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Le phallus dans le fantasme

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 166-171)

G) Le sujet du désir

2) Le phallus dans le fantasme

Ce qu'il faut repérer dans le fantasme (phantasme ?) c'est que le sujet dans son rapport à l'objet a est un sujet déjà, et aussi, divisé par le signifiant. En effet, le sujet n'est pas divisé que de la perte de l'objet a mais aussi du fait de sa prise dans le signifiant. Il est sujet du signifiant et sujet de la jouissance, puisque le signifiant négativise la jouissance en même temps qu'il la commémore et la véhicule. Et comme le souligne Agnès Sofiyana 145 : l’identification au phallus est un acte (au sens signifiant) de copule et lient de manière incompréhensible les deux faces du fantasme, comme on le fait lorsqu’on accompagne d’un trait la surface unilatère du ruban de Möbius.

Le mathème S <> a désigne assez clairement que ce qui est articulé à l'objet a dans le fantasme est un sujet divisé par le signifiant. Cette division par le signifiant est articulée à un signifiant d'exception qui leste la chaîne signifiante et symbolise la perte de l'objet a.

145 Agnès Sofiyana, Il eût phallus, http://psychanalyse-paris.com/Il-eusse-phallus.html

Cette formule établit quelque chose qui est un lien, une connexion entre ce sujet en tant qu'ainsi constitué et quelque chose d'autre qui s'appelle petit a 146.

Que nous appelions ce signifiant phallus ou autrement peu importe et qu'il soit mis en place par le Nom du Père ou les Noms du Père (le Père qui Nomme) peu importe également, ce qu'il faut retenir c'est que dans tous les cas, que ce soit dans la névrose ou dans la psychose ou avec le sinthome, cette symbolisation fait son office d'articuler RSI et c'est justement quand PHI dysfonctionne, ou est absent, que les choses se compliquent.

Ce que semble avoir repéré Paul-Laurent Assoun quand il énonce à propos du fantasme : Le sujet divisé -par son entrée dans les signifiants- estampillé par l'objet- cause du désir, voilà le lieu du fantasme livré en sa structure de base 147.

Dans la dépersonnalisation l'effet de distanciation se loge au cœur du fantasme et le sujet se retrouve comme désarticulé : la dimension imaginaire celle du soutien de l'image, de l'expérience du miroir, la dimension symbolique, celle du phallus et celle de l'objet a dans sa dimension réelle sont sérieusement atteintes.

Il y a du sujet à partir du moment où nous faisons de la logique, c'est à dire où nous avons à manier des signifiants 148.

Cet effet de distanciation peut conduire à ce que certains auteurs, comme Sylvie Le Poulichet 149, nomment l'informe : ce qui désigne des processus inconscients résultant de vacillements identificatoires et les formations symptomatiques qui en

146 Jacques Lacan, La logique du fantasme, Inédit, leçon du 16 Novembre 1966.

147 Assoun Paul-Laurent, Le fantasme, éd. Anthropos, Paris, 2010.

148 Jacques Lacan, La logique du fantasme, Inédit, leçon du 16 Novembre 1966.

résultent (rapport au corps, perte du désir, …).

Cet informe renvoie à une nécessité primordiale que rappelle Michel Dominique : L’existence requiert de chaque individu le courage de devenir ce qu’il est et d’être ce qu’il devient. Pas plus, mais pas moins non plus… être ce que l’on devient, c’est donc sortir de l’informe, se mettre en forme, émerger… et s’incarner dans un dire 150.

L'informe retire au sujet la capacité de donner une forme stable à un Je. Une caractéristique de la dépersonnalisation est bien qu'il y a un Je qui exprime qu'il n'est plus. La dépersonnalisation a pour autre caractéristique de rendre fragile toute limite : entre le dehors et le dedans (cf : projection et introjection), le mort et le vif, le moi et l'objet, le somatique et le psychique, le masculin et le féminin, … .

Donc nous repérons systématiquement une difficulté pour un sujet d'inscrire une admission dans le moi, un jugement d'attribution ou un jugement d'existence (formules freudienne 1925).

La seule garantie de synthèse est celle du fantasme tel que Lacan l'articule comme support du désir et qu'il écrit: $ <> a, formule qui indique qu'il s'établit dans notre relation à l'autre de la parole, en même temps qu'elle articule la position du sujet au regard de son désir et de l'objet qui le cause. Cette formule indique par le poinçon cette séparation du sujet avec l'objet qui le cause, c'est à dire d'avec lui-même 151.

