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Première évaluation : antisérums anti-BoNTA

3.6.1 Construction et validation du matériel génétique de départ

Le matériel génétique de départ nécessaire à la construction des plasmides d’expression eu- caryote nous est fourni par le laboratoire du Dr. Michel Popoff (Unité Bactéries Anaérobies et Toxines de l’Institut Pasteur). Nous avons choisi de travailler avec le fragment C-terminal de la toxine botulique A (que nous noterons FcBoNTA), qui est la mieux connue et touche l’homme.

Le fragment FcBoNTA, extrait du plasmide pCR2.1-FcToxA, est inséré dans le vecteur d’ex- pression eucaryote pVax2 sous contrôle d’un promoteur CMV. De nombreuses études ont en effet montré que le promoteur CMV était le plus efficace pour une expression maximale dans le muscle [194, 339, 340]. Le plasmide obtenu est noté pVaxFcBoNTA.

La fonctionnalité du plasmide est vérifiée par transfection transitoire sur des cellules de mélanome de souris B16. Une RT-PCR spécifique à partir de l’ARN extrait du lysat cellulaire nous permet de détecter le transcrit du fragment FcBoNTA (figure 3.9).

1kb Fc Ø C- C+ Fc Ø RT-PCR PCR 1kb Fc Ø C- C+ Fc Ø RT-PCR PCR 1kb Fc Ø C- C+ Fc Ø RT-PCR PCR

Fig.3.9 – Analyse par RT-PCR de la présence du transcrit correspondant au fragment FcBoNTA dans le lysat cellulaire après transfection. L’ARN total des cellules transfectées est extrait par la méthode du TRizol. Une RT spécifique est effectuée avec les amorces appropriées avant amplification par PCR d’un fragment de 259pb de l’ADNc du fragment FcBoNTA (amorce sens : 5’tgcatcacaggcaggcgtag3’, amorce antisens : 5’cccatgagcaacccaaagtcc3’). Les produits de PCR sont séparés par électrophorèse sur gel d’agarose 2%. Notations : 1kb : marqueur de taille ; Fc : transfection avec le plasmide pVaxFcBoNTA ; ⊘ :contrôle cellules non transfectées ; C- : PCR sans ADN ; C+ :PCR sur le plasmide pVaxFcBoNTA. En contrôle, une PCR est effectuée directement sur les ARN extraits avant RT des deux conditions.

Par contre un marquage immunofluorescent sur des cellules fixées d’une transfection équiva- lente avec un anticorps monoclonal anti-FcBoNTA ne nous permet pas de détecter la présence de la protéine. La sensibilité de la détection est peut-être trop faible, ou la protéine n’est pas suffisamment exprimée.

Nous décidons tout de même de tester ce plasmide pVaxFcBoNTA in vivo. 3.6.2 Première évaluation in vivo : preuve du concept

Une première étude est réalisée pour vérifier que l’injection et électrotransfert d’un plasmide codant le fragment C-terminal de la toxine botulique A peut conduire à la production d’anticorps anti-FcBoNTA, et que ces anticorps sont neutralisants vis-à-vis de la neurotoxine botulique A

3.6. Première évaluation : antisérums anti-BoNTA 135 entière.

Un groupe de souris est injecté et électrotransféré dans le muscle tibial cranial avec 40µg de plasmide pVaxFcBoNTA. Deux autres groupes de souris sont injectés et électrotransférés avec 20µg ou 40µg de plasmide pVaxFcBoNTA à J0 et traités à nouveau à J21 avec les mêmes doses de plasmide. Un groupe de souris contrôle ne reçoit aucun traitement. Des prélèvements de sang sont effectués régulièrement à 15, 21, 35, 49 et 154 jours après le début de l’expérience. La détection des anticorps anti-FcBoNTA dans le sérum est effectuée par un test ELISA.

Nous avons tout d’abord analysé les résultats obtenus avec les deux groupes de souris réin- jectées à J21 (figure 3.10). 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 15 21 35 49 154 jours A b s o rb a n c e à 4 9 2 n m naïves 20µg + réinjection 20µg 40µg + réinjection 40µg

Fig. 3.10 – Première évaluation : comparaison de deux doses de plasmide injectées.

Les souris (SWISS, 3 animaux par groupe) sont injectées et électrotransférées dans le muscle tibial cranial avec le plasmide pVaxFcBoNTA (20 ou 40µg). Les flèches rouges indiquent les deux électrotransferts (J0 et J21). Des échantillons de sang sont prélevés régulièrement aux temps indiqués et un ELISA est effectué sur des dilutions de sérums au 1/100e

dans une solution PBS-Tween20 (0,1%)-gélatine (0,2%) pour détecter la présence d’anticorps anti-FcBoNTA dans le sérum. Les résultats correspondent à la moyenne ±SD des absorbances à 492nm obtenues.

Cette première évaluation nous permet de conclure qu’il est possible d’obtenir des anticorps anti-FcBoNTA par injection et électrotransfert de plasmide codant le fragment C-terminal Fc- BoNTA de la toxine botulique A : en effet on observe une différence significative entre les lots traités et le lot contrôle. Cependant il ne semble pas, du moins dans cette première étude, y avoir de différence significative entre les deux groupes de souris traitées avec 20 ou 40µg d’ADN, sauf à long terme.

Comparons maintenant les deux groupes traités avec 40µg de plasmide, mais l’un ayant eu une deuxième injection à J21, l’autre non (figure 3.11).

On n’observe pas de différence significative entre les deux groupes réinjectés ou pas.

