9.3 Conclusion générale sur l’étude du roulis hollandais de l’hélicoptère
10.1.3 Analyse
Il existe plusieurs méthodes pour examiner les propriétés d’une orbite périodique, afin de
sa-voir principalement si l’orbite périodique est attractive ou répulsive et à quelle vitesse les
trajec-toires convergent ou divergent. En théorie des bifurcations, la méthode employée généralement est
l’application de premier retour (section de Poncaré) [Guckenheimer et Holmes 2002, Perko 1996].
Dans le cadre de cette étude, la préférence est donnée à la méthode du premier harmonique
qui permet de diagnostiquer l’existence (ou non) de cycles limites mais également leurs
caracté-ristiques comme la pulsation, une amplitude approximative ou la stabilité. Elle a aussi l’avantage
d’être plus facile à mettre en œuvre par un ingénieur qui a des connaissances théoriques
mathéma-tiques moins importantes qu’un chercheur et qui préfère toujours les outils les plus pragmamathéma-tiques.
L’analyse du problème se décompose en deux parties. Dans un premier temps, une
configura-tion dont la nervosité du pilote a été choisie est étudiée et l’existence éventuelle de cycles limites
ainsi que leurs propriétés sont déterminées. Dans un deuxième temps, la topologie des trajectoires
du système est caractérisée en fonction de la nervosité du pilote K
pil. Enfin, les résultats sont
interprétés du point de vue de la théorie des bifurcations et de l’ingénierie en mécanique du vol.
La démarche et les théorèmes utilisés dans l’étude de cas de la partie bibliographique portant
sur le PIO de l’arrondi à l’atterrissage du X-15 (section 4.3) sont en grande partie respectés.
Dans la configuration adoptée, le gain pilote est tout d’abord fixée à K
pil= 3.9. Une étape
de l’analyse est de tracer le diagramme de Nyquist relatif à la partie linéaire (en bleu) constituée
de l’aéronef et du pilote ainsi que celui relatif à l’opposé de l’inverse du premier harmonique de
la partie non-linéaire (en rouge) i.e. la servocommande limitée en vitesse.
162 Analyse de bifurcations de cycles limites : les oscillations induites par le pilote
Fig. 10.4. Diagramme de Nyquist et de Nichols pour un gain piloteK
pil= 3.9
Comme les courbes s’intersectent en deux points, il y a deux cycles limites. Le critère de
Loeb permet d’affirmer que le point d’intersection supérieur sur la figure (10.4) correspond à
une orbite périodique instable et celui inférieur à une orbite périodique stable. Les valeurs de
la pulsation ω aux points critiques en lesquels G(jω) = −1/N(X) sont 3.8rad/s et 2.5rad/s.
Quant aux valeurs du rapport X =
AωVLtelles que−1/N(X) =G(jω), elles sont de 1.3et2.3.
Or l’amplitude A des cycles est donnée, dans le cas du limiteur en vitesse, par la formule
A =
VLXω. Les enseignements de la méthode du premier harmonique permettent de conclure
qu’il existe un cycle instable de pulsation ω = 3.8rad/s et d’amplitude A = 0.1rad et
un cycle stablede pulsationω = 2.5rad/s et d’amplitudeA= 0.25rad. En particulier, une
information importante est que l’orbite périodique instable est à l’intérieur de celle qui est stable.
Pour vérifier cette affirmation, des simulations temporelles dont les valeurs initiales sont à
l’intérieur et à l’extérieur du cycle limite instable sont effectuées. Vu la disposition des éléments,
comme l’amplitude de l’état d’entrée de la non-linéarité est de A = 0.1rad pour ce qui est du
cycle instable, la valeur-couperet d’initialisation deθestδ
s(0)/K
pil=A/K
pil≈0.1/3.9≈0.025.
Une première simulation, de condition initialeθ(0) = 0.02raddans le cycle instable, est faite
et présentée dans (10.5).
Premier cas de PIO : le vol en stationnaire du concept ADOCS 163
Fig.10.5. Simulations temporelles de θetδ
spour θ(0) = 0.02radetK
p= 3.9
Le système converge vers le point d’équilibre à l’origine, comme le prédit l’analyse précédente.
Pour compléter les vérifications concrètes, une autre simulation temporelle est réalisée en se
plaçant cette fois-ci en dehors du cycle instable et en prenant une condition initiale θ(0) =
0.03rad.
