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Physiologie des acides biliaires

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III. Un nouveau rôle pour les acides biliaires

1. Physiologie des acides biliaires

Les acides biliaires sont les principaux constituants de la bile qui est également composée de cholestérol, phospholipides, bilirubine et ions bicarbonates. De par leur propriété amphiphile, les acides biliaires assurent, d’une part, l’absorption intestinale des lipides alimentaires et des vitamines liposolubles, et d’autre part, l’excrétion de molécules hydrophobes dans la bile. Les acides biliaires sont de puissants détergents qui peuvent être cytotoxiques à haute concentration. Leur synthèse et leur transport sont donc des fonctions finement régulées.

a. La synthèse des acides biliaires

La production hépatique d’acides biliaires s’effectue principalement au niveau des hépatocytes périveineux et comprend une cascade de nombreuses réactions enzymatiques qui convertit les molécules hydrophobes de cholestérol en molécules amphiphiles. Elle représente la voie principale

du catabolisme du cholestérol.Les produits de cette synthèse sont appelés acides biliaires primaires

Figure 14: Composition du pool d’acides biliaires chez l’Homme et la souris

CA : acide cholique, CDCA : acide chénodéoxycholique, DCA : acide déoxycholique, LCA : acide lithocholique, MCA : acide muricholique, UDCA : acide ursodéoxycholique, G : conjugué à la glycine, T : conjugués à la taurine.

(D’après Prawitt et al., 2014)

HOMME SOURIS

Acides biliaires primaires

Acides biliaires secondaires

Acides biliaires tertiaires Acide cholique Acide chénodéoxycholique

Acide déoxycholique Acide lithocholique

Tauro- ou Glyco- Conjugaison Dé-hydroxylation Dé-conjugaison Sulfo- ou Glucurono- Conjugaison

Figure 13: Synthèse des acides biliaires secondaires et tertiaires

Les acides biliaires secondaires sont formés par les bactéries intestinales. Ils retournent au foie via la circulation entérohépatique où ils peuvent être transformés en acides biliaires tertiaires.

Circulation portale Lumière intestinale

36 chénodéoxycholique peut être transformé en acide muricholique. Les acides biliaires primaires sont majoritairement formés via la voie classique ou neutre dont la première étape fait intervenir la cytochrome p450 cholestérol 7α-hydroxylase (CYP7A1). L’activité de cette enzyme détermine le pool d’acides biliaires de l’organisme. La synthèse d’acides biliaires primaires peut également s’effectuer via la voie alternative ou acide dont l’enzyme clé est la cytochrome p450 stérol 27-hydroxylase (CYP27A1). La composition du pool d’acides biliaires dépend de l’activité de la cytochrome p450 stérol 12α-hydroxylase (CYP8B1), qui catalyse la formation d’acide cholique à partir d’intermédiaires

de la synthèse d’acide chénodéoxycholique chez l’Homme, ou muricholique chez le rongeur (Fig. 12).

Les acides biliaires primaires sont ensuite conjugués à la taurine ou à la glycine ce qui accentue leur caractère hydrophile. Les acides biliaires primaires peuvent être transformés en acides biliaires secondaires suite à des dé-conjugaisons et dé-hydroxylations par les bactéries intestinales. Ces derniers comprennent les acides déoxycholique et lithocholique issus respectivement des acides

cholique et chénodéoxycholique. Enfin, les acides biliaires secondaires peuvent être convertis en

acides biliaires tertiaires après sulfo- ou glucurono-conjugaisons au niveau du foie (Fig. 13). Ces

différentes voies de synthèse aboutissent à la formation de nombreuses formes d’acides biliaires

permettant une solubilisation efficace d’une large population de molécules lipophiles (Fig. 14 -

Russell, 2003; Lefebvre et al., 2009).

