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Récoltes — Castor vs loutre

AUTEUR: RENÉ LAFOND

1- PORTRAIT DE LA SITUATION

• Rétrospective ;

Les prix élevés offerts pour la fourrure de martre d'Amérique dans la deuxième moitié des années 1980 ont entraîné des niveaux de récolte sans précédent sur le plan provincial. Devant les risques de surexploitation, quelques régions ont débuté, en 1987, un programme de suivi particulier à l'exploitation de la martre. Ce programme a pris une envergure provinciale en 1989. Cependant, une baisse relative du prix de la fourrure de martre et un désintéressement général envers l'activité de piégeage semblent avoir diminué les niveaux de récolte.

• Analyse des paramètres généraux ;

La récolte de martre a connu une chute constante de 1987-1988 à 1993-1994, exception faite de 1991-1992 (Figure 1). Le prix moyen de sa fourrure, lequel semble conditionner les niveaux de récolte, a également chuté depuis 1987; par contre, il est toujours demeuré intéressant ces dernières années, oscillant autour de 50,00 $.

En 1992-1993, on observe une diminution généralisée de la récolte partout au Québec comparé à l'année précédente. Cependant, en 1993-1994, les captures de martres et les rendements qui y sont associés augmentent dans la majorité des régions, sauf dans les régions 09 et 10 où l'on remarque une nette diminution (Figure 2 ) . Comme ce sont deux régions importantes en terme de nombre de captures, il en résulte la plus faible récolte provinciale de martre depuis 10 ans (Tableau 1).

• Analyse des paramètres spécifiques ;

a) Pourcentage de mâles : Tel que mentionné abondamment dans la littérature, lorsqu'on retrouve 50 % (ou moins) de mâles dans la récolte de martre, on risque fort de surexploiter la ressource. La figure 3 démontre qu'il s'est récolté un peu plus de 50 % de mâles en 1987-1988.

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De façon générale, ce pourcentage augmente constamment jusqu'à atteindre 66 % de mâles en 1993-1994. Ainsi, le ratio de mâles est toujours demeuré au dessus de la parité, c'est-à-dire dans des valeurs acceptables au niveau de l'exploitation.

Il est à noter que le pourcentage de mâles calculé à l'aide du Carnet du trappeur est toujours légèrement supérieur à celui issu de l'analyse des carcasses (exception faite pour 1993-1994 où ils sont semblables), mais les tendances sont identiques.

b) Rapport juvéniles par femelle adulte : Certains auteurs affirment qu'une exploitation sécuritaire des populations de martre devrait afficher un rapport égal ou supérieur à 3,0 juvéniles par femelle adulte (> 1,5 an) capturée. Jusqu'à ce jour, les valeurs les plus basses obtenues furent de 4,0 juvéniles par femelle adulte en 1987-1988 et en 1991-1992 (Figure 4) se trouvant ainsi dans la plage dite «sécuritaire» de l'exploitation. On remarquera que le rapport des sexes évolue de la même façon que le rapport juvéniles par femelle adulte.

c) Succès et effort de piégeage : Tel que mentionné dans le dernier bilan provincial de l'exploitation de la martre, il semble qu'un succès de piégeage égal ou supérieur à 10 martres/1000 nuits-piège indique un degré d'exploitation acceptable. Les valeurs obtenues depuis l'implantation du Carnet du piégeur sur une base provinciale indique que le succès se maintient autour de 11 captures/1000 nuits-piège. Seule la saison 1992-1993 fait exception affichant un faible 7,4 captures/1000 nuits-piège (Figure 5 ) .

L'effort de piégeage moyen (en nuits-piège par trappeur) traduit l'attrait qu'exerce le piégeage de la martre auprès des trappeurs. Ainsi, les trappeurs de martres déploient un effort de piégeage remarquablement stable d'une année à l'autre, oscillant entre 700 et 800 nuits-piège par trappeur.

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2- DISCUSSION

Faits saillants :

La saison 1992-1993 fut la pire saison de piégeage de la martre depuis l'instauration du Carnet du trappeur; les succès de piégeage provincial et régionaux furent les plus faibles enregistrés à cette date. Il est intéressant de noter que les autres indicateurs biologiques (pourcentage de mâles et rapport juvéniles par femelle adulte) ont connu, un an auparavant

(1991-1992), leur plus faible valeur de ces cinq dernières années.

En 1993-1994, la situation s'est rétablie puisque la récolte de martre a connu une augmentation sensible dans l'ensemble de la province, exception faite des régions 09 et 10. D'ailleurs, dans ces deux régions, on a observé un an auparavant le plus faible pourcentage de mâles depuis 1987-1988; par exemple, la Côte-Nord (région 09) a enregistré un ratio débalancé en faveur des femelles (44 % de mâles en 1992-1993).

