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Pompe à protons de type vacuolaire (V-ATPase)

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C. Régulateurs du pH cellulaire

2. Pompe à protons de type vacuolaire (V-ATPase)

a) Structure

La pompe à protons de type vacuolaire (V-ATPase), initialement mise en évidence dans les organelles de cellules végétales ou fongiques, est également exprimée dans les cellules eucaryotes où elle est localisée dans les compartiments intracellulaires mais aussi au niveau de la membrane plasmique. Il s’agit d’un complexe multiprotéique utilisant l’énergie d’hydrolyse de l’ATP pour transporter de manière électrogénique les protons (Brown et al., 1987; Forgac, 1989). Le complexe est séparé en deux domaines ; un domaine V1 composé de 8 sous-unités différentes (A-H) responsables de l’hydrolyse de l’ATP et un domaine V0 membranaire composé de 6 sous-unités (a, c, c’, c’’, d et e) formant le pore responsable du transport des protons (Figure 11) (Forgac, 2007; Jefferies et al., 2008). Les sous-unités c, c’ et c’’ forment un anneau au niveau membranaire nécessaire à la fonction du complexe. Le transport des protons s’effectue par une rotation du complexe protéique (Hirata et al., 2003;

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Imamura et al., 2003). L’hydrolyse de l’ATP par le domaine V1 fourni l’énergie nécessaire pour la rotation d’un complexe composé des sous-unités D F d et de l’anneau. L’anneau effectue sa rotation par-rapport à la sous-unité a fixe, composée de deux hémi-canaux un orienté vers le cytoplasme et l’autre vers le milieu extracellulaire ou luminal. Le proton rentre par l’hémi-canal situé sur la partie cytoplasmique et se fixe sur une des sous-unités de l’anneau, puis lors de la rotation reste attaché sur l’anneau pour atteindre l’autre hémi-canal. Ce transport s’effectue avec une stœchiométrie de deux protons pour l’hydrolyse d’un ATP puisque ce complexe possède six sites de fixation pour les protons au niveau de l’anneau et 3 sites d’hydrolyse d’ATP (Tomashek and Brusilow, 2000).

Figure 11 : Structure et fonctionnement de la V-ATPase

A. Structure des deux domaines V0 et V1 formant la V-ATPase. B. L’hydrolyse de l’ATP par le complexe V1 induit la rotation du rotor situé sur le complexe V0 et permettant le transport de protons. D’après Beyenbach and Wieczorek, 2006.

b) Fonction

Les V-ATPases situées dans les organelles intracellulaires telles que les vésicules à clathrine, les vésicules synaptiques, les endosomes, les vésicules de l’appareil de Golgi, les vésicules sécrétrices ou les lysosomes ont pour rôle l’acidification de ces compartiments et la génération d’une force proton-motrice. Ces protons situés dans les compartiments intracellulaires peuvent être utilisés pour transporter des molécules comme des neurotransmetteurs ou des acides aminés vers ces compartiments. Le milieu acide de certains

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compartiments est nécessaire pour la dissociation de complexes récepteur-ligand intervenant dans les voies de l’endocytose ou pour l’activation d’enzymes protéolytiques capables d’activer par protéolyse d’autres protéines (Jefferies et al., 2008). Les V-ATPases exprimées au niveau de la membrane plasmique sont principalement situées dans des cellules épithéliales où elles permettent d’acidifier l’environnement extracellulaire et de réguler le pH intracellulaire. Dans les ostéoclastes la V-ATPase sécrète des protons lors du phénomène de résorption osseuse afin de dissoudre l’os et d’activer des protéases (revue du paragraphe II.D) (Nordstrom et al., 1995). L’activité de transport de protons par la V-ATPase peut être régulée par la formation de ponts disulfures réversibles au niveau des sites catalytiques (Feng and Forgac, 1992a,1992b). Sa régulation peut également s’effectuer par son adressage à la membrane, par dissociation des deux domaines V1 et V0 ou par une variation du couplage entre transport de protons et hydrolyse d’ATP (Cipriano et al., 2008).

La V-ATPase est exprimée au niveau de la membrane plasmique de cellules cancéreuses où elle possède un rôle de régulation du pH intracellulaire (Martinez-Zaguilan and Gillies, 1992; Martinez-Zaguilan et al., 1993) et par conséquent du pH extracellulaire. Son expression au niveau de la membrane plasmique et son activité sont retrouvées dans des cellules cancéreuses hautement invasives et il est proposé que son activité soit corrélée à l’agressivité des cellules cancéreuses (Martinez-Zaguilan et al., 1998; Sennoune et al., 2004).

L’expression de la V-ATPase dans les cellules cancéreuses est impliquée dans plusieurs de leurs propriétés. L’inhibition de la V-ATPase diminue la prolifération (Manabe et al., 1993), modifie la morphologie des cellules et diminue leur migration (Thomsen et al., 1999). La surexpression de la V-ATPase dans des fibroblastes induit une augmentation de l’invasivité des cellules et de l’activité de la MMP2 (Kubota and Seyama, 2000). De plus l’expression de la V-ATPase est capable d’augmenter la tumorigénicité des cellules (Perona and Serrano, 1988) tandis que son inhibition par un siRNA réduit la taille des tumeurs et la formation des métastases (Lu et al., 2005b). Il a été montré que les isoformes a3 et a4 du domaine V0 sont plus exprimées dans des cellules cancéreuses fortement invasives où elles participent à l’invasivité de ces cellules (Hinton et al., 2009). Le rôle de la V-ATPase dans les cellules cancéreuses semble impliquer principalement un effet sur la régulation du pH et non un rôle de la protéine en elle-même.

Le ciblage de l’activité de la V-ATP a été proposé comme une nouvelle stratégie de traitement des cancers (Spugnini et al., 2010). Une molécule inhibitrice de la V-ATP, l’esomeprazole

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utilisée comme une prodrogue activée par un pH acide, diminue la croissance de tumeurs et le gradient de pH des tumeurs in vivo (De Milito et al., 2010). Les inhibiteurs de V-ATPase pourraient également être utilisés dans le cadre de résistances aux chimiothérapies. En effet, l’expression de plusieurs sous-unités de la V-ATPase est augmentée par un agent de chimiothérapie, le cisplatine (Murakami et al., 2001; Torigoe et al., 2002). Cette augmentation d’expression est impliquée dans des phénomènes de chimiorésistance, il a donc été proposé que l’inhibition de la V-ATPase permettrait d’augmenter la cytotoxicité du cisplatine et pourrait être une nouvelle stratégie pour éviter les résistances à ce composé. De plus un prétraitement de cellules cancéreuses avec un inhibiteur de la V-ATPase sensibilise les cellules au 5-fluorouracile et à la vinblastine (Luciani et al., 2004).

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