b. Le cycle entérohépatique

Les acides biliaires sont synthétisés au niveau du foie et sécrétés dans la bile qui est stockée dans la vésicule biliaire durant les périodes de jeûne. Lors d’un repas, la vésicule biliaire se contracte sous l’action de la cholécystokinine, une hormone duodénale dont la sécrétion est stimulée par l’arrivée de lipides ou de protéines dans l’intestin. La bile est alors libérée au niveau du duodénum via le canal cholédoque. Les acides biliaires sont ensuite majoritairement réabsorbés au niveau de l’iléon distal et retournent au foie par la veine porte. Seuls 5% des acides biliaires échappent à la réabsorption et sont excrétés dans les fécès. Cette perte est compensée par une synthèse de novo

d’acides biliaires par le foie afin de maintenir un pool constant (Fig. 15). Chez l’homme, on estime

que le cycle entérohépatique prend place 10 à 12 fois par jour. Cependant, les flux biliaires varient durant la journée et sont directement liés à l’ingestion d’aliments. On observe ainsi une augmentation des flux biliaires et de la concentration plasmatique d’acides biliaires pendant les périodes postprandiales (Lefebvre et al., 2009). Par ailleurs, l’ablation de la vésicule biliaire entraine une sécrétion de bile en continue chez l’Homme (Malagelada et al., 1973). Ce même phénomène est observé chez le rat qui a la particularité de ne pas posséder de vésicule biliaire.

Figure 15 : Le cycle entérohépatique des acides biliaires

Le trajet des acides biliaires est indiqué par des flèches jaunes. 1. Synthèse et conjugaison

2. Stockage

3. Solubilisation des lipides alimentaires

4.Biotransformation par les bactéries intestinales 5. Réabsorption intestinale (95%) 5. Excrétion (5%) 6. Réabsorption hépatique

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c. Le transport des acides biliaires dans le cycle entérohépatique

x Des hépatocytes aux canalicules biliaires

Au niveau du foie, la sécrétion des acides biliaires dans les canalicules biliaires dépend d’un transport actif et met en jeu des transporteurs de la superfamille des ABC (ATP-Binding Cassette). Les acides biliaires monovalents (tauro et glyco-conjugués) sont sécrétés dans les canalicules biliaires majoritairement via le transporteur BSEP (bile-salt export pump). Ces acides biliaires peuvent également être sécrétés via le transporteur MDR1A (multidrug export pump 1a). Les acides biliaires divalents (sulpho- et glucurono-conjugués) transitent des hépatocytes aux canalicules biliaires via le

transporteur MRP2 (multidrug resistance-associated protein 2) (Fig. 16 - Meier and Stieger, 2002;

Trauner and Boyer, 2003; Alrefai and Gill, 2007).

x De la lumière intestinale à la circulation portale

Dans l’intestin, les acides biliaires non-conjugués, de par leur pKa élevé, peuvent être réabsorbés par diffusion passive alors que l’absorption des acides biliaires conjugués nécessite la présence de transporteurs spécifiques. Les acides biliaires peuvent être réabsorbés au niveau du jéjunum via le transporteur sodium-indépendant OATP3 (organic anion transporting polypeptide 3) exprimé à la membrane apicale. Cependant, ce système de transport présente une faible affinité pour les acides biliaires. La réabsorption la plus efficace s’effectue au niveau de l’iléon et du colon via le transporteur sodium-dépendant ASBT (apical sodium-dependent bile salt transporter) également appelé ISBT (ileal sodium-dependent bile salt transporter). Le transport cytosolique des acides biliaires est assuré par la protéine I-BABP (ileal bile acid-binding protein). Le transfert des acides biliaires des entérocytes à la circulation portale s’effectue via le transporteur hétérodimérique OST- α/β (organic solute transporter α/β), l’échangeur d’anion t-ASBT (une forme tronquée de ASBT) et le transporteur MRP3. Les iléocytes et colonocytes ont également la capacité de sécréter les acides biliaires dans la lumière intestinale via le transporteur MRP2 localisé au niveau de leur membrane

apicale (Fig. 16 - Meier and Stieger, 2002; Trauner and Boyer, 2003; Alrefai and Gill, 2007).

