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4.2.1 Description

Le roulis hollandais est un mouvement oscillatoire naturel de l’hélicoptère concernant

essen-tiellement les variables de roulis et de lacet. Le nom tire son origine de la ressemblance de la

trajectoire avec celle que font les couples hollandais patinant dans le fond d’un canal gelé

bras-dessus bras-dessous. Il est aggravé par trop d’effet dièdreet par peu destabilité directionnelleet il

peut être excité par une bourrasque ou par un coup de palonnier sur le rotor arrière [Prouty 1992].

L’effet dièdre existe à la fois pour les avions et les hélicoptères. Il s’agit d’un phénomène qui

consiste en la création d’un couple de roulis dans le sens opposé au dérapage. Pour ce qui est

de la stabilité directionnelle, appelée également "effet girouette", elle découle principalement de

l’action de la dérive en dérapage [Lefort et Hamann 1999, Wanner 1983] et crée un moment de

lacet provoquant une rotation en lacet afin d’annuler le dérapage.

Le roulis hollandais est un comportement qui se retrouve pour tous les aéronefs. Quand un

passager regarde par la fenêtre d’un avion par exemple, il observe qu’un élément de l’appareil

monte et descend relativement à l’horizon : c’est une illustration du mouvement de roulis lié à ce

phénomène (à moins qu’il soit compensé par le système de stabilisation, auquel cas le braquage

alterné des ailerons sera une manifestation du phénomène).

Dans l’analyse du roulis hollandais d’un avion, comme les variables longitudinales et les

va-riables latérales sont découplées, un ingénieur n’a pas besoin de prendre en compte l’intégralité

des équations du mouvement. Il peut se limiter au bloc latéral (i.e. aux équations décrivant le

mouvement latéral) et fixer le bloc longitudinal (i.e. aux équations représentant le mouvement

longitudinal) qui comprend la portance, la traînée et le tangage de l’appareil. Dans le cas de

l’hélicoptère, malheureusement, le couplage (fort) entre toutes les variables oblige à prendre en

compte toutes les équations. Par exemple à forte vitesse, le niveau de pas collectif requis pour

maintenir l’équilibre est tel qu’une augmentation de l’angle d’attaque du rotor induit un couple

moteur beaucoup plus fort, ce qui illustre le couplage entre tangage et lacet.

Quand le roulis hollandais est légèrement instable, le pilote arrive instinctivement à le

stabi-liser. Cependant, en vision dégradée, par temps de pluie ou de brouillard, le pilote ne peut plus

prendre l’horizon comme référence et un roulis hollandais instable devient alors très dangereux.

C’est pourquoi les normes de certification exigent qu’il soit stable pour autoriser l’appareil à

voler dans de telles conditions ("Instrument Meteorological Conditions I.M.C." qui classe le vol

dans la catégorie "Instrument Flight Rules" vol I.F.R. [Prouty 1992]).

Dans le cas des hélicoptères, les ingénieurs ont du mal à prédire la stabilité du roulis hollandais

par le calcul et à en comprendre les raisons notamment parce qu’il est difficile de simuler la

façon dont l’écoulement du sillage du rotor évolue et les perturbations aérodynamiques sur les

différents éléments. Ces difficultés de simulation inhérentes à la complexité des phénomènes à

modéliser, font qu’encore de nos jours la démarche pour garantir une stabilité du mode roulis

hollandais (ou d’une stabilité marginale) reste empirique. Des essais en vol sont effectués sur des

prototypes, et ensuite des surfaces verticales (petites ailes ou carénages) sont parfois rajoutées

au-dessus ou en dessous du centre de gravité pour améliorer la stabilité de l’appareil [Prouty 1992,

Kampaet al.1997].

52 Exemples de phénomènes non-linéaires de la dynamique du vol des hélicoptères

Présentation du roulis hollandais 53

4.2.2 Méthodologie d’analyse linéaire

La méthodologie d’analyse actuelle repose bien souvent sur une analyse linéaire complétée

par des simulations temporelles du modèle non-linéaire complet. Une présentation succincte est

donnée ci-après et de plus amples informations sont disponibles dans [Padfield 1996, page 245].

