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Politiques laitières en Algérie

Dans le document Lait et produits laitiers (Page 30-37)

Filière lait en Algérie

IV. Politiques laitières en Algérie

Après l’indépendance, l’élevage existant était constitué de deux races locales, la Brune de l’Atlas et la Guelmoise. C’était un élevage traditionnel entièrement extensif localisé dans les plaines du nord et les zones de montagne (CHERFAOUI et al., 2006). Les politiques de développement et de régulation de la filière lait menées jusqu'à la fin des années 1980 avaient pour principal objectif une amélioration de la consommation du lait et la satisfaction des besoins de la population (BENCHARIF, 2001). En 1995, l’instruction ministérielle a été promulguée qui ouvre une nouvelle phase en prenant en considération l’ensemble des segments de la filière et en sensibilisant l’implication de l’ensemble des acteurs intervenants dans la filière lait (CHERFAOUI et al., 2006). L’année 2000 est marquée par l’avènement du Plan National du Développement Agricole (PNDA), ayant pour finalité la restructuration du territoire agricole (MADR, 2012) et le développement de la filière lait pour répondre aux besoins de la population d’une part et pour résister face à la concurrence occidentale d’autre part (ZOUBEIDI et GHARABI, 2013). Selon BENCHARIF (2001), l’action des pouvoirs publics a consisté fondamentalement à développer la filière par le « bas », c’est-à-dire en un élargissement du marché, en négligeant totalement l’amont. L’État s'est appuyé sur deux principaux instruments : - les prix à la consommation qui ont été maintenus relativement bas grâce à la subvention croissante et,

- les importations d'importantes quantités de poudre de lait.

IV.1. Production laitière

La production laitière en Algérie et comme dans les pays de l'Afrique du nord est faible et généralement destinée à l'autoconsommation ou à la vente directe en lait liquide, les villes étant approvisionnées par les importations (FAO, 2012). En amont de la filière, la production laitière est assurée en grande partie (plus de 80 %) par le cheptel bovin ; le reste est constitué par le lait de brebis et le lait de chèvre. La production cameline est marginale. La production laitière est assurée par un cheptel de 1,46 million de bovins dont 655 284 vaches laitières, 7,64 millions de brebis et 1,6 à 1,7 million de chèvres. L’évolution de la

16 malgré l’accroissement enregistré durant la période 2002-2012 (Tableau 4) (KALI et al., 2011). La production laitière nationale est restée faible d’environ 2,2 milliards de litres en 2008, soit un accroissement de 42,4 % (ONS, 2010), mais elle reste toujours non satisfaisante à la demande, quoiqu’elle soit arrivée à environ 03 milliards de litres en 2011,

soit un accroissement de 84 % par rapport à l’année 2000, l’année de lancement du plan National de Développement Agricole(KACIM EL HASSANI, 2013).

En 2012, la production nationale du lait cru est estimée à 3,14 milliards de litres, fournie à 73 % par le cheptel bovin (2,3 milliards de litres). La quasi-totalité des productions cameline, caprine et ovine est autoconsommée. Seulement le tiers de la production laitière bovine est valorisée sur les circuits industriels (MADR, 2013).

Tableau 4. Évolution de la production nationale du lait cru de 2002 à 2012

Année 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 1011 2012 Production nationale (106litres) 1,544 1,610 1,915 2,092 2,244 2,185 2,21 2,39 2,63 2,92 3,14 Source :(MADR, 2013)

Selon l’Office National Interprofessionnel du Lait (ONIL) (2015), la production durant l’année 2014/2015 est arrivée à 3,75 milliards de litres. La progression observée ces dernières années est le résultat direct de l’augmentation de l’effectif bovin par l’importation de génisses pleines à partir de 2004 et par la mise en œuvre des mesures incitatives engagées à travers les instructions établies dans le cadre du PNDA, ainsi que l’amélioration progressive des techniques de production (KALI et al., 2011).

Bien que, la production laitière ait enregistré une progression positive, elle demeure faible eu égard aux potentialités génétiques notamment du bovin laitier moderne d’une part, d’autre part, elle est issue d’unités peu ou pas spécialisées, incapables d’assurer une collecte suffisante durant toutes les périodes de l’année que cela soit en quantité ou en qualité (KALI et al., 2011 ; BELHADIA et al., 2014). Selon KACIM EL HASSANI (2013), l’accroissement de la production laitière enregistré durant la période (2000-2012) est plutôt le résultat d’une augmentation des effectifs des vaches laitières et non pas du

17 à l’analyse des contraintes limitant la productivité des troupeaux, et à l’évaluation des capacités d’adaptation de l’animal à produire, se reproduire et se maintenir dans les conditions d’élevage locales (MADANI et MOUFFOK, 2008).

IV.2. Collecte du lait cru

L’analyse de la filière lait en Algérie permet de faire ressortir la faiblesse de la production laitière et l’insuffisance de la collecte qui expliquent le très faible taux d’intégration par rapport au système de transformation (part de lait cru collecter dans les quantités totales produites) (DJERMOUN, 2011).