x De la circulation portale aux hépatocytes

La réabsorption hépatique des acides biliaires s’effectue principalement au niveau des hépatocytes périportaux. Il s’agit d’un processus efficace avec 75 à 90% des acides biliaires réabsorbés dès leur premier passage dans le foie. Ce taux de réabsorption reste constant quel que soit la concentration systémique en acides biliaires. Le transfert des acides biliaires du sang portal au cytosol des hépatocytes est principalement assuré par le transporteur ATP- et sodium dépendent

Figure 16: Les transporteurs des acides biliaires

BA : acide biliaire, NTCP : Na+-taurocholate cotransporting polypeptide, BSEP : bile-salt

export pump, OATP : organic anion transporting polypeptide, MRP : multidrug resistance- associated protein, MDR : multidrug export pump, ASBT : apical sodium-dependent bile salt transporter, I-BABP : ileal bile acid-binding protein, OST : organic solute transporter, OA : molécule chargée négativement, OC : molécule chargée positivement, GSH : glutathion. (D’après Thomas et al., 2008)

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transporteur sodium-indépendant OATP1 (Fig. 16 - Meier and Stieger, 2002; Trauner and Boyer,

2003; Alrefai and Gill, 2007).

x Des hépatocytes à la circulation systémique

Le premier passage hépatique ne permettant pas une réabsorption totale des acides biliaires présents dans la veine porte, une part des acides biliaires se retrouve dans la circulation systémique. Par ailleurs, les hépatocytes possèdent un système de sécrétion d’acides biliaires au niveau de leur membrane basolatérale. Dans des conditions physiologiques normales, l’activité de ce système est négligeable mais peut être induite en cas de cholestase, i.e. d’arrêt ou de ralentissement de la sécrétion de bile dans l’intestin et donc d’accumulation de bile dans les voies biliaires hépatiques. Ce

système comprend les transporteurs MRP3 et 4, OST-α/β et OATP2 (Fig. 16 - Meier and Stieger, 2002;

Trauner and Boyer, 2003; Alrefai and Gill, 2007).

x De la circulation systémique à l’urine

Les acides biliaires présents dans la circulation systémique sont filtrés par les reins. En condition normale, ils sont réabsorbés au niveau des tubules contournés proximaux et leur fuite dans les urines est très faible. Cette réabsorption est assurée par le transporteur ASBT à la membrane apicale et par les transporteurs MRP3 et OST-α/β à la membrane basolatérale. La présence des transporteurs MRP2 et 4 à la membrane apicale des cellules tubulaires permet la sécrétion des acides biliaires dans les urines. Ce mécanisme prend notamment place en cas de cholestase où l’excrétion

rénale des acides biliaires devient une alternative majeure pour diminuer leur taux circulant (Fig. 16 -

Meier and Stieger, 2002; Trauner and Boyer, 2003; Alrefai and Gill, 2007).

2. Les acides biliaires : de nouveaux régulateurs métaboliques

Dépassant leur rôle dans l’absorption des lipides et le métabolisme du cholestérol, les acides biliaires ont récemment été identifiés comme de réelles molécules de signalisation. Ils sont en effet impliqués dans de nombreuses régulations métaboliques principalement via leur interaction avec des récepteurs spécifiques.

a. Les récepteurs des acides biliaires

Les effets métaboliques majeurs des acides biliaires s’effectuent via leur fixation sur le récepteur nucléaire FXR (farnesoid X receptor) et le récepteur membranaire TGR5 (ou GPBAR1 - G protein-coupled bile acid receptor 1). Les acides biliaires peuvent également se lier à d’autres récepteurs nucléaires impliqués dans le métabolisme lipidique tels que VDR (vitamin D receptor) et

RXR

FXR

FXRE

F

Shp Fgf15/19

Transporteurs des acides biliaires

Protéines et enzymes du métabolisme lipidique

FXRE

Protéines et enzymes du métabolisme lipidique

Figure 17: Mode d’activation de FXR et ses gènes cibles

Une fois activé par ses ligands, FXR peut se lier sous forme d’hétérodimère avec RXR ou de monomère sur une séquence FXRE (FXR response element) localisée sur le promoteur de ses gènes cibles.

