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II.1 Introduction

Soumise à des glaciations et déglaciations successives au cours du quaternaire la vallée glaciaire de la Romanche présente dans sa partie basse de nombreux indices de déstabilisations gravitaires probablement liées au réajustement des versants rocheux suite au retrait glaciaire. Parmi ces déstabilisations se trouve le mouvement de Séchilienne qui affecte le versant situé en rive droite de la Romanche. Le choix d’étudier ce mouvement majeur des Alpes françaises est motivé par sa localisation dans une vallée glaciaire alpine mais également en raison de l’importante documentation existante sur ce mouvement. En effet le mouvement de Séchilienne fait l’objet depuis les années 80 de nombreuses études et d’une surveillance continue en raison du fort risque qu’il représente.

Afin d’avoir une vision synthétique de l’ensemble des connaissances acquises sur le site de Séchilienne, un état des lieux de l’ensemble des travaux réalisés sera dressé dans ce chapitre.

II.2 Description du mouvement de Séchilienne

II.2.1 Localisation du mouvement

Le mouvement de Séchilienne est localisé dans la vallée de La Romanche, à une vingtaine de kilomètres au Sud-est de la ville de Grenoble (Figure II.1a). Il affecte une partie du versant nord, situé entre Séchilienne et Vizille (Figure II-1b) et appartenant à la bordure Sud du massif de Belledonne.

Figure II-1 Localisation du mouvement de Séchilienne a) en France b) au Sud-est de la ville de Grenoble, dans la vallée de La Romanche.

La zone déstabilisée présentée à la Figure II-2 (limites en vert) possède une superficie d’environ 0,7 km². Elle s’étend en rive droite de la Romanche, du village des Thiébauds à l’Est (ancien verrou glaciaire) au village des Rivoirands à l’ouest, entre 600m et 1140 m d’altitude. Cette limite à 1140m d’altitude correspond à l’escarpement sommital du Mont sec qui s’étire sur prés d’un kilomètre avec une hauteur atteignant par endroit une trentaine de mètres. On retrouve dans la partie Est de cette zone déstabilisée une zone plus active appelée « les Ruines de Séchilienne». Les Ruines de Séchilienne d’une superficie de 0,05 km² (limites en bleu, Figure II-2a et b) débute à mi-versant et s’étend entre 700 et 850m d’altitude. Cette zone est facilement identifiable en raison de la présence d’un important cône d’éboulis actif (Figure II-2a et b).

Figure II-2 a) Photographie de l’extrême sud du massif de Belledonne avec localisation du mouvement et de la zone des Ruines. b) photographie et limites de la zone des Ruines.

II.2.2 Historique des événements

Depuis plusieurs siècles, le site de Séchilienne est régulièrement affecté par des chutes de bloc (éboulements rapportés au cours des années 1726, 1762, 1794, 1833, 1906 [Panet et al., 2000] ), faisant de ce site un lieu reconnu comme dangereux. Ces événements réguliers, toutefois considérés comme mineurs, n’ont jamais alerté la population ou les pouvoirs publics, comme en témoignent les différents signes d’exploitation du versant : chemin et champs dispersés ainsi que les nombreuses mines anciennement en activité [Chardon, 1987]. A partir des années 80, les chutes de blocs vont cependant s’intensifier et menacer la route RD 1091 sous-jacente, provoquant la réaction des pouvoirs publics. En réponse, un remblai de protection a été érigé afin de contenir les blocs et de protéger la route passant au pied du versant. Lors de l’hiver 1985, ce remblai de protection a été cependant dépassé au cours d’un éboulement durant lequel des blocs de taille importante ont atteint la route. Suite à cet événement, des reconnaissances géologiques ont alors mis en évidence que ces chutes de blocs, jusque là considérés comme un simple processus d’érosion superficielle, était au contraire lié à un mouvement profond affectant le versant. Le site de Séchilienne a alors été sous surveillance [Duranthon and Effendiantz, 2004], avec la mise en place d’un dispositif de suivi et d'auscultation progressivement mis en œuvre et développé par le CETE de Lyon (paragraphe II.3.3.1 ). Depuis lors, de nombreux éboulements, avec des volumes compris entre 0,01m3 et 40000 m3 (novembre 2006) ont eu lieu [Kasperski, 2008]. Depuis Avril 2007, des milliers d’évènements sismiques, attribués à des éboulements, ont été enregistrés sur le versant [Helmstetter and

Garambois, 2010]. Le dernier événement recensé est daté du 2 janvier 2013 avec un volume de 1000

m3. En parallèle du dispositif de surveillance, de nombreuses études géologiques, géodésiques, géotechniques, géophysiques et hydrogéologiques [Antoine et al., 1987, 1994 et 1998; Giraud et al.,

1990 ; Rochet et al., 1994; Pothérat, 1995; Alfonsi, 1997; Vengeon, 1998 ; Vengeon et al., 1999 ; Pothérat & Alfonsi, 2001; Guglielmi et al., 2002 ; Alfonsi et al., 2004; Durville et al., 2004; Meric et al.,

2005 ; Kasperski, 2008 ; Leroux, 2009] ont été réalisées afin de mieux comprendre et caractériser ce mouvement de versant.

II.2.3 Aléas, risques et enjeux

A partir de ces mesures d’auscultation et des nombreuses études réalisées, plusieurs scénarios d'évolution du versant ont été élaborés par le comité international d’expert mandaté par l’Etat. Nous présenterons dans ce paragraphe les différentes conclusions issues des rapports (Panet I, II et III) fournis par ce comité en 2000, 2003 et 2009 [Panet et al., 2000, 2003 et 2009] ainsi que celles issues du rapport d’expertise rédigé par Durville et al, en 2004. Ce dernier basé sur les rapports Panet I, II ainsi que sur de nouvelles expertises géologiques, hydrauliques et socio-économiques a eu pour objectif de préciser les aléas et les enjeux composant le risque de Séchilienne, et de proposer des parades techniques et juridiques susceptibles de réduire ou prévenir ce risque et les dommages associés.

II.2.3.1 Aléas

La notion d’aléa traduit la probabilité d'occurrence, en un point donné, d'un phénomène naturel de nature et d’intensité définie. La particularité du mouvement de Séchilienne est la combinaison selon le scénario d’évolution du versant [Panet et al., 2000, 2003 et 2009] de plusieurs aléas : éboulement rocheux, hydrauliques et sismiques.