Les équations linéarisées du mouvement latéral obtenues en remplaçant l’angle de roulis par la

composante de vitesse de déviation latérale ν

0

=ν+U

e

ψ (où U

e

est la vitesse de translation à

l’équilibre) s’écrivent :

d

dt

˙

ν

0

ν

˙

ν

p

0 0 Y

v

g

0 0 1 0

−N

r

−U

e

N

v

N

r

+Y

v

g−N

p

U

e

L

r

/U

e

L

v

−L

v

/U

e

L

p

·

˙

ν

0

ν

˙

ν

p

= 0 (4.1)

Plusieurs modes propres impliquant les angles de roulis, lacet et dérapage existent. Deux

modes sont apériodiques : le mouvement de roulis (autour de l’axe correspondant et bien amorti

à cause du fort amortissement de roulis dû au rotor) et le mouvement spiral (mouvement de

virage permanent). Il reste un mode complexe, le roulis hollandais. Ce dernier est oscillatoire, de

faible période et se traduit par un mouvement couplé autour de l’axe de roulis et de lacet. Il est

solution de l’équation :

λ

2

+ 2ζ

d

ω

d

λ+ω

d2

= 0 (4.2)

où l’amortissement est donné par :

d

ω

d

=−

N

r

+Y

v

d

L

r

U

e

L

v

L

p

/

1− σ

d

L

r

L

p

U

e

(4.3)

et la pulsation par :

ω

d2

= (U

e

N

v

d

L

v

)/

1− σ

d

L

r

L

p

U

e

(4.4)

avec σ

d

=

gNpUeLp

.

C’est la connaissance des termes des matrices de sensibilité des dynamiques vis-à-vis des

états et des commandes qui permet de déterminer les caractéristiques du roulis hollandais e. g.

sa stabilité. Les études paramétriques portent sur l’évolution des dérivées que sont la stabilité

directionnelleN

v

, l’effet dièdreL

v

, l’amortissement en lacetN

r

ou en roulisL

p

par exemple.

La figure (4.10) extraite de [Kampaet al. 1997] présente une décomposition des dérivées qui

influencent l’amortissement (et la pulsation) du roulis hollandais.

La stabilité directionnelleN

v

("Weather-Cock-Stability") résulte de l’action de la dérive et du

fenestron, le fuselage ayant pour sa part un effet déstabilisant qu’il faut compenser.

L’amortisse-ment en lacetN

r

("Yaw Damping") provient principalement de composants tels que le fenestron

et la dérive, N

r

ne souffre pas de l’influence négative du fuselage car aucun moment dû à la

vi-tesse de lacet n’est créé. L’effet dièdreL

v

("Dihedral Stability") reçoit une forte contribution du

rotor principal et de l’ensemble fenestron/dérive. Il peut être modifié par l’ajout de petites ailes

verticales au bout de l’empennage horizontal ("endplates"), au-dessus de la dérive ou au-dessous

du fuselage, ce qui donne lieu à un (intéressant) anti-couple au centre de gravité de l’appareil.

Par ailleurs, l’amortissement en roulisL

p

dépend essentiellement du type de rotor principal. Ce

dernier est sans articulation dans le cas de l’EC 135,L

p

est donc fortement amorti.

54 Exemples de phénomènes non-linéaires de la dynamique du vol des hélicoptères

Fig. 4.10. Analyse de la stabilité du roulis hollandais de l’hélicoptère EC 135 [Kampaet al. 1997]

En jouant sur ces dérivées, il est possible de faire évoluer la valeur propre (et donc

l’amortisse-ment) associé au roulis hollandais comme le montre la quatrième figure de (4.10). Pour atteindre

les caractéristiques spécifiées par les instances officielles, les concepteurs cherchent un compromis

technologique entre les effets contradictoires qu’une modification de l’appareil peut induire sur

les valeurs des dérivées. Par exemple, l’accroissement de la surface des ailes verticales augmente

N

v

(donc la fréquence et seulement marginalement l’amortissement). Mais, si la surface est placée

trop haut relativement au centre de gravité de l’appareil, L

v

est plus grand, ce qui contribue à

réduire (négativement) l’amortissement du roulis hollandais.

4.2.3 Perspectives sur l’analyse du roulis hollandais

L’analyse linéaire du roulis hollandais permet de diagnostiquer la stabilité locale du point

d’équilibre associé au cas de vol et, dans l’examen du comportement global de l’aéronef, l’existence

éventuelle d’une orbite périodique n’est généralement pas envisagée. Les conclusions déduites sont

directes et sont celles d’un vol stable ou instable. Or, la présence d’un cycle limite implique par

exemple que les oscillations ont une amplitude bornée et non plus infinie. Les prévisions relatives

au comportement qualitatif de l’engin et à la dangerosité du point de vol ne sont plus du tout

les mêmes.