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CHAPITRE 4 : REGARD DES FEMMES SUR LES INÉGALITÉS

4.1 Discriminations

4.2.6 Le pouvoir d’agir par procuration

Certaines femmes qui disent avoir subi de la violence conjugale semblent vouloir changer leurs conditions de vie et soulèvent l’importance du «care», d’une famille qui sache bien prendre soin d’elles et de leurs enfants :

« I want to change this life; I want a man a family who will take good care of me and my kids. » Ikrâm, 25 ans, mususlmane

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« This bad condition I will change. In place of that if it’s possible I want to give to my kids nice education, nice care, everything. » Alîza81, 22 ans, musulmane

Ici, Alîza et Ikrâm semblent mettre de l’avant que si elles avaient le pouvoir de changer leurs conditions de vie, elles tenteraient de transformer celles de leurs enfants. Il semble ardu pour ces femmes de formuler des souhaits pour elles- mêmes. En effet, pour plusieurs femmes l’idée de rêver et d’imaginer leur vie autrement ne semble pas chose facile, car leur vie serait déjà complète et il ne serait pas possible d’y changer quoi que ce soit. Selon Arya: «What I will change? I’m al- ready married, I have kid, I cannot change. » Pour elle, il n’y a pas de possibilité de changement, car sa situation lui semble bien établie.

Une autre jeune femme s’est spontanément posé la question concernant sa vie conjugale. Houriya mentionne que si c’était à refaire, elle ne le ferait pas de la même façon, car ses rêves ont pris fin au moment où elle s’est mariée : « I didn’t like to marry, if someone asked me this question if I wanted to get married I would have said no. Before my married life it was fine, it was very enjoyable. But after marriage, my own wishes were finished, only kids, only husband, only in-laws. » Ces souhaits dont Houriya fait mention pourraient ne jamais se réaliser, car selon elle, les désirs des enfants, du mari et des beaux-parents passeraient en premier. D’autres femmes comme Houriya disent ne pas vouloir changer un seul aspect de leur vie, mais elles aspirent à de meilleures conditions de vie pour leurs enfants :

Nothing to change, I want to change life of my children, better life for them. Darra, 32 ans, mususlmane

First think no goal. I have wishes for our kids. I want nice marriage for my daughter and nice education for both. I don’t want to change, I am happy with my husband. I have nice kids. They obey us. I only want bright future for our kids (right marriage, education). Éliza, 32 ans, musulmane

L’éducation semble être un désir largement partagé par ces femmes et de bonnes conditions de vie y seraient indissociables, selon elles. Toutes les femmes ont enseigné à leurs filles l’importance de l’éducation et la nécessité d’aller à l’école, notamment deux participantes qui mentionnent ne pas vouloir que leurs filles

81 Alîza a vécu la mort d’un fils, il lui reste maintenant ses deux filles. Elle a une mauvaise relation avec sa famille et sa belle-famille, son mari ne travaille pas, elle reste chez ses parents et sa mère ne cesse de lui demander de partir…

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soient analphabètes comme elles, voulant leur donner une capacité d’agir sur leur vie :

I’m telling them, don’t do bad things, do good things. I don’t want them to be like, I’m illiterate, I want them to do study. Arya, 25 ans, hindoue I will told her just do study, until you want, even until I die, I will give you. Badia, 30 ans, mususlmane

Badia, par ces paroles, évoque l’idée qu’elle donnerait à sa fille la possibilité d’étudier et que toute sa vie elle y veillerait, jusqu’à sa mort. Même si le but de cette recherche n’était pas de faire une analyse différenciée selon le genre, il aurait été intéressant de voir si les frères des répondantes avaient un niveau d’éducation plus élevé que le leur et si les préférences des frères en matière de choix du sexe auraient été différentes de celles de leurs sœurs.

Afin de réduire les inégalités entre les sexes, le gouvernement indien et d’autres partenaires locaux et nationaux ont pour objectif d’assurer l’éducation au primaire pour tous en 2015. C’est notamment dans cette optique qu’en 2010, le gouvernement indien a mis en place une loi sur le droit à l’éducation. D’ailleurs à ce propos, Houriya reconnaît qu’il y a eu des efforts faits par le présent gouvernement pour mettre en place des mesures pouvant faciliter l’accès à l’éducation pour les filles et les garçons en situation de pauvreté, par le biais de bourses. La différence d’accès entre les sexes ne serait pas très visible selon elle : « No I didn’t saw too much, because government now providing education and scholarship for both, we also need girl, we can educate them also. I got the knowledge from this organization. So many years I was attach with this organization»82. Toutefois, la mise en application de ces programmes est critiquée.

En somme, on constate que chez les participantes l’opinion de la communauté a une très grande place dans l’inculcation des valeurs à leurs enfants. La responsabilité des parents de marier leur fille, la socialisation des enfants de sexe féminin aux tâches ménagères et les restrictions imposées aux filles et aux jeunes femmes tant dans les sphères publiques que privées, en sont des exemples. Les rumeurs sont bien présentes dans le discours des femmes et semblent contribuer à

82 Ici la personne a fait mention de l’organisme toutefois pour que le quartier reste anonyme, il est primordial de garder l’organisme également dans l’anonymat pour des questions de sécurité et de confidentialité.

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reproduire un ordre social marqué par des inégalités entre les genres tant au sein de l’organisation familiale que dans la sphère publique. Les femmes rencontrées sont certes au fait de l’existence d’une division sexuelle, elles semblent d’ailleurs s’y conformer, tout en ayant à l’esprit un avenir meilleur pour leurs enfants. Nous verrons dans le prochain chapitre en quoi ces pressions sociales et familiales ont une influence sur le discours des femmes et de quelles façons ces représentations peuvent se transposer dans le choix du sexe de l’enfant à naître pour éclairer le phénomène des interruptions volontaires de grossesse sur la base du sexe du fœtus.

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CHAPITRE 5 : LES FEMMES, AGENTES DE CHANGEMENT, AU CŒUR DES

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