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CHAPITRE 4 : MODÈLE QUANTIQUE DU ROTATEUR CONFINÉ

4.4 Le rotateur confiné

4.4.1 Potentiel de confinement

La forme explicite pour le potentiel de confinement est donnée à l’équation 4.2, qui est répétée ici par commodité. V = 1 2k|⃗R| 2= 1 2k|(⃗r+ ⃗dci)| 2= 1 2k(|⃗r| 2+| ⃗dci|2+2(⃗r· ⃗dci)) [4.2] La signification des symboles utilisés dans cette équation est illustrée à la figure 36, où les lettres minuscules

θet ϕ indiquent la position angulaire du centre de masse (CM) de la molécule dans le repère du laboratoire,

et les lettres majusculesΘ et Φ décrivent l’orientation du vecteurdci.

x y z ⃗r ϕ θ b a c ⃗R CI CM dci ⃗ dci Φ Θ

Figure 36Variables utilisées dans la définition du potentiel de confinement.

Les vecteurs⃗r etdci⃗ peuvent être définis en terme de leur coordonnées sphériques respectives, ce qui permet de réécrire le potentiel de confinement explicitement en terme des variables r, θ, ϕ,Θ et Φ :

⃗r =r ⎡ ⎢ ⎣ sin θ cos ϕ sin θ sin ϕ cos θ ⎤ ⎥ ⎦ ⃗ dci =dci ⎡ ⎢ ⎣ sinΘ cos Φ sinΘ sin Φ cosΘ ⎤ ⎥ ⎦ [4.41]

V(r, θ, ϕ,Θ, Φ) = 1 2k(r

2+

dci2+2rdci(sin θ cos ϕ sinΘ cos Φ

+sin θ sin ϕ sinΘ sin Φ+cos θ cosΘ))

[4.42] Puisque le produit scalaire entre deux vecteurs est minimal quand les deux vecteurs sont antiparallèles, on peut déduire que le potentiel est minimisé quand⃗r =− ⃗dci. Cette opération consiste en fait à appliquer l’opérateur parité sur l’un des deux vecteurs pour obtenir les coordonnées du deuxième. En coordonnées sphériques, l’opérateur parité transforme(r, θ, ϕ)en(r, πθ, π+ϕ), on a donc la conditionΦ=ϕ+π

et Θ = πθ pour que le potentiel soit minimisé. Cette condition peut être vue comme la source du

couplage entre la position et l’orientation.

Cette anticolinéarité entre les vecteurs position et orientation comme condition de minimisation du potentiel est retrouvée pour d’autres systèmes, comme CO@C60 (206) ou CH3F dans les matrices de gaz rares (207). D’ailleurs, cette condition apparait également dans les simulations par dynamique moléculaire, avec la distribution du produit scalaire d’orientation. En effet, la figure 18 montre que l’orientation la plus probable, donc, celle qui minimise l’énergie potentielle, correspond à l’alignement antiparallèle des vecteurs position et orientation. Le potentiel de confinement utilisé dans le modèle du rotateur confiné se trouve justifié par ces observations.

Comme nous l’avons vu lors du traitement de l’oscillateur harmonique, les harmoniques sphériques avec l = 1 (tableau 15) peuvent servir de fonctions de base pour décrire n’importe quel vecteur en trois dimensions. L’équation 4.21 en est un exemple. De même, la somme de fonctions trigonométriques apparaissant dans l’équation 4.42 peut être décrite par les harmoniques sphériques en remarquant que :

Y11(θ, ϕ)Y1−1(Θ, Φ) +Y1−1(θ, ϕ)Y11(Θ, Φ) = − 3

sin θ sinΘ(cos ϕ cosΦ+sin ϕ sinΦ) [4.43] Y10(θ, ϕ)Y10(Θ, Φ) = 3

cos θ cosΘ [4.44]

