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Chapitre 1 : Aspects élémentaires, interactions rayonnement-matière

B. Les photons

Contrairement aux électrons, les photons ne sont pas soumis à l’interaction coulombienne avec les électrons du cortège atomique. Ils n’interagissent donc pas de façon continue avec le milieu et ont une probabilité non nulle de traverser n’importe quelle épaisseur de matière sans interagir. Les notions de parcours et de ralentissement utilisées pour les particules chargées n’ont donc plus de sens pour les photons. Elles sont remplacées par les notions d’atténuation et de libre parcours moyen.

Lorsqu’un faisceau de N photons traverse une épaisseur x de matière de masse volumique ρ, le nombre N' de photons primaires ayant interagi dans le milieu vaut :

où les coefficients d’atténuations massiques

i

- La diffusion cohérente, ou effet Rayleigh - L’effet photoélectrique

- La diffusion incohérente, ou diffusion Compton - La production de paire

Les graphiques I.5 et I.6 représentent les coefficients d’atténuations massiques des photons dans l’eau et le plomb, en fonction de leur énergie, pour ces différents phénomènes.

Il apparaît, au vu de ces graphiques, que la diffusion cohérente est l’effet le moins probable vis-à-vis des autres phénomènes. L’effet photoélectrique est majoritaire à basse énergie, mais l’effet Compton devient prépondérant aux énergies intermédiaires (de l’ordre du MeV), ce qui en fait l’interaction principale aux énergies de la radiothérapie. Quand aux créations de paires, c’est à haute énergie (vers 10 MeV) qu’elles deviennent le plus probables.

1. Diffusion cohérente ou effet Rayleigh Il s’agit de l’absorption d’un photon incident par un atome du milieu, suivie de sa rediffusion dans une direction différente. Le photon diffusé ayant la même énergie que le photon incident, la diffusion est qualifiée de cohérente.

Notons que ce phénomène ne se produit qu’à basse énergie et qu’il n’induit pas d’ionisation du milieu mais seulement une dispersion angulaire des photons incidents.

Figure I.5 : Coefficients d’atténuations massiques dans l’eau et le plomb suivant les différents modes d’interaction : la diffusion cohérente, l’effet photoélectrique, la diffusion incohérente et la production de paire.

ν

h

e

+ Z.

h

ν

Figure I.6 : Diffusion cohérente

2. Effet photoélectrique

Lors du processus d’absorption photoélectrique, représenté Figure I.7, le photon incident est intégralement absorbé par un atome de la matière. Son énergie h est alors transférée ν à un électron qui est éjecté avec une énergie cinétique E e

correspondant à l’énergie du photon incident diminuée de l’énergie de liaison du photoélectron B (dans le cas le plus probable de la couche K, B est de l’ordre du keV pour les

Le départ de l'électron laisse le cortège électronique dans un état instable. L'atome réorganise alors sa population électronique, ce qui conduit à l’émission de photons X ou d'électrons Auger (généralement absorbés à proximité de leur lieu d’émission). Les nouvelles lacunes sont elles mêmes comblées par le même mécanisme.

3. Diffusion incohérente ou effet Compton L’effet Compton, représenté Figure I.8, intervient entre un photon incident et un électron du milieu. Le photon incident est dévié de sa trajectoire initiale par l’électron auquel il cède une partie de son énergie lors de la collision.

Les lois de conservation de l’énergie et de l’impulsion permettent de déterminer l’énergie emportée par chacun des partenaires de la réaction. Ainsi, l’énergie du photon diffusé hν' est reliée à celle du photon incident h et ν l’angle de diffusion θ par la relation suivante :

(

θ

)

De plus, la distribution angulaire des photons diffusés est donnée par la formule de atomique du matériau, r le rayon classique de l’électron, et 0 2

0c m hν

α = .

La figure ci-dessus illustre la forte tendance qu’ont les photons à diffuser vers l’avant à haute énergie, ce qui contribue à maintenir les faisceaux de photons utilisés en radiothérapie vers l’avant. A plus basse énergie, en revanche, la diffusion est quasiment isotrope.