Ligand de FXR αs GDP β β β ϒ Adénylate cyclase ↑AMPc Ligand de TGR5 Protéine kinase A inactive Protéine kinase A active αs GTP

+

CREB CREB CREB

P

TGR5

Cytosol

Figure 18: Cascade de signalisation intracellulaire induite par l’activation de TGR5

L’activation de TGR5 entraine la libération de la sous-unité Gα stimulatrice qui active l’adénylate cyclase. L’augmentation conséquente de la concentration intracellulaire d’AMPc entraine l’activation de la protéine kinase A qui phosphoryle CREB.

(Adapté de Thomas et al., 2008)

FXR

FX

Ligand de FXR

R

XR

Co-activateur Co-répresseur

XR

FX

Co-activateur Co-répresseur

39 PXR (pregnane X receptor). L’activation de ces récepteurs requiert cependant une concentration supra-physiologique d’acides biliaires (Porez et al., 2012).

x FXR

C’est en 1999 qu’a émergé le rôle des acides biliaires dans la régulation de l’expression des gènes impliqués dans le métabolisme lipidique, glucidique et énergétique. Cette année-là, les acides biliaires ont en effet été identifiés comme ligands endogènes du récepteur nucléaire FXR (Makishima et al., 1999; Parks et al., 1999). FXR est fortement exprimé dans le foie et l’intestin, i.e. les sites majeurs du métabolisme des acides biliaires, et dans une plus faible mesure dans le tissu adipeux, le pancréas et les glandes surrénales. Parmi les acides biliaires, l’acide chénodéoxycholique est l’agoniste le plus puissant de FXR suivi par l’acide déoxycholique (Lefebvre et al., 2009).

FXR est impliqué dans la régulation transcriptionnelle de nombreux gènes du métabolisme lipidique, glucidique et énergétique. Au niveau moléculaire, l’activation de FXR par ses ligands entraine sa fixation sur le promoteur de gènes contenant un élément de réponse FXRE (FXR-response element). FXR peut agir sous forme de monomère ou d’hétérodimère avec le récepteur nucléaire

RXR (retinoid X receptor) afin d’activer ou de réprimer l’expression de ses gènes cibles (Fig. 17 -

Hollman et al., 2012; Lefebvre et al., 2009). FXR peut également inhiber indirectement l’expression de gènes en induisant l’expression du récepteur nucléaire atypique SHP (small heterodimer partner). Ce dernier inhibe la transcription d’un grand nombre de gènes impliqués dans le métabolisme via sa liaison à d’autres récepteurs nucléaires ou à des facteurs de transcription (Zhang et al., 2011).

x TGR5

En accord avec leur rôle de molécules de signalisation, les acides biliaires ont été identifiés comme ligands endogènes du récepteur membranaire TGR5 au début des années 2000. TGR5 fait partie de la superfamille des récepteurs couplés aux protéines G et présente une affinité plus forte pour les acides biliaires secondaires (Kawamata et al., 2003; Maruyama et al., 2002). Il est fortement exprimé dans la vésicule biliaire, l’iléon et le côlon mais aussi dans les tissus adipeux blanc et brun, les muscles squelettiques, le pancréas, les cellules immunitaires et dans certaines aires cérébrales. D’un point de vue mécanistique, la fixation des acides biliaires sur TGR5 entraine l’activation de l’adénylate cyclase qui stimule la production d’AMPc. Ce dernier peut ensuite activer la protéine kinase A puis le facteur de transcription CREB, impliqué dans la régulation de l’expression des gènes

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b. FXR et l’homéostasie des acides biliaires

La synthèse et le transport des acides biliaires sont des fonctions finement régulées afin de maintenir un pool constant et de protéger les tissus d’une accumulation cytotoxique d’acides biliaires. Plusieurs études ont mis en avant un rôle clé du récepteur FXR dans la régulation de ces processus.