De ces résultats, on peut envisager qu'il existe une certaine valeur prédictive des paramètres biologiques sur les niveaux de récolte de l'année suivante. Il faudrait documenter cet aspect afin de voir s'il s'agit d'une conséquence du taux d'exploitation ou s'il s'agit de la dynamique normale de la population.

En résumé, les indicateurs de l'exploitation de la martre nous portent à croire que les niveaux de récolte sont très sécuritaires actuellement.

Mentionnons toutefois que le calcul des indicateurs biologiques de 1993-1994 n'est complété que pour quatre régions sur 10, nous empêchant d1 approfondir-une analyse interrégionale.

Gestion de la martre ;

A première vue, il semble que les indicateurs actuels soient adéquats.

Cependant, il n'y a pas de lien direct entre les valeurs des indicateurs d'exploitation de la martre et les niveaux de population de cette espèce. Ce constat est lié à notre manque de connaissance sur la validité de nos indicateurs et sur les meilleurs moyens à prendre pour aider une population de martre en difficulté. Il nous est donc actuellement impossible de gérer la martre en identifiant un taux d'exploitation optimal et de le suivre dans le temps.

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Nous disposons actuellement de nombreux outils de suivi pour la martre mais, lorsqu'on compare les résultats tirés de l'analyse des carcasses et du Carnet du trappeur, on remarque certaines divergences. A la figure 3, par exemple, les pourcentages de mâles n'auraient-ils pas dû être semblables annuellement (à tout le moins, les intervalles de confiances n'auraient-ils pas dû tous se chevaucher)?

Avenues de solution :

Comme la martre se gère, entre autres, à l'aide d'indicateurs biologiques qu'on pourrait qualifier de «seuils minimum à respecter» (50 % de mâles, 3,0 juvéniles par femelle adulte, 10 captures/1000 nuits-piège), il serait essentiel de valider ces indices pour établir quelles valeurs sont applicables au Québec. Cela nous permettrait de revoir l'ensemble de nos sources de données sur l'exploitation de la martre afin d'évaluer la pertinence de certains volets du programme.

Suite à tout cela, nous serions en mesure d'établir un plan de gestion qui prévoit des mécanismes administratifs et/ou réglementaires permettant de réagir rapidement à toute situation problématique touchant la martr© dans le cadre d'une gestion plus rationnelle.

3- RECOMMANDATIONS

- relatives au suivi de la martre ;

ATTENDU QUE nous avons présentement des dédoublements d'outils de suivi sur l'exploitation de la martre;

ATTENDU QUE certains de ces outils de suivi requièrent un investissement considérable en ressources humaines;

ATTENDU QUE la validité des paramètres du suivi de l'exploitation de la martre n'a pas été démontrée pour le Québec;

ATTENDU QUE dans le contexte actuel de recentrage des ressources, il est urgent de questionner la pertinence de maintenir certaines activités de suivi des populations;

IL EST RECOMMANDÉ

• qu'un bilan complet des données recueillies depuis 1987-1988 sur l'exploitation de la martre soit produit d'ici le 31 mars 1995;

• que les responsables du piégeage se prononcent, à la lumière de ce bilan, sur la pertinence de maintenir le programme de suivi pour la martre tel qu'il existe actuellement et ce, avant la saison de piégeage

1995-1996.

- relatives à la gestion de la martre :

ATTENDU QUE les indicateurs actuels ne nous permettent pas de porter un diagnostic précis sur l'exploitation de la martre;

ATTENDU QUE nos connaissances actuelles ne nous indiquent pas quelles seraient les mesures adéquates à prendre suite à un constat de surexploitation d'une population de martre;

ATTENDU QUE la réglementation et la gestion s'appliquant à la martre (aux animaux à fourrure en général) ne prévoient pas une réaction rapide face à un constat de surexploitation d'une population;

ATTENDU QUE la martre est une des espèces d'animaux à fourrure les plus convoitées et les plus sensibles à la surexploitation par le piégeage;

ATTENDU QUE la martre est économiquement très importante au Québec;

IL EST RECOMMANDÉ

• qu'un plan de gestion de la martre d'Amérique au Québec soit élaboré prioritairement suite à celui portant sur le lynx du Canada;

qu'on évalue la pertinence de mener des recherches (travaux de terrains ou autres) visant l'établissement d'indicateurs sur l'exploitation de la martre qui soient légers et fiables en vue d'en intégrer les résultats au plan de gestion.

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