150 Michel Dominique , De la dépersonnalisation à l'être-chair, Cahiers de Gestalt-thérapie, 2004/1 n° 15, p. 193-200.

151 Isabelle Le Goc-Diaz, La dépersonnalisation : un point de vue idéal ? Que nous enseignent les dépersonnalisés ?, Journal Français de Psychiatrie, n°4, Seuil, 1996.

Depuis l'objet a le fantasme s'articule bien à l'Autre et à la question du désir : Le désir se supporte d'un fantasme dont un pied au moins est dans l'Autre, et justement celui qui compte, même et surtout s'il vient à boiter 152.

L'Autre est à la croisée des chemins dans l'instauration du fantasme puisque c'est une perte commune de l'objet a, entre le sujet divisé et le lieu des signifiants.

Puis la symbolisation de cette perte avec la fonction du Père qui Nomme qui va rendre effective la séparation du sujet d'avec son énonciation. Le phallus n'appartient pas à l'Autre, c'est justement ce qu'il va rechercher chez le Père, ce que souhaite être l'enfant pour sa mère et qu'il va finir par désirer avoir.

Le phallus va venir nouer par la symbolisation qu'il réalise de la perte de l'objet a les trois dimensions constitutives du sujet. Seul le phallus a le pouvoir de faire du sujet le sujet du signifiant. Le phallus est le meurtre de l'objet a.

152 Jacques Lacan, Écrits, éd. Seuil, 1966, p. 780 (Kant avec Sade).

L' Unheimlich marque des effets de la distanciation

Il nous semble que l'objet a est toujours manquant et parler de son surgissement est, pour nous, un abus de langage. A notre sens le surgissement de l'objet a n'est autre que la défaillance du phallus à symboliser la perte, un échec de la castration, le dévoilement d'une béance sous les pieds du sujet. Là où il y avait du désir il ne reste qu'un vide. C’est l’acuité d’un instant rempli de détresse où le sujet se sait exister avant de désirer, où il se voit avoir tout perdu et subsister pour en témoigner.

Face à ce vide, dévoilement momentané ou durable, le sentiment d'inquiétante étrangeté peut envahir le sujet.

La question de l'inquiétante étrangeté est fondamentale dans l'approche que nous avons de la dépersonnalisation / déréalisation. C'est justement avec l'unheimlich que la notion de déréalisation, toujours concomitante de la dépersonnalisation, vient à s'éclairer. Ainsi pour comprendre le mécanisme de distanciation et des ses effets il est nécessaire de bien étudier la notion d'unheimlich. Tout d'abord nous nous appuierons sur une étude de Alain Costes 153 pour illustrer le fait que le terme d’inquiétante étrangeté est double. En effet Freud repère deux sortes d'unheimlich : l'une qui trouve sa source dans les complexes infantiles que le sujet a refoulés, l'autre qui prend naissance dans les croyances animistes infantiles que le sujet a " surmontée ". Dans le premier cas, l'angoisse surgit lors d'un retour inopiné d'un refoulé, dans le second à la faveur d'une croyance ancienne

" surmontée " qui fait retour.

153 Alain Costes, La notion de surmontement dans l’œuvre de Freud, collection Psychanalyse à l'Université Vol. 8, éditions Paris Réplique, 1982, p129-146. Nous avons inséré ce texte en annexe du fait du grand intérêt qu'il présente à nos yeux et de la difficulté d'en obtenir une copie.

L’inquiétante étrangeté renvoie à un état très précoce des relations enfant/adulte.

Elle émane de complexes infantiles refoulés : complexe de castration, fantasmes liés au corps maternel, lorsqu’ils sont ramenés par quelque expression extérieure, ou bien lorsque de primitives convictions surmontées semblent de nouveau être confirmées.154… l’inquiétante étrangeté prend naissance dans la vie réelle lorsque des complexes infantiles refoulés sont ranimés par quelque impression extérieure ou bien lorsque de primitives convictions surmontées semblent de nouveau être confirmées 155.

Nous nous appuierons sur ces deux occurrences pour notre lecture de l'unheimlich dans son rapport avec le mécanisme de distanciation.

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 166-171)