x FXR et la synthèse des acides biliaires

On sait depuis de nombreuses années que les acides biliaires sont capables d’inhiber leur propre synthèse. Les mécanismes correspondants ont pu être mis en évidence au début des années 2000 grâce à l’étude du phénotype de souris invalidées pour le gène Fxr. En effet, ces souris présentent une augmentation de l’expression de CYP7A1, l’enzyme limitante de la voie neutre de synthèse des acides biliaires. De plus, un régime riche en acide cholique ne réprime pas l’expression de CYP7A1 chez ces souris, ce qui atteste d’un rôle essentiel de FXR dans la régulation de la synthèse des acides biliaires (Sinal et al., 2000). Plusieurs études ont ensuite précisé les régulations moléculaires sous-jacentes. Au niveau du foie, FXR inhibe la transcription du gène de CYP7A1 via l’induction de la transcription de SHP. Ce dernier inhibe l’activité de récepteurs nucléaires nécessaires à l’expression de CYP7A1 tels que LXR (liver X receptor) et LRH1 (liver receptor homologue 1) (Brendel et al., 2002; Goodwin et al., 2000). En parallèle, l’activation de FXR induit la production du facteur FGF19 (fibroblast growth factor 19), équivalent du FGF15 chez le rongeur, dans l’intestin (Inagaki et al., 2005). La fixation de FGF15/19 au récepteur FGFR4 (fibroblast growth factor receptor 4) dans le foie entraine l’inhibition de l’expression de CYP7A1 via la voie c-Jun N-terminal kinase (Holt et al., 2003). FXR inhibe également l’expression de CYP8B1, l’enzyme clé de la synthèse d’acide cholique, en réprimant l’activité du facteur de transcription HNF4α (Sanyal et al., 2007). Cependant, une équipe a montré que les acides biliaires peuvent également inhiber leur synthèse de manière indépendante de FXR. Ils sont en effet capables d’inhiber l’expression de CYP7A1 en réprimant l’activité transcriptionnelle de HNF4α via la voie des MAP kinases (mitogen-activated protein) (De Fabiani et al., 2001, 2003).

x FXR et le transport des acides biliaires

Le rôle de FXR dans la régulation du cycle entérohépatique des acides biliaires a également été mis en avant par l’étude des souris invalidées pour ce récepteur. Ces souris présentent en effet une diminution de l’excrétion fécale d’acides biliaires ainsi qu’une augmentation de leur taux circulant. Ces observations ont été corrélées à une diminution de l’expression du transporteur BSEP, impliqué dans l’export des acides biliaires dans les canalicules biliaires. De plus, chez des souris témoins, la

Canalicule biliaire BSEP NTCP OSTα OSTβ ASBT OSTβ β OSTα IBABP

FXR

SHP

FXR

SHP

Lumière in

te

st

inale

Circ

ulat

ion portale

Vers la circulation

systémique

Figure 19: La régulation du cycle entérohépatique par FXR

Le trajet des acides biliaires est indiqué par des flèches vertes en pointillés et leurs transporteurs sont entourés en vert.

Activation

Inhibition

Entérocyte

41 supplémentation en acide cholique dans la nourriture induit l’expression de BSEP et réprime celle du transporteur NTCP qui est impliqué dans la réabsorption hépatique des acides biliaires. Cet effet n’est pas retrouvé chez les souris déficientes pour FXR ce qui suggère un rôle causal de ce récepteur nucléaire dans la régulation par les acides biliaires de l’expression des transporteurs clés du cycle entérohépatique (Sinal et al., 2000). D’un point de vue moléculaire, FXR diminue la réabsorption hépatique des acides biliaires provenant de la veine porte en inhibant l’expression de NTCP via l’induction de SHP (Denson et al., 2001). En parallèle, FXR augmente la sécrétion des acides biliaires dans les canalicules biliaires en stimulant l’expression de BSEP d’une part, et dans la circulation sanguine en augmentant l’expression de OSTα/β et MRP3 d’autre part (Ananthanarayanan et al., 2001; Houten and Auwerx, 2004; Landrier et al., 2006). Dans les entérocytes, FXR diminue la réabsorption des acides biliaires en inhibant l’expression du transporteur apical ASBT par l’intermédiaire de SHP (Neimark et al., 2004). De plus, FXR stimule l’expression de la protéine de transport I-BABP et augmente la sécrétion par les entérocytes en induisant l’expression des