Il faut cependant noter que pour ces deux premiers graphes, les groupes n’étaient consti- tués que de trois souris au départ. Ce nombre de souris est trop faible pour avoir des résultats statistiques très robustes, mais nous donne des informations à titre indicatif.

136 Chapitre 3. Obtention d’antisérums antitoxines botuliques 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 15 21 35 49 jours A b s o rb a n c e à 4 9 2 n m naïves 40µg + réinjection 40µg 40µg sans réinjection NS NS

Fig. 3.11 – Première évaluation : comparaison de deux lots avec ou sans réinjection.

Les souris SWISS (n=3) sont injectées et électrotransférées dans le muscle tibial cranial avec 40µg de plasmide pVaxFcBoNTA. Des échantillons de sang sont prélevés régulièrement aux temps indiqués et un ELISA global est effectué sur des dilutions de sérums au 1/100e

pour détecter la présence d’anticorps anti-FcBoNTA. Les résultats correspondent à la moyenne ±SD des absorbances à 492nm ).

Cette première évaluation nous permet uniquement de conclure qu’il est possible d’obtenir des anticorps dirigés contre le fragment C-terminal de la toxine botulique A par électrotransfert de plasmide. Nous confirmons aussi qu’il est possible d’obtenir des anticorps contre le fragment C terminal de la toxine botulinique A, qui est produite ici de manière intracellulaire (car il n’y a pas de signal de sécrétion) par le myotube transfecté. Il a déjà été montré que des anticorps peuvent être produits dans le cas de protéines intracellulaires, notamment contre la beta-galactosidase [341]. Des anticorps neutralisants ont également été obtenus contre la protéine intracellulaire L1 du papillomavirus [342]. Par contre dans notre cas, le protocole optimal d’obtention d’antisérums anti-toxines reste à définir.

3.6.3 Test de neutralisation

Avant d’aller plus loin dans le projet nous avons analysé certains de ces sérums par un test de neutralisation pour savoir si ces anticorps obtenus contre le fragment C-terminal de la toxine botulique A étaient neutralisants.

Ce test de neutralisation (ou test de létalité) est effectué dans le laboratoire du Dr. M. Popoff à l’Institut Pasteur : pratiquement, la toxine botulique de type A est produite et calibrée à 10 Doses Létales Souris par ml. Des dilutions de sérum sont ensuite mises en incubation avec 1 ml de préparation de toxine 30 minutes à 37°C, et injectées à des souris par voie intrapéritonéale à raison de 1 ml par souris et par dilution. Les souris sont ensuite observées pendant quatre jours. Les résultats sont exprimés en unités neutralisantes par ml, une unité neutralisante correspondant au volume de sérum neutralisant 10 Doses Létales Souris (10MLD).

3.6. Première évaluation : antisérums anti-BoNTA 137 (figure 3.12) pour déterminer les sérums ayant le plus haut titre en anticorps. En contrôle, le laboratoire du Dr. M. Popoff nous a fourni un sérum de souris immunisées par des injections de protéine recombinante. 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 1,4 1,6 1/200 1/800 1/3200 1/12800 1/51200 dilutions A b s o rb a n c e à 4 9 2 n m moyenne Témoins moyenne 20µg 2X 40µg n°1 2X 40µg n°2 2X 40µg n°4 1X 40µg n°6 contrôle (Pasteur)

Fig.3.12 – ELISA global 172 jours après le début de l’expérience.Pour les souris naïves et

traitées avec 20 µg, seule la moyenne est représentée. Pour les souris traitées avec 40µg, le résultat pour chaque souris (n°1, 2, 4 et 6) est représentée. En contrôle nous avons dosé un sérum de souris fourni par le Dr. Michel Popoff (correspondant à une injection de protéine recombinante). L’ELISA est réalisé sur des dilutions croissantes de sérum dans du PBS-Tween20 (0,1%)-gélatine (0,2%).

NB : Nous avons utilisé pour toute notre étude la définition suivante pour le titre en anticorps : c’est l’inverse de la dilution pour laquelle la différence de DO entre un sérum traité et un sérum non traité est de 0,3 (voir Matériel et Méthodes).

Nous avons testé le pouvoir neutralisant des sérums des deux souris ayant le titre en anticorps le plus élevé au dernier jour de la cinétique (figure 3.12). Ces deux souris (n°2 et 4) ont été injectées et électrotransférées deux fois avec 40µg de plasmide pVaxFcBoNTA, l’une 21 jours après (souris 4), l’autre 110 jours après le premier traitement (souris 2).

Ces sérums sont testés aux dilutions 10−2, 10−3, 10−4, 10−5 contre 10 doses létales de toxine

botulique A, avec 1 souris par dilution. Le tableau 3.2 présente les souris survivantes injectées par BoNTA et neutralisées par les sérums testés.

Dilutions Titre neutral.

Sérum 10−2 10−3 10−4 10−5 pour 10MLD

souris n°2 1/1 0/1 0/1 0/1 100

souris n°4 1/1 1/1 0/1 0/1 1000

Tab.3.2 – Test de neutralisation contre la toxine botulique A. Les résultats correspondent au

nombre de souris survivantes injectées par BoNTA et neutralisées par les sérums testés. Les titres neutralisants sont exprimés en unités neutralisantes par ml (une unité neutralisante correspondant au volume de sérum neutralisant 10 Doses Létales Souris)

138 Chapitre 3. Obtention d’antisérums antitoxines botuliques Les titres obtenus pour les deux sérums sont entre 100 et 1000, ce qui n’est pas très élevé mais démontre cependant que les anticorps obtenus par électrotransfert ont un pouvoir neutralisant sur la toxine botulique A.