La collecte constitue la principale articulation entre la production et l’industrie laitière. La collectée laitière durant l’année 2012, était de 688 millions de litres, dont près de 160 millions de litre par les 14 filières du secteur laitier public (MADR, 2013), pour passer à 938 millions de litres en 2015 selon l’ONIL (2015).

La collecte est assurée jusqu’à 1995 par les ex-unités du groupe étatique (Giplait), et connaît une forte croissance durant la période 1990-96. Ensuite, le délaissement partiel de l’activité de collecte au profit des collecteurs privés organisés autour des minis laiteries a induit le déclin de la collecte pour la période (1996-99) (KACIM EL HASSANI, 2013), d'où les quantités collectées en 1999 sont inférieures à 93 millions de litres, soit seulement 7,7 % de la production nationale (BENCHARIF, 2001). En effet, c’est à partir de 2001 que la collecte suscite un nouvel intérêt pour atteindre près de 700 millions de litres en 2012 (KACIM EL HASSANI, 2013). La collecte n’a pas pu progresser d’une manière durable et significative ; elle a subi des variations importantes d’une année à l’autre durant la période 2000 – 2007 (KALI et al., 2011). Entre 2000 et 2004, le taux de collecte nationale se situe en moyenne entre 5 et 7 %, pour se doubler en 2005, puis poursuivre leur croissance pour représenter en 2012 sept fois le volume de 2004 et 23 % de la production (MAKHLOUF et al., 2015).

Une faible productivité ainsi qu’une production saisonnière très marquée influent de manière directe sur le ramassage et la mise en marché du lait dans le cadre de la filière contrôlée système formel, ou lait usinable (DJERMOUN, 2011). Le lait non collecté reste en partie utilisé pour l’allaitement et l’autoconsommation familiale, mais une quantité non négligeable est écoulée par les circuits non contrôlés (BELHADIA et al., 2014). Afin d’encourager la collecte, une prime de 4 Dinar Algérien (DA) par litre livré à l’usine est assurée pour les collecteurs livreurs ; l’éleveur qui livre son lait à la transformation est

18 DA par litre de lait cru réceptionné (KALI et al., 2011).

L’augmentation de la production laitière et la revalorisation du prix du lait cru payer aux producteurs sont les principaux facteurs qui expliquent la progression de la collecte. A ces facteurs s’ajoute l’extension géographique du réseau de collecte et la croissance du nombre de collecteurs privés (MAKHLOUF et al., 2015).

IV.3. Prix du lait à la consommation

Le choix d’une politique laitière basée sur des prix à la consommation fixés par l’État à un niveau bas s’est traduit par l’orientation des éleveurs vers la production de viande ou la production mixte (viande/lait) (MADANI et MOUFFOK, 2008). La production locale a également été pénalisée par la faiblesse du prix du lait cru et du prix du lait industriel à la consommation, toux deux fixés par l'état (BENCHARIF, 2001).

Le prix minimum garanti (PMG) du lait cru a augmenté de 4,54 % par an entre 2001 et 2012. Mais en terme réel (corrigé de l’inflation), cette évolution est négative. Sur toute la période de 2001 à 2012, le prix réel du lait cru payé aux producteurs a perdu annuellement environ 12 centimes par litre alors qu’en parallèle, l’augmentation du prix réel d’un kilogramme d’aliment concentré (granulé composé essentiellement de maïs et tourteau de soja) était en moyenne de 17 DA par an (MAKHLOUF et al., 2015).

Les pouvoirs publics ont axé leur intervention sur le soutien du prix à la consommation des produits laitiers, sur la sécurisation des approvisionnements et sur la mise en place d’une politique de développement de l’élevage laitier local (MADANI et MOUFFOK, 2008).

IV.4. Importation du lait et des produits laitiers

Le taux de couverture de la consommation par la production nationale de lait cru est en croissance, mais la filière lait se trouvant toujours dépendante des importations de poudre de lait et dont la production locale de lait cru n’a jamais pu satisfaire cette demande (KACIM EL HASSANI, 2013). Face au déficit de la production nationale du lait, l’État a fait massivement appel aux importations. Les pouvoirs publics mettent en place une politique favorisant l’installation d’élevages laitiers par l’importation de génisses a haut potentiel génétique, le but est d’augmenter la production et, par la même, de réduire la facture des importations (GHOZLANE et al., 2010). De 2007 à 2012, les importations cumulées de génisses gestantes ont atteint environ 70 000 têtes de différentes races hautement laitières (MADR, 2013). Grâce à ces importations, le cheptel bovin est composé

19 en 2013, après plusieurs années de stagnation, de 911 401 vaches laitières, soit 56 % de l’effectif total de ruminants qui assurent en moyenne 73,2 % de la production laitière totale (SOUKEHAL, 2013).

Selon l’ONIL (2015), le total des importations (poudre de lait et produits dérivés) durant l’année 2014/2015, est de 404.716 tonnes pour une valeur de 1.166.127.793 USD. Le secteur privé a importé un volume total de 229.153 tonnes pour une valeur de 699.696.649 USD dont :

- 43.900 tonnes des produits dérivés importés par les privés pour une valeur de 164.763.624 USD ;

- 185.254 tonnes de matières premières laitières importées par les privés pour une valeur de 534.933.025 USD et représentant l’équivalent de 1 685 milliard de litres de lait.