transporteurs basolatéraux OSTα/β et MRP3 (Fig. 19 - Grober et al., 1999; Landrier et al., 2006;

Houten and Auwerx, 2004).

c. Les acides biliaires et le métabolisme lipidique

La relation entre les acides biliaires et le métabolisme du cholestérol est connu depuis de nombreuses années et constitue une cible thérapeutique dans le traitement des dyslipidémies. Une approche utilisée concerne l’utilisation de résines chélatrices d’acides biliaires tels que la cholestyramine, le colestipol, la colestimide et le colesevelam. Ces dernières séquestrent les acides biliaires dans la lumière intestinale ce qui empêche leur réabsorption et entraine leur excrétion dans les fécès. Cette perte est compensée par une synthèse hépatique de novo d’acides biliaires créant une importante mobilisation du stock de cholestérol. On observe alors chez les patients sous résines chélatrices une diminution de la concentration plasmatique de cholestérol et des lipoprotéines LDL (low density lipoprotein) impliqués dans le transport du cholestérol du foie vers les tissus périphériques. Par ailleurs, ces patients présentent également une augmentation du taux circulant de triglycérides suggérant un rôle des acides biliaires dans la régulation du métabolisme lipidique au sens plus large (Insull, 2006). En accord avec cette hypothèse, les patients traités aux acides biliaires présentent une diminution des triglycérides plasmatiques (Bell et al., 1973; Bateson et al., 1978; Angelin et al., 1986). De la même manière, un traitement à l’acide cholique chez les souris hypertriglycéridémiques diminue le taux circulant de triglycérides et des lipoprotéines VLDL (very low density lipoprotein) qui assurent le transport des lipides du foie vers les tissus adipeux (Watanabe et al., 2004).

42 Face à ces observations, plusieurs équipes se sont intéressées à l’implication des récepteurs des acides biliaires dans la régulation du métabolisme lipidique. Dans un premier temps, des études ont montré que les souris invalidées pour le gène Fxr présentent une augmentation des concentrations plasmatiques de triglycérides et de cholestérol ainsi que du stockage hépatique de lipides sous régime standard (Sinal et al., 2000; Ma et al., 2006). A l’inverse, l’administration de GW4064, un agoniste pharmacologique spécifique de FXR, réduit l’hypertriglycéridémie chez les souris génétiquement obèses et diabétiques (ob/ob et db/db) (Cariou et al., 2006; Zhang et al., 2006). Par ailleurs, une étude a montré que l’administration d’acide taurocholique ne diminue pas les taux circulants de triglycérides chez les souris invalidées pour le gène Fxr, ce qui suggère un rôle essentiel de ce récepteur dans la régulation du métabolisme lipidique par les acides biliaires (Claudel et al., 2003). Les mécanismes moléculaires sous-jacents sont multiples et associent notamment une diminution de la lipogenèse de novo, de l’absorption intestinale de cholestérol et de la production hépatique de VLDL, avec en parallèle une augmentation de l’adipogenèse dans le tissu adipeux blanc (Porez et al., 2012).

Des études ont également suggéré un rôle de TGR5 dans la régulation du métabolisme lipidique. Une équipe a notamment montré que l’administration d’un agoniste pharmacologique spécifique de TGR5 diminue le taux de triglycérides circulants et la stéatose hépatique chez les souris rendues obèses par un régime hypercalorique (Thomas et al., 2009). Ces données sont cependant

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