La distribution angulaire des diffusions Compton aura également une grande importance pour l’étude du rendement lumineux des scintillateurs plastiques qui sera menées au chapitre 3.

4. Création de paire ou matérialisation Si l’énergie du photon incident est supérieure à deux fois l’énergie de masse de l’électron au repos (soit 1.02 MeV), le processus de création de paire devient possible, énergétiquement parlant. En pratique, la probabilité de

Figure I.10 : Création de paire Figure I.9 : Représentation polaire du nombre de photons diffusés à

l’angle θ par unité d’angle solide. Les courbes sont présentées en fonction de l’énergie des photons incidents.

cette interaction reste très faible en dessous de plusieurs MeV.

De cette interaction résulte la matérialisation d’un électron et d’un positron, tout deux se partageant équitablement l’énergie du photon initial :

(

2 2

)

2

1 h m c

E

Ee+ = e = ν − e Eq. I.9

Le positron matérialisé finit toujours par rencontrer son antiparticule (un électron du matériau) et termine ainsi sa courte vie par l’émission de deux photons de 511 keV correspondant à l’énergie de masse libérée.

5. Coefficient d’absorption massique d’énergie

Nous venons de décrire les différentes interactions qui peuvent survenir entre des photons de différentes énergies et un matériau qu’ils traversent. D’un point de vue plus global, l’ensemble de ces interactions peut se traduire par une atténuation massique du faisceau ou une absorption massique d’énergie.

La première de ces deux grandeurs, que nous avons introduite au début de cette partie, décrit uniquement la probabilité d’occurrence d’un type d’interaction particulier. Du point de vue de la physique médicale, il est surtout important de connaître la fraction d’énergie cédée par ionisation au milieu traversé, plutôt que le type d’effet mis en jeu. Pour cela, tous les modes d’interactions sont donc rassemblés dans un seul coefficient d’absorption massique d’énergie

enρ

µ . Ce dernier a été calculé et tabulé pour l’ensemble des matériaux pouvant intervenir en dosimétrie [ICRU44]. Il est obtenu de la manière suivante :

1. en pondérant le coefficient d’atténuation massique par un facteur représentant la fraction d’énergie transférée par le photon incident à l’électron touché. Ce facteur multiplicatif est égal à un pour l’effet photoélectrique, et inférieur à l’unité pour l’effet Compton ou la création de paire.

2. en pondérant ce résultat par la fraction moyenne d’énergie effectivement utilisée par les électrons secondaires pour ioniser le milieu (énergie perdue par collisions).

Sont représentés, Figure I.11, les coefficients d’atténuation massique et d’absorption massique d’énergie dans l’eau.

Or il est remarquable sur cette courbe qu’à partir d’environ 10 keV, les coefficients d’absorption massique d’énergie et d’atténuation massique se distinguent nettement l’un de l’autre. Leur rapport, représenté Figure I.12 pour l’eau, nous donne la fraction d’énergie moyenne communiquée au milieu par photon incident et pour une interaction.

Cette figure illustre bien le fait qu’un photon interagissant par effet photoélectrique, phénomène prédominant en dessous de 10 keV, va mettre en mouvement un électron transportant (quasiment) toute l’énergie qu’il possédait, d’où une fraction d’énergie communiquée proche de 1. Une interaction par effet Compton se traduira, quant à elle, par l’émission d’un électron dont l’énergie prend une valeur comprise entre zéro et une fraction de l’énergie du photon incident. Le reste de l’énergie est transporté plus loin par le photon diffusé, ce qui justifie une fraction d’énergie inférieure à 1.

Figure I.11 : Comparaison de l’évolution du coefficient d’absorption massique d’énergie et du coefficient d’atténuation massique dans l’eau.

Figure I.12 : évolution de l’énergie moyenne cédée par des photons de 1 keV à 20 MeV dans l’eau.

Ceci implique qu’aux énergies de la radiothérapie, un photon communique uniquement 30 à 50 % de son énergie à la matière lors d’une interaction, transportant le reste de cette énergie plus loin.