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CHAPITRE 1 - R EPONSE INFLAMMATOIRE PLAQUETTAIRE AU COURS DE L ’ INFECTION

C. Polyarthrite rhumatoïde

La polyarthrite rhumatoïde (PR) est un rhumatisme inflammatoire chronique, qui affecte approximativement 1% de la population adulte mondiale. Elle se caractérise par une inflammation de la synoviale (tissu qui tapisse l’intérieur de la cavité articulaire), au niveau des petites et moyennes articulations des bras (coudes, mains) et des jambes (genoux, pieds) [386]. La destruction progressive de l’articulation provoque un handicap qui diminue la qualité de vie. La PR influencerait également l’espérance de vie par des épisodes inflammatoires aigus plus complexes et par une accélération du processus athérosclérotique [387].

Comme plusieurs pathologies inflammatoires, l’étiologie exacte de la PR n’est pas encore totalement élucidée. Des facteurs génétiques et environnementaux sont clairement mis en cause [386]. L’implication d’autoanticorps est également très possible [388].

Certains facteurs solubles libérés par les cellules mises en jeux dans la PR sont également responsables de la destruction osseuse. Un exemple bien décrit est la libération de MMP par les lymphocytes B et par les « fibroblast-like synovocytes » (FLS) stimulés par de l’IL-1 et du TNF-. De plus, l’IL-17 libéré par les lymphocytes T, présente un effet potentialisateur sur la réponse des FLS stimulées par de l’IL-1 [389]. D’autres protéases comme les cathepsines et les aggrecanases semblent impliquées dans la destruction osseuse [386]. L’activation du système RANK/RANK Ligand (RANKL) par les lymphocytes T est également impliqué dans l’érosion osseuse associée à la PR [390].

Le phénomène érosif observé dans la PR ne se limite pas au tissu osseux car des interstices sont aussi présents au niveau de l’endothélium associé à la membrane synoviale ; phénomène favorisant ainsi la formation de l’œdème caractéristique de la PR [391]. Dans cette étude de 1975, la présence de plaquettes à proximité de ces espaces avait déjà été observée.

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GR

C’est seulement en 2012 que Cloutier et al. confirment ces résultats (figure 33) et montrent que c’est la sérotonine dérivée des plaquettes qui est à l’origine de la formation de ces interstices [294], d’où leur localisation. Le mécanisme décrit dans cette étude représente une façon par laquelle les plaquettes peuvent prendre part à l’inflammation des articulations.

D’autres constatations témoignent de l’activation des plaquettes dans la PR. En effet, l’observation, au microscope électronique, de biopsies de synovie révèle la présence de thrombi qui obturent la lumière des vaisseaux synoviaux [391].

Dans la PR, l’activation plaquettaire ne concerne pas seulement leur fonction hémostatique ni la libération du contenu des granules denses, et notamment de sérotonine, car leur versant inflammatoire est également mis jeu. L’expression de CD62P sur les plaquettes est plus élevée pour les patients en PR aiguë que pour les patients en rémission ou les sujets non atteints de PR [392]. Ces patients présentent également un taux plus élevée de sCD40L sérique [393].

Figure 33 - Présence des plaquettes à proximité des fenestrations endothéliales observées dans la polyarthrite rhumatoïde

D’après Cloutier et al. [285]

Le synovium de patient atteint de polyarthrite rhumatoïde a été analysé par microscopie électronique. Les flèches noires indiquent un interstice entre les cellules endothéliales. E indique cellules endothéliales; PL, plaquettes; L, lymphocytes; RBC, globules rouges. Grossissement X 48 400

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L’expression de ces deux molécules par les plaquettes favorise leur adhésion aux autres cellules de l’inflammation ; c’est pour cela que les analyses de cytométrie en flux portant sur du sang circulant de patients PR révèlent la présence de complexes plaquettes-neutrophiles et plaquettes-monocytes [393], [394]. La formation des ces complexes cellulaires est également favorisé par une augmentation de l’expression du CD11b à la surface des monocytes et neutrophiles de patients PR [395]. Comme décrit au début du chapitre 2, la formation de ces complexes favorise le recrutement des leucocytes au niveau de l’endothélium