Fig.10.6. Simulations temporelles de θetδ
spour θ(0) = 0.03radetK
p= 3.9
Le système tend bien vers une orbite périodique dont l’amplitude au niveau de la
servo-commande (variableδ
s) est de l’ordre de0.25rad, équivalente à celle pressentie dans les calculs
préliminaires. Il y a effectivement dans cette configuration un couplage "pilote-véhicule-élément
déclenchant" qui donne lieu à des oscillations entretenues lors d’une telle manœuvre.
Dès lors que l’existence de PIO a été mise en évidence dans une situation où la nervosité
du pilote était fixée, l’étape suivante est de pouvoir dresser un inventaire des différents types de
comportement de l’appareil et des cas possibles de PIO.
Comme tâche initiale de l’analyse globale du dispositif, il est nécessaire de résoudre l’équation
d’auto-oscillations. En notantH la fonction de transfert décrivant la réponse de l’aéronef dans
le plan longitudinal et N(A, ω) l’approximation du premier harmonique de la non-linéarité, les
164 Analyse de bifurcations de cycles limites : les oscillations induites par le pilote
solutions éventuelles de K
pilH(jω)N(A, ω) + 1 = 0 sont recherchées. Une routine programmée
dans l’environnement matlab procède au calcul des courbes du gain piloteK
pilen fonction de la
pulsation ω et de l’amplitude A.
Fig. 10.7. Courbes du gain piloteK
pilen fonction de la pulsation ω et de l’amplitude A
De l’examen des tracés de la figure (10.7), il ressort qu’il peut être distingué trois plages
de valeurs du gain pilote K
pilpour lesquelles le nombre de cycles limites diffère.
– Pour K
pil<3.72, il n’y aaucun cycle limite.
– Pour3.72< K
pil<4.1, il y adeux cycles limiteset le critère de Loeb permet d’affirmer
que le cycle d’amplitude la plus faible et de pulsation la plus grande estinstablealors que
l’autre eststable.
– Pour K
pil>4.1, il n’y a qu’un unique cycle limite stable.
Le diagramme de Nyquist associé à K
pil∗= 3.72 montre que les graphes de K
pil∗·H et
−1/N sont tangents, ce qui est une indication que K
pil∗est bien la valeur critique pour laquelle
apparaissent les cycles limites. De même, sur le diagramme de Nyquist associé à K
pil∗∗= 4.1, le
graphe de K
pil∗∗H passe par le point(−1,0), ce qui signifie que le cycle limite associé est voué à
disparaître. La figure (10.8) illustre ces constations.
Premier cas de PIO : le vol en stationnaire du concept ADOCS 165
Fig.10.8. Diagrammes de Nyquist pourK
pil= 3.72 etK
pil= 4.1
Dans cette partie de l’analyse, l’attention se focalise aux environs de K
pil∗. Une simulation
temporelle est tout d’abord effectuée pour K
pil= 3.7< K
pil∗et sa valeur initiale θ(0) = 0.1rad
est sélectionnée grande afin qu’elle converge de façon certaine vers le cycle limite éventuel, s’il y
en a un.
Fig.10.9. Simulations temporelles de θetδ
spour θ(0) = 0.1radetK
pil= 3.7
La simulation converge vers le point d’équilibre à l’origine, en accord avec les prévisions de
l’investigation initiale.
La configuration dans laquelle l’étude se poursuit est celle où K
pil= 3.76 > K
pil∗. La
simu-lation, dont la valeur initiale de θ(0) = 0.1rad est choisie grande afin de ne pas manquer un
éventuel cycle limite, donne :
166 Analyse de bifurcations de cycles limites : les oscillations induites par le pilote
Fig. 10.10. Simulations temporelles deθ etδ
spourθ(0) = 0.1rad etK
pil= 3.76
Il s’agit d’une situation pour laquelle il y a un couplage aéronef-pilote, comme prévu. Afin
d’accrocher des orbites périodiques avec Simulink, il faut néanmoins choisir un gain pilote
légè-rement plus élevé que la valeur critique théorique K
pil∗.
Dans le document
Théorie des bifurcations appliquée à l'analyse de la dynamique du vol des hélicoptères
(Page 162-167)