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L'objet a

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 123-128)

G) Le sujet du désir

2) L'objet a

Maintenant que nous avons déplier ce que nous entendons par sujet divisé dans la formule du fantasme (et ses conséquences en terme de dépersonnalisation) autrement dit, pour nous, le sujet divisé par le signifiant et inscrit dans la castration comme sujet désirant, intéressons nous au deuxième terme de cette formule : l'objet a.

2.1) La nature de l' objet a

Placé au centre du nœud borroméen, l'objet semble participer des trois dimensions constitutives du sujet. Nous nous proposons ici, afin d’éclaircir la position théorique que nous souhaitons tenir, de détailler un peu la modalité - ou du moins ce que nous en comprenons - selon laquelle l'objet a participe de ces dimensions.

L’objet a, coincé entre les trois registres de l’imaginaire, du symbolique et du réel, va apparaître au sujet dans un premier temps sous son versant imaginaire, puis grâce au travail signifiant de la cure sous son versant symbolique et enfin sa dimension réelle lui sera dévoilée, avec pour conséquence la possibilité pour lui de percevoir l’emprise qu’exerçait son fantasme.

En effet, dès le début du séminaire sur la logique du fantasme Lacan nous précise que l'objet a est d'une autre nature que celle de l'Imaginaire même si cette dimension y est impliquée du simple fait des lathouses, semblant d'objet a, après lesquelles nous courrons quotidiennement.

Aussi bien le trait imaginaire de ce qu'on appelle l'objet(a), vous apparaîtra-t-il mieux encore, à mesure que nous marquerons ce qui permet de le caractériser comme valeur logique être beaucoup moins apparenté - il me semble, au premier abord - avec le domaine de ce qui est, à proprement parler, l'imaginaire.

L'imaginaire bien plutôt s'y accroche, l'entoure, s'y accumule. L’objet (a) est d’un autre statut 96.

Quel autre statut pouvons-nous lui donner ? Lacan analyse également l'objet a comme chute du Réel 97. Le réel de l’objet a est abordé de plusieurs façons, dont nous retiendrons deux aspects : par le nombre, en identifiant a à un nombre irrationnel (dit le nombre d’or), en 1967 ; par la topologie du nœud borroméen, à partir de 1972.

Dans cette thèse nous radicaliserons la définition de l'objet a que nous plaçons définitivement du côté du Réel ce qui implique un certain nombre de postulats :

– tout d'abord, comme énoncé précédemment, l'objet a n'est pas imaginaire, il renvoie et conditionne cette dimension par effet : L'imaginaire bien plutôt s'y accroche, l'entoure, s'y accumule 98,

– il en est de même pour le symbolique qui s'articule à l'objet a par la fonction phallique mais dont il est radicalement séparé puisque relevant de l’innommable, de l'impossible,

– il ne peut pas surgir car cela impliquerait qu'il ait une nature (texture, temporalité, espace, etc...) alors qu'il est hors langage, innommable, Réel.

Ce qui implique que lorsque sa présence, qui est plutôt une absence présentifiée, se fait sentir il ne s'agit en fait que de la confrontation non

96 Jacques Lacan, La logique du fantasme, Inédit, leçon du 16 Novembre 1966.

97 Jacques Lacan, L'acte psychanalytique, Inédit, leçon du 06 Décembre 1967.

98 Jacques Lacan, La logique du fantasme, Inédit, leçon du 16 Novembre 1966.

médiatisée par le symbolique (la fonction phallique) à la béance produite lors de l’aliénation du sujet dans le langage.

2.2) L'objet du manque

Lacan précisera d'ailleurs : En effet, le sujet n'est point encore apparu avec la seule coupure par où cette bulle qu'instaure le signifiant dans le réel laisse choir d'abord cet objet étranger qu'est l'objet a 99.

La perte de l'objet a implique la barre sur le grand A qui signifie au sujet qu'il n'y a pas d'Autre de l'Autre (incomplétude de l'Autre) et la barre sur le S du sujet qui implique que celui-ci est décomplété d'une part de son être dans l'opération d'aliénation.

Alors pourquoi l'Autre est barré, pourquoi manque t-il de garantie, pourquoi le champ de l'Autre ne tient pas ? Parce qu'il n'est pas apte à prendre en compte toute la jouissance, il ne peut pas dire tout l'être de jouissance qu'est le sujet : une partie échappe, l'objet a. il n'y a pas d'Autre de l'Autre : il manque un signifiant pour que la chaîne inconsciente s'honore de boucler sa signification 100.

99 Jacques Lacan, La logique du fantasme, Inédit, leçon du 16 Novembre 1966.

100 Jacques Lacan, Écrits, éd. Seuil, 1966, p. 818.

Le Symbolique indique la place d’un sujet dans un ensemble, il ne désigne pourtant pas ce qu’un sujet a de spécifique, d’unique. Ce qui est central pour Lacan est ce qui ex-siste au Symbolique. Cette formule, ex-sister au Symbolique, pointe une existence, une appartenance au Symbolique tout en restant en dehors.

La lettre a désigne le vide central de la structure, lequel peut-être occupé par n'importe quel objet et occasionnellement les objets pulsionnels (partiels ou encore pré-génitaux : le sein, les fèces, le regard, la voix et le rien) : Les objets partiels peuvent donner figure à ce reste Réel.

La question du corps

Pour qu'un sujet ait un corps, et qu'il soit sien, il est nécessaire que les trois dimensions du Réel, du Symbolique et de l'Imaginaire soient à peu près correctement articulées, nouées. Nous soutenons qu'il faut également que ce corps soit nommé pour chaque sujet, c'est à dire qu'il soit situé à des coordonnées singulières dans le champs du symbolique par la symbolisation de la perte de l'objet a, nous développerons plus en avant la question de la localisation dans la partie suivante. Cette localisation dans le symbolique met en scène ce que nous avons développé dans l'évolution de la notion de phallus (phallus symbolique, jouissance phallique, fonction phallique et sinthome, comme énoncés dans le déroulement de la pensée lacanienne) et de l'objet a. La dépersonnalisation nous expose une clinique où cette articulation (et donc cette localisation) est à ce point mise en tension que le sujet a le sentiment de ne plus exister tant son corps lui semble distant. Nous postulons que cette distorsion est produite, comme nous le verrons, par un mécanisme que nous repérons comme un décentrement (verfremdungseffekt) au cœur de la distanciation (Verfremdung) dont nous déplierons la nature, également, dans la partie suivante.

Avant cela, au regard de ce qui vient d'être énoncé précédemment, intéressons nous à la relation particulière que le sujet dépersonnalisé entretient avec son corps. Être ou avoir un corps peut renvoyer à être ou avoir le phallus, il est nécessaire de passer de l'un à l'autre pour s'incorporer. Dans la Phénoménologie de la perception Maurice Merleau-Ponty a développé la notion de corps propre, celui-ci se distingue du corps comme organisme biologique et indique la subjectivité du corps. Ce corps propre devient la base de la conscience de soi, et le siège du sentiment d'unité, il est le moi au niveau le plus primaire. Freud a écrit : la maison qui constitue la seule représentation typique, c’est-à-dire régulière de

l’ensemble de la personne humaine 101. Voilà, le corps habitat. Freud constate que cette représentation se développe par la suite avec les ouvertures (bouche, yeux = fenêtre, porte, etc...) et il repère également le lien entre le corps et le moi : le moi est avant tout un moi corporel, une entité corporelle, non seulement une entité toute en surface, mais une entité correspondant à une surface 102. Quels lien faire entre ce corps qui se jouit et celui substrat du sentiment d'existence ?

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