Outre le recrutement des neutrophiles, les plaquettes peuvent participer à l’inflammation de la PR par leur activité de COX-1 qui favorise la libération de prostaglandine H (PGH). Il est possible que l’excès de PGH plaquettaire puisse, par diffusion, atteindre les FLS. Ces derniers contiennent une prostacycline synthase qui métabolise le PGHen prostacycline, protéine hautement pro-inflammatoire [396]. Ceci expliquerait alors pourquoi la prostacycline est retrouvée en plus forte concentration chez les patients PR [397].

Enfin, la participation la plus originale des plaquettes dans la PR se fait via leurs microparticules. L’équipe de Boilard a mis en évidence ce mécanisme, dans lequel les MPP exercent un rôle inflammatoire direct au-delà du compartiment sanguin. Il avait déjà été montré que les patients PR présentaient un taux sanguin de microparticules significativement plus élevé que les sujets non atteints de PR [398]. L’altération endothéliale observée au niveau de la synovie dans les cas de PR fait que les plaquettes rentrent en contact avec le collagène de la matrice extracellulaire soutenant la membrane synoviale. Il s’ensuit alors l’activation de la GPVI plaquettaire, conduisant à la formation de microparticules (figure 34). Ces microparticules ont la possibilité de quitter le compartiment sanguin selon deux voies : i) passage passif à travers les fenestrations endothéliales dont la taille concorde avec celles des MPP. ii) transport par les leucocytes en cours d’extravasation. La présence des MPP dans le liquide synovial a pu être confirmée par cytométrie en flux et en microscopie à immunofluorescence. Les images de microscopie montrent que les neutrophiles contenus dans le liquide synovial présentent un signal CD41+, mais dont la taille ne correspond pas à des plaquettes entières mais à des microparticules. Ces résultats favoriseraient ainsi la seconde hypothèse pour le recrutement des microparticules.

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Articulation du genou humain

Fémur Cartilage Capsule Espace articulaire -membrane synoviale Fibula Menisque Tibia Synovium inflammatoire hypertrophique Polyarthrite rhumatoïde Synoviocyte Membrane synoviale Fenestration endothéliale Collagène stromal Microparticules Liquide synovial

Les MPP sont riches en IL-1 et sont alors capables d’induire l’activation des FLS se traduisant par une réponse cytokinique incluant la libération d’IL-8 [75].

L’ensemble de données rapportées ci-dessus montrent bien que les plaquettes sont impliquées dans la physiopathologie de la PR, d’autant plus qu’une déplétion plaquettaire attenue fortement le développement de la PR chez un modèle murin [75]. Ces études sont les premières à montrer que les MPP sont capables d’exercer leur activité inflammatoire en dehors de leur lieu de production.

Figure 34 - Libération de microparticules plaquettaires dans le liquide synovial de patients atteints de polyarthrite rhumatoïde

D’après Zimmermann et al. [390]

Durant la polyarthrite rhumatoïde, les articulations deviennent inflammatoires; avec une dilation de l’endothelium de la sinovie et une accumulation de neutrophiles, de cytokines/chimiokines et d’autres médiateurs de l’inflammation dans le liquide synovial. Une activation locale des plaquettes par le collagène induit la libération de microparticules plaquettaires. Ces microparticules peuvent alors s’insérer dans le synovium et amplifier sur place l’inflammation en produisant de l’IL-1β. Cette molécule peut activer les synovocytes et supporter ainsi un cycle de l’inflammation.

- 137 - A c B D Rectocolite hémorragique (RCH) Maladie de Crohn(MC) A sp ec t e nd os cop iq ue B iop sie in te st in al e