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Obtention de l’outil

A. Principe du phage display

Il y a une vingtaine d’années, Smith a créé une méthode permettant la présentation de polypeptides à la surface de phages filamenteux, un virus qui infecte les bactéries Escherichia coli (Smith 1985) (figure 16). A la différence d’autres phages, le bactériophage filamenteux se réplique et s’assemble sans tuer son hôte. Le « phage display » a été originellement inventé pour la sélection par affinité de fragments peptidiques exprimés à la surface des phages à partir de fragments d’ADNc. L’association de la protéine exposée en surface (« le phénotype ») avec son ADN codé par le phage (« le génotype ») permet d’accéder rapidement aux séquences correspondant aux molécules sélectionnées car l’ADN est directement isolé avec la protéine pour laquelle il code.

o La sélection :

Le principe de sélection des clones spécifiques consiste à enchaîner des tours de sélection conduisant à l’enrichissement d’une suspension de phages en clones spécifiques qui seront ensuite testés par criblage (figure 17). Les phages présentant un anticorps spécifique sont retenus sur une surface préparée avec l’antigène cible alors que les phages non adhérents sur l’antigène sont éliminés par les lavages. Les phages liés spécifiquement sont élués et réintroduits dans des bactéries pour l’étape d’amplification. Cette nouvelle production de phages sera de nouveau sélectionnée sur la cible antigénique. Des pressions de sélection peuvent être introduites à chaque tour de sélection. Cette stratégie fondée sur la sélection est nettement plus puissante qu’une stratégie de criblage classique qui ne peut pas être appliquée à des banques de tailles supérieures à 106 clones

indépendants. Le criblage final est effectué à partir des clones préalablement sélectionnés. L’opportunité de sélectionner un clone spécifique lors de ce criblage final est donc largement augmentée.

o Le phagemide :

La banque que nous avons utilisée (Griffin.1 library) est basée sur l’utilisation du vecteur phagemide pHEN2. Le phagemide est un plasmide qui abrite une origine de réplication dérivée du phage f1 en supplément de son

.

Figure 17 : Représentation schématique de la sélection d’anticorps à partir d’une banque de phages

Enrichissement en phages présentant un anticorps spécifique de l’antigène cible (cercle rouge) et élimination des phages non spécifiques formant le bruit de fond.

origine de réplication plasmidique (Paschke 2006). Des bactéries sont transformées avec le phagemide et la production par ces bactéries de phages contenant le génome phagemidique est réalisée après infection des bactéries avec le phage auxilliaire M13K07. Ce phage auxiliaire fournit toutes les protéines et enzymes nécessaires pour la réplication du phagemide, de l’ADN simple brin et son encapsidation ainsi que les protéines de structure formant la capside du phage.

o Les scFvs :

Ce phagemide pHEN2 code une banque de fragments d’anticorps (des scFvs : single-chain-Fragment-variable) fusionnés à la partie N-terminale de la protéine pIII de la capside du phage (figures 16 et 18). Les immunoglobulines IgG et IgM sont formées de molécules constituées de 2 chaînes lourdes et 2 chaînes légères, qui comprennent chacune des parties variables et constantes. La partie contenant le site de liaison à l’antigène, le paratope, est retrouvée dans les domaines variables et peut être exprimée séparément sans la perte de ses propriétés de liaison (Skerra and Pluckthun 1988). Ainsi un fragment variable formé d’une chaîne unique (scFv) peut être obtenu grâce à un lien flexible permettant de joindre les parties variables des chaînes lourdes (VH) et légères

(VL) (figure 19) (Bird, Hardman et al. 1988).

o La banque :

Il existe deux types de banques : les banques naïves et immunes. Les banques « immunes » sont obtenues suite à l’exposition de l’animal à un agent immunogène alors que pour l’obtention d’une banque « naïve », l’animal (ou le donneur) n’a pas été immunisé. Pour des raisons de conservation de la structure tridimensionnelle de l’antigène, nous avons choisi d’utiliser une banque « naïve ». Les banques de fragments d’anticorps « naïves » existent sous deux formes : « naturelles » ou « synthétiques ». Le répertoire immunitaire naïf d’un animal (répertoire avant la rencontre forcée ou volontaire avec des antigènes) contient des anticorps capables de se fixer sur la plupart des molécules. Ce répertoire dérive du réarrangement combinatoire des différents gènes « V » dans les cellules souches. Chaque cellule B exprime une seule combinaison VH et VL,

Figure 18: Représentation schématique du vecteur pHEN2 (Griffin 1. library)

pelB leader: séquence du peptide signal, qui permet la sécrétion dans l’espace

periplasmique; VH: fragment variable de la chaîne lourde (≈ 400 paires de bases) ; VL:

fragment variable de la chaîne légère (≈ 400 paires de bases); 6xHis : étiquette 6 histidines;

myc: étiquette myc; amber: codon stop ambre; N1, N2, C-term: parties N- et C-terminale de

la protéine pIII de la capside du phage ; LMB3 et pHENSeq : amorces sens et anti-sens qui encadrent le scFv ; NcoI et NotI : sites enzymatiques délimitants la VH et la VL du scFv.

Figure 19 : Vue schématique des particules de IgG, Fab et scFv

Vl : fragment variable de la chaîne légère ; Cl : partie constante de la chaîne légère ; Vh :

fragment variable de la chaîne lourde ; Ch1, Ch2 et Ch3 : parties constantes de la chaîne lourde

légère. Les banques naïves « naturelles » sont préparées à partir de l’ARNm du gène « V » des IgM des cellules B de donneurs humains non immunisés isolés à partir des lymphocytes du sang périphérique, de la moelle osseuse, des cellules de la rate ou à partir de cellules animales (Hoogenboom 1997). Le gène « V » est amplifié à partir de l’ADNc en utilisant des oligonucléotides se liant aux régions structurantes (FR pour Framework) entourant la région du gène « V ». La banque naïve « naturelle » est construite à partir des séquences codant les chaînes lourdes (VH) et légères (VL) assemblées de façon aléatoire pour former les

anticorps scFv (single-chain-Fragment-variable) ou Fab. Ces séquences peuvent être modifiées par mutation aléatoire maîtrisée des CDRs (Complementary Determining Regions) ou parfois des régions avoisinantes : les FR. C’est ainsi que l’on construit une banque naïve synthétique dont la diversité est élargie par rapport à une banque naïve « naturelle ».

o La banque Griffin.1 :

La banque synthétique « Griffin1. library », (Griffiths, Williams et al. 1994) qui nous a été fournie par le MRC, a été construite dans le phagemide pHEN2. Elle exprime 109 clones différents. Cependant, elle n’est plus disponible

maintenant

.

Une banque similaire (Tomlinson I & J) est distribuée par les services du MRC (http://www.mrc-cpe.cam.ac.uk/).