La mise en place par l’État d’une industrie de transformation de la poudre de lait importée permet de couvrir les besoins de la population, toutefois, elle semble inadaptée à jouer un rôle efficace dans le développement de la production laitière bovine (ABBAS et al., 2009).

Trois principauxcircuits d'approvisionnement en laits et produits laitiers importés : - la poudre de lait destinée à la production du lait recombiné par les entreprises du Giplait (Deux types de poudres importées : la poudre à 26 % de matière grasse et la poudre de lait totalement écrémé, à 0 % de matière grasse) ;

- les laits en poudre et farines lactées destinés directement à la consommation humaine et - les produits transformés : fromages, yaourts, beurre, crème de lait etc. (BENCHARIF, 2001).

IV.5. Consommation du lait et des produits laitiers

Le lait et les produits laitiers sont considérés comme source des « protéines refuge » par une large population ce qui explique d’une part en partie la croissance de la demande de ces produits, d’autre part la croissance démographique et le prix du lait qui est resté accessible (KALI et al., 2011 ; MAKHLOUF et al., 2015). Ainsi, la consommation par habitant en lait et ses dérivés a passé de 35 équivalents lait/an à 147 équivalents lait/an en 2012 (MADR, 2013), et qui demeure plus élevé si l’on compare à nos voisins tunisiens qui est de 83 L/hab./an ou encore les Marocains 64 L/hab./an (KACIM EL HASSANI, 2013). Pour ce qui est de la consommation des fromages et des yaourts, celle-ci s’élève à 5 ou 6 Kg par an et par habitant, alors qu’elle était de moins de 1 Kg en 88. Toutefois, elle reste

20 faible en la comparant à celle des Marocains et Tunisiens qui s’élever à 10 kg/an/hab. (SOUKI, 2007). Cependant, le consommateur algérien reste loin derrière le consommateur européen, qui consomme plus de 250 litres/an (FAO, 2016).

IV.6. Industrie laitière en Algérie

L’élevage, au niveau des exploitations laitières est peu productif, la croissance de la production de lait cru ne suit pas celle des capacités de transformation dans l’industrie, c’est ce qui explique principalement la déconnexion de cette dernière de la sphère de production locale et, par là-même, le fort degré d’extraversion de la filière (ZOUBEIDI et GHARABI, 2013).

L’industrie de transformation demeure fortement dépendante des importations où la structure des approvisionnements des entreprises, est caractérisé par l’importance relative du poids des matières premières importées, pour les différentes activités du secteur de l’industrie laitière (KALI et al., 2011). La structure générale de l’industrie laitière fait apparaître la coexistence de trois formes d’entreprises :

- les unités de production publiques organisées sous forme de groupe industriel de production du lait (Giplait) ;

- les entreprises privées de taille moyenne qui ont tendance à se développer grâce, notamment, aux partenariats réalisés avec les entreprises étrangères ;

- les entreprises privées de petite taille qui ont une assise régionale et qui se spécialisent dans la production d’un ou deux produits notamment le fromage.

A ces trois catégories s’ajoutent toutes les petites laiteries qui opèrent dans le secteur non enregistré (informel) (KALI et al. 2011).

L’industrie laitière, en Algérie, était à dominance publique, la part du secteur privé était faible (moins de 10 % de la production globale) et son activité est essentiellement orientée vers la production de laitages (fromages, desserts lactés, yaourts...) (AMELLAL, 1995). Actuellement, la production industrielle est dominée par le secteur privé qui réalise une production totale de 2 170 milliards de litres équivalents dont 70 % sont réservés à la production des produits laitiers à forte valeur ajoutée et lui assure plus de 66 % des parts du marché national. En outre, ce secteur est plus dynamique en matière de collecte de lait cru (63,7 % du total du lait collectés) (MAKHLOUF et al., 2015).

21 La distribution du lait et des produits laitiers est assurée selon trois types de circuits de mise en marché et de distribution du lait et des produits laitiers :

● Circuit informel : il s’agit de l’autoconsommation ou de la vente de proximité du lait cru et dérivés fabriqués au niveau des fermes de manière artisanale (Lait caillé, petit lait…) (BENCHARIF, 2001). Le secteur informel gère plus de ¾ de la production nationale, qui est exclu de tout ou partie du système d’aides publiques, mais échappe aussi totalement aux différents systèmes de contrôle de qualité du lait cru (MAKHLOUF et al., 2015).

● Circuit formel : correspond aux circuits hérités de l'ancienne organisation publique du commerce du lait industriel et de produits dérivés (BENCHARIF, 2001).

● Circuit émergeant : il s’agit des entreprises privées engagées dans l’importation et la distribution spécialisée en commerce de gros (KALI et al., 2011). Se sont développés, en relation avec la libéralisation de l'économie et la disparition des monopoles des entreprises publiques (BENCHARIF, 2001).

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