solution liquide par voie sol-gel, ce qui permet également le dépôt de films cristallisés à température ambiante.