Le potentiel de confinement peut alors être exprimé en terme des harmoniques sphériques : V(r, θ, ϕ,Θ, Φ) = 1 2k(r 2+dci2+ 3 2rdci(Y 0 1(θ, ϕ)Y10(Θ, Φ) −Y11(θ, ϕ)Y1−1(Θ, Φ)−Y1−1(θ, ϕ)Y11(Θ, Φ)) [4.45] Écrire le potentiel en terme des harmoniques sphériques s’avère pratique pour deux raisons, toutes deux liées aux propriétés des coefficients de Clebsch-Gordan, que nous allons voir par la suite. La première est que, écrit sous cette forme, on voit directement que le potentiel de confinement impose des règles de sélection sur le mélange des nombres quantiques J, l, et sur leurs projections. En effet, nous allons voir que les fonctions d’ondes du rotateur confinée sont séparables, le calcul des éléments de matrice du potentiel implique donc des intégrales angulaires qui sont effectuées séparément sur les angles θ, ϕ etΘ, Φ . Ces

intégrales ont la forme : ∫ 0 ∫ π 0 ( Ym′l l′ )∗ (θ, ϕ)Y1x(θ, ϕ)Ylml(θ, ϕ)sin θdθdϕ [4.46]

avec x = 0,±1. Les propriétés des coefficients de Clebsch-Gordan permettent de montrer que ces intégrales sont non nulles seulement si l′ = l ou l±1 et m

l = ml+x, avec x = 0,±1 (2,136). Les mêmes remarques valent pour J et MJ, quand l’intégration se fait surΘ et Φ. Le potentiel de confinement autorise donc le couplage entre états respectant les règles de sélection :

∆J =∆l=∆MJ =∆ml =0,±1 [4.47]

où le symbole∆ ne désigne pas le changement d’un nombre quantique lorsque qu’un état quantique change (comme lors de l’absorption d’un photon par exemple), mais plutôt la différence entre deux nombres quantiques X et X′ de deux états qui sont couplés par le potentiel (∆X =XX). Attention aussi aux

égalités, qui servent simplement à exprimer que les mêmes règles de sélection s’appliquent à tous ces nombres quantiques ; elles n’ont pas pour but de dire que lorsque la variation de l’un d’eux est fixée, toutes les autres lui sont égales.

En plus de ces règles de sélection (plus exactement, règles de couplage), il est intéressant d’examiner quelles sont les couples de valeurs MJ/m′l autorisés par le potentiel. On remarque à l’équation 4.45 que seuls les produits ayant x =−xinterviennent dans les produits d’harmoniques sphériques du potentiel, où x fait référence à l’exposant des harmoniques sphériques, comme à l’équation 4.46. Cela signifie que le potentiel couple seulement les états dont les projections des moments angulaires orbitalaires et rotationnels sont égales et opposées. On peut voir cela comme l’équivalent quantique de la condition de minimisation du potentiel, où, d’un point de vue classique, celui-ci est minimisé quand les vecteurs⃗ret⃗dci sont antiparallèles. Cela se traduit par un mélange de fonctions d’onde qui doivent avoir des composantes en z opposées pour les moments angulaires rotationnel et orbitalaire, afin de minimiser ce potentiel. Étant donnée les règles de sélection sur∆MJ et∆mlénoncées à l’équation 4.47, et le fait que le potentiel couple seulement les états répondants au critère MJ = −m′l, on en déduit qu’il existe une règle additionnelle contraignant les variations simultanées de ∆MJ et∆ml :∆MJ =∆ml, où, ici, l’égalité sert vraiment à exprimer la contrainte que ces deux quantités doivent être égales. En effet, en posant∆MJ = M′J−MJ et ∆ml =m′l−ml, puis en appliquant les conditions MJ =−m′l et M′J =−mlimposées par le potentiel, on obtient bel et bien ∆MJ = −ml+ml′ = ∆ml. Ainsi, les valeurs de ∆MJ et ∆ml pour deux états couplés ne sont pas indépendantes.

La seconde raison pour exprimer le potentiel en terme des harmoniques sphériques est similaire : les intégrales relatives aux éléments de matrice s’expriment de manière analytiquement exactes dans ce cas.

Les éléments de matrices qui sont forcément nuls sont facilement identifiables, et le calcul les éléments non nuls est facilité par l’existence d’identités mathématiques entre les harmoniques sphériques. Plus de détails sur cet aspect seront donnés lorsque l’implémentation numérique du modèle sera discutée. Une discussion sur l’évaluation des paramètres k et dci apparaissant dans le potentiel est